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1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (201-250)

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Puis vous remettrez ce pasté dans le four, & vous l'y laisserez environ trois heures pour achever de le faire cuire, faites en sorte que la saulce soit éboüillie suffisamment avant que retirer ce pasté hors du four, & entretenez toûjours le feu dans le four, en sorte que la chaleur soit suffisante pour cuire ce pasté sans le brusler.

Lors que ce pasté sera cuit, vous retirerez la gousse d'ail que vous y aurez mise avant que de le servir sur la table, puis vous remettrez le couvercle, afin de servir ce pasté couvert. Et si on ne le mange pas tout en une fois, on pourra le faire reschauffer dans le four, jusques à ce qu'il soit mangé entierement.

VI.

Faire un pasté, & une tourte de chapon, de poitrine de veau, de pigeonneaux, d'aloüettes & autres ; pour les manger chauds.

DRessez vostre crouste de pasté, qui doit estre de paste fine ; faites-la de grandeur & de hauteur proportionnée à ce que vous desirez mettre dedans : faites en sorte que le milieu du fonds soit un peu plus épois que le reste de la croûte : garnissez le fond, en y mettant un

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petit de graisse de bœuf hachée, & de la moësle, si vous en avez, ou bien vous y mettrez du lard haché menu, en sorte que les morceaux soient environ gros comme des poids.

Lors vous prendrez la viande que vous desirez mettre dans le pasté : elle doit avoir esté lavée auparavant avec de l'eau chaude : il faut aussi qu'elle soit nettoyée & qu'elle ne soit plus moüillée : & si c'est une poitrine de veau, vous pouvez la faire blanchir ou revenir un petit dans de l'eau presque boüillante, & cette viande estant ressuyée, vous la couperez par morceaux larges de deux doigts, & vous couperez les costes en deux.

Que si c'est un chapon, ou d'autres oiseaux, ou gibier que vous desiriez mettre dans vostre pasté, il faut applatir l'estomach, cassez les gros os, & faire quelques entailles sur l'estomach, oster le col, le bout des aisles, & les jambes, & placer la viande dans le pasté, puis vous l'assaisonnerez d'épisse salée, & en suitte vous garnirez le pasté d'un morceau de beurre, & de quelquestranches de lard. Vous pouvez aussi y adjoûter de beatilles, des asperges, des culs d'artichaux,

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des jaunes d'œufs durcis entiers, ou coupez par quartiers, champignons, du verjus en grain, & du persil haché bien menu, & aussi de petites andoüillettes : & vous mettrez par dessus ces estoffes vos tranches de lard & le beurre ; puis le pasté estant estoffé, vous le couvrirez, & le banderez avec du papier pour soustenir la crouste, & empescher qu'elle ne creve.

Faites un trou au milieu de la couverture, puis vous dorerez le pasté, & vous le mettrez au four : donnez luy une chaleur pareille à celle qu'il faut donner aux pastez d'assiette, asin que nous le dirons au Chapitre suivant.

Ces pastez doivent estre cuits suffisamment en une heure & demie ou environ, plus ou moins selon la grandeur du pasté, & aussi selon la qualité de la chaleur du four.

Vous pouvez faire ces pastez dans une tourtiere avec une crouste fueilletée, principalement si vous la garnissez de pigeonneaux.

VII.

Faire pasté à la saulce douce.

SI vous desirez faire un de ces pastez à la saulce douce, vous les tirerez à la

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gueule du four, lors qu'il sera cuit à demy, & vous mettrez un antonnoir au trou qui est au milieu de la couverture du pasté, & vous verserez dedans une verrée, ou tout autant qu'il sera besoin selon la grandeur du pasté, d'hypocrat bien sucré, ou bien du beurre fondu, dans lequel on aura dissoult du sucre, & un petit de canelle, plus ou moins de l'un & de l'autre, suivant la grandeur du pasté.

Remettez le pasté au four, & achevez le faire cuire.

VIII.

Faire un pasté d'assiette.

PRenez par exemple prés d'une livre de chair de veau, ou de porc frais, ou de mouton, ou de beuf : la roüelle de veau est la chair la plus propre pour faire de ces pastez ; prenez aussi une livre de graisse de bœuf qiu soit fraiche, ou bien de la moesle, hachez-les bien menuës ensemble, & lors qu'elles seront hachés grossierement, vous les assaisonnerez de sel & d'espisse, puis vous acheverez de les hacher : vous pouvez aussi hacher avec la viande & la graisse quelque siboule, ou de persil.

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Lors que le hachis sera fait, vous y adjoûterez le blanc & le jaune, ou seulement le blanc d'un œuf tout crud, & vous le meslerez dans le hachis avec une gache de bois, afin de lier mieux cét appareil, dans lequel vous pouvez mettre du pignon & du raisin de Corinthe, si vous y en desirez.

Lors vous dresserez une abesse de paste fine, en forme ronde, & vous l'emplirez à moitié de vostre hachis : applatissez cette chair, & la pressez contre la crouste, puis vous mettrez dessus des asperges, ou des morceaux de culs d'artichaux, ou des champignons, des jaunes d'œufs durcis & coupez par quartiers, quelques tranches de palais de bœuf ; si vous en avez des fagoues, des pistaches, & autres beatilles, telles que vous pourrez avoir : vous pouvez aussi mettre quelque morceaux de moësle de bœuf parmy les beatilles, & aussi des marrons rostis à demy. En la saison du verjus de grain, vous pouvez en mettre environ une douzaine de grains, plus ou moins selon la granduer du pasté, puis vous acheverez de remplir le pasté avec de vostre hachis, & vous la pres-

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serez moderement sur les beatilles.

Si vous faites un pasté bienhaut, vous pouvez y faire plusieurs lict tant de chair hachés, & l'assaisonner (comme il a esté dit cy-dessus) que de beatilles.

Couvrez vostre pasté & le dorez pardessus, apres avoir fait un petit trou à la pointe du chapiteau.

Si la crouste de vostre pasté est bien fine, & assez haute, vous mettrez une bande de gros papier autour du corps du pasté : il faut ue cette bande soit découpée par le bord, & qu'elle soit graissée de bon beurre frais du costé qu'elle touchera le pasté puis il faudra mettre une ficelle sur cette bande, afin de l'attacher au pasté.

Lors que le pasté sera garny, estoffée, & couvert, vous pourrez le mettre au four. Il n'est pas besoin que la chaleur du four soit du tout si grande, que si c'estoit pour faire cuire des pastez plus gros.

Ces pastez doivent estre cuits suffisamment en une bonne demie heure, s'ils ne sont pas bien gros, & si la chaleur du four leur est propre : & si ces pastez sont plus ou moins gros, il faudra aussi plus ou moins de temps pour les faire cuire.

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Vous pouvez faire un de ces pastez dans une tourtiere, & faire la crouste fueilletée.

IX.

Faire un pasté de gaudiveau.

LEs pastez de gaudiveau doivent estre faits de chair de roüelle de veau, ou d'autre chair hachée avec de la graisse, & assaisonnée comme celle des pastez d'assiette. C'est pourquoy un pasté de gaudiveau, ne differe d'avec les pastez d'assiette, sinon en ce que les pastez d'assiette sont ronds couverts en pointe, & les pastez de gaudiveau sont plats, descouverts, & en ovalle : il y a encore de particulier aux pastez de gaudiveau, qu'on les arrose & assaisonne d'une saulce blanche fait avec du verjus, & quelque jaune d'œuf delayez ensemble : on arrose de cette saulce un pasté de gaudiveau lors qu'il est cuit, puis on remet ce pasté au four environ un demy quart d'heure, afin que cette saulce s'espoississe.

Il faut lier la chair du pasté de gaudiveau avec la crouste : & à cet effet il faut la presser avec vos doigts, principalement le lon du bord afin que la paste soit ferme.

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Quand vous avez accommode le premier lict  de la viande, il faut le couvrir d'asperges  & d'autres beatilles, parmy lesquelles vous pouvez en la saison mettre des chastaignes ou marrons rostis à demy, & du verjus de grain lors qu'il y en a : puis pouvez râper un petit de muscade sur des beatilles, vous couvrirez ces beatilles d'un lict de chair hachée & assaisonnée comme il a esté dit, & apres que vous aurez pressé un peu cette viande sur les beatilles, vous dresserez le bord du pasté, vous pourez le renforcer d'une bande de paste que vous y joindrez par dedans, & vous ferez en sorte qu'elle deborde un peu sur la chair : il faut decouper ce bord de paste qui touchera sur la chair de vostre pasté, quelque petites endoüillettes que vous aurez faites à ce dessein de vostre chair haché. Vous pouvez rasper un petit de muscade sur le pasté, lors qu'il sera prest à mettre au four.

Faites cuire ce pasté, lors qu'il sera presque cuit vous le retirerez à la gueule du four, pour y verser la saulce blanche, de laquelle nous avons parlé cydessus en ce Chapitre, puis vous ache-

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verés de faire cuire ce pasté.Vous pouvez faire un de ces pastés dans une tourtiere, & faire la crouste de paste feüilletée.

X.

Un pasté de Beatilles.

POur faire un pasté de beatilles, on se sert de viande hachée & assaisonnée de la mesme façon que pour faire un paste de gaudiveau, ou bien un pasté d'assiette : mais il faut mettre moins de chair hachée dans le pasté de beatilles, & y mettre au contraire beaucoup de beatilles, & aussi plus de graisse & de moësle entre les lits de beatilles ; on garnit le dessus avec des endoüillettes de la mesme chair hachée, puis on raspe un peu de muscade par dessus ; & enfin il faut couvrir le pasté & le mettre au four.

XI.

La maniere de faire une tourte de beatilles.

FAites un pasté de beatilles dans une tourtiere, & que la crouste soit de paste fueilletée.

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XII.

Autre maniere de faire une tourte de viande hachée.

PRenés à discretion de la chair de veau ou de chapon, ou d'autre bonne viande qui soit boüillie, ostez la peau, les nerfs, & les os, puis vous hacherez cette chair bien menuë, & vous la piellerez ensuite dans un mortier ; adjoûtez-y un peu de fromage frais, & autant de fromage vieil qui soit raspé ou découpé bien menu, mettez y aussi environ six œufs bien battus, & autant qu'il sera besoin de moësle de bœuf, ou de panne de porc qui soit coupée menuë, meslez ces choses ensemble & les assaisonnez de sel bien menu, & d'un peu dépisse ou de canelle en poudre.

Lors que vostre appareil sera prest, vous mettrez dans une tourtiere un abesse de paste fueilletée, garnissez-là suffisamment de vostre farce ou appareil, puis vous la couvrirez d'un couvercle de pâte, faites-y un petit trou au milieu, & faites cuire cette tourte suffisamment.

XIII.

Pasté à la Cardinale.

EStendez dans une petite tourtiere, ou dans un moule de fer blanc, de la pâ-

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te feuilletée espoisse environ comme un quart-d'escu, & qu'elle déborde par dehors tout autour, remplissez suffisamment  cette abesse avec de la chair de veau ou de volaille toute cruë, ou bien qui soit blanchie, c'est à dire, qui soit cuite plus qu'à demy, & haché tres-menu avecc pareille quantité de moësle, ou de graisse de bœuf, & que cet appareil soit assaisonné d'épisse salée : vous pouvez y mesler du pignon & du raisin de Corinthe, & quelques morceaux de jaunes d'œufs durcis.

Lors que le pasté sera garny, vous le couvrirez proprement d'une crouste de paste fueilletée, puis vous le ferez cuire.

Il y a des personnes qui mettent du sucre dans cette sorte de pastez, & y mettent aussi de la saulce douce lors qu'ils sont cuits à demy.

Si ces pastez sont petits, vous pouvez les faire cuire dans une petit four de cuivre.

XIV.

Un pasté à l'Angloise.

PRenez un levrau bien tendre, qui soit habillé, ostez aussi tout la fressure, coupez la teste & les pattes, applatissez l'estomach, battez aussi suffisam-

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ment la chair du levreau, afin qu'elle soit plus tendre, faites de petites entailles sur le dos & aux cuisses, qui soient assez longues & profondes, ou bien vous pouvez couper par morceaux vostre levrau : lardez en suite la chair avec de petits lardons.

Lors que le levrau sera préparé de cette sorte, vous ferez une abesse de grandeur suffisante, donnés luy l'espoisseur de deux bons travers de doigt, mettez-là sur une feüille de papier, & sur un des bouts de cette abesse, vous ferez un lict de moësle, ou de graisse de bœuf, ou de lard haché menu ; ce lict ou couche doit estre aussi long & large que le levrau, assaisonnez aussi ce lict de graisseavec de l'espisse salée, puis vous coucherez le levrau sur ce lict de graisse le ventre dessous, & si vous avez coupé le levrau par morceaux, il faudra rapporter toutes les pieces en leur propre place, puis on assaisonnera le levrau par-dessus avec de l'episse salée, vous mettez aussi sur le levrau de la moësle ou graisse hachée, puis des beatilles, comme raisin de Corinthe & du pignon bien lavé, de l'escorce de citron confite coupée par petits morceaux bien

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menus, ou en peites tranches minces, adjoûtés y aussi des morceaux de moësle de bœuf, des champignons, & des pistaches, si vous en avez, des riz de veau, crêtes de coq blanches, des jaunes d'œufs durs entieres ou coupez par quartiers, & des capres s'il y en a.

Il faut mesler les beatilles, & les assaisonner avec un bien peu d'espisse salée, & lors que toutes ces beatilles seront posées sur le levreau, vous le couvrirez d'une leger lict de graisse hachée menuë, mettez y encore par dessus quelques petites tranches e lard, puis vous estendrez en long environ une demie livre de bon beurre frais qu'il faudra mettre sur l'appareil, & par dessus le beure, on y adjoutera une bonne poignée de sucre en poudre.

Quand le pasté sera garny, vous le couvrirez avec l'autre bout de l'abesse qui a demeuré vuide, & lors qu'il sera bien fermé & bien façonnéé, il faudra le dorer par dessus, puis le mettre au four sur une fueïlle de papier, & prendre garde de ne le pas rompre.

Apres que ce pasté aura esté au four l'espace d'une demie heure, vous ferez

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un trou sur le milieu de la crouste de dessus, afin qu'il ne creve pas : vous luy baillerez le feu comme pour un pasté de coq d'Inde.

Ce pasté pourra estre cuit en deux bonnes heures.

Quelques personnes detrempent un demy grain de musc, avec une goutte d'eau rose, & le versent dans ce pasté en l'estouffant, mais l'odeur du musc nuit à la pluspart des femmes & à d'autre personnes : c'est pourquoy il est à propos de n'y en mettre point.

Lors que ce pasté sera cuit, vous le tirerez hors du four, & vous estendrez petit à petit sur la crouste de la glace de sucre avec un couteau ou avec le dos d'une cueilliere d'argent : & faut que cette glace soit mince à peu prés comme une feüille de papier.

Aussi-tost que le pasté sera doré de cette glace, vous le remettrez environ un demy quart d'heure à l'entrée du four, pour faire secher la glace, & faut que la chaleur soit fort douce, afin que la glace demeure blanche ; car si le fond est trop chaud, la glace devient rousse : aussitost que cette glace est sechée, faut tirer

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le pasté hors du four, & le servir le plus promptement que vous pourrez, de peur que le pasté ne se morfonde, & que la glace ne se fonde.

XV.

Un pasté à la Suisse.

DRessez un pasté d'assiette de paste demy feüilletée, faites la crouste de l'espoisseur d'un bon doigt, mettrez dans le fond une poignée de veau haché avec de la graisse puis vous garnirez le pasté avec un levrau ou lapin coupé par morceaux, assaisonnez la viande avec de l'&pisse salée, adjoutez y quantité de marrons, de champignons, une siboule, ou une eschalotte escrasée ou coupée par morceaux, & des beatilles si vous en avez, puis on mettra par dessus une poignée de veau haché avec de la graisse, & six ou sept endoüillettes de veau, puis demie livre de beurre, un quarteron de moüesle & un quarteron de graisse de bœuf qui soit haché, puis quelques tranches de lard sur tout l'appareil.

Quand ce pasté sera garny, vous le couvrirez d'un couvercle de paste fueillettée, espois environ comme le travers du petit doigt, dorez ce couvercle, & y faites un

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trou au milieu, puis il faudra bander ce pasté tout à l'entour avec du papier beurre qui soit de la hauteur du pasté, & lié ce papier avec une ficelle pour le tenir en estat.

Mettez ce pasté au four sur un feüillet de papier blanc, & lui donnez l'âtre doux comme à un gasteau.Il faut environ deux heures pour le cuire.

XVI.

Un pasté de Requeste.

IL faut bien esplucher ou nettoyer des abatis de volailles, comme des cols coupez par morceaux, des aisles, de gisiers & des foyes, desquels vous osterez l'amer, lavez bien toutes ces choses en deux ou trois eaux, puis on les fera égouter : vous pouvez aussi couper un morcea de fressure de cochon de laict ou d'un agneau, apres en avoir osté l'amer, c'est à dire, le fiel : & faudra laver la fressure lors qu'elle sera coupée par morceaux.

Il faut en suitte mettre ces morceaux dans une terrine bien nette, & les assaisonner d'épisse salée, de persil & de lard haché menu, vous pouvez y adjoûter des champignons, & du verjus de grain lors qu'il y en a, ou des cardes, ou des

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asperges, ou des culs d'artichaux coupez par mourceaux.

Lors que cét appareil sera preste, on dressera l'abesse ou crouste de pasté : il est à propos qu'elle soit de paste fine, donnez luy l'épaisseur de deux quarts d'écu plus ou moins selon la grandeur du pasté, on l'emplira ensuittes des requêtes assaisonnées comme nous l'avons dit, puis on mettra sur ces requêtes quelques tranches de lard, & un bon morceau de beurre frais qui soit applaty à proportion de la grandeur du pasté.

Mettez un couvercle de pâte sur le pâté & les dorés, & s'il est besoin vous le banderez d'une bande de papier graissée de beurre : faites un trou sur le milieu du couvercle, & mettez le pâté au four, & lors qu'il sera cuit, on versera dedans avec un antonnoir un peu de caulce blanche : remettez le pâté dans le four quelque temps pour faire épaissir la saulce composée de jaunes d'œufs delayés avec un peu de verjus.

XVII.

Pasté d'assiette à l'Italienne en paste feüillettée.

DRessez vostre crouste de feüilletage, & luy donnez l'épaisseur d'un

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bon pouce, puis on la garnira dans le fond d'une poignée de veau haché avec de la graisse, puis on y ajoûtera trois perdrix ou trois pigeons vieux, dont on aura coupé les pieds, les aisles, le col, & abatez l'estomach, & qui soient lardez de quelques lardons au travers de leyr chair comme celle d'un pâté de venaison, puis vous les assaisonnerez d'pisse salée. Mettez-y aussi des marrons pelez, du pignon & du raisin de Corinthe de chacun une petite poignée, trois jaunes d'œufs durcis & coupez par la moitié, un peu de canelle en poudre, & un quarteron & demy de sucre, une tranche de citron confite, des champignons & des beatilles si vous en avés. Et au lieu de perdrix ou de pigeons, vous pouvez employer d'autre viande en ce pasté : par exemple du lapin coupé par morceaux & bien entrelardé.

Pour nourrir la viande de ce pâté, vous ajoûterez sur toute ses étoffes une poignée de veau haché avec de la moësle ou graisse, six ou sept andoüillettes de veau, demie livre de beurre, graisse hachée & moësle de chacun un quarteron, & quelques tranches de lard par dessus, couvrez ce pâté d'un couvercle de paste épais comme letravers du petit doigt ou

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environ, dorez ce couvercle & y faites un trou sur le milieu.

Il faudra bander le pâté tout à l'entour avec du papier beurré qui soit de la hauteur du pâté, & lier ce papier avec une ficelle pour le tenir en estat.

