La variation diagénique est la variation d’une langue à l’intérieur d’un groupe selon le genre, c’est-à-dire selon le sexe du locuteur ; elle est comme les deux précédentes l’affaire de la sociolinguistique, qui pour ne pas être en reste, a forgé le mot « sexolecte » pour définir les différences que l’on peut observer entre le langage des hommes et celui des femmes :
Les dimensions de la variation linguistique – IX
Espace | Groupe social | Sexe | Usage | Temps |
Variation diatopique | Variation diastratique | Variation diagénique | Variation diaphasique | Variation diachronique |
Grammaire comparée Linguistique comparative Dialectologie |
Sociolinguistique | Sociolinguistique | Sociolinguistique | Grammaire historique |
Dialecte Géolecte Régiolecte Topolecte |
Technolecte Sociolecte |
Sexolecte |
C’est une variation dont l’étude n’a été mise en avant que récemment, dans le contexte plus vaste des « études de genre » (calque de l’anglais « gender studies »), qui constituent désormais un champ d’étude interdisciplinaire porteur (sociologie, politique, anthropologie, histoire, philosophie, arts… et linguistique).
Appliquée au champ de la langue française, l’étude de la variation diagénique tend plutôt à montrer qu’à l’heure actuelle, la variation linguistique entre la manière de parler des hommes et celle des femmes est très mince.
Il n’en a peut-être pas toujours été ainsi. On peut imaginer qu’à l’époque, pas si lointaine, où les femmes étaient confinées à la maison, limitées aux tâches ménagères et à l’éducation des enfants, sans réel contact avec la vie extérieure, et où les hommes seuls exerçaient des professions qui les mettaient au contact de réalités variées, il devait exister des différences sensibles, au moins sur le plan lexical, entre la manière de parler des femmes et celle de parler des hommes, deux groupes sociaux exposés alors à des réalités très différentes. D’une manière caricaturale, on peut imaginer que Monsieur n’avait pas la moindre idée de ce que Madame faisait quand elle plumait des amandes ou qu’elle boutonnait une volaille, alors que Madame n’entendait rien aux intérêts créditeurs, agios et prêts à tempérament de Monsieur.
Remarque : Il ne faut pas confondre ce que l’on dit et les mots que l’on utilise pour le dire. Tenir des propos sexistes n’est pas l’expression de la variation diagénique ; ce le serait seulement à partir du moment où pour tenir des propos sexistes une femme utiliserait des moyens linguistiques différents de ceux des hommes et inversement.
Voilà donc pour la variation diagénique, que l’on peut très bien percevoir comme un cas particulier de la variation diastratique, les hommes et les femmes ne définissant jamais que deux groupes sociaux différents.
On notera par ailleurs qu’en définissant la variation diagénique comme se marquant à l’intérieur d’un groupe donné, la linguistique subordonne la variation diagénique à la variation diastratique. En réalité, une même personne appartient à des groupes sociaux variés – jeune ou vieux, urbain ou rural, scolarisé ou non, homme ou femme, exerçant telle ou telle activité… –, chacun des groupes sociaux auquel il appartient pouvant présenter des caractéristiques linguistiques propres. Le langage de chaque locuteur peut ainsi être perçu comme le produit des interactions entre les différents « –lectes » qu’il maitrise, voire de la prégnance de l’un ou l’autre de ses « –lectes », ce qui fera en définitive que chacun s’exprimera d’une manière qui lui est propre.