Balade 421 : Regart me trait et Doulx Penser me rue (DXXXIV)
Autre Balade[1]
Regart me trait et Doulx Penser me rue,
Desir m’assault et Souvenir me nuist,
Et la biauté de ma dame m’argue,
Paour me tient et de jour et de nuit,
5 Honte me vient et Dangier me destruit :
Se Pitéz n’est, je mourray d’ame[r] cy,
Et Doulx Espoir qui un pou me conduit :
Je n’attens riens fors que mort ou mercy.
Helas ! Amours m’a bien mis en sa mue
10 Quant je ne puis voler, n’avoir deduit,
Ne veoir l’air de la tresbelle nue,
Qui de beauté com le souleil reluit.
Car Male Bouche a mon oreille bruit,
Qui nuit et jour me met en grant soucy.
15 La char m’en taint et mon las cuer s’en cuit :
Je n’attens riens fors que mort ou mercy.
Doulce Pité, qu’estes vous devenue ?
Franchise aussi, Grace qui toujours luit, 169d
Plaisant Desir, soiéz a ma venue :
20 Faictes qu’octroy soit par vo bonté duit,
Se Grace n’ay, que j’aye sauf conduit
Pour regarder celle que j’ayme sy :
Car s’ainsi n’est, mon corps art tout et bruit :
Je n’attens riens fors que mort ou mercy.
[1] Pièce identique au f° 274a sous le n° MXXXIX