Balade 8 : De Nepturnus et de Glaucus me plain (VIII)
Autre Balade
De Nepturnus et de Glaucus me plain
Qui contre moy font la mer felonnesse,
Et d’Eolus, dieu des vens, le villain,
Qui par Eurus m’a empeschié l’adresse
5 De mon propos, et passer ne me lesse.
Par ses souffléz fait l’eaue tempester
En escriant, quant mon passage cesse :
Contre les vens ne puet nulz de la mer.
Li dieux de l’air fait plouvoir soir et main,
10 L’air obscurcir. Jupiter me courresce, 3a
Aux dieux de mer a estandu sa main.
Saturne o eulx son froit yver m’adresse,
Et chascuns d’eulx de sejourner me presse.
Mon navire font par leur force encrer.
15 Mouvoir ne puis, c’est ce qui trop me blesse :
Contre les vens ne puet nulz de la mer.
J’ay du dieu Mars, en guerre souverain,
Tout le pouoir. De Cerés la deesse,
Du dieu Bachus, vin, fleur, becuit et grain,
20 Chars salees. De Juno la richesce
Pour bien paier. De Venus la proesce
Qui jeunes gens fait par amours amer.
Cause ne sçay se mon fait se delesse :
Contre les vens ne puet nulz de la mer.
L’envoy
25 Dieux Mars, j’atten printemps de douçour plain,
Que l’en pourra paisiblement rymer.
Lors y fait bon, en yver n’y fait sain :
Contre les vens ne puet nulz de la mer.