Virelay 70 : Adieu m’amour, ma joye, m’esperance (DCCLIV)
Autre Virelay
Adieu m’amour, ma joye, m’esperance,
Mon bien mondain, mon desir, ma plaisance,
Adieu celle qui m’a ressucité,
Adieu ma dame, adieu cuer de pité,
5 Ayéz de moy, s’il vous plaist, souvenance,
Car je m’en voiz contre ma voulenté,
De revenir briefment entalenté, 200b
Plains de doleur et de desesperance,
Hors du pays languir en obscurté,
10 Pensans a vous, triste et desconforté,
Doubtans tousjours que vous n’ayéz grevance.
Mais vous m’avéz tant norry des m’enfance,
Et si me par a vo bonne ordonnance
Pour querre honneur et acquerir bonté.
15 C’est ce qui m’a forment reconforté,
S’en porteray plus aise ma grevance.
Adieu m’amour, [ma joye, m’esperance.]
Or veille Dieux qu’il vous soit raporté
Touz biens de moy, et que ja lascheté
20 En mon las cuer ne face demourance.
De bien faire m’avéz amonnesté,
Sy doy avoir prudence et honnesté,
Et acquerir renommee et vaillance.
Et par ma foy cuer et corps et puissance
25 Y mett[e]ray et tel perceverance
Que l’en dira qu’amour m’a proffité,
Ou je mourray tant que vostre amité[1]
A son retour ara grant congnoissance.
Adieu m’amour, ma joye, m’esperance etc.
[1] Ms. ammitié