Balade 978 : He ! Faulx Rapport et Envie dolente (MCCCCLIII)
Balade par maniere de complainte contre faulx rapport
He ! Faulx Rapport et Envie dolente,
Tous .ii. puissiéz de male mort mourir,
Car par vous n’est doleur que je ne sente,
Qui vers m’amour m’avéz voulu trahir,
5 Dont mon las cuer est si ferus d’air
Que je ne sçay[1] si je dors ou je veille,
Quant les biaux yeulx et la face vermeille
De celle a qui je suis homs ligement,
Croit voz faulx diz, dont trop fort me merveille,
10 Quant je l’ayme sur toutes loyaument.
Et ja soit ce que chascun de vous mente
Pour faire amour de noz cuers departir
Et pour cuider qu’a vo parler[2] s’assente,
Je ne croy pas qu’Amours peust soufrir
15 La fausseté que vous cuidéz couvrir,
Qui onques mais ne fut veue pareille,
Dont mis m’avéz tele puce en l’oreille,
Et croire tost qui vient soudainement,
Que mon las cuer en larmes de cang mueille,
20 Quant je l’aime sur toutes loyaument.
Las ! et ce qui encor plus me tourmente
Et qui me fait en desespoir languir,
Est ma dame, qui de m’amer s’absente
Et qui me veult laisser sanz moy oir !
25 Hé ! Faulx Rapport, que je te doy hair !
Helas ! Pité, a ma dame conseille,
Que Loyauté pour mon fait se traveille
Et Verité. Ceuls scevent bien comment
Je suis tray sans cause non pareille,
30 Quant je l’aime sur toutes loyaument.
L’envoy 443b
Hé ! dieu d’Amours, a ma dame commende
Qu’a son conseil Pité, Loyauté mande,
Et soit[3] bannis Faulx Rapport en present
Et Envie la mauvaise truande,
35 Et que guerdon[4] pour bien amer me rende,
Quant je l’aime sur toutes loyaument.
[1] Ms. suis
[2] Ms. parlers
[3] Ms. si
[4] Ms. guerredon