Un des principaux acquis de la Révolution française en matière de distribution des usages de la langue française au XIXe siècle est qu’il n’y a plus lieu désormais de faire la distinction entre la langue du pouvoir et la langue de l’administration.
En dépit du processus de francisation, c’est-à-dire d’expansion du français non dialectal issu du programme d’éradication des patois, qui se met en place à la fin du siècle, le français dialectal se maintient comme langue vernaculaire, c’est-à-dire comme langue majoritaire : il faudra encore attendre longtemps pour que le français devenu langue (officielle) de la France devienne aussi langue des Français – Brunot avait encore un dialecte, le lorrain, comme langue maternelle, et Pagnol, le provençal, alors que l’un et l’autre sont nés à la fin du XIXe siècle.
La situation linguistique du XIXe siècle se présente donc globalement comme suit :
La situation linguistique au XIXe siècle
Au XVIIIe siècle | Au XIXe siècle | |
Langue du pouvoir | français | français |
Langue de l’administration | français | |
Langue véhiculaire | français | français |
Langue du culte | latin chrétien | latin chrétien |
Langue de la culture | français | français |
Langue du savoir scientifique | français | français |
Langue d’enseignement | latin classique | latin classique + français |
Langue vernaculaire | français dialectal + français | français dialectal + français |
Terminons par une remarque qui ne se dégage pas du tableau de synthèse donné pour les usages en ce qu’elle se place plutôt sur un plan méthodologique. Nous avons vu que la zone d’éclosion de la langue française débordait à l’origine largement les limites de la France d’aujourd’hui, puisqu’elle incluait une partie de la Belgique et de la Suisse. L’histoire de la langue française en France ne se différenciait pas alors de l’histoire de la langue française en Belgique. Mais au XIXe siècle, la Belgique gagnait son indépendance, et l’histoire de la langue française en Belgique gagnerait à être étudiée spécifiquement à partir de cette époque. Il en va de même pour l’histoire du français en Suisse.