Chançon royal 81 : Les roys des Gaulx et de la grant Bretaigne (CCCXCV)
Autre Balade
Les roys des Gaulx et de la grant Bretaigne
Aux menistres de Dieu, roy souverain,
A tous nobles et au peuple, souviengne
D’eulz amender en ce siecle mondain.
5 Nous avons veu vostre requeste a plain
Et les meschiefs que vous avéz souffers
Pour noz guerres dont vous estes desers,
Et noz pais que tous destruis voions.
Dont de pitié sont noz .ii. cuers ouvers,
10 Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
Laquelle fu jadis ferme et certaine :
Tant c’om ne prist le nom de Dieu en vain,
C’om le doubta, religion fu saine,
Qu’amour regna et que de main en main
15 […][1]
Du bien commun estoit chascun appers.
Mais par orgueil vint puis un temps divers,
Par non craindre ce que craindre devons :
C’est nostre Dieu, soions a lui ahers,
20 Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
Convoitise qui est racine et vaine
De trestous maulx et orgueil pour certain,
Envie aussi qui maintes genz mehaigne, 135a
Dissimuler, trahison soir et main,
25 Qui destrempe de l’yaue son[2] levain
Qui a esté de faintise couvers :
Entre les genz est li pos descouvers,
Qui a troublé le peuple et les barons.
En repentant soions a Dieu offers,
30 Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
Trop ont eu de richesce mondaine
Nosre ancesseur et leur peuple hautain.
Eulz engressiéz ont pris la voye vaine,
Ilz ont eu povreté en desdain,
35 A tous pechiéz avoient leur reclain,
Discorde adonc par punir les fist sers.
Guerre leur vint au long et au travers.
De leur essil l’aigre grappe buvons,
Dont pluseurs sont mors et occis envers,
40 Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
Par tel convent nul vers Dieu ne mespreigne,
Mais le servons de cuer loyal et sain
Doresnavant[3], et que chascun refraigne
Le convoiter et hair son prouchain,
45 Et que de nul n’ysse aucun[4] mot villain,
N’aux povres Dieu ne soit nulz homs ahers,
Religion tiegnent moyne[5] et convers.
Selon la loy de Jhesuchrist vivons,
Soient pugnis par raison les pervers,
50 Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
L’envoy
Prince, nobles, [prestres], peuple, de fain
Avéz mouru, nous sentons nostre clain.
Moult de meschiéz aussi souffers avons.
Retournéz tous au salut premerain, 135b
55 Ayméz vous tuit comme frere germain,
Et pour ce a tous bonne paix octroyons.
[1] Vers non édité ou vers manquant non signalé
[2] Ms. un
[3] Ms. Doresenavant
[4] Ms. ancien
[5] Ms. moynes