Balade 827 : Deux eurs ay qui ne sont pas grans (MCCXXIV)
De la complainte que fait un homme de sa fortune et de son maleur
Deux eurs ay qui ne sont pas grans,
Ou remede ne puis trouver :
L’un est, se je ven com marchans,
Il me fault grant marchié donner.
5 Mais s’il me fault riens achater
On le me vent plus qu’il ne vault
La moitié. Dont vient ce deffault ?
Y pourroit on remede mettre ?
Nenil. Au fort, il ne m’en chault :
10 Malheureux suis par toute lettre.
Car se j’ay vins, bestes, ahans,
Cras pourceaulx, laines pour draper,
Vaiches, brebis, moutons aux champs,
Poulains, fromens, pour moy aidier[1],
15 Foins avecques, buche a moler,
Feves, poys, noix dont hulle sault,
Je treuve l’achateur si caut
Que du marchié se veult demettre.
Pour noient tout donner me fault.
20 Maleureux suis par toute lettre.
Voire, par Dieu, roys des mescheans, 332b
Car s’il me fault pour hors aler
Chevaulx, joyaulx, draps noirs ou blans,
A paine en puis je recouvrer.
25 Et s’en mes vignes fault ouvrer,
Tout me fault prandre au pris plus grant.
Fortune me fait cest assault.
Nul bon eur ne me veult tramettre,
[Et] toute maleurté m’assault :
30 Maleureux suis par toute lettre.
L’envoy
Princes des chetis, ordonner
Vueilliéz sur mon fait, qui est cler
En tout maleur, et le soubmettre
Tant que mieulx puisse marchander.
35 A vendre ne puis profiter :
Maleureux suy[2] par toute lettre.
[1] Saint hIlaire corrige en aider
[2] Saint Hilaire corrige en suis