Mettez ce pâté au four sur un fueillet de papier blanc, & luy donnés l'âtre doux comme à un gâteau. Il faut environ deux heures & demie pour ce pasté.

Quand il sera presque cuit vous le tirerez hors du four, & on y versera avec un entonnoir par le trou du couvercle une sauce douce faite avec un quarteron de sucre, & près d'un demy septier de vin avec un peu de canelle en poudre, remettés en suite le pâté dans le four environ une demie heure pour lier cette sauce douce.

XVIII.

Faire des petites pastez à l'Espagnole.

FAites  de la pâte fine, & sur un litron de farine, ajoûtez-y quatre jaunes d'œufs ; lors que cette pâte sera preste vous dresserez la croûte des petits pâtez d'assiette de l'épaisseur de deux feüilles de papier ou d'un teston, plus ou moins selon sa grandeur, & vous la garnirez du hachis suivant.

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Hachez bien delié un blanc de chapon, un quarteron de chair de porc frais, & un quarteron de chair de mouton, deux ris ou fagoües de veau, du lard gras, de bonne moësle & de graisse de bœuf, de chacun un quarteron, un peu de siboulette ou d'oignon, & force champignons, du sel & de l'épisse douce à discrétion, & hacher toutes ces choses ensemble.

Garnissez vos abesses de ce hachis, puis faudra couvrir vos pasté de feüilletage, de sain doux, & dorer ce couvercle, puis on fera cuire ces petits pastez.

XIX.

Faire des petits pastez à la Princesse.

PRenez de la paste de sucre, faites en de petites abesses le plus minces qu'il sera possible : il faut les dresser dans de petites tourtieres, comme si c'estoit pour faire des petits pastez à la Cardinale, garnissez ces petits pastez de chair rostie ou boüillie qui soit bien delicate, comme de blanc de chapon haché bien menu avec de bonne moësle de bœuf, & assaisonné d'épisse salée : vous pouvez y ajoûter des beatilles blanchies, & des champignons cuits dans le beurre, & choses semblables.

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Lors que les petits pâtez seront garnis, on les couvrira de la même paste, vous les ferés cuire : il faut leur donner l'être doux, & ils seront cuit en moins d'un quart d'heure.

XX.

Faire un pâté en venaison de carpe ou d'autre poisson, pour manger froid.

PRenés une belle carpe ou quelqu'autre poisson qui soit gros, & s'il a des écailles, il faut écailler, puis l'eventrer ; il y a des poissons qu'il faudra écorcher comme l'anguille.

Lors qu'on a vuidé le poisso, on peut aussi oster les ouyes, c'est un poulmon du poisson.

Le poisson estant aprêté, vous ferés des entailles profondes sur le dos, puis on lardera le poisson avec du lard de balaine, ou des éguillettes d'anguille, & en charnage vous pouvez larder le poisson avec du lard à larder la viande.

Ne manqués pas d'oster les laictes ou laictances, & les œufs ui se rencontreront dans le ventre du poisson.

Quand vôtre poisson sera entierement apresté, vous dresserez une abesse de pâte, épaisse de deux ou trois doigts ; si

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c'est un grand poisson que vous desiriés mettre en paste, on fera cette abesse de longueur & de largeur sufisante, puis vous mettrez sur un des bouts de cette abesse une couche de beurre frais qui soit, proportionnée à la longueur du poisson, puis vous la poudrerez d'épisse salée, puis vous coucherez vôtre poisson sur icelle couche de beurre : puis vous poudrerez le poisson dedans le ventre & dehors avec de vôtre épisse salée, mettez dedans son ventre une couche de beurre, comme aussi sur le poisson un autre lict ou couche de beurre, ajoûtez y quelques feüilles de laurier : vous pouvez mettre les lettes ou oeufves à costé du poisson, & les épisser. Sallez vôtre pasté avec jugement, & lors qu'il sera assaisonné, il faudra fermer la paste, & à cet effet, replier ou rabattre sur le poisson le bout de l'abesse qui estoit vuide, puis dorer ce pâté avec de la doreure maigre si c'est en Carême.

Mettez ce pasté au fourt, & quand il y aura esté environ une demie heure, vous ferez une petit trou au dessus de la croûte, puis vous remettrez ce pâté dans le four pour achever de le faire cuire.

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Il faut trois bonnes heures pour faire cuire un de ces pastez de poisson, s'il est grand : & lors que vous jugerez qu'il sera cuit, vous le tirerez hors du four, & vous verrez avec un petit baston qu'il faudra enfoncer doucement dans le pasté par le trou qui est sur la crouste de dessus, si la saulce surnage le poisson : car si la saulce paroît estre trop courte, comme il arrive souvent, vous ferez fondre du beurre qu'il faudra assaisonner de vostre épisse salée, puis vous le verserez dans le pâté par le moyen d'un antonnoir afin d'augmenter la saulce.

Un jour après que le paste sera cuit, vous boucherez le trou qui est au couvercle du pasté, en y metant un petit de paste.

XXI.

Faire un pasté de poisson couvert ou découvert, lequel pasté il faut manger chaud.

PRenez tel poisson qu'il vous plaira, comme une carpe, ou une anguille, ou une tanche, ou un rouget, habillez-le & le preparez suivant que nous l'avons dit au Chapitre precedent, excepté qu'il ne faut point le larder.

Il y a des personnes qui trouvent à pro-

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pos qu'on échaude ou fasse revenir le poisson dans de l'eau chaude lors qu'il est habillé, principalement si le poisson est glaireux comme la tanche ou l'anguille, avant que de le mettre dans le pâté d'assiétte ; ce que font aussi les pâtissiers, parce que si on enferme dans un pasté du poisson tout crud, il faut crever le pâté.

Lors que le poisson est aprêté, il faut preparer une abesse de pâte fine, ou feüilletée, & la faire de longueur & de hauteur proportionnée à la grandeur de vôtre poisson : car on fait ordinairement en oval les pâtez de poisson.

Neanmoins vous remarquerez qu'on ne fait pas ordinairement la croûte de ces pâtez fine, c'est à dire, qu'on n'y met pas tant de beurre, principalement lors qu'on a dessein de faire ces pâtez découverts, parce que la croûte se renverseroit trop aisément, & la saulce se perdroit : cette croute doit avoir environ l'épaisseur de deux ou trois piastres ou piece de cinquante-huit sols.

Remarquez donc qu'il ne faut pas faire la pâte su fine de ces pâtez de poisson, & que les bons Patissiers le paistrissent avec de l'eau chaude afin qu'elle soit plus

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ferme : & quand on a dressé la crouste pour faire un pâté de poisson qui soit decouvert, on doit la laiser à l'air l'espace d'une heure ou deux pour la r'affermir avant que d'y mettre le poisson dedans.

Il faut proportionner la grandeur de vôtre crouste à la grandeur du poisson que vous desirez coucher dedans : lors que la croûte du pâté sera rafermie, vous mettrés dans le fond une couche de beurre frais : poudrés-là d'épisse salée, puis couchez sur icelle vôtre poisson ; vous devés avoir fait des taillades dans le plus épais de sa chair : que si vôtre poisson est par tronçons, il faudra raporter les pieces en leur propre lieu ; si le pasté est fait en ovalle, mettez aussi une couche de beurre dans le ventre du poisson, & un'autre par dessus ; assaisonnez-le d'épisse salée : vous pouvez mettre aux côtés du poisson ses oeuves ou laitances, & les poudrer d'épisse salée, puis vous pouvez ajoûter dans le pâté de pignon, du raisin de Corinthe, des champignons, des capres, des asperges, des morceaux de cul d'artichaux, ou autres choses semblables, si vous en avés, & du verjus de grain : quelques-uns y mettent aussi des huites qu'on

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a fait revenir dans de l'eau boüillante, faites en sorte que vostre pasté soit salé sans excez.

Puis si la croûte est fien, ou que vous craigniez qu'elle s'abatte dans le four, lors qu'elle sera humectée par le beurre fondu, il faudra bander vostre pasté par dehors : on peut mettre aussi une bande de papier double par dedans avant que de le garnir : ces bandes doivent être de papier en double, & bien graisées de beurre, & faut aussi les lier par dehors avec deux ou trois tours de ficelle.

Mettez vostre pasté dans le four, & prenez garde que la croûte ne se renverse de costé ou d'autre ; que si elle se renverse par quelque endroit, il faudra la redresser doucement avec une pelle à four.

Quand ce pasté sera cuit à demy, vous le retirerez à la queule du four, pour y remettre du beurre & du verjus pilé : ou bien vous y mettez environ deux onces d'amandes pelées & pilées, ou reduites en lait avec un petit de verjus : remettez le pasté dans le four.

Ces pastez de poisson qui sont découverts, pourront estre cuits en une heure & demie ou environ ; pourveu qu'ils soient de granduer mediocre.

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Remarquez que si vous desirez mettre une anguille entiere en paste, & en faire un pasté découvert, il faut la rouler & couper son arête de quatre poulces en quatre poulces ou environ : car si vous ne rompez pas son arête, elle se redressera en cuisant, & en s'étendant elle pourra rompre le pasté & le gaster : c'est pourquoy il vaut mieux la couper par tronçon de telle longueur qu'il vous plaira.On peut faire couverts ces pastez de poisson ; & à cet effet il faudra faire une abesse de pâte fine qui soit assez large & assez longue pour faire vostre pasté tout d'une piece en façon d'un pasté en venaison.

Lors que cette abesse sera preste, on mettra sur l'un des bouts une couche de beurre frais, assaisonnez-la d'épisse, puis on y couchera le poisson tout aprêté : & lorsque le pâté s era étoffé entierement, vous le couvrirés avec le bout de l'abesse qui est vuide, puis on fera un trou sur le milieu de ce coucercle, comme il a été remarqué au chap. des pâtez en venaison.Remarqués que quelquefois on fait des pastez ronds ou d'assiette avec du poisson, & ces pastez doivent estre couverts comme nous l'avons remarqué : le

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poisson que l'on met dedans doit estre coupé par tronçons.

XXII.

Pastez de chair de poisson desossée & hachée.

PRenez autant qu'il sera besoin de pâte fine étoffée comme celle de pâtez d'assiette ou de gaudiveau, dresés vos petites abesses ou croûtes en façon de pâtés à la Cardinale, ou de pâtez d'assiette de trois sols : & si vous faites des pastez d'asiette, faut que la crouste soit un peu plus épaisse dans le milieu du fond.

Lors que les abesses seront dressées, vous les garnirez premierement d'une petite couche de beurre frais, puis on remplira le pasté à demy avec du hachis de carpe ou d'autre poisson qui soit assaisonnés comme nous les proposerons cyaprès, puis vous mettrez sur ce hachis un lict de beatilles maigre ; par exemple, quelques morceaux de cul d'artichaux ou d'asperges parboüillies, ou des laitances ou langues de carpes cuites dans le court boüillon, ou des marrons rostis à demy, & hors du Carême vous pouvés y ajoûter des moitiés de jaunes d'œufs durs : & si c'estoit un jour gras, on pourroit y

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méler quelques morceau de moësle de bœuf.

Quand le pasté sera garny de beatilles, vous y ajoûterez encore un morceau de beurre, & si vous ne mettez point de beatilles dans ces pâtés, il ne faut pas laisser demettre du beurre sur le premier lict de hachis de poisson, ensuite dequoy on achevera de remplir suffisamment le pâté avec du hachis : & vous mettrez encore par dessus le hachis un petit morceau de beurre, & si les pâtez sont dressez en rond en façon de pâtez d'assiette, on y ajoûtera un couvercle de pâte en façon d'une piramide, & faudra qu'il soit percé par le haut, puis on dorera le couvercle.

Mettés ces pâtez au four, & leur donnés l'âtre comme aux petits pastez d'assiette.

Que si vous faites des pâtés de hachis découverts, lors qu'ils seront cuits vous pourrez y ajoûter une sauce doulce : & si c'estoit un jour gras, on pourroit y ajoûter du jus d'un membre de mouton ou de quelqu'autre viande rostie, ou bien une sauce blanche de jaunes d'œufs cruds délayez avec du verjus, puis il faudra remettre le pâté dans le four quelque peu

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de temps, afin qu'il prenne le goust de cette saulce, & que la saulce puisse s'&paissir : mais ces pastez de poisson haché sont mal-aisez à gouverner s'ils sont un peu grands, c'est pourquoy il est plus aisé d'en faire des tourtes avec une crouste de paste feüilletée.

XXIII.

La maniere de desosser le poisson, & de preparer un bon hachis de poisson pour en garnir des pastez.

POur faire un hachis de poisson, il faut en premier lieu cailler le poisson s'il est besoin, puis le peler, c'est à dire oster la peau, puis vuider le ventre du poisson, & en oster les boyaux & tout ce qu'il y a, soit oeuves, soit laitances, & le sang, puis on desossera le poisson, c'est à dire, qu'il faudra eparer la chair d'avec les arêtes, & plus il y a des petites arêtes entremêlées avec la chair du poisson, plus aussi il faut estre exact à la desosser ; ce qu'on peut faire en levant par tranches avec un couteau la chair du poisson, par exemple d'une carpe : mais parce que cette maniere de desosser le poisson qui est difficile, & que d'ailleurs la chair du poisson qui est toute cruë fait crever les pastez. Si on l'y

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met toute cruë, il est plus à propos de desosser le poisson en la maniere suivante.

Quand le poisson est habillé, il faut le plonger dans de l'eau presque boüillante, & l'y laisser tremper plus ou moins suicant l'épaisseur qu'il a : & il sera temps de le tirer hors de l'eau lors que vous pourez facilement détacher la chair d'avec les arêtes, & par ce moyen il sera aisé de desosser le poisson : mais d'autant que l'eau emporte une partie du goût du poisson, il est plus à propos de faire cuire le poisson au court-boüillon, & apres qu'on l'aura laissé refroidir à demy dans son court-boüillon, afin qu'il en prenne le goût, il sera aisé de separer la chair d'avec les arêtes du poisson.

Quand vous aurés tiré la chair du poisson hors des arêtes, vous la mettrez sur une table ajoûtez-y un peu du persil, du sel & des champignons coupés par morceaux, & un peu d'épisse : & si vous aimés la douceur, on peut y ajoûter du raisin de Corinthe & du pignon bien lavez : il faut hacher toutes ces choses ensemble, & lors que le hachis sera apresté, on en garnira les pastez ainsi qu'il a esté dit.

Si vous avés du hachis de reste, on peut le mettre dns une écuelle avec du beur-

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re & un oignon ou une siboule entiere, & le faire cuire, & pendant qu'il cuit, vous le retournerez de fois à autre, on peut y ajoûter des capres, & un peu de courtboüillon si vous en avez, & sur la fin un peu de verjus.

Lors que le hachis sera cuit, & que la saulce sera faite & de bon goût, vous retirerez l'oignon ou siboule, & raperez un peu de muscade sur le hachis, si davanture on n'y a point mis d'épisse.

Vous pouvvez picquer sur le hachis des apprestes de pain frit, un peu de saulce d'Alemagne seroit bonne aussi dans les hachis, si vous n'y avez point mis de court-boüillon.

Et pour déguiser davantage un hachis de poisson, vous pouvez hacher des jaunes & blancs d'œufs durs avec le hachis de poisson, ou bien on pourroit y mettre du jus de membre de mouton ou de quelque autre bonne viande.

Que si vous desirez faire des andoüillettes de chair de poisson, prenez du hachis de poisson, avant qu'il soit cuit dans le beurre, & le moüillez avec un peu de blanc d'œuf, ou de verjus, ou de vin blanc, puis on pressera ce hachis dans la

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main pour le lier en façon d'andoüilletes, puis on les fera cuire comme le hachis.

Il y a des personnes qui font cuire le hachis de poisson avant que d'en faire des pâtez : mais quand le hachis est cuit, il est trop gâcheux, à cause de la saulce.

XXIV.

Faire des petits pastez à l'huile, avec du hachis de poisson.

PRenés de la paste faite à l'huile, & dressés de petites abesses dans de petites tourtieres, si vous n'aimés mieux faire de petits pastés dressez.

Quand les abesses seront dressées, vous les garnirés de hachis de carpe ou de brochet, ou de perche, ou de vive, ou de sole, ou de chair de quelqu'autre bon poisson cuit au court-boüillon, & que cette chair soit bien hachée avec un peu de persil & de pignon, & quelques anchois desallés suffisamment : vous pouvez y ajoûter des champignons cuit dans le beurre, & que toutes ces choses soient bien hachée ensemble, & que ce hachis soit assaisonné d'épisse sallée.

Lorsque ce hachis sera haché bien menu, vous y ajoûterés à discretion de bonne huile qui soit rafiné, comme il a esté dit au Chapitre de la paste à l'huile. Et

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quand le hachis sera prêt, on en remplira les abesses, puis on couvrira les pastez d'un couvercle de paste à l'huile, dorez les en suite, & faites cuire ces pastez, & que l'âtre du four soit doux.

Ceux qui n'aiment pas l'huile, pourront employer du beurre dans ces pâtez au lieu d'y mettre d'huile.

CHAPITRE VII.

La maniere de faire un pain benist.

SI vous desirez employer un demy boisseau de fleur de farine pour faire un pain benist il faudra premierement prendre environ la grosseur de deux œufs de poule de franc levain, & mettre environ le tiers de vostre farine sur une table bien nette.

Faites une fontaine, c'est à dire un trou au milieu de la farine, mettez-y le levain & le detrempez exactement avec de l'eau chaude en le maniant avec vos mains, puis vous mélerés vôtre farine avec le levain qui est dissoult dans l'eau, mettezy ce qu'il faudra d'eau afin de bien pêtrir cette pâte jusques à ce qu'elle soit bien douce : il faut la laisser assez molle.

Lors que la paste sera pêtrie suffisam-

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ment, en sorte qu'il n'y ait point de durillons dedans, vous la couvrirez bien & la tiendrez chaudement en un lieu où il ne fasse point de vent, ny de froid, tout ainsi que si c'estoit pour faire du pain.

Laissez cette pâte en cet estat environ deux ou trois heures, si c'est en Esté, afin que ce levain ou paste puisse s'aprêter & se revenir suffisamment : mais si c'est une saison froide comme en Hyver, il faut 5. ou six heures pour aprester ce levain.

Regardés de fois à autres à cette âte, & lorsque vous verrés qu'elle sera renflée & comme crevassée par dessus : vous mettrez sur une table le reste de vôtre demy boisseau de farine : faites-y un asez grand creu au milieu, & y mettez un peu d'eau tiede dans laquelle vous aurez fait fondre un demy quarteron de sel, puis un quarteron de beurre frais : mettés aussi dans le méme trou toute vôtre pâte, & deliés-le tout ensemble & le reduisez en paste qui ne doit pas estre si molle qu'à la premiere fois.

Ecrasez & maniez bien toute cette pâte, puis vous la tournerez en la façon d'un gros pain, puis vous la couvrirez aussitost, afin qu'elle ne se morfonde, & ne se gaste pas.

Laissez toute vostre paste en cet estat

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environ une demie heure, puis vous la dresserés en long, ou bien vous le mettrés sur un rondeau de bois qui soit poudré d'un petit de farine, afin que la paste ne s'attache pas dessus : puis vous dresserez vostre pain benist qu'il faudra dorer en suite dedans & dehors : il faudra aussi piquer le pain benist par endroit dedans & dehors avec un morceau de bois pointu, afin qu'il se boursonffle pas.

Lors que le pain benist sera façonné, vous le poserez sur une pesle qui soit suffisamment grande, prenez garde de rompre le pain benist, & le mettez au four.

Il faut une petite demie heure pour cuire un pain benist d'un demy boisseau de farine, & il faut que le four soit un petit moins chaud que si c'estoit pour cuire de gros pain.

