Dans sa récriture en moyen français, Brunot avait rapproché certains verbes de leur sujet.
Il procède de même dans sa récriture en français moderne : done toujours en fin de phrase dans le texte en moyen français, a, en français moderne, trouvé sa place en début de phrase près de son sujet, Dieu m’en donne, de même que soit s’est rapproché de son sujet qui, de sorte qu’il ne reste plus trace dans le fragment moderne de cet ordre des mots où le verbe et son sujet semblaient totalement indépendants et étaient en tout cas disjoints. Quant à la fin du serment des soldats, Brunot ne semble pas avoir trouvé d’autre alternative que de la récriture complètement :
ne je, ne nul que j’en puis retourner, en nulle aide contre Loys ne lui serai en ce
→ je ne lui prêterai en cela aucun appui, ni moi ni nul que j’en pourrais détourner
Dans sa récriture en français moderne, Brunot dote également le verbe prendrai, d’un sujet et déplace une fois encore le verbe de la fin de la phrase au début de celle-ci, à proximité du sujet dont il l’a doté.
La formulation du sujet, la proximité du sujet et du verbe sont des conséquences de l’évolution phonétique et de l’amüissement des consonnes finales qui en touchant les désinences verbales personnelles a conduit à la restructuration du groupe verbal.
Plus discret dans la récriture de Brunot, mais témoignant d’un changement tout aussi fondamental, est le passage de chrestien peuple à peuple chrétien, dont le point de départ est, une fois encore, dans l’amüissement des consonnes finales, qui va ici contribuer à réorganiser entre eux tous les éléments du groupe nominal.
Le recours aux prépositions est un premier aspect de cette réorganisation. Brunot passe ainsi de l’amour Dieu à l’amour de Dieu, signifiant par là que la langue moderne renonce à construire ses compléments du nom sans préposition.
Le recours aux articles en est un autre aspect. Brunot en a rendu compte dans sa version en moyen français du texte et en rend une nouvelle fois compte dans sa récriture en français moderne, en introduisant le devant des infinitifs nominalisés :
le savoir
le pouvoir
Le rejet des adjectifs derrière le nom en est encore un effet. Les prépositions et les articles se positionnent devant le nom, venant saturer la place devant le nom. Les adjectifs, qui se disposaient jusqu’alors librement de part et d’autre du nom, vont tendre alors à se placer derrière le nom, là où la place n’est pas systématiquement saturée par une préposition ou un article. Et c’est tout cela qui est résumé dans le passage de
chrestien peuple → peuple chrétien