Chançon royal 101 : Sergens, prenéz moy ce larron (DCCCCXII)
Autre Balade
― Sergens, prenéz moy ce larron,
Trop est de male renommee.
― Voluntiers. Venéz en prinson, 236d
Puis que la chose est commandee.
5 ― Je n’ay meffait a ame nee :
Que je parle au prevost a part.
― Adieu, il est huimais trop tart.
― Je lui diray, se vous vouléz.
― Et que n’a il ou coul la hart ?
10 J’estoie trop mal informéz.
― Veoir vous veult : il y fait bon.
― Alons y, mais prés de l’entr’e
Retournéz. Tesmoin n’y voulon.
― Lierres, par la vierge honouree,
15 Vo gueule sera estranglee,
Je vous livreray au frappart.
― Prevost, pour Dieu, aiéz regart
A cent frans que vez ci, tenéz.
Je suis prodoms. ― C’est vray, Colart.
20 J’estoie trop mal informéz.
Je m’en revois en no maison.
Sergens, reslargissiéz l’entr’e
De ce varlet, c’est un prodom.
― Par la char Dieu, c’est grant fumee !
25 C’estoit un larron a l’entr’e,
Mais en tant d’eure qu’il espart,
Faictes d’un larron papelart.
En po de temps gens reforméz.
― Cilz ci n’a pas mangié le lart,
30 J’estoie trop mal informéz.
― Or me dittes : comment fait on
Si tost prodomme a la volee
D’un murdrier, d’un mauvés garçon ?
― Quant son innocence est trouvee.
35 Par cent tesmoings l’a cilz prouvee :
Saichiéz, ce n’est pas un coquart.
Dire ne sçaroie le quart
Des biens qui sont en lui trouvéz. 237a
Ne m’en enqueréz plus, Lietart :
40 J’estoie trop mal informéz.
― A tout le moins, qui paiera mon
Salaire de celle journee ?
― Souffréz vous. Sergent, j’en repson,
Tenéz dix soulz. ― Pas ne m’agree.
45 ― Vous avéz tort, c’est grant boursee.
Je les preste, se Dieu me gart.
― Vo bourse est devenue happart
Puis que les larrons y pandéz.
― Souffréz vous. Car par saint Lienart,
50 J’estoie trop mal informéz.
L’envoy
Sergens ! ― Maistre ? ― Nous delivron
Ce varlet qui fut arrestéz.
― Voist a Dieu, c’est asséz raison :
Vous estiéz trop mal informéz.