Vous reconnoistrez qu'un pain benist sera cuit par le mesme moyen que nous dirons que l'on reconnoit que le pain est cuit.

Remarquez que beaucoup de Pâtissiers employent de la leveure ou écume de bierre dans les pains benits qu'il font, au lieu d'y mettre du franc levain, parce que la leveure de bierre fait aprêter & lever plus promptement la pâte, fait aussi

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paroistre davantage leur machandise, & la rend plus delicate, quoy que moins utile pour la santé.

Remarquez aussi, que si vous faites un grand pain benist, il faut en broyer la pâte avec un gros morceau de bois que les Pastissiers appellent une broye.

II.

Un pain benist fin & plus delicat, lequel on appelle à Paris du cousin, & en d'autres endroits on le nomme chanteau.

FAites vostre levain comme nous l'avons dit au Chapitre precedant, avec le tiers de vôtre demy boisseau de farine fine, & lors qu'il sera revenu ou apresté, vous mettrez sur le tour ou table le reste de vostre demy boisseau de farine, faitesy une fontaine au milieu, chauffez y une chopine d'eau ou plûtost du laict, afin que ce pain benist ou chanteau soit plus fin & plus delicat : faites fondre dans ce laict deux onces de sel & une livre de beurre, versés-le ensuite dans le milieu de la farine, ajoûtez-y une demie livre de fromage mol non écrêmé : & si vous voulez aussi trois ou quatre œufs qui soient delayés avec un peu de lait, mettez-y aussi le levain, & paistrissez exactement le tout ensemble.

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Quand vous aurez bien manié & fraisé toute la pâte, vous la retournerez comme il a esté dit au Chapitre precedent : puis vous la couvrirez, & vous la laisseres reposer environ une demie heure : puis vous en formerez une chanteau ou un pain benist ; lequel il faudra dorer & piquer, & enfin le mettre au four.

Remarquez qu'il faut plus de temps pour cuire ce pain benist fin, à cause que la paste en est plus étouffée.

Chapitre IV.

La maniere de faire une tourte à la crême de Pastissier.

PReparez une abesse de paste fine ou de feüilletage, dressez-la dans une tourtiere.

Remarquez qu'il est à propos que les tourtieres de couvire soient étamées par dedans, afin que la crouste des pieces de four ne s'attache pas à la tourtiere, & qu'elle ne prenne aucune mauvaise qualité du cuivre.

Il faut aussi que le fond des tourtieres soit uny, & qu'il ny ait point de creux, afin que le fond de la piece de four ne [s]'attache point au fond de la tourtiere.

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Remarquez aussi, qu'il faut étendre avec le pouce un morceau de beurre dans la tourtiere pour la graisser legerement, si la croûte de la piece de four n'est pas feüiletée, afin qu'lle ne s'attache point à la tourtiere en cuisant.

Il faut aussi graisser le dedans d'une tourtiere, lors que vous desirez y faire cuire une piece de four qui n'a point de croûte, comme une omelette au pain.

Que si l'abesse d'une piece de four est faite de pâte feüilletée, ne sera pas besoin de graisser le fond de la tourtiere avec du beurre : mais il suffira de la poudrer legerement par dedans avec une pincée de fleur de farine, afin que l'abesse ne s'attache pas à la tourtiere.

Lors que la tourtiere est arnie de son abesse, il faut mettre fondre dans un plat sur un peu de feu : par exemple un quarteron de bon beurre frais pour une tourte de mediocre grandeur : & lors qu'il est fondu, vous y mettrez environ la grosseur de trois œufs de crème de Pâtisier, & une bonne poignée de sucre, un peu de canelle en poudre & fort peu d'eau rose ; on peut y ajoûter du raisin de Corinthe, du pignon, & de petites tranches d'écorce de citron confite.

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Il faut méler ensemble tout cét appareil : puis on garnira l'abesse, qui doit estre épaisse environ de l'épaisseur de deux testons : & lors que la tourte sera garnie suffisamment, on la garnira par dessus avec des bandes de paste.

Il faut environ un quart d'heure pour faire cuire cete tourte : & lors qu'elle sera cuite, ou à peu près, on la tirera hors du four pour la poudrer de sucre : puis on la remettra encore un peu au four afin que le sucre se glace : puis vous la tirerez hors du four, & lors on pourra l'arroser de quelques gouttes d'eau rose.

Remarquez en general, que si vous desirez employer du pignon ou du raisin de Corinthe, il faut le nettoyer & le laver avant que de le mettre dans une piece de four.

Remarquez aussi, que si vous faites cuire dans le four une tourte ou quelqu'autre piece de patisserie qui soit dans une tourtiere, il faudra mettre quelquefois la tourtiere sur la braise.

Remarquez aussi que si vous faites cuire une piece de pastisserie dans une tourtiere sur de la cendre chaude sans la mettre

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dans le four, il faut que le bord de la pâtisserie soit plus bas que celuy de la tourtiere, & faut couvrir la tourtiere d'un couvercle convenable, sur lquel on mettra de la cendre chaude & quelque peu de braise, plus ou moins selon la grandeur & lépoisseur de la piece du four.

Car il faut qu'il y ait du feu dessus & dessous la tourtiere, lors qu'on fait cuire une piece de pastisserie dans une tourtiere prés le feu, & sans mettre dans un four.

II.

Autre tourte à la cresme tres-delicate.

GRaissez legerement une tourtiere avec un peu de bon beurre frais, puis on garnira cette ourtiere avec une abesse de paste fine ou de feüilletage, puis vous remplirez suffisamment cette abesse avec de la cresme fine de Pastisserie : on peut y adjoûter la grosseur d'un œuf ou de deux de tres-bon lard gras, raspé avec une raspe ou avec un coûteau : vous pouvez aussi y adjoûter de l'escorce de citron confite taillée en petits morceaux ; il ne restera plus qu'à façonner le dessus de la tourte avec de petites bandes de paste, puis on la fera cuire.

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Lors que cette tourte sera cuite, vous la poudrerez de sucre, & la remetrez un peu de temps au four : puis on la bassinera legerement de quelques goutes d'eau rose avant que de la servir.

III.

Une tourte de moësle de bœuf.

PRenez un quarteron de moësle de bœuf, escrasez-là avec vos doigts par petits morceaux, qui soient environ de la grosseur de petites noisettes, adjoutez-y a peu pres autant de sucre en poudre & deux jaunes d'œufs, une petite pincée d'épisse salée ; du pignon, du raisin de Corinthe, & escorce de citron qui soit hachée bien menuë : mettez-y aussi du biscuit ou du macaron, ou des amandes deliées & pilées, ou de la mie de pain environ la grosseur d'un œuf de poulle, meslés ensemble toutes ces choses avec une gache ou cueillere, & lors que cet appareil sera prest, vous en garnirez une tourtiere garnie de son abesse, puis vous banderez dru vostre tourte par dessus, ou bein vous la couvrirez d'une fueille de paste qui soit decoupé en plusieurs endroits.

Faites cuire vostre tourte, & lors

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qu'elle sera cuite vous la poudrerez de sucre, & remettrez un petit au four.

IV.

Une tourte au lard.

RAspez du lard gras avec un couteau ou avec une rape, ou le hachez seulement bien menu : vous pouvez la faire tremper quelque temps dans de l'eau nette, puis vous en peserez un quarteron, adjoûtez-y environ autant de sucre en poudre & deux jaunes d'œufs, une pincée d'episse salée, environ, le tiers d'une fueille d'escorce de citron, & aussi environ la grosseur d'un œuf de mie de pain blanc qui soit émie bien menu, ou bien du macaron, ou seulement environ autant d'amandes pelées & pilées avec une petit d'eau rose, ou bien au lieu d'une de ces choses vous y mettrez une bonne cueillerée de cresme de Pastissier, parce qu'elle est bonne en toutes sortes de tourtes : meslez toutes ces choses ensemble, vous pouvez encore y adoûter un peu de raisin de Corinthe & de pignon. Et lors que cet appareil sera prest, vous en mettrez suffisamment dans une tourtiere garnie de son abesse : puis vous acheverez de façonner vostre tourte ; &

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enfin vous la ferez cuire : lors qu'elle sera cuitte, vous la poudrerez de sucre, & la remettrez un petit au four, & lors que vous l'aurez retirée, vous l'arroserez de quelques goutes d'eau rose.

V.

Une tourte de roignon de veau.

LOrs qu'une longe de veau est rostie, vous prendrez le troignons avec la graisse qui y sera, hachez-les bien menu, & les assaisonnez comme la tourte de moësle de bœuf : vous pouvez adjoûter dans cét apareil une cueillerée de cresme fine de Patissier.

Remplirez de cêt apareil une tourtiere garnie de son abesse, couvrez cette tourte d'une feüille de paste qui soit decoupée : puis vous ferez cuire vostre tourte, & lors qu'elle sera cuite, vous y mettrez du sucre & quelques gouttes d'eau rose comme au Chapitre precedent.

Vous pouvez faire une tourte de langue de veau, de la mesme façon qu'une tourte de roignon de veau.

245

VI.

Une tourte aux œufs.

GArnissez vostre tourtiere d'une abesse de paste fine ou feuilletée : puis vous répandrez dans cette abesse une poigné de sucre en poudre ; & vous couperez en deux le jaune d'environ une vingtaine d'œufs durs, plus ou moins selon vostre besin, arrandez ces moitiez de jaunes d'œufs dans vostre tourtiere sur la couche de sucre : & lors que ce lict d'œufs sera garny, vous piquerez environ cinq ou six clous de girofle sur cinq ou six moitiez de jaunes d'œufs, puis vous poudrerés ce lit d'œufs avec un petit de canelle en poudre ; adjoûtez-y autant qu'il vous plaire d'écorce de citron confite, vous pouvez y adjoûter du pignon & du raisin de Corinthe.

Mettz une bonne poignée de sucre sur cét appareil, & un bon morceau de beurre frais : par exemple un demy quarteron qui soit aplaty & posé sur le sucre.

Bandez cette tourte avec des petites bandes de paste, puis vous la ferez cuire comme les autres tourtes, & lors qu'elle sera cuite vous la sucrerez, puis la remettrez un petit dans le four : & lors

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qu'elle sera retirée dehors, il faudra jetter dessus quelques gouttes d'eau rose.

VII.

Une tourte d'herbes.

PRenez deux poignées d'herbes douces, comme de la poirée, ou de laictuës, ou des mauves ou des espinards, ostez les costes ; puis vous laverez vos herbes, & en suitte vous leur ferez prendre un boüillon dans de l'eau boüillante afin de les mortifier, puis vous les tirerez à sec & les presserez bien entre vos mains ou entre deux assiettes, pour en sortir l'eau.

Hachez bien menu ces herbes ou les broyez dans un mortier, puis vous en mettrez dans une escuelle environ la grosseur de deux œufs, avec environ la grosseur d'n œuf ou un petit plus de bon beurre frais qui soit déjà fondu, adjoûtez une bonne poignée de sucre en poudre, vous pouvez y mettre davantage de sucre, assaisonnez cet appreil avec une petite pincée d'episse douce, autant de canelle en poudre, & aussi une petite pincée de sel : vous y mettrez encore environ la groseur d'un œuf de poulce de mie de pain blanc qui soit emiée bien

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menu, autant de bescuit bien sec ou bien deux macarons, ou bien un peu d'amandes douces pelées & pilées dans le mortier : mettez-y aussi environ le tiers d'une feüilled'escorce de Citron qui soit coupée en petits morceaux & environ la grosseur de deux œufs de cresme de Pastissier : vous pouvez aussi y adjoûter le jaune d'un œuf qui soit crud, ou bien la gorsseur d'un œuf de bon fromage mol qui ne soit pas cresmé : vous pouvez encore y mettre un peu de pignon & de raisin de Corinthe, principalement en Hyver & en Caresme : meslez bien toutes ces choses ensemble avec une gache de bois, ou avec une cueillere.

Lors que cét appareil sera bien lié, vous garnirez une tourtiere d'une abesse de paste fine ou de feuilletage, époisse environ de l'époisseur de deux testons, remplissez suffisament cette abesse avec vostre appareil ; puis vous garnirez le dessus de la tourte avec des petites bandes de paste : fraisez si bon vous semble le bord de la tourte, ou le vitelez.

Mettez cette tourte, au four, & la posez de fois à autre sur un peu de braise,

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elle pourra estre cuite en l'espace d'une petite demie heure : & lors qu'elle sera presque cuite, il faudra la retirer hors du four, & la poudrer d'une poignée de sucre, & de quelques gouttes d'eau rose, puis vous la remettrez un bien petit de temps au four : & lors que vous l'aurez retirée cette derniere fois, vous la poudrerez encore d'une poignée de sucre.

VIII.

Une tourte de racines.

PRenez des racines de chervis, ratissezles, & les nettoyez, vous les ferez cuire dedans de l'eau jusques à ce qu'elles soient parboüillies suffisament, puis vous les tirerez à sec, & vous les pillerez dans un mortier ; vous pouvez aussi les monder par un camis afin d'en tirer seulement la moësle.

Lors vousp rendrez environ la grosseur de deux œufs de ces racines pilées ou de leur moësle, laquelle il faut mettre dedans une écuelle avec autant de mie de pain blanc ou de macaron, & aussi environ la grosseur de deux œufs de cresme de Pastissier, deux poignées de sucre & un petit d'eau rose, du sel, de la canelle, & de l'épisse à discretion, com-

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me aussi du pignon, du raisin de Corinthe & de l'escorce de citron, meslez toutes ces choses ensemble avec environ la grosseur d'un œuf ou un peu plus de beurre frais qui soit fondu, & lors que cet appareil sera prest, vous le coucherez dans une tourtiere garnie de son abesse de paste fine ou de fueilletage.

Bandez cette tourte & la faites cuire, & lors qu'elle sera cuite ou à peu prés, il faudra la poudrer d'une poignée de sucre & de quelques gouttes d'eau rose, puis la remettre au four un petit de temps ; puis vous la retirerez & la poudrerez encore de sucre, & sera fait.

IX.

Une tourte de fruit crud.

GArnissez vostre tourtiere d'une abesse de paste fine ou fueilletée, mettez y une ocuche de sucre, puis vous la garnirez des groseilles rouges qui soient égrainées, ou de verjus en grain, ou de cerises meures, ou d'abricots coupez par la moitié, ou de prunes qui soient pelées, vous pouvez aussi oster le noyau : que si vous desirez mettre des abricots entiers dans une tourte, il faut les peler ; adjoutez y un morceau de beur-

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re, un peu de canelle en poudre, quelques tranches menuës d'escorce de citron confite, & une poignée de sucre ou plus suivant la grandeur de la tourte.

Lors vous couvrirez cétte tourte d'une fueille de paste que vous pourrez decouper dans le milieu, puis vous la dorerez, & vous mettrez au four cette tourte & lors qu'elle sera cuite, vous la sucrerez par dessus, & la remettrez un petit de temps au four, & sera faite.

X.

Une tourte de chair de citroüille, ou de courge, ou de melon.

PRenez de la chair de citroüille ou de celle de courge, ou d'un melon, coupez-la par morceaux qui soient gros environ comme de noix, faites la cuire à demy & à petit feu dans l'eau qu'elle jettera, & ayez soin de retourner les morceaux de fois à autre, afin qu'il ne se brûlent pas : que si vous dsirez avoir moins de peine, vous mettrez un peu d'eau avec la chair de ces fruicts afin qu'elle cuise plus promptement & plus aisément, mais aussi elle aura un peu moins de goust.

Lors que vostre citroüille sera cuitte

1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (251-300)

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à demy, il faut la tirer à sec & la laisser bien égouter : ou bein vus la presserez dans la main ou dans un linge pour égouter mieux son eau : puis vous la pilerez ou écacherez avec une cueillere.

Au lieu de preparer de la citroüille ou de la chair de courge, ou de celle d'un melon en la maniere que nous avons dit, vous pouvez en prendre qui soit encore toute cruë & la piler, puis la faire cuire à demy dans du boüillon de chair ou dans de l'eau, & lors qu'elle sera cuite à demy comme si c'estoit pour la fricasser au beurre ou à l'huile, vous la passerez par une estamine ou gros linge ou par un tamis, afin d'en separer les filets.

Quand la citroüille sera preparé, vous la mettrez dans une écuelle ou petit bassin : adjoutez y un bon quarteron & demy de sucre ou encore plus une pincée d'épisse ou de canelle en poudre, & un peu de sel : vous pouvez aussi y mettre du pignon, du raisin de Corinthe, & de l'écorce de citron coupée en petits morceaux, & de la cresme de Patissier, ou bien de la mie de pain blanc, ou du macaron ou biscuit qui soit escrasé, ou

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la grosseur d'un bon œuf d'amandes douces pélées & pilées exactement dans le mortier : vous pouvez aussi y mettre du fromage frais fait qui ne soit pas écresmé.

Adjoutez danscet apareil autant qu'il sera besoin de beurre frais qui soit fondu, ou de la moüesle ou graisse de porc qui soit coupée par petits morceaux : & si c'est un jour gras, au lieu de mettre dans cette tourte de la cresme de Patissier, vous y adjouterez quelques jaunes d'œufs cruds.

Meslez ces choses ensemble & les reduisez en forme de farce : & si vous avez de la peine à la bien lier, vous y adjouterez quelques cueillerées de lait, afin d'incorpore mieux cét appareil.

Lors que l'appareil sera prest, il faudra en coucher suffisamment dans une tourtiere qui soit garnie d'une abese : puis il faudra couvrir cette tourte avec une feuille de paste, & dorer vostre piece de four, puis la faire cuire : & lors qu'elle sera cuite, vous la poudrerez par dessus avec beurre, & jeterez dessus quelques goutes d'eau rose.

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XI.

Une tourte avec de la chair de pommes.

GArnissez une tourtiere d'une abesse de paste, puis faites-y un lit de sucre & la garnissez en suite de pommes ou de poires pelées & hachés assez menu, ou coupées par tranches, les pepins & le cœur en estants ostez, entremeslez y du pignon, du raisin de Corinthe, & de l'escorce de citron si vous en desirez, poudrez cét appareil avec un peu de canelle en poudre, adjoute-y aussi du sucre à discretion qui soit en poudre, & un morceau de beurre frais : par exemple la grosseur d'une noix ou environ pour tourte mediocre : couvrez cette tourte comme une autre tourte de fruit, & la mettrez au four quand elle sera dorée : & lors qu'elle sera cuite, vous la poudrerez de sucre, & la remettrez un peu de temps au four.

VIII.

Une tourte ou pasté, ou chosson de pommes ou de poires, ou d'autre fruit crud.

DRessez la crouste de telle grandeur & de telle figure qu'il vous plaira, puis vous la garnirez d'un lict de sucre par dedans : adjoutez des pommes ou

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d'autre druit coupé par quartier apres en avoir aussi osté le cœur & la peau : adjoutez y un morceau de beurre frais, & quelque peu de canelle en poudre ou de l'anis verd : au lieu de beurre vous pouvez mettre de la moüelle dans ces tourtes ou pastez de fruit, vous pouvez mettre aussi du pignon, raisin de Corinthe ou de Damas, ou des prunaux, & de l'escorce de citron coupée par petites tranches : vous pouvez aussi poudrer cet appareil pardessus avec une poignée de sucre en poudre.

Couvrez cette tourte ou pasté, & le mettez au four.

XIII.

Une tourte de confitures.

GArnissez vostre tourtiere d'une abesse de paste, puis vous mettrez dans le fond de cette abesse un petit de sucre en poudre, puis il faudra estaler vos confitures dans vostre abesse : vous pouvez y adjouter un peu d'escoce de citron coupée en petites tranches deliées, adjoutez-y aussi un peu de sucre par-dessus, & un peu d'eau rose.

