Balade 607 : J’ay veu la riviere de Saine (DCCCCLIX)
Autre Balade
J’ay veu la riviere de Saine,
Du Rosne, de Laire et du Ryn,
Par inundacion soudaine,
Courre es champs et par le chemin
5 Comme une mer, et leur train
Demourer une longue espace
De temps, et puis celle eslevace
Se departoir soudainement,
Faisant l’eaue des flums plus basse :
10 Pour dure chose violent.
Avoir gaingnié sanz cause et paine,
Par malice ou maint sont enclin,
Suronde, et lors Orgueil le maine
Un temps regner, mais en la fin
15 Vient un pechié ou un hutin,
Qui tel acquest toult et efface
Et emporte, quant le flun passe,
L’acquest du propre tenement
Bien acquis. Hom[1] ne se mefface :
20 Pou dure chose violent.
La petite riviere est plaine
Et le petit fleuve enterin
D’yaue en tout temps, car il n’a vayne
Qui tende a grever son voisin.
25 Il ne soufle pas du venin
D’autre euaue, toudis tient sa place
Quant [en] ses rives se soulace
Sanz exceder aucunement.
Tout homme a ceste exemple face : 250b
30 Pou dure chose violent.
L’envoy
Prince, pour avoir ne pour grace
Ne soit homme trop acquerant,
Tiengne le moien et pourchace :
Pou dure chose violent.
[1] Ms. homme