Couvrez vostre tourte d'une fueille de paste qui soit decoupée au milieu

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comme nous l'avons proposé au Chapitre de la tourte de pommes : dorez cette tourte par dessus, & la mettez au four, & la faites cuire promptement car il n'y a que la crouste à cuire.

Lors qu'elle sera cuite, vous la sucrerez par dessus, pui vus la remettrez un petit au four, & l'ayant retirée, vous pourez encore la poudrer d'un petit de sucre.

XIV.

Autre tourte en façon de tourte aux confitures.

PRenez du fruit seché a four ou au Soleil, & les faites boüillir dans de l'eau pour les ramollir, comme des pruneaux, ou des dattes, ou des raisins de Damas : vous pouvez y mettre du sucre.

Lors que le fruit sera ramolly suffisamment, il faudra en oster les noyaux & les pepins, uis vous pilerez le fruit, ou bien vous en tirerez la moüelle par un tamis ; adjoutez y du sucre, un peu de farine, & bien peu de canelle battuë : meslez ces choses ensemble, puis vous en garnirez vostre abesse, & vous acheverez cette tourte comme au Chapitre precedent.

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XV.

Une tourte de franchipanne.

MEttez sur le tout trois quarterons à bon pois de fleur de farine & du sel à discretion : il faut detremper cette farine en un lieu frais avec du blanc d'œuf tant que soit assez pour la reduire molle comme du feuilletage.

Lors que cette paste sera preste, vous la laisserez reposer un bien peu de temps afin qu'elle soit plus maniable, puis il faudra l'estendre sur le tour, & la faire la plus mince que vous pourrez.

Incontinent apres que la paste sera étenduë, vous graisserez avec du sain doux le fond d'une tourtiere, & on y estendra un des bouts de la paste pour faire une abesse, il faudra graisser de sain doux cette abesse, & replier la paste par dessus, & graisser encore ce ply de paste avec du sain doux, & mettre encore un quatriéme plyde paste, lequel il ne faut point gresser par dessus.

Quand le quatriéme ply, c'est à dire la quatriéme abesse de paste sera mise, vous y coucherez autant qu'il sera besoin de l'apareil suivant qui soit estre prest quand vous commencerez à dressez la tourte.

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Mettez dans un poëslon une chopine de cresme de laict qui soit douce, & qui ne soit point battuë ; adjoûtez-y quatre jaundes d'œufs, une petite pincée de sel, & deux pincées de fleur de farine, delayez ensemble toutes ces choses, & les faites boüillir sur le feu pres d'une demie-heure, & remuez tousjours cet apareil jusques à ce qu'il soit espois comme de la boüillie lors qu'elle est cuite.

Quand cette boüillie sera cuite, on la versera dans une écuelle : & lors qu'elle sera refroidie à demy, vous y adjoûterez un quarteron de pistaches pelées dans de l'eau chade comme des amandes, plus bien battûes ou pillées grossierement dans un mortier de marbre, comme si c'estoit pour faire du macaron ; adjoûtez-y aussi un bon quarteron & demy de sucre en poudre, une pincée de canelle battuë, unetranche ou fueille d'escorce de citron confiter dechiquettée en petits morceaux, une vingtaine de grains de bon pignon, & une bonne pincée de raisin de Crinthe : on peu encore y adjoûter en mesme temps un peu d'ambre gris & de musc destrempez dans une petite d emie cueillerée d'eau de

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fleur d'orange ou d'eau rose, & gros comme la moitié d'un œuf de moësle de bœuf escachée, & mesler ensemble toutes ces choses, & en garnir toute autant qu'il sera besoin.

Quand la tourte sera remplie suffisamment de cet appareil, il faudra replier quatre fois la paste par dessus cet appareil pour faire le couvercle, & graisser de sain doux le dessus de chaque feüillet de paste.

Puis on rognera le bord de la tourte, & faudra le serrer ou presser avec les deux pouces, pour attacher & bien joindre ensemble les feüilles de paste, en sorte qu'ils soient bien soudez ensemble, afin que l'appareil ne foire pas : on peut aussi façonner à descretion le bordage de la tourte : par exemple le faire en carneaux.

Il faut aussi déchiqueter les deux fueilles du dessus du couvercle sans toucher à ceux de dessous : ce qu'il faut faire avec un couteau ou ganif, ou y faire seulement de petites fentes qui ne doivent pas penetrer plus bas que la deuxiéme fueille du couvercle, de peur que l'apareil ne sorte.

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Il faut dorer la tourte par dessus, & la mettre au four sur un peu de braise qui ne soit pas bien ardente, & que la tourtiere soit bien droite.

Il faut prés d'une heure pour cuire cette piece de four, qui devient époisse quasi d'un demy pied d'époisseur.

Lors que cette tourte est cuite & tirée hors du four, vous la poudrerez de sucre par dessus, & de quelques gouttes d'eau rose ou de fleur d'oranges ; puis on la remettra à l'entrée du four afin qu'elle se glace : ce qui se fait en demy quart d'heure : & lors elle sera preste à servir sur la table.

CHAPITRE IX.

La maniere de faire une fueillantine.

MEttez dans une écuelle la grosseur de deux œufs de cresme de Pastissier, un quarteron de sucre en poudre, un jaune ‘œuf crud, une pincée de raisin de Corinthe, autant de pignon, & d'escorce de citron confite coupée bien menu, un ou deux macaron escachez

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bien menu, un peu de canelle en poudre, & de bonne eau rose : il faut déliez ensemble toutes ces choses avec une haché ou cueilliere d'argent ; & y adjoûter quelques gouttes d'eau de fleur d'orange ou de jus de citron : il en faut peu de l'un & de l'autre.

Ou bien au lieu de tous ces ingrediens, vous pouvez composer l'appareil seulement avec de la cresme de Patissier, de la mie de pain blanc, ou du biscuit escaché, un peu de raisin de Corinthe, du sucre, un petit de canelle, & quelque gouttes de jus de citron.

L'appareil estant fait, on fera deux abesse de paste fueilletée de la grandeur & de l'époiseur d'une petite assiette : mettez sur un morceau de papier une des abesses sur laquelle on versera l'apareil susdit, qu'il faudra estendre un peu avec la gache : puis vous moüillerez un peu le bord de l'abesse, & en suitte on la couvrira de l'autre abesse ou fueille de paste : il faut assembler soigneusement le bord des deux abesses l'une avec l'autre, en façon d'une tarte, & mettre la feuillentine au four, qui sera cuite en demie heure ou environ.

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Lors que cett piece de four sera presque cuite, poudrez-la de sucre, & l'arroserez de quelques gouttes d'eau rose, ou plustost d'eau de fleur d'orange, puis on la remettra au four un peu de temps pour faire glacer le sucre, & l'ayant retirée du four cette dernière fois, il faudra le poudrer encore de sucre.

On peut dresser & faire cuire une feüillentine dans une tourtiere : on peut aussi en faire de petites & de telle grandeur qu'il vous plaira.

CHAPITRE X.

La maniere de faire des tartres.

DRessez vostre crouste, la paste ne doit pas estre si fine que si c'estoit pour faire une tourte : donnez luy l'espoisseur d'un teston au plus à proportion de sa grandeur, & faites en sorte que le milieu du fond soit un peu plus espois que le reste.

La crouste estant ressuyée, vous la garnierez de cresme de Pastissier, ou de confitures, ou de fruit, ou de fromage,

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qu'il faut assaisonner de sucre, de raisin de Corinthe, ppignon, canelle ou épisse douce en poudre, beurre frais, & autres ingrediens, cmme si c'étoit pour en faire une tourte.

Quand la tarte sera garnie, vous la banderez par dessus de quelques bandes de paste, puis on la sucrera & mettra au four, & lors qu'lle sera cuite, vous la poudrerez encore de sucre, & l'arroserez de quelques goutes d'eau rose.

Les petites tartelettes se font de la même maniere.

II.

Tarte au fromage, au Flan.

PRenez gros comme les deux poings de fromage mol non escresmé, la grosseur d'une ou deux noix de fromage sec un peu affiné qui soit écaché ou raspé, ou seulement coupé en morceaux bien petits, & du sel à discrétion, & environ un quarteron de bon beurre non sallé qui soit fondu  ajoûter y le blanc & le jaune d'un ou deux œufs : meslez ensemble toutes ces choses, & les maniez bien pour les délier, & y ajoûtez un peu d'eau fride si l'apareil est trop épais ; mais si le formage mol que vous

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employez est bien mol & rend du petit laict, il ne faut point mettre d'eau dans cet appareil, au contraire il faut égouter le lait, parce que l'apareil seroit trop gâcheux : reduisez l'apareil en consitance de boüillie qui est bien cuit & époisse comme de la colle : il faut aussi y ajoûter environ la grosseur d'un œuf de fleur de farine ou de pain blanc.

Remplissez la tartre de cet apareil ou farce, & la mettez au four, & lors qu'elle sera cuite, vus pourrez la poudrer de sucre.

Remarquez qu'on peut employer de bonne graisse de porc au lieu de beurre pour faire de ces tartes au fromage.

III.

Autres tartes au fromage plus fines, qu'on appelle des tartes d'amy.

BAttez deux ou trois jaunes d'œufs avec une poignée de sucre en poudre, & quand ils seront bien delayez, versez les dans l'abesse ou crouste dressée pour faire la tarte : étendez-y ce premier apareil, puis on mettra par dessus autant qu'il sera besoin de la farce au fromage & autres ingrediens proposez pour faire les tartes commune au fromage.

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La tarte estant garnie suffisamment faites la cuire : & lors qu'elle sera presque cuite, poudrez là de sucre & l'arrosez d'un peu d'eau rose : remettez-là au four pour achever de la faire cuire, & pour faire glacer le sucre.

IV.

Autre façon de tarte au fromage.

DRessez vstre crouste : & lors qu'elle sera ressuyée ou raffermie, garnissez-là d'un lict de bon formage sec par exemple d'un bon angelot ; il en faut mettre environ l'époisseur d'un bon travers de doigt ou d'un poulce au plus, & que ce fromage soit coupé en petits morceaux ou escaché avec l'escachoy ; adjoûtez y par dessus à discretion de bon beurre frais, quelques jaunes d'œufs battus, faites cuire cette tarte qu'on appelle en Picardie une boutonnée, & fait trouver le vin bon.

Cette tartre sera plus delicte si vous meslez ensemble les œufs, le beurre, le fromage, & le reste de l'assaisonnement pour le reduire en farce dont on garnira l'abesse ; voire mesme au lieu de fromage sec, il sera plus à propos d'y employer de deux sortes de fromage mol,

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dont l'un soit un peu plus frais fait que l'autre.

V.

Autre tarte ou flan au fromage.

PRenez une demie livre à bon poids de fromage gras qui soit encore mol, mais bien ressuyé, escachez-le sur le tour : puis on y adjoûtera un bon posson de bonne cresme douce qui soit espoisse, une petite pincée de fueilles de persil haché bien menu, trois jaunes d'œufs, & un brain de sel : meslez bien ensemble toutes ces choses : & quand cet appareil sera reduit en farce bien deliée : versez-là sur une abesse de paste fine l'époisseur de deux bons testns, & large comme une assiette : mettez sur cette farce un demy quarteron de bon beurre frais rompu par petits morceaux : couvrez cet appareil d'un couvercle de paste bien fine & bien mince, moüillez les bords avec un peu d'eau, & les soudez ensemble exactement, & y faite un cordon façonné comme il vous plaira : Cette tarte ressemble à une petite tourte ou escuelle renversée. Il faut dorer le couvercle, & faire une mediocre ouverture en croix dans le milieu, pour donner de

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l'air à ce qui est dans la tourte, il est à propos de le relever un peu les pointes de cette ouverture : faites cuire cette piece de four, & ce qui sera fait en une bonne demie heure ou environ.

CHAPITRE X.

La maniere de faire des ratons.

MEttez sur le tour, par exemple un litron de farine fine, un bon quarteron de beurre si vous en avez, & environ une demie once de sel, & un demy septier d'eau tiede ou environ : maniez ensemble toutes ces choses & les reduisez en paste bien lié ; il faut qu'elle soit mollette : mettez de cette paste sur du papier graissé de beurre, & la façonnez en fçon de gasteaux : faites les de l'espoisseur de deux testons & la grandeur du tour d'une petite assiette plus ou moins, comme il vous plaira, & reserver un peu le bord : il faut dorer ou remplir un peu le raton avec de la farce des tartes au fromage, puis vous les ferez cuire.

267

II.

Autre façon de raton.

PRenés trois ou quatre cueillerées combles de fleur de farine ou de ris en poudre, delayez les avec du laict, en sorte que l'appareil soit epois comme de la boüillie bien cuite, adjoûtez y un peu de sel bien écrasé : vous pouvez aussi y délayer un ou deux jaunes d'œufs, ou y adjoûter un macaron ou une cueillerée d'amandes pelées & bien pilées : mais il n'est pas necessaire d'y adjouster ny de macaron, ny d'amandes, ny de jaune d'œuf.

L'appareil estant prest, vous ferez fondre dans un poëslon assés grand, ou tourtiere mediocre, la grosseur d'un œuf de bon beurre frais, & quand il sera fondu & demy roux & bien chaud, versez y le susdit appareil, faites en sorte qu'il soit estendu également dans le poëslon ou tourtiere, & ne soit pas plus espois que le travers du petit doigt ou environ : laissez cuire doucement le raton sur un feu mediocre sans le couvrir, & regardez de fois à autre s'il ne brusle point par dessous : & lors qu'il sera coloré par dessus & rissolé suffisamment, retournez le afin

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que l'autre costé cuie & prenne de la couleur, ce qu'estant fait, vous le dresserez sue une assiette, & poudrerez de sucre dessus & dessous.

CHAPITRE XII.

La maniere de faire de dariolle.

MEttez dans un bassin ou dans une jatte : par exemple la quatriesme partie d'un litron de fleur de farine, & le blac & le jaune de deux œufs : delayez bien ces choses ensemble avec une gâche ou cueillere, versez-y petit à petit un peu de laict, & de sel à discretion ; car il en faut peu : détrempez bien cette farine ou appareil comme si c'estoit pour faire de la boüillie : & lors que l'appareil sera bien délié, adjoûtez une chopine de laict qu'il faudra bien délayer avec les choses susdites, comme si o naoit dessein d'en faire de la boüillie : & si vous n'aviez pas de laict de vache ny d'aucun autre animal, on pourra se servir de laict d'amandes, & en ce cas il faudra mettre un peu lus de farine.

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L'appareil estant appresté, on mettra unabesse dans une tourtiere, & la tourtiere estant au four, vous la remplirés suffisamment de l'appareil susdit : on fera cuire cette piece de fur : & lors qu'elle sera cuite & tirée hors du four, on fendra en croix le dedans sans toucher à la crouste, puis on mettra dans la fente de la dariole environ la grosseur d'une grosse noix de bon beurre non salée, un bon demy quarteron de sucre en poudre avec un peu d'eau rose : remettez en suitte dans le four vostre dariole, afin que le beurre & le sucre se fonde, & que cette pastisserie en prenne le goust, ce qui est fait en peu de temps, puis on la tirera hors du four. Que si vous n'avez pas de tourtieres il faudra prendre un mourceau de paste qui ne soit pas si fine pour en dresser une crouste assez grande en forme d'une tarte : donnez luy environ deux bons travers de doigts de bord.

Mettez cette crouste à l'air durant quelque temps, afin qu'elle se seche & se rafermisse : puis quand on voudra achever la dariole, on metta dans le fond de cette crouste gros comme unepetite noix de beurre non salé : mettez cette crouste

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dans le four afin qu'elle se raffermisse, puis on y versera environ une quatriesme partie de ce qu'il faudroit de la farce[3] susdite pour remplir cette tarte ou dariole, & un peu apres vous y verserez encore autant : puis quelque temps apres, on achevera de la remplir suffisamment du mesme appareil ou farce susdite.

Il faut environ une bonne demie heure pour cuire une dariole ou tarte d'une chopine de laict.

Lors que cette dariole sera cuite, vous pourrez y adjoûter du beurre, du sucre, & de l'eau rose, suivant qu'il a esté dit cy-dessus, sinon vous la poudrerez simplement avec du sucre & un peu d'eau rose.

Chapitre XIII.

La maniere de faire des thalemouses.

PRenez par exemple gros comme les deux poings de fromage mol qui soit frais fait & non escresmé, une bonne poignée de fleur de farine, le blanc & le jaune d'un œuf, du sel à discretion : vous

[3] force

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pouvez y adjoûter environ gros comme un œuf de fromage affiné qui soit sec & haché menu, ou raspé avec la raspe : meslez ces choses ensemble, enfermés cet appareil dans une abesse de paste fine, & vous luy donnerez la forme d'une thalemouse qui a trois cornes, dorez la thalemouse & la mettez au four.

Remarquez qu'il ne faut pas remplir entierement les thalemouses, parce que l'appareil qui est dedans se renfle & s'&coulroit dehors en cuisant.

CHAPITRE XIV.

La maniere de faire un gasteau mollet excellent dans une tourtiere.

PRenez deux petits fromages à la cresme qui soient  frais faits & sans sel : ils pesent chacun environ …… mettez les dans une scuelle ou petit bassin, & les échachez avec une cueillere, puis vous y adjoûterez prés d'un bon quarteron de bon beurre non salé qui soit fondu ; adjoûtez y en suitte le jaune & le blanc de trois ou quatre œufs qu'il faudra incor-

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porer l'un apres l'autre dans cet appareil, & vous y meslerez peu à peu trois petites cueillerées de fleur de farin ou de mie de pain blanc qui soit bien desliée, ou gros comme un petit œuf de biscuit raspé bien menu, adjoûtez-y un macaron escrasé bien menu, & deux ou trois cueillerées comble de sucre en poudre, c'est environ une once de sucre : assaisonnez cet appareil avec un peu de sel bien menu : il fait en suitte gouster de cette farce, pour voir si elle est assez salée : il faut peu de sel, & que cette farce soit à peu pres de la consistance de la boüillie qu'on donne aux enfans : & si vous jugez que cette farce soit trop espoisse, on pourra y mésler une petite cueillerée de laict ou d'eau pour la rendre plus coulante.

Lors que cette farce sera assaisonnée, il faudra graisser le dedans d'une tourtiere avec un petit morceau de beurre frais, puis on versera dans cette tourtiere de la farce susdite, jusques à ce qu'il y en ait par tout environ l'époisseur d'un travers de doigt.

Remuez un peu la tourtiere, afin que la farce se repande esgalement dedans : puis on mettra la tourtiere dans le four 

273

ou sur la braise, & en ce cas il faut couvrir la tourtiere avec un couvercle sur lequel faudra mettre de la cendre chaude, & aussi de la braise, & vous ferez en sorte qu'il n'y en ait pas plus en un endroit qu'en l'autre.

Si la tourtiere est couverte, on la descouvrira de fois à autre, afin de voir si le gasteau se cuit, & prend plus de couleur en un endroit qu'en l'autre, il faudra oster une partie de la braise qui est au droit de la partie du gâteau trop colorée.

Que si ce gasteau renfle beaucoup pendant qu'il cuit, de sorte qu'il touche au couvercle de la tourtiere couverte, c'est signe qu'il y a trop de feu, ou que ce gasteau est trop espois ; c'est pourquoy vous diminuerez le feu, ou vous retirerez un peu la tourtiere hors du feu, & la tenez descouverte un petit de temps pour donner de l'air au gasteau, afin qu'il se rabaisse : puis on recouvrira la tourtiere avec son couvercle garny d'un peu de braise, & vous remettrez la tourtiere sur la cendre chaude pour acever de faire cuire ce gasteau. Il faut environ trois quarts d'heure pour faire cuire à loisir un de ces gasteaux.

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Lors qu'il sera cuit suffisamment, on le mettra sur une grande assiette, poudrez le de sucre par dessus : il est bon chaud & froid,

Si vous faites cuire ce gasteau dans un four, il ne faut point couvrir la tourtiere, il cuira plus facilement, & vous pourrez le faire plus espois : par exemple on pourra luy donner l'époisseur d'un bon poulce ou un peu plus à proportion de la hauteur du bord de la tourtiere.

Remarquez qu'on peut adjoûter dans l'apareil ou farce de ce gasteau deux onces d'amandes douces pelées & bien pilées au lieu d'un macaron, vous pouvez aussi y mettre une once de bon pignon pilé grossierement : principalement si on ne met point de macaron dans cet appareil, on peut aussi y adjoûter un peu d'escorce de citron ou paste d'abricot, ou d'autre cofiture seiche semblable : mais ces ingrediens ne sont point necessaires : parce que ce gasteau ne laissera pas d'être excellent encore qu'il n'y ait ny amandes, ny pignons, ny escorce de citron confite, & outre qu'il sera plus aisé à faire.

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II.

Gasteau mollets sans fromage.

MEttez sur une table ou dans un bassin, ou dans une jatte de bois environ deux litrons de fleur de farine, faites une fontaine dans le milieu, c'est à dire un trou assez grand dans le milieu de la farine, dans lequel trou vous mettrez environ une livre de beurre frais battu qui ne soit pas salé : on peut manier ce beurre avec les mains pour le ramoüillir, s'il est trop ferme : mettez encore avec le beurre environ une chopine de cresme de laict selon la mesure du vin non pas à la mesure du laict, parce qu'il y en auroit trop ; adjoûtez-y pres d'une once de sel éscrasé, cassez-y aussi quatre œufs frais.

Remarquez qu'il ne faut pas mettre toute la cresme de laict en une seul fois car il suffira que d'abord vous y en versiez environ la moitié ou les deux tiers de la chopine.

Meslez & maniez bien ensemble toutes ces choses, y remettant de fois à autre de la cresme de laict pour bien détremper cét appareil, jusques à ce que l'on ne

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sente plus de grumeaux ou duretez dans la paste, & que la paste soit assez ferme pour se soustenir en forme de gateau sur du papier, sans s'estendre & s'escouler beaucoup ça & là : & lors qu'on l'aura estenduë en façon d'un gasteau[4].

Quand donc vous jugerez que cette paste sera paistrie suffisamment il faudra en gouster, afin de juger si elle est de bon sel, puis on la mettra par morceaux ou poignées sur du papier graissé de beurre.

Dressez vos gasteaux, & leur donnez environ le travers d'un poulce ou un peu plus d'espoisseur, & les faites de la grandeur d'un moyenne assiette plus ou moins selon vostre desir, puis on les dorera par dessus.

Mettez au four ces gasteaux : il faut environ trois quarts d'heure pour les cuire suffisamment.

L'âtre du four doit estre chaud à peu pres comme pour cuire du pain Bourgeois, ou autre, de grosseur mediocre : que si le four n'est pas assez chaud, les gasteaux ne prendront pas de couleur, & au contraire, si le four est trop chaud les gasteaux ne cuiront pas bien dedans.

[4] gosteau

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III.

Autre gasteau mollet sans fromage, qui doit estre fait dans une tourtiere.

MEttez dans un pot de terre ou dans une grande escuelle un litron de fleur de farine, delayez-y huict oeufs, & une cueillerée de bonne leveure de biere puis on y adjoûtera une bon quarteron ou un petit plus de beurre que l'on aura fait fondre sur le feu avec un posson de laict.

Meslez bien cet appareil & l'assaisonnez de sel escaché : gousté de cet appareil, & s'il est assez salé, il faudra le couvrir avec un linge chaud, & le mettre pres le feu, en sorte qu'il ne sente qu'un peu de chaleur douce : laissez les pres le feu environ une heure, afin que cette farce se renfle & leve.

Lors que cet appareil se sera renflé, on le fera fondre dans une tourtiere assez grande environ un demy quarteron assez moins de bon beurre non salé, puis vous y verserez l'appareil ou farce, puis on couvrira la tourtiere de son couvercle : mettez du feu dessous & dessus, & faites cuire ce gasteau.

Il faut environ trois quarts d'heure

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ou plus pour faire cuire en perfection un de ces gasteaux.

Lors que le gasteau sera cuit, on peut le manger sans y faire d'autre façon : ou bien aussi-tost que ce gasteau sera cuit & tiré hors de la tourtiere, on separera le dessus d'avec le dessous en le coupant avec un cousteau, ou avec un fil par le milieu de la mie, & vous renverserez le dessus, afin d'arroser la mie du gasteau avec de bon beurre fondu qu'il faut verser dedans, puis vous y adjousterez du sucre en poudre, & un peu d'eau rose ou d'eau de canelle : puis vous remettrez les deux moitiés du gasteau l'une sur l'autre, & on laissera reposer ce gasteau quelque temps prés le feu, en sorte qu'il ne se morfonde pas avant que de la manger.

Remarquez que ce gasteau est bien espois c'est pourquoy on peut oster une partie de la mie, & n'y laisser que les deux croustes garnies d'un peu de mie en façon d'un poupelin.

279

IV.

Autre gasteau mollet sans fromage, lequel gasteau les Flamans nomment du pain aux œufs.

MEttés dans un bassin ou sur une table deux litrons de fleur de farine, cassés-y deux œufs ; adjoûtés-y une demie livre de beurre frais que vous aurez fait fondre & chauffer sur le feu avec un posson de laict : mettez aussi dans cét appareil plein une cueillere d'argent de bonne leveure de biere qui soit espoisse, & plustost plus que moins, & du sel à discretion.

Il faut bien mesler manier toutes ces choses ensemble pour reduire en paste bien liante, & en paistrissant cette paste on la poudrera de fois à autre avec un peu de farine.

La paste estant paistrie en perfection sera ferme : & lors vous la tournerez en façon d'un pain, & la poserez sur une fueille de papier, puis vous la couvrirez d'une serviette bien chaude.rop proche du feu se durciroit.

Il faut mettre cette paste essés pres du feu, sans toutefois qu'elle en soit trop pres, parce que le costé qui seroit t

280

Vous laisserez cette paste à a chaleur douce, jusques à ce qu'elle soit levée suffisamment : il faut environ cinq quarts d'heures pour la faire lever : & lors qu'elle sera assés levée, & qu'elle commencera à s'écailler ou se fendre un petit, vous la formerés en façon d'un gasteau qu'il faudra dorer par dessus, puis vous mettrez ce gasteau au four.

L'âtre du four doit estre chaud à peu prés comme pour faire cuire du pain de grosseur mediocre,

Il faut environ une demie heure ou trois quarts d'heure pour le cuire : & lors qu'il sera tiré du four, vous pouvés le poudrer de sucre & de quelques gouttes d'eau rose, avant que de le servir sur la table : ce qui n'est pas necessaire.

V.

Un gasteau à la Dame Susanne.

MEttez sur une table trois quarterons de fleur de farine, faites-y un creux, dans lequel on mettra huict jaunes d'œufs & deux blancs d'œufs, & une demie once de sel écaché ; adjoûtés-y trois bon quarterons de bon beurre frais que vous aurez fait fondre dans une escuelle sur le feu avec un posson de laict

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ou plûtost de cresme de laict : il faut que ce laict & le beurre soit bien chaud, & qu'il boüille quasi lors qu'on le met dans l'appareil, & mettre aussi ce qui sera dans le fond de l'escuelle.

Maniez bien ensemble toutes ces estoffes jusques à ce que cette detrempe ou paste soit quasi refroidie, puis on la laissera refroidir une bonne demie heure, afin qu'elle se rafermisse, & en attendant on fera le levain suivant : commencez à faire un bon quart d'heure apres que la paste sera apprestée, pour faire ce levain.

Vous mettre sur la table un quarteron de fleur de farine, faites y une fontaine, & y mettrez un demy quarteron de bonne leveure qui soit espoisse ; adjoûtez y un peu de laict ou de cresme qui soit chaude tant qui soit assez pour reduire ces estoffes en paste bien liante & assez mollette, en les maniant bien sur la table : & quand cette paste sera suffisamment pasitrie, vous la tournerez en façon d'un petit pain, & la laisserez reposer en cet estat environ un demy quart d'heure ou jusques à ce que ce levain soit assez renflé, & commence à se crevacer ou s'écailler par dessus, & il ne faut

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que tenir ce levain en un lieu un peu chaud.

Dés que le levain commencera à ce fendre ou s'escailler par dessus, vous le meslerez avec la paste susdite : maniez les bien ensemble, puis vous moulerez toute cette paste, faites en comme un pain, mettez-la sur une fueille de papier, & la former en façon d'un gasteau, & luy donnez la hauteur d'un bon poulce & le dorez, & le laissez reposer environ une bonne heure si c'est en Esté : & en Hyver deux bonnes heures, & le mettez en un lieu qui ne soit pas froid.

Lors que ce gasteau sera prest à mettre au four, vous façonnerés le bord, & dechiqueterez profondement le dessus avec la pointe d'un cousteau, & que le coustau entre avant dans le gasteau, & en mesme temps on le mettra au four : il faut luy donner la chaleur assés douce, & le laisser cuire à loisir, il sera cuit dans une petite heure : ne le retirez pas qu'il ne soit bien ressuyé par dedans, afin qu'il ne se rompe pas.

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VI.

Gasteaux mollets, au fromage.

PRenez gros comme les deux poings de fromage frais fait qui ne soit pas écresmé, assaisonnez le de sel escaché menu : mettez-y aussi une demie livre de bon beurre non salé, cassez-y deux œufs : si le fromage est un peu essuyé, c'est à dire un peu sec, & par consequent moins humide qu'il ne devroit estre pour faire ces gasteaux, il faudra mettre un peu d'eau dans cet appareil pour ayder à la lier, il faut aussi adjoûter pres d'un litron de fleur de farin, & manier bien toutes ces choses ensemble avec vos mains pour les bien mesler : & lores que cet appareil sera prest, il faudra graisser une fueille de papier, & coucher la paste sur icelle pour en former un gasteau, auquel vous donnerez l'espoisseur de deux travers de doigt : dorés le par dessus & le mettrés au four, il pourra estre cuit en moins d'une demie heure.

VII.

Un gasteau verollé.

FAites de la paste comme nous avons dit, pour le gasteau mollet au fromage, estendez-là sur le papier en forme

284

d'un gasteau, & luy donnez l'époisseur de deux bons pouces, puis avec les mains il faudra relever court le bord grossierement tout au tour, la hauteur de trois doigts, comme si vous aviez dessein de dresser une tarte : pressez un peu avec la main le milieu de ce gasteau.

Lors vous prendrez environ un quarteron de fromage affiné suivant vostre goust : coupez-le par morceaux qui soient gros environ comme de petits dez : il faudra les mettre sur le gasteau, & en les taillant dessus il faudra les presser ou aplatir avec la main pour les faire entrer tant soit peu dans le gasteau : il faut aussi ensuite mesler parmy ces morceaux de fromage environ un bon quarteron de bon beurre non salé, qui soit coupé en petits morceaux, & y adjoûter un œuf battu, puis relever & rejetter dedans le bordage du gasteau.

Ce gasteau doit estre cuit dans une demie heure ou environ, & luy donner l'âtre comme à d'autres pieces de four.

Ceux qui aiment bien le fromage, font faire ces gasteaux doubles, & pour cét effet on fait deux abesses espoisses du travers de doigt, & sur celle de dessous, on

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y faict un lict de formage fin billeté, puis on met l'autre abesse par dessus, on les joint ensemble, & on achevera ce gasteau comme nous avons dit cy-dessus.

VIII.

Un gasteau de Milan.

MEttés sur une[5] table un litron & demy de fleur de farine, faites un creux au milieu, & y mettez une livre de bon beurre qui ne soit pas salé ny dur, cassez-y aussi deux ou trois œufs ; adjoûtez-y la grosseur du poing de bon fromage mol non escremé qui soit frais fait, & du sel pour assaisonner cét appareil ; lequel il faudra bien manier, & le reduire en paste en y adjoûtant un peu d'eau.

Lors que cette paste sera maniée suffisamment, vous l'estendrez en forme de gasteau sur du papier qui soit graissé de beurre : il faut donner à ce gasteau environ l'espoiseur de deux bons poulces : vous pouvez aussi façonner le bord, dorez vostre gasteau par dessus une fois ou deux, & le rayez aussi avec un cousteau, on peut aussi le piquer par endroits.

Il pourra estre cuit suffisamment en une bonne demie heure.

Que si vous desirez que ce gasteau

[5] ne

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soit bien sec & grugeant, il faut le laisser ressuyer bien à point dans le four.On fait les gasteaux des Rois comme ceux de Milan, mais on les fait moins fins : & si les Pastissiers y mettent de la leveure de biere.

IX.

Un gasteau aux amandes.

MEttez sur une table, par exempe un bon litron ou un petit plus de fleur de farine, faites un creux au milieu, & y mettez pres d'une demie livre de sucre en poudre, estendées ce sucre dans ce creux ; adjoûtez y une demie livre d'amandes douces pelées & battuës, ou pilées dans un mortier de marbre ou de pierre : mettez y aussi un quarteron & demy de bon beurre non salé ; adjoûteés y un péu de sel menu, c'est à dire environ la grosseur d'une petite noisette, & deux ou trois jaunes d'œufs & un[6] peu d'eau rose.

Maniés ensemble toutes ces choses, & si la paste vous semble trop dure, vous y adjoûterez un peu d'eau rose qui soit bonne.

Lors que cette paste sera preparée, il faudra l'estendre uniment en forme de

[6] ub

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gasteau sur du papier qui soit graissé de beurre donnez environ l'époisseur d'un bon poulce à ce gasteau, le rayez par dessus comme si vous vouliez y marquer un certainn ombre de part.

On dore quelque fois ce gasteau par dessus : mais il vaut mieux le mettre au four sans le dorer.

Il faut luy donner un feu doux, & au bout d'une heure ou un peu plus, il sera cuit & ressuyé suffisamment.

Lors vous le tirerez hors du four, & si ce gasteau n'est point doré, il faudra le glacer de sucre, & pour cet effet, aussitost qu'il sera cuit & tiré hors du four, il faudra aussi-tost estendre dessus de la glace de sucre, & qu'elle ne soit pas plus espoisse qu'une fueille de papier : puis vous le remettrez un peu de temps à l'entrée du four pour seicher sa glace, & sera fait.

Et aussi-tost qu'il sera hors du four, on peut piquer sur le gasteau de canila un peu haut, & des morceaux d'escorce de citron confite qu'il faut piquer promptement pendant que la glace est chaude.

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X.

Un gasteau fueilleté.

EStendez de la paste füeilletée sur du papier qui ne soit pas gras : donnez à cette paste environ l'espoisseur du travers d'un doigt ou d'un poulce, & coupez cette paste tout autour avec un cousteau ; afin de l'arondir en forme de gasteau : dorez le par dessus, & le mettez au four, il sera cuit & ressuyé dans l'espace d'une heure ou environ.

Chapitre XV.

La maniere de faire une flamiche.

MEttez sur une table bien nette environ une livre & demie de bon fromage gras un peu salé, qui soit fait depuis quelques jours, comme de deux ou trois jours, ou depuis dix ou douze jours au plus : escachez ce fromage avec vos mains ou avec un bistortier, & le maniez jusques à ce qu'on ne sente plus de grumaux : & lors vous adjoûterez une livre & demie de bon beurre non salé, deux onces de sel ou environ qui

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soit escrasé, huit ou neuf œufs : maniez ensemble toutes ces choses jusques à ce qu'elles soient bien liées, comme si c'estoit de la paste bien molle ou de la farce : & lors il faut l'estendre sur la table, & verser parmy environ un verre d'eau froide afin de détremper ou déslier d'avantage cette farce & la rendre plus claire, quasi comme si c'estoi des œufs battus.

Lors vous prendrez environ un quart de fleur de farine, respandez-en sur ladite farce environ les deux tiers qu'il faut mesler & incorporer avec cette farce : puis on y adjoustera encore quasi tout le reste de la farine à la reserve d'une ou deux poignée.

L'appareil estant reduit en paste bien liée, il faudra poudrer cette paste avec un peu de farine & la manier doucement deux ou trois fois en l'espace d'un bon demy quart d'heure, puis il faudra estendre un peu cette paste une ou deux fois avec le bistortier, puis on la remettra en masse, & on la laissera encore reposer & l'apprester environ l'espace d'un demy quart d'heure au plus : & lors on roulera en long cette paste, coupez-là pour en faire des gasteaux de telle figure

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& de telle grandeur qu'il vous plaira, & leur donnez l'époisseur de deux ou trois travers de foigts ou plus moins à proportion de leur grandeur. On mettra ces gasteaux sur du papier graissé avec un peu de bon beurre, puis on les façonnera tout autour du bord : rayez aussi & piquez le dessus, & le dorez, puis on fera cuire ces gasteaux.

Il faut environ une demie heure pour les cuire en perfection : ils demandent l'âtre chaud a peu prez, comme pour faire cuire du pain de grandeur mediocre : tenez le four bouché, afin de leur donner plus de couleur : regardez de fois à autre aux gasteaux pendant qu'ils sont au four, afin d'empescher qu'ils ne soient burslez, & les faites cuire à loisir ; c'est pourquooy il ne faut pas leur en donner la chaleur trop aspre ; ne retirez point ces gasteaux lors du four, qu'il ne soient ressuyez suffisamment.

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CHAPITRE XVI.

La maniere de faire un poupelain.

PRenez environ gros comme le poing de fromage à petits choux, ce sont des fromages non ecresmés qui sont faits du jour mesme : mettez ce fromage dans une scuelle, & le deliez bien, y adjoûtant quelque pincé de fleur de farine ; cela estant fait, il faudra casser deux œufs dns cet appareil, mettez-y aussi une bonne poignée de fleur de farine, & un peu de sel escrasé : puis il faudra delayer toutes ces choses ensemble avec la gâche de bois.

Lors que cet appareil sera prest, vous le mettrez sur du papier graissé de beurre : estendez-le en forme de gasteau, & luy donnez environ l'espoisseur du travers d'un doigt, puis vous le mettrez au four, & faut que l'âtre du four soit chaud : cette piece de four sera cuite dans une demie heure, puis il faudra la retirer du four, & l'ouvrir en deux pour separer les deux croustes entieres l'une

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d'avec l'autre puis vous les mettrez separement l'une apres l'autre dans une bassin ou autre vaisseau commode, dans lequel il y ait une quantité suffisante de bon beurre fondu & non salé : & faut que ce beurre soit rafiné, comme il sera dit cyapres.

Il faut plonger la crouste de dessous la premiere, & un peu apres la retirer & la laisser égoutter, puis il faudra plonger dans le mesme beurre la crouste de dessus du poupelain.

Lors que ces deux croustes, seront egoutées, il faudra les bien poudrer de sucre dessus & dessous, & les arroser par dedans avec un peu d'eau rose, vous pouvez aussi garnir le dedans de la crouste de dessus, avec de petites tranches d'escorce de citron, puis vous la couvrirez de sa crouste de dessus qu'il faudra bien sucrer, puis vous remettrez le poupelain à l'entrée du four afin que le sucre esglace, & aussi pour tenir chaudement le poupelain jusques à ce que vous desiriez le manger.

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CHAPITRE XVII.

La maniere de raffiner du beurre.

FAites fondre du beurre frais, & le laissez boüillir doucement sur du feu clair jusques à ce qu'il devienne clair, & que le formage soit tombé au fond : & lors on retirera le vaisseau hors du feu ; laissez refroidir à demy le beurre afin que toute l'rodure tombe au fond, ou qu'elle s'amasse avec l'esume : puis il faudra escumer le beurre exactement, & le verser en suite dans des pots pour vous en servir quand il vous plaira.

CHAPITRE XVIII.

La maniere de faire des petits choux.

IL faut faire la paste des petits choux comme celle du poupelain, il faut seulement la faire un peu plus forte de farine.

La paste estant faite, il faudra en cou-

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cher separement sur du papier graissé de beurre environ la grosseur d'un œuf, plus ou moins, faites-les rondes & les dorez un peu doucement, puis vous les mettrez au four.

Il faut que l'âtre du four, & le four, aussi soit chaud de bonne sorte.Lors que les petits choux seront cuits, vous pourrez les couper par la moitié, & les plonger dans du beurre, puis les accommoder comme nous avons dit du poupelain.

Ou bien vous pouvez couper par morceaux des petits choux, & les mettre dans une escuelle avec un peu de beurre non salé & de l'eau rose, faites les chauffer & les mangez.

CHAPITRE XIX.

La maniere de faire des gauffres au sucre.

CAssez trois œufs dans un bassin, adjoûtez-y un quarteron de sucre en poudre : les battez ensemble, puis vous y mettrez la pesanteur d'un quarteron de fleur de farine ou un peu plus : détrem-

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pez ensemble toutes ces choses, puis vous adjoûterez un demy quarteron de bon beurre non salé qui soit fondu, & delayés bien dans l'appareil avec un gache ou cueillere : & si vous jugez que l'appareil soit trop foible, c'est à dire trop clair, il faudra y adjoûter un peu de sucre & de farine pour l'espoissir.

Quand cét appareil sera prest, il faudra faire chauffer le gauffrier des deux costez, & ne pas le chauffer jusqu'à ce qu'il fume, parce qu'il seroit trop chaud, & brûleroit les gauffres.

Lors donc que le gauffrier sera chaud suffisamment, il faut l'ouvrir, & mettre dedans environ la grosseur d'une petit œuf de vostre paste qu'il faut estendre un peu long, puis vous fermerez doucement le gaufrier, & le mettrez sur le feu & le retournerez un peu apres sur l'autre costé, afin que la gauffre soit cuite des deux costez, puis vous la leverez bien doucement hors du gauffrier, & vous couperez promptement les baveures, c'est à dire les bords.

Si ces gauffres tiennet au gauffrier, c'est pourquoy il faudra y mesler un peu de farine & de beurre, & aussi un œuf.

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Ces gauffres sont meilleures froides que chaudes.

II.

Gauffres au laict, ou à la cresme.

MEttez un litron de farine dans un bassin, cassez deux ou trois œufs, & les deslayés ensemble en y adjoûtant de la cresme de laict ou du laict, & une pincée de sel, adjoûtez y aussi la grosseur de deux œufs de fromage à la cresme qui soit frais fait, ou seimplement du fromage mol non escremé, & un quarteron de bon beurre qui soit fondu, quand bien vous ne mettriez qu'un demy quarteron de beurre, ce seroit assez, pourveu que vous y mettiez un demy quarteron de bonne moësle de beouf escrasée bien menu.

Meslez bien toutes ces choses ensemble, & lors que cét appareil sera bien lié, il faudra mettre les fers au feu, & faire des gauffres.

Ces gauffres doivent estre mangées lors qu'elles son chaudes.

III.

Gauffres au fromage fin.

MEttez un litron de fleur de farine dans un bassin, cassez y deux œufs, adjoûtez-y un quarteron de beurre qui

297

soit fondu, gros comme un œuf de fromage mol, & gros comme deux ou trois œufs de fromage fin, billeté, c'est à dire qui soit coupé en petits morceaux, gros comme des gros poix, adjoutez y aussi un peu de sel escrasé.

Il faut mesler toutes ces choses ensemble, & les reduire en une paste qui soit un peu molle : & si elle estoit trop ferme, il faut y adjoûter en la maniant un peu d'eau froide, plûtost un peu de laict, ou de la cresme de laict.

Fraisez ou maniez bien ces choses jusqu'à ce que vous ayez donné une bonne consistance à vostre paste.

Lors vous mettrez le gauffrier au feu, & vous le chaufferez suffisamment des deux costez, & en atendant il faudra prendre un morceau de vostre paste, & l'aplatir en façon d'une abesse, qui soit quasi aussi grande que le gauffrier, & qui ne soient pas plus espoisses qu'une piece de cinquante huit sols, & qui soient plus longues que large ; & quand les fers du gauffrier seront assez chaud, il faudra mettre dans le gaufrier une de ces abesses, fermer le gauffrier & faire cuire la gauffre des deux costez.

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Il faut manger ces gauffres lors qu'elles sont encore chaudes, plûtost que d'attendre qu'elles soient refroidies.

Si vous craignez que le fromage fin s'attache au gauffrier, vous n'en mettrez point dans l'appareil de ces gauffres, mais lors que vous en aurez dressé de petites abesses pour en faire des gauffres, vous mettrez sur icelles du fromage fin coupé par petits morceaux, il en faut environ la grosseur d'une grosse noix, ou deux petites noix pour une gauffre, mettez ces petits morceaux de fromage le long du milieu de ces petites abesses, & l'enveloppez dans l'abesse, puis vous la coucherez dans le gauffrier, pour la faire cuire d'un costé & d'autre, & retournant le gauffrier lors qu'il sera besoin.

IV.

Autre maniere de gauffres excellentes.

PRenez une pinte delaict, & les faites chauffer un peu plus que tiede dans un petit chauderon, puis vous mettrez deux livres ou un peu moins de fleur de farine dans un bassin d'estain ou autre vaisseau, puis on délayera la farine avec le laict un peu chaud.

Il faut aussi mettre demy quarteron

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de jaune d'œufs dans une écuelle & les bien battres, & puis les mesler doucement dans la susdite paste, avec une grande cueillere de bois.

Il faut auparavant que de mettre les œufs, délayer dans la paste une demy cueillerée d'égout de bonne leveure, c'est à dire de la leveure qui soit espoisse.

En suite de toutes ces choses, on adjoûtera encore dans la paste trois bons quarterons de beurre frais qu'on aura fait fondre dans un poëslon, & lors qu'il commencera à boüillir, on le versera dans la paste, adjoûtez-y une petite demie poignée de sel menu.

Remarquez, que depuis que les œufs sont dans la paste, il ne faut plus guere remuër l'appareil, & le remuër legerement, parce que les gauffres seroient moins legerez si on remuoit beaucoup & rudement cét appareil depuis que les jaunes d'œufs y sont.

Il faut mettre cét appareil au coin du feu, & le couvrir chudement, jusqu'à ce qu'il soit levé ou renflé, & quelques fois il faut bien deux heures pour faire lever ou bouffer cét appareil, ce qui depend de la bonté de la leveure.

300

Quand la paste sera bien boursoufflée, on fera chaufer le gauffrier, puis on le frotera de beurre, puis on y mettra de la paste avec la cueillere de bois, & à mesme temps qu'on a mis la paste il faut fermer le gauffrier, le retourner, & le mettre sur le feu, & quand on jugera que la gauffre ou paste sera cuite d'un costé, vous retournerez le gauffrier sur l'autre costé.

Faites cuire ces gauffres, avec discretion sur une petit feu clair, & que le gauffrier soit appuyé sur un trepied.

CHAPITRE XV.

La maniere de faire des beignets ou beignet.

PRenez un litron de fleur de farine, adjoutez-y trois petis fromages à la créme, c'est à dire environ …. de fromage non écresmé qui soit fait du jour mesme, cassez-y environ trois œufs, & environ la groseur d'un œuf de moëlle de bœuf, rapée ou achée bien menu, détrempeztout cét appareil & le meslez bien, en y adjoutant environ

1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (301-350)

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un demy septier ou tout autant de vin blanc qu'il en sera besoin, assisonnez cet appareil d'une pincée de sel meu, & d'une once de sucre en poudre, & il faut que cét appareil ou paste soit époisse environ comme de la boüillie qu est cuite ; vous pouvez lors y adjouter de la pomme coupée par tranches, ou de l'escorce de citron qui soit raspée coupée par petits morceaux.

Lors que cét appareil est prest, il faudra faire chauffer du sain doux, ou du beurre, ou de l'huile, & quand il sera chad suffisamment, vous broüillerez vostre ppareil avec une cueillere, prenez en suffisamment dans la cueillere, & le versez dans le sain doux.

Aussi-tost que les beignets seront cuits, il faudra les tirer hors de la poësle, & les faites égouter, puis les mettre dans une escuelle, les poudrer de sucre si bon vous semble, & les arroser de quelques gouttes d'eau rose, ou d'eau de fleur d'orange.

Remarquez que vous pouvez faire plus ferme l'appareil ou farce de vos beignets & la reduire en forme de paste molle, en y mettant moins devin, & cette

302

paste servira à faire des pets d'asme ; c'est à dire qu'au lieu de faire des beignets communs, vous diviserez votre paste en petits morceaux ronds qui soient gros comme de petites noisettes, & vous les mettrez cuire dans le sain doux ou beurres, ou huiles jusqu'à ce qu'il soient rissolez.

II.

Autre façon de beignets que l'on applle des Tourons.

FAites cuire du ris avec du laict, ou avec de l'eau, il faut qu'il soit assez espois, & lors qu'il sera refroidy, vous le pilerez, eny adjoûtant si bon vous semble, des amandes douces pelées : qu'il faut aussi piler.

Mettez cét appareil dans un escuelles, adjoûtez-y la moitié autant ou environ de fleur de farin, quelques œufs cruds, un peu de sel menu, & du vin blanc ou du laict à discretion : meslez bien ensemble toutes ces choses, & les reduisez en façon d'une farce ou boüillie ou paste qui ne soit, trop ferme ny trop molle, vous pouvez y meslez du raisin de Corinthe, & de l'écorce de citron raspée.

303

Lors vous ferez chauffer du sain doux, ou du beurre, & lors qu'il sera caud suffisamment, vous prendrez de cét appareil dans une cueillere mediocre, & vous le verserez dans la poësle.

Faites cuire ces beignets de deux costez : & pour cét effet, vous les retournerez dans la poësle l'un apres l'autre, & lors qu'ils seront cuits, il faudra les tirer à sec & les faire égouter, puis les mettre dans un plat, & les poudrer de sucre avant que de les manger.

III.

Autres beignets.

PAistrssez de la farine avec de l'eau & du sel, faites vostre paste modérément ferme, estendez-là avec un rouleau, coupez-là par petits morceaux carrez, ou de telle autre figure qu'il vous plaira, puis vous les frirez dans du beurres ou dans du sain doux ou de l'huile.

Et lors que vous les aurez tirez à sec, vous pourrez les poudrer de sucre, ou bien vous les employerez à garnir un plats d'espinards, ou des poix, ou un costé découvert de poisson, ou sur quelque autre metz.

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CHAPITRE XVI.

La maniere de faire des rissolles.

PRenez de la chair de bœuf, ou de mouton, ou de porc, ou de veau, qui soit rostie ou boüillie, hachez bien menu, & l'assaisonnez d'un peu d'episse salée : puis vous ferez de petites abesses de paste blanche à demy fine, dans lesquelles vous enfermerez un peu de cette chair hachée : & lors que vos rissoles seront façonnées, il faudra les frire dans du sain doux qui soit chaud comme pour faire des beignets : quand la crouste paroist jaune d'un costé dans le sain doux, vous retournerez les rissoles de l'autre costé avec un petit bastons sans le crever, & quand elle seront rissolées des deux costez, il faudra les tirer à sec avec un escumoire ou cueillere percée.

II.

Rissoles fueilletées plus delicates.

PRenez de bonne viande boüillie, ou plûtost qui soit rôtie si elle n'est pas tout-à fait cuite, elle en sera meilleure :

305

par exemple du blanc de volaille, ou de la roüelle de veau : s'il y a quelque peau grossiere, il faudra l'oster, puis hacher la viande, & la mettre dans une escuelle, avec un peu d'épisse salée, ou raisin de Corinthe, du pignon, du sucre à discretion, & un petit d'eau rose, meslés ensemble toutes ces choses.

Lors il faudra dresser de petites abesses de paste fueilletée, & leur en donner l'espoisseur d'un quart d'écu : envelopez dans châque abesse environ gros comme un petit œuf ou une noix, plus ou moins comme il vous plaira de vostre appareil, & formés vos rissoles, dorés les, & les mettrez au four sur du papier.

Ces rissoles veulent cuire à feu doux comme pour cuire une tarte, laissez les cuire à loisir, il faut environ demie heure pour les cuire si elles sont petites.

Quand ces rissolesseront presque cuittes, & que la crouste a pris couleur, il faudra les tirer hors du four & les poudrer de sucre par dessus, puis les remettre quelque peu de temps dans le four pour achever de les faie cuire, & pour faire glacer le sucre.

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CHAPITRE XVII.

La maniere de faire des casse-museaux.

IL faut prendre des morceaux de moëlle de bœuf qui soient longs, chacun s'il est possible, environ de la longueur du poulce, eschaudez les dans de l'eau presque boüillante, puis il faudra les tirer hors de l'eau avec une cueillere percée, & les faire égouter un peu, puis les arranger sur une table, & les poudrer tous le plus que vous pourrez les charger de sucre en poudre qui soit assaisonné d'un peu d'épisse salée ou d'un peu de sel & de canelle en poudre.

Lors vous dressez promptement de petites abesses de paste fueilletée bien mince : garnissez un des bouts d'un morceau de moesle qui soit de la longueur du poulce, & s'il est besoin vous y adjoûterez encore du sucre assaisonné comme il a esté dit, puis vous renversez sur cette moesle l'autre bout de l'abesse, moüillez un peu les bords de la paste, afin que vous puissiez les joindre l'un avec l'autre plus facilement.

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Lors que vos casse-museaux seront faits, il faudra les frire dans du beurre, ou dans du sain doux, & les pas éfondrer en retournant, & quand ils seront frits, il faudra les tirer hors de la friture avec une cueillere percée, puis les poudrer de sucre, & les manger incontinent.

II.

Autre casse-museaux.

PRenez du fromage mol non écresmé qui soit frais fait, ou bien du laict caillé, & du fromage sec découpé bien menu, des œufs cruds, un peu de farine fine ou plustost de la cresme de Pastissier, du raisin de Corinthe, & du pignon, du sucre assaisonné d'épisse salée, ou seulement de l'épisse salée : vous pouvez aussi y mettre un peu de viande cuitte qui soit hachée bien menu, meslez ensemble toutes ces choses, & en faites comme une farce, en y adjoûtant un peu de laict, & que cette farce soit un peu coulante.

Enfermez de cette farce dans des petites abesses de fueilletage, & en faites des casse-museaux, lesquels il faudra frire dans dun beurre ou du sain doux, puis vous pourrez les poudrer de sucre si bon vous semble.

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CHAPITRE XVIII.

La maniere de faire deseschaudez, ou craquelins au beurre.

MEttez sur une table un demy litron de fleur de farine, faites-y une petite fosse au milieu, mettez-y environ un demy verre de leveure de biere, adjoûtés y ce qu'il faudra d'eau chaude, & maniez le tout ensemble, le reduisez en paste un peu mollette, pour vous servir de levain, c'est pourquoy il faudra ramasser cette paste & la tourner en façon d'un petit pain, & la mettre dans un lieu chaud, afin qu'il revienne ou se renfle promptement, & si c'est en Esté il pourra se renfler suffissamment en un demy quart d'heure.

En attendant que ce levain se renfle, vous mettrez sur une table, un quart de fleur de farine, faites y une fosse au milieu, & mettez une livre de beurre non salé, lequel beurre vous aurez manié & ramolly auparavant s'il est trop dur, adjoûtez y une once ou un petit plus de sel

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menu, meslez ses choses ensemble, en y adjoûtant ce qu'il faudra d'eau froide pour paistrir cette paste.

Lors que cette paste sera paistrie à demy, vous prendrez vostre levain s'il est prest, c'est à dire s'il est bouffy & renflé, il faut le mesler avec vostre paste en achevant de la paistrir.

Et quand elle sera paistrie suffisamment, vous la couperez par morceaux, que vous mouslerez avec la main en petits poins qu'il faudra estendre en suitte pour les former en eschaudez.

Cela estant fait il faudra avoir dans un chauderon ou dans une poësle à confiture de l'eau sur le feu, & qu'elle soit quasi boüillante jettez-y dedans vos eschaudez, & les y laissez jusqu'à ce qu'ils reviennent dessus : & lors il faudra les remuer un peu dans cette eau, puis vous prendrez une escumoire avec laquelle vous enleverés en l'air un peu de l'eau dans laquelle sont vos escaudez, & vous les arroserez ou bassineés de cette eau, les laissant cependant dans leur eau jusques à ce qu'il se soient revenus & raffermis, pourquoi reconnoistre, il faudra tirer un de vos eschaudez, & vous la ma-

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nierez pour reconnoistre s'il est assez ferme.

Lors que vous jugerez que les échaudez seront revenus suffisamment, vous les tirerez hors de l'eauavec un escumoire, & les mettrez se ressuyer & refroidir sur un clayon ; puis vous les mettrez au four : il ne faut qu'un quart d'heure pour cuire de petits eschaudez communs.

Mais il faut que le four soit rude, c'est à dire qu'il soit aussi chaud par tout comme si c'estoit pour cuire des gros pastez.

Si les eschaudez ne prennent pas suffisamment de couleur en cuisant, il faudra faire un peu de feu clair sur la fin, à une des jouës ou costé du four, afin que la chaleur se rebatte sur les échaudez & leur donne de la couleur.

Remarquez que si vous ne mettez point de beurre dans l'appareil de vos eschaudez, vous ne ferez que des eschaudez au sel & à l'eau, qui sont plus estimez de quelques personnes, que les eschaudez au beurre.

Quant aux eschaudez au œufs, ils se font aussi comme au beurre : mais il faut mettre des œufs dans la paste ; c'est pour-

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quoy sur un quart de farine il faut casser quinze œuf, & mettre seulement une demie livre de beurre.

Il faut aussi que la paste de laquelle on pretend faire des échaudez aux œufs, soit bien maniée, & plus mollette que celle des autres eschaudez.

Il faut encore remarquer qu'on doit donner le four moins rude aux eschaudez aux œufs, qu'à ceux qui sont seulement au sel & à l'eau, ou au beurre.

CHAPITRE XXIV.

La maniere de faire du biscuit commun des Pastissiers.

CAssez par exemple huit œufs dans une escuelle, battez les comme si c'estoit pour faire une omelette ; adjoûtés y environ pour deux liards de coriandre battuë, ou d'anis verd, & une livre de sucre en poudre, delayez un peu ces choses ensemble, puis y adjoutez trois bons quarterons ou pres d'une livre de fleur de farine ; il faut delayer ensemble toutes ces choses exactement, & les battre jus-

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ques à ce que la paste devienne blanche, & le biscuit sera d'autant plus beau & mieux fait que la paste aura esté plus battuë.

Lors que la paste sera blanche à force d'estre battuë, vous la coucherés dans des mousles à biscuit que les Pastissiers nomment des tourtieres à biscuit qui sont de fer blanc, & devant que de les garnir de cette paste, il faut les graisser par dedans avec du beurre frais qui soit fondu.

Remplissez vos mousles au juste, & ne les garnissez point de cette paste ou appareil que quand le four sera prest & non plustost : puis il faudra poudrer avec du sucre bien sec le dessus des biscuits, & les mettre incontinent dans le four loin de la braise.

Vous pouvez faire l'essay avec un ou deux biscuit, afin de vous apprendre à en faire sans beaucoup de perte ; car cette pastisserie est dificile à bien faire.

Il faut que la chaleur du four soit douce pour cuire du biscuit, & qu'elle soit à peu près comme elle se rencontre dans le four lors que le pain est cuit un peu plus qu'à demy.

Il faut laisser le four ouvert, & conside-

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rer souvent le biscuit pendant qu'il cuit, car en premier lieu il se renflera, puis il prendra de la couleur : ce qui se fait environ au bout d'un demy quart-d'heure.

Si le biscuit noircit dans le four, c'est signe que le four est trop chaud, c'est pourquoy il faudra retirer les biscuits pres la bouche du four, afin de laisser un peu amortir la chaleur.

Si au contraire, le biscuit demeure pasle dans le four, sans prendre de couleur, c'est signe que la chaleur du four est foible, c'est pourquoy il faudra mettre le bouchoy à la bouche du four, & le déboucher souvent, afin que le biscuit ne se brusle pas.

Quand le biscuit aura de la couleur, & qu'il aura demeuré environ un quartd'herre & demy dans le four ou un peu plus à proportion qu'il sera gros, il faudra en tirer un hors du four & le toucher doucement avec la main : & s'il vous repousse, & qu'il paroisse ferme sans s'applatir, asseurez vous qu'il est cuit : & à l'heure mesme il faudra tirer le biscuit hors du four, & le tirer tout chaud hors de son moule ou tourtiere.

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II.

Du biscuit à la Reyne.

FAites de la paste comme au chapitre precedent, sinon que vous y mettrez moins d'œufs, car il faut que la paste du biscuit à la Reyne soit un peu plus ferme : c'est pourquoy au lieu, par exemple de huit œufs, ce sera assez d'y en mettre six.

Lors que la paste sera preste, vous la coucherez avec une gache sur du papier bien blanc, & vous ferez ces biscuits ronds comme des petits pains, & on les poudrera par dessus avec du sucre.

Il faut donner l'atre un peu plus chaud au biscuit à la Reyne, qu'au biscuit commun.

Aussi-tost quele biscuit à la Reyne sera cuit, vous le tirerez hors du four, & le détacherez hors de dessus son papier, en coulant adroitement un couteau mince entre le biscuit & le papier.

III.

Du biscuit de Piedmont.

ON le fait avec de semblable paste que le biscuit à la Reyne.

Il faut seulement coucher la paste en long sur du papier, & lui donner environ l'époisseur d'un travers de doigt, & le

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moins de largeur que vous pourrez, & la longueur d'un bon doigt : poudrez-le de sucre & le mettez au four.l'atre du four bien doux, comme il a

Il faut laisser peu de temps ce biscuit dans le four, parce qu'il est bien-tost cuit : mais il faut que le four soit aussi chaud que pour cuire du biscuit à la Reyne.

Quand ce biscuit sera cuit, vous le détacherez incontinent hors de dessus son papier.

IV.

Du biscuit de canelle.

PRenez de la paste de massepain ; adjoutez-y de la canelle en poudre, mélez bien l'un avec l'autre, & faites en sorte que la paste soit bien forte, roulez-là sur le tour, & luy donnez deux tours, c'est à dire qu'il faut l'estendre & la rouler par deux fois sur le tour.

Quand la paste sera roulée pour la seconde fois, il faudra l'estandre avec le rouleau, comme si vous desiriez en faire une abaisse, & qu'elle ne soit pas plus espoisse qu'une piece de cinquante huit sols : puis on couperea cette paste en façon de petits biscuit ou de petits carrez, & les mettre sur du papier : donnez leur

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coustume d'estre apres qu'on en a tiré le pain : on peut les seicher dans une estuve.

V.

Des biscuits de sucre en neige.

CLarifiés un quarteron de sucre royal & les faites cuire en consistance de syrop bien espois, ou de sucre rosat : puis on y adjoûtera deux blacs d'œufs reduits en mousse, battez ces choses ensemble, & en estendez sur du papier en forme de petit biscuit, & luy donnez le four fort doux.

VI.

Des biscuits de pistaches.

PElez des pistaches, puis vous les pilerez dans un mortier, & vous les meslerez avec l'appareil du biscuit en neige, pour faire du biscuit qui sera verdastre.

VII.

Du biscuit de Gamby.

PRenez de la paste de fueilletage apres qu'elle est ployée, & qu'elle a tous ses tours, il faut reduire l'abesse de l'espoisseur d'un quart d'escu, & la couper de telle figure qu'il vous plaira, & les couchez sur du papier.

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Donnez-leur le four fort doux, & c'est assez deles mettre au four apres qu'on en aura tiré d'autres pastisseries : il faut environ une demie heure pour les cuire, & quand ils seront cuits, on les glacera avec de la glace de sucre.

VIII.

Du biscuit de Caresme.

IL faut avoir par exemple une demie livre d'amandes douces pelées & bien battuës dans le mortier, une livre & demie de sucre en poudre, & gros comme une petite amande de gomme cantragan qui soit detrempée à loisir dans une cueillerée d'eau chaude.

Meslez ces choses ensemble dans un mortier avec un coupe de blanc d'œufs & une demie cueillerée de jus de citron, ou raspez seulement gros comme la moitié d'une avelaine ou muscade d'escorce d'un citron crud & bon à manger ; on battra pareillement toutes ces choses dans un mortier l'espace d'une bonne heure, & vous ferez en sorte que la paste devienne un peu plus ferme que celle de massepain, en sorte qu'on ait de la peine à la manier & la bien lier.

Quand la paste sera en cét estat, on la

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tirera sur le tout, & faudra la manier sur iceluy avec un peu de sucre en poudre, & un peu de farine meslez ensemble : estendez donc cette paste avec le rouleau & luy baillez deux ou trois tours c'est à dire, qu'il faut estendre & plier deux ou trois fois la paste sur la table tout de la mesme façon que du fueilletage : enfin vous l'aplatirez & estendrez uniment, lui donnerez l'espoisseur d'une piece de cinquante huit sols, & vous la taillerez uniment par morceaux en lon en forme de biscuit de carnage : puis on les couchera en mesme-temps sur du papier, & de là au four, qui soit doux comme pour faire cuire du biscuit de canelle.

Chapitre XXV.

La maniere de faire du massepain commun.

PRenez une livre d'amandes douces nouvelles & entieres, mettés-les dans de l'eau quasi boüillante, laissez-les tremper environ un quart-d'heure hors du feu pour amollir la peau : puis on les pe-

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lera, & à mesure qu'elles seront dépoüillées de leur peau, il faut les mettre dans de l'eau fraische.

Les amandes estans toutes pelées, vous les laverez dans une ou deux eaux, puis on les mettra égouter sur un clayon ou égoutoir ; ce qu'estant fait, vous les pilerez dans un mortier de marbre ou de pierre, en adjoûtant à diverses fois environ un petit demy verrre d'eau rose en les pilant, afin qu'elles ne fassent huile.

Il faut piler les amandes jusques à ce qu'elles soient reduite en paste bien douce, & qu'il ne reste rien à piler, en sorte que si vous maniez cette paste entre vos doigts, vous n'y rencontriez rien de dur ou de rude : il faut aussi que cette paste d'amandes soit assez ferme estant pilée ; ce qui oblige d'y mettre un peu d'eau rose en la pilant.

La paste estant aprestée en cette sorte, on y adjoûtera du sucre en poudre à raison d'une demie livre ou trois quarterons pour livre d'amandes pelées : meslez bien ensemble le sucre avec la paste d'amandes ; adjoûtés y aussi un blanc d'œuf frais, puis on rebattra bien toutes ces choses ensemble dans le mortier avec le pilon :

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& lors que la paste sera liée exactement tirez-là hors du mortier, & la mettez dans une escuelle.

Maniez ensuite cette paste sur une table bien nette qu'il faut poudrer de fois à autre avec un peu de sucre en poudre au lieu de farine, pour empêcher que la paste d'amandes ne tienne sur la table ny à vos mains.

Mettez cette paste en autant de morceaux qu'il vous plaira, & les façonnez en telle figure qu'il vous plaira : & si vous en faites des autres, donnez leur environ l'époisseur de sepot ou huit feüillets de papier, & les posez sur du papier blanc quand elles seront dressées : puis on les mettra secher plus qu'à demy dans un four dont la chaleur soit tres-douce ; car il faut qu'elle soit pour bien secher du massepain, & ne point brûler, neantmoins il faut que l'âtre soit un peu chaud : on peut donc mettre le massepain au four apres qu'on en aura tiré le pain ou biscuit.

Quand le massepain sera cuit ou seché, tirez-le hors du four pour le glacer, c'est à dire le dorer promptement avec de la glace de sucre qu'il faut estendre

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sur les massepains avec le dos d'une cuillere d'argent ou avec un cousteau : puis on remettra aussi-tost le massepain à l'entrée du four pour secher la glace ; ce qui sera fait en demy quart d'heure ou environ, en suitte dequoy le massepain sera tiré hors du four : & si vous desirez piquer par dessus du canela ou de l'escorce de citron, ce sera à la fortie du four avant que la glace se soit refroidie, afin de ne la rompre pas.

Il faut plus de temps pour secher du massepain dans une estuve : mais la glace & le masspaine en sont plus beaux & plus blancs.

Chapitre XXVI.

La maniere de faire du macarron.

PIlez des mandes, ainsi qu'il a esté proposé au Chapitre du massepain, puis vous le pilerez & reduirez en paste tres-douce : par exemple une livre, adjoûtez-y autant pesant de sucre en poudre & quatre blancs d'œufs : meslez ces choses ensemble, en y ajoûtans un peu

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d'eau rose, & les rebattez derechef dans le mortier pour faire cette paste bien liante, il faut pourtant qu'elle soit un peu mollette.

Quand cette paste sera preste, couchez là sur du papier blanc par morceaux éloignez quelque peu l'un de l'autre, & que ces morceaux soient un peu longs en forme de macaron, & les poudrez par dessus avec du scure fin, puis on les mettra au four pour secher jusques à ce qu'ils soient bien fermes par dessus en les couchant.

Il faut que la chaleur du four soit douce comme au Chapitre du massepain, & que l'atre soit pourtant un peu chaud, afin de pousser la paste, & la faire bouffer.

Le macaron doit estre au four un peu plus long-temps que le massepain, d'autant qu'il est plus espois : & on peut y laisser le macaron jusques à ce que le four soit refroidy.

Neantmoins les bons Pastissiers ne laissent pas si long-temps leur macaron dans le four, de peur qu'il ne devienne roux, & le tirent avant qu'il soit parfaitement ressuyé : mais ils le mettent ensuite sur le four chaudement l'espace de

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vingt-quatre heures, afin qu'il se desseche à loisir sans perdre sa blancheur.

CHAPITRE XXVII.

La maniere de faire des pains de citron.

MEttez dans un mortier un quarteron de sucre Royal en poudre ; adjoûtez-y un blanc d'œuf & un peu de jus de citron, & aussi gros que deux noisettes d'écorce de citron crud raspée bien menu ; battez ensemble toutes ces choses, & les incorporez bien, en sorte que la paste soit fort dure, & qu'on ne puisse quasi plus la manier.

Lors vous mettrez cette paste par morceaux de la grosseur d'une noix, il faut les rondir entre les mains en les maniant avec du sucre en poudre, puis vous les applatirez & les arrangrez sur du papier blanc, puis vous les mettrez au four à my-four, c'est à dire qu'il ne faut pas les mettre trop avant dans le four : donnezleur une chaleur douce, & quil soit semblable à celle qui est requise pour cuire

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du macaron, & ne bouchez pas le four.

Il faut environ un quart-d'heure pour le cuire.

Retirez-les quand le sucre sera bien costoyé & ferme.

II.

Autres Pains de Citron.

IL faut composer vostre paste comme au Chapitre precedent, sinon que vous y mettrez le double d'écorce de citron crud : lors que la paste sera apprestée, vous la mettrez par morceaux qui soient gros environ comme la moitié d'une noix, serrez les un peu entre vos doigts, puis vous les mettrez sur du papier, & vous les ferez cuire comme les autres pain de citron.

CHAPITRE XXVIII.

Pasté aux œufs.

FAites de la paste avec un peu de farine & d'eau salée, ou servez-vous de paste plus fine, estendez-là, & la coupez par morceaux ; relevez le bordage

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de chaque piece, pour en former autant de petits pastez, cassez un œuf frais dans chacune de ces abesses, assaisonnez-les de sel, du sucre, & d'un peu de canelle en poudre, puis vous y mettrez le couvercle, faites cuire moderément ces pastez dans du beurre bien chaud, & les retirez avant que l'œuf soit beaucoup durcy.

II.

Pasté en pot aux œufs.

FAites un aumelette assaisonnée de sel, ciboulette, & persil, ou autre menuës herbes coupées menuës : il faut hacher l'aumelette, & la mettre dans un pot avec de la purée de poix clairs & du beurre, ou de l'huile, assaisonnez cela de sel & d'espisse détrempée avec du verjus : & en Esté on peut y adjouster des groseilles : apres que le tout aura boüilly quelques temps, adjoustez-y des jaunes d'œufs durcis, & bardez de cloux de girofle, vous pouvez y mettre de l'oignon frit, servez cela chaudement, on peut y picquer du pain frit par dessus.

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III.

Gasteau ou Tourte aux œufs.

MEttez dans une tourtiere environ la grosseur d'un œuf de beurre frais, & pendant qu'il fond, vous casserez cinq ou sinc œufs, adjoûtez-y du sel & la grosseur d'un gros œuf, ou un peu plus de mie de pain blanc qui soit menuë, ou deux cueillerées de fleur de farine, bateez exactement le tout ensemble, puis y adjoûtez deux ou trois cueillerées de créme ou de laict, & une petite pincée d'épisse ou de canelle en poudre battez encore un peu vos œufs, & les verserez dans la tourtiere lors que le beurre sera fondu & roux à demy, couvrez la tourtiere avec son couvercle, sur lequel vous mettrez de la cendre chaude, & un peu de braize, pour faire cuire la tourte de tous les costes, servez la chaude ; vous pouvez rasper dessus du fromage, ou du sucre, & y adjoûter quelques goutes d'eau rose.

IV.

Tourte d'œufs aux Pommes.

MEttés dans une escuelle la grosseur de deux œufs ; ou un peu plus de moëlle de pomme cuite, adjoûtez-y deux

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cueillerées de sucre en poudre, deux petites cueillerées de fleur de farine, cinq ou six œufs, & du sel à discretion, broüillez le tout ensemble jusqu'à ce que la farine soit incorporée exactement avec le reste des ingrediens ; versez cét appareil dans une tourtiere, ou dans un poëslon, ou dans une scuelle, dans laquelle vous aurez estendu la grosseur d'un œuf, ou un peu plus de beurre frais : couvrez la tourtiere, mettez-là sur un peu de feu, & couvrez aussi le couvercle avec un peu de braize, & au bout d'un quart-d'heure ou un peu plus, vous découvrirez la tourtiere, afin de voir si le gasteau est cuit, & s'il a assez de coleur dessus & dessous, & sil en a assez il n'y a qu'à le dresser sur une assiette pour le servir sur table : vous pouvez y mettre du sucre & de l'eau rose, & y piquer quelque morceau d'écorce de citron confite.

Au lieu de moëlle de pomme, vous pouvez employer de la chair de citroüille, ou de melon ou de quelqu'autre fruict qui soit cuit pour en faire un gasteau.

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V.

Œufs foüettez en forme de gasteau ou poupelain.

CAssez par exemple quatre ou cinq œufs, mettez le blanc à part dans une escuelle, & les jaunes dans une autre escuelle : battez bien le blanc des œufs jusques à ce qu'il soit reduit en escume, avec une petite poignée de jons ou de petits baston ; broüillez aussi un peu les jaunes : puis on mettra dans un poëslon mediocre, ou dans une tourtiere, quasi la grosseur de deux œufs de bon beurre frais, & quand il sera fondu, & qu'il deviendra roux, il faudra rebatre un peu le blanc des œufs, & y adjoûter deux bonnes cueillerées de sucre en poudre & du sel à discretion : lors que le beurre sera roux à demy, mettez-y une petite rostie, ou une crouste du dessus du pain : qui soit ronde & grande comme la moitié de la main ou environ, & incontinent apres versez-y le jaune des œufs, puis vous y adjoûterez le blanc par dessus. Faites cuire ces œufs sur un peu de cendre chaud, ils seront cuits en peu de temps, & se brusle aisément ; donnez-leu de la couleur de la mesme

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façon qu'aux œufs au laict, puis vous les dresserez sur une assiette, & les poudrerez de sucre.

VI.

Œufs en beignets.

PRenez du coq ou de l'arbe à char, de la melisse, de la tenesie, du persil, de chacun deux trois brins, de la buglose bien tendre autant que de toutes les autres vous pouvez y adjoûter de la ciboulle & de la laictuë : hachez bien menu toutes ces herbes, puis on battra par exemple six ou huit œufs, comme si c'estoit pour faire une aumelette, adjoûtez-y les harbes hachées, & du sel a discretion. Lors on fera fondre de bon beurre dans une poësle, ou dans une escuelle large : & lors que le beurre sera demy roux, prenez de vos œufs battus avec une cueillerée assez grande, & en versez par cueillerés dans le beurre tant que soit assez pour faire trois ou quatre beugners de la grandeur de la main ou environ, & lors qu'ils seront cuit suffisamment, tirez-les à sec, & faites en autant qu'il vous plaira : mais il faut les manger tout chauds ; quelques-uns raspent du sucre, par dessus.

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VII.

Autres œufs en façon de bugnets, ou de macarons.

FAites cuire des œufs jusques à ce qu'ils soient durs, puis vous les hacherez avec du persil, & un peu de ciboulettes & de thin, assaisonnez cet hachis avec d sel, & l'incorporez avec de la glaire d'œuf, ou avec un jaune d'œuf crud, puis vous en ferez de petites pelottes en façon d'andoüilletes de la grosseur d'un œuf, ou en façon de macaron, ou de telle autres figure qu'il vous plaira ; faites-les frire ou cuire un peu dans du beure à demy roux sur le rechaud, ou dans lap oësle puis retirez-les à sec & les poudrez d'un peu de muscade & de sel, s'il est besoin.

VIII.

Autres œufs en façon de beugnets.

CAssez quatre œufs, adjoûtez-y du sel, battez-le, & en faites une aumelettre, & dés qu'elle sera cuite à demy hachez-là avec une poignée de persil amorty sur une pele de feu, adjoûtez-y une demie once de raisin de Corinthe, & presque autan de pignon ; liez cet hachis avec un œuf crud, & un peu de

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farine, puis on fera de petites pelotes, ou des morceaux de telle figure qu'il vous plaira, faites-les cuire dans du beurre à demy roux, comme au Chapitre precedent, puis les tirez à sec hors du buerre & les poudrez de sucre & de sel s'il est besoin ; mangez-les devant qu'ils soient refroidis.

IX.

Bisque aux œufs.

MEttez dans un plat un lict de tranches de bon fromage entre deux licts de soupes, ou roties de pain sechées au feu, arrosez-les de pureee au poix ou d'autre boüillon maigre, qui soit assaisonné de beurre & de sel, faites mitonner le tout quelque temps sur un peu de feu, puis il faudra garnir le potage avec du persil haché grossierement, puis vous y adjoûterez des œufs pochez en l'eau, ou apprestez en quelque autre maniere, entier ou non ; vous pouvez mettre entre les œufs des morceaux de laicts de carpe, ou de petits poissons frits, comme de l'eperlan ou goujon, ou des aprestes de pain frit : adjoûtez des capres & des champignons, ou autres beatilles maigres, telles que vous les aurez, bien cuites & assai-

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sonnées : quelques-uns y mettent des raisins de Corinthe, & des pruneaux boüillis : Assaisonnez le tout de quelques cloux de girofle entier ou rompus grossierement, ou de quelque autre episse, comme de gingembre : lors vous adjoûterez doucement autant qu'il sera besoin de purée, ou d'autre boüillon maigre bien beurré, & remettez le plat sur le feu pour quelque temps, prenant garde que le pain ne s'attache au fonds : on peut adjoûter du verjus en cette bisque, ou de la sausse verte ; quelques-uns y mettent du vin : quand la bisque sera preste & de bon goust, rapez-y de la muscade, ou de la crouste de pain, & la servez.

X.

Civé aux œufs.

FAites chauffer de bon huyle, cassez y des œufs, & le retirez à sec avant que le jaune soit beaucoup durcy ; puis les mettez dans une plat, & y adjoûtez une sausse faite avec de l'oignon coupé par roüelle, & frites avec de l'huyle, le tout assaisonné de sel & de verjus : rapez-y un peu de muscade.

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XI.

Herbolade.

MEttez, par exemple huict jaunes d'œufs dans un plat d'argent, ou autre, qui ne soit pas bien large : & si c'est un jour gras, delayez-les avec environ un demy-septier de bon boüillon de viande qui soit fait sans herbes : au lieu de boüillon, vous pouvez employer de crème,ou de laict, adjoûtez-y une petite pincée de sel menu, & deux macarons écrasez bien menu : on peut y mettre autant de biscuit rapé ; adjoûtezy aussi trois ou quatre cueillerées de jus de poirée pilez dans un mortier avec de l'eau rose ; mettez-y aussi un demy quarteron de sucre en poudre : versez cét appareil dans un plat, dans lequel il y ait environ la grosseur d'une noix de bon beurre fondu, laissez prendre au fonds l'herbolade sur le feu, & quand elle sera prise à demy, adjoutez-y une once d'escorce de citron confite, rapée, ou coupée en forts petits morceau ; adjoutez-y aussi une once de pistaches pelées & pilées,  & laissez prendre entierement l'herbolade sur un feu mediocre, & lors vous luy donnerez un peu de couleur avec une

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pesle rouge, puis on retirera le plat hors du feu, & l'on piquera dans l'herbolade de petites tranches d'escorce de citron confite, sucrez-la pardessus.

CHAPITRE XXIX.

Diverses manieres d'apprester les œufs perdus ou pochez, cuits en l'eau.

Premiere maniere.

FAites boüillir de l'eau, puis cassez des œufs les un apres les autres, & les versez separément dans l'eau boüillante : & lors qu'ils seront cuits mediocrement, tirez-les a sec sans les laisser durcir. Ils peuvent servir pour garnir un potage d'herbes, ou tel autre qu'il vous plaira. On peut aussi servir ces œufs avec diverses sausses, & quelques fois on les poche dans du laict, ou dans du vin doux.

Seconde maniere.

Mettez en un plt quatre œufs perdus, ou pochez, & les assaisonnez de sel : vous pouvez y raper du fromage par dessus.

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Troisiesme maniere.

On peut mettre de ces œufs dans un plat, adjoûtez-y un peu de sel, & les poudrez de sucre, & de quelque goute d'eau rose, ou de verjus, ou de jus de citron, ou d'orange ; vous pouvez y adjoûter un peu de cnelle en poudre, ou de l'eau de canelle.Quatriesme maniere.

Ou bien, vous mettrez de ces œufs dans un plat, dans lequel il y ait un peu de sel, vous pouvez y adjoûter du sucre ; & sivous n'y mettez point de sucre, la muscade n'y sera point mauvaise : on peut donner couleur à ces œufs avant que les mettre dans le plat, en tenant dessus l'espace de quelque temps une pesle ou poësle bien chauffée.

Cinquiesme maniere.

Quelquefois on met de la sausse verte & on les tient quelque temps sur le feu, assaisonnez-les de sel & de muscade.

Sixiéme maniere.

Ou bien vous ferez roussir du beurre dans une pësle, puis faites-y cuire de l'oignon haché ; assaisonnez-les de sel bien menu, & de poivre, & quand l'oi-

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gnon sera cuit, adjoustez-y un fil de vinaigre, & incontinent apres on versera cette saulce sur les œufs pochez : quelques-uns y adjoûtent un peu de muscade. Remarquez que si les œufs sont arrangez dans le plat en façon d'un poisson, on les appelle un Saumon d'œufs.

Septiéme maniere.

Faites cuire dans le beurre roux de l'oignon haché, & lors qu'il sera cuit, adjoûtez-y une sausse faite avec du vinaigre, & de la moutarde meslée ensemble, assaisonnée de sel & versez cette sausse sur les œufs.

Huictiéme maniere.

Ou bien faites roussir du beurre, puis adjoûtez-y une sausse composée de moustarde douce, ou de raisiné delayé avec du vin, ou de l hypocras ; retirez incontinent la poësle hors du feu, sans faire boüillir cette sausse, & la versez sur vos œufs. Au lieu de faire roussir le beurre dans la poësle, il suffit de le faire fondre dans un plat, puis on y adjoûtera l'hypocras ou moustarde douce delayée, comme a esté dit, en suitte on y mettra les œufs pochez, & vous rasperez du sucre par dessus.

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Neufiéme maniere.

On peut faire une farce d'herbes, & la mettre dans un plat, & arranger par dessus les œufs, & adjoûter quelques apprestes de pain frittes dans le beurre, ou des tranches d'aumelettes, & rasper dessus de la muscade.

Dixiéme maniere.On peut aussi faire fondre de bon beure dans un plat sur un feu mediocre ; puis vous casserez desoeufs, & apres en avoir osté la glaire, vous mettrez le moyeux entiers dans une escuelle, & les verserez l'un apres l'autre dans le beurre fondu, & quand le beurre commencera à boüillir, retirez le plat hors du feu. On peut adjoûter par dessus un petit de canelle en poudre.

CHAPITRE XXIV.

Diverses manieres d'apprester les œufs durs.

Premiere maniere.

MEttez dans un plat un morceau de beurre, du vinaigre, ou du verjus

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& un peu de sel : & lors que le beurre sera fondu, adjoutez-y trois jaunes d'œufs durs qui soient écachez ; delayez-les dans la sausse, puis il faudra garnir le plat avec des œufs durs coupez par moitié, ou par quartiers, raspez y un peu de muscade pardessus, ou de la crouste de pain.

Seconde maniere.

Faites roussir du eurre dans la poësle : vous pouvez y adjoûter du persil, ou de la ciboule qui soit hachée : & quand cela sera cuit, versez le dans un plat apres l'avoir assaisonné de sel & de poivre, puis mettez-y des œufs durs coupez par moitié :  On peut y mesler de la moustarde, ou faireu ne sausse à robert : faites boüillir un peu cette sausse avant que de servir ces œufs.

Troisiesme maniere.

Quelquefois on frit simplement les œufs durs coupez par moitié, quelquefois aussi on les trempe dans de la farine dilayée dans du vin ou du laict, puis on les frit en façon de bugnets : & apres les avoir tirez à sec hors du beurre, mettez les dans un plat, & les poudrez de sel : adjoûtez-y du vinaigre, ou du jus de citron, ou une sausse dou-

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ce. On peut aussi y mettre de la canelle en poudre.

Quatriesme maniere.

On peut servir ces œufs avec les sausses proposées pour les œufs pochez.

Cinquiesme maniere.

Vous pouvez encore mettre dans un plat des œufs coupez par moitié, & les assaisonner d'une sausse blanche : faites dans la poësle avec des jaunes d'œufs crud, & du verjus, ou du vin blanc delayé ensemble, le tout assaisonné de sel, & d'un peu d'espice, ou de poudre de fines herbes, puis verser le tout sur vos œufs.

CHAPITRE XXVI.

Œufs à la Portugaise.

VOus pouvez fricasser, ou frire en la poësle des œufs durs, ainsi que suit. Il faut premierement fricasser dans du beurre du persil haché menu, ou de l'oignon : ou des ciboules, & quand le persil ou l'oignon sera cuit à demy, versezy des œufs durs coupez par roüelles : on peut y adjouter une poignée de cham-

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pignons pelez lavez & coupez par morceaux ; assaisonnez le tout de sel, & le fricassez bien dans la poësle : & sur la fin vous y mettrez du vinaigre : quand ces œufs seront hachez dans le plat, vous pouvez y rasper de la muscade pardessus, & ls garnir aussi de pain frit en apprestes, que vous larderez comme dans un hachis de carpe : on peut aussi enjoliver cette fricassé avec destranches de citrons cruds.

Quelquefois, on fricasse à demy de l'oignon, ou persil avec de bon beurre, puis on y adjoûtera des œufs durs coupez par roüelles, & un peu devant qu'on les tire de la poësle, on y adjoûte une sausse composé de moutarde, dilayée avec du verjus ou du vinaigre, & assaisonnée de sel : & apres leur avoir donné un tour ou deux de poësle sur le feu, il n'y a qu'à le dresser ; vous pouvez y rasper un peu de muscade pardessus.

II.

Œufs durs farcis.

PRenez des herbes douces comme laictuës, pourpié, poirée, bourrache, oseille, persil, ou verfeüil, & un peu de thim : ostez la tige des herbes, & si vous

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desirez que la farce soit de haut goust, mettez-y beaucoup de persil ou de cerfueil, & quelques ciboulettes, les herbes estant bien nettes & lavées, il faudra les hacher : assaisonnez-les de sel, & d'un peu de cloux de girofle, ou de poivre : on peut hacher avec les herbes des champiognons bien nets, & qui soient déjà cuit & bien assaisonnez : il y a mesme des personnes qui adjoûtent du fromage coupé bien menu. Versez cette farce dans une poësle, & la faites cuire avec du beurre à demy roux, ou avec d'autre graisse ou huile : & quand elle est cuite à demy, quelques-uns y adjoûtent du raisin de Corinthe, ou du pignon ; ce qui n'est point necessaire, il suffit de l'assaisonner de sel : & quand elle sera cuite, vous y mettrez des jaunes d'œufs durs qui soient coupez par petits morceaux, & donnerez encore deux ou trois tours de poësle, puis vous la dresserez dans un plat, & la garnirez par dessus avec des œufs durs coupez par moitié : quelquesfois on oste le jaune des œufs durs pour le mesler avec la farce : & lors qu'elle est cuite on en remplit le blanc avant que de le poser sur le reste de la far-

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ce : quelquefois au lieu de mettre les blancs d'œufs sur la farce, on se contente d'y piquer des apprestes de pain : ou de petits gasteaux de paste frits dans le beurre : & on peut rasper pardessus un petit de muscade, ou de croute de pain.

III.

Œufs à l'oseille.

BEaucoup se contentent de faire cuire dans un plat, ou dans une poësle de l'oseille ou vinette, apres en avoir osté les tiges : mettez y de bon beurre, & du sel à discretion : vous pouvez adjoûter du poivre, ou de l'espisse : & la farce estant cuite, mettez-y les œufs durs coupez par moitié, ou par quartiers : quelquefois on fait une sausse blanche avec des jaunes d'œufs cruds detrempez avec un peu de verjus ou d'eau, & on la mesle avec l'oseille quand elle est cuite, puis on y adjoûte les œufs : vous pouvez y rasper de la muscade par dessus.

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CHAPITRE XXVII

Diverses manieres de faire les Aumelettes.

Aumelette simple.

Premiere maniere.

PRenez par exemple une demie douzaine d'œufs, cassez-les separément sur une assiette, puis les battez tous ensemble dans un plat, adjoûtez-y du sel menu, & quelque goutte d'eau ou de laict : faites fondre du beurre dans une poësle, & loes qu'il sera roux, versez y les œufs battus, & les laissez cuire plus ou moins, suivant que vous desirez avoir une aumelette baveuse ou seiche. Au defaut du beurre, on se peut servir d'huile, ou d'autre graisse pour cuire ces œufs, & toute autre sorte d'aumelettes.

Si vous desirez qu'une aumelette soit verte, il n'y a qu'à mettre de la sausse verte dans les œufs lors qu'on les bat, ou bien vous en pouvez servir avec l'aumelette : mais ordinairement on aime mieux

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un filet de vinaigre : On peut servir de la moustarde, soit commune, soit douce : & lors il est à propos de servir l'aumelette roulée comme une andoüille, & fenduë par les deux bouts, qu'il faut escarter un peu loin de l'autre.

II.

Aumelette à la Celestine.

CAssez une douzaine ou vingtaine d'œufs plus ou mois, assaisonnezles de sel, & les battez : vous pouvez y adjoûter de la mie de plain blanc bien emiée, & du persil haché, ou du sucre en poudre : mettez-y aussi de bon beurre frais coupée par petites tranches, autant qu'il en faudroit dans une poësle pour y fricasser grassement une pareille, quantité d'œuf ; & cependant que l'on bat le tout ensemble, il faut mettre dans une poësle à frire bien nette une livre de bonne huile d'olive ou de beurre, & le faire chauffer jusques à ce qu'il boüille, & aussi-tost le verser hors de la poësle, & sans l'essuyer, vous y verserez en mesme temps les œufs battus, assaisonnez de sel & de beurre comme il est dit laissez-les cuire, & les remuez seulement dans le milieu doucement avec un baston

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un peu large & plat par le bout, ou avec la pointe d'un costeau, afin que les œufs se prennent mieux, lors que l'aumelette sera cuite à demy : retournez-la avec une assiette ou un friquet pour achever de la faire cuire, & pour empescher qu'elle ne s'attache à la poësle & ne brusle : mouvez souvent la poësle.Quand cette aumelette sera dressée, vous pouvez la poudrer de sucre, & l'arroser d'un peu d'eau rose & canelle : on peut faire aisément cette aumelette dans une tourtiere couverte qui soit haute de bord.

III.

Aumelette crtonneuse.

BAttez par exemple six œufs, assaisonnez-les de sel : & de beurre estant fondu dans la poësle, versez-y en mesme temps les œufs battus, & incontinent apres vous y adjoûterez du pain en appreste, ou de la mie de pain bien menuë qui soit frite ; il faut répandre l'un l'autre dans la poësle sur le feu, & quand l'aumelette sera cuite & que vous la verserez dans le plat, faites en sorte que le pain frit soit dessus : quelques-uns font frire du persil, & le mettent encore par

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dessus, & quelquefois on y jette aussi un peu de vinaigre à peu pres comme les Pastissiers mettent de l'eau rose sur les tartes.

IV.

Aumelette aux Pommes.

PElez trois ou quatre pommes, & les coupez en roüelles, fricassez-les dans la poësle avec un quarteron & demy ou environ de beurre frais, & de sucre autant qu'il vous plaira : & quand elles seront cuites, vous pouvez verser par dessus sept ou huict œufs battus & assaisonnez de sel : remuez souvent la poësle pour empescher que l'aumelette ne tienne & ne brûle : & lors que vous la verserez dans le plat, vous ferez en sorte que les pommes soient enfermées au dedans, puis on poudrera l'aumelette pardessus avec du sucre.

Il est plus aisé quand les pommes sont cuite de les tirer à sec hors de la poësle : & les metttre sur une assiette, puis on fera une uamelette un peu baveuse : & lors qu'elle sera assez cuite, on peut y enfermer promptement les pommes, puis y rasper du sucre par dessus.

347

Il y en a qui se contentent de mettre sur une assiette les pommes fricassées, & les couvrent d'une aumelette baveuse, laquelle on poudre de sucre.

V.

Aumelette à la mode.

BAttez les œufs & les salez : adjoûtez y du pignon, du raisin de Corinthe, de l'escorce de citron confite, hachez menu, le beurre estant fondu & à demi roux dans la poësle : versez-y les œufs en les broüillant bien : dressés cette aumelette dés qu'elle sera cuite moderément, on peut la roulet comme un andoüille, raspés-y du sucre par dessous vous pouvez aussi y adjoûter par dessus quelques gouttes d'eau rose ou de canelle.

VI.

Aumelette à l'escorce de citron.

BAttés des œufs avec un peu de laict, vous pouvez y adjoûter un peu de l'escorce de citron confite rapée bien menu, & du sel à discretion, & faites l'aumelette.

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VII.

Aumelette au lard.

PRenez le gras d'un quarteron de lard ou environ, ostés les leveures, & coupés le lard en petits morceau, qui soient gros à peu prés comme une noisette ; faites-les fondre en la poësle : & lors qu'il commencera à se seicher, adjoûtez-y six ou sept œufs battus & salés si besoin est.

VIII.Autre maniere.

CAssez six ou sept œufs : adjoûtez-y environ demy quarteron de lard coupé menu, & du sel s'il est besoin, battés le tout ensemble, & le versez dans la poësle en laquelle il y ait autant qu'il est besoin de beurre à demy roux ou de moüelle fonduë, & faites cuire l'aumelette.

IX.

Aumelette à la créme.

CAssez six œufs, adjoûtez-y trois ou quatre cueillerées de créme & du sel à discretion : battés bien le tout ensemble, & le versés dans le beurre à demy roux, & faites cuire moderement cette aumelette.

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X.

Autre aumelette à la créme.

FAites fondre environ un quarteron de beurre dans une poësle, puis vous y verserez une demie douzaine d'œufs battus, & sallez suffisamment : & lors qu'ils seront pris, adjoûtez-y environ un posson de bonne créme : & quand elle sera cuite & dresée, raspez-y du sucre par dessus, vous pouvez aussi y adjoûter de l'eau rose. Il ne faut point que la créme bouïlle ; c'est pourquoy si l'aumelette n'estoit assez cuite lors qu'on y met la créme, on fera rougir une pesle pour luy donner couleur.

XI.

Aumelette aux herbes.

HAchez des herbes douces comme laittuës, oseille bourache, buglose, mauves, ostez latige des herbes, & quand elles seront bien hachées, il faut les battre avec les œufs, & y adjoûter du sel : & si vous desirez que vostre aumelette soit douce ,adjoûtez-y du raisin de Corinthe, faites fondre du beurre, & quand il sera assez chaud, versez les œufs : quand l'aumelette sera dressés, raspez-y du sucre par dessus. Si vous desirez que cette

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aumelette soit de haut goust, mettez-y plus de sel & d'espisses.

XII.

Aumelette au persil.

CAssez des œufs, adjoûtez-y de la fueilles de persil haché menu, & du sel : battez vos œufs, & faites vostre aumelette. On peut hacher grossierement une ou deux poignées de persil, & frire dans du beurre, puis y adjoûtez six ou sept œufs battus & assaisonnez de sel.

XIII.

Aumelette à la coiboulette.

HAchez de la ciboulette, & la battez avec des œufs, lesquels estant assaisonnez de sel, vous les versez dans du beurre à demy roux, ou dans de l'huile, pour en faire une aumelete.

XIV.

Aumelette farcie avec chicorée.

PRenez de la chicorée blanche, & la trempez dans de l'eau boüillante : on peut se servir de chicorée sauvage : retirez la hors de l'eau, un peu de temps apres, égouttez-la, puis il faut la hacher menu, assaisonnez-la de sel, vous pouvez y adjoûter des champignons à demy cuits & coupez par petits morceaux : faites

1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (351-400)

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cuire le tout avec du beurre, puis les tirez à sec, & les meslez avec des œufs battus pour en faire promptement une aumelette, laquelle ne doit pas estre beaucoup cuite : dressez-la & raspez dessus de la muscade ou du sucre.

XV.

Aumelette au fromage.

PEndant que le beurre fond dans la poësle, il faut couper du fromage bien menu, & le battre avec les œufs ; adjoutez-y du sel à discretion, & verser le tout dans du beurre à demy roux pour faire l'aumelette.

Aumelette aux concombres.

PRenez d'une aumelette autant qu'il sera besoin, hachez la menu : vous pouvez y adjoûter du pignon & du raisin de Corinthe, ou de la faree d'herbes, ou du hachis de poisson bien assaisonné & cuit, ou des laites de carpes qui soient déjà cuites : vous pouvez aussi mettre avec chacune de ces choses des champignons hachez menu & cuits à demy, incorporez le tout avec quelques blancs ou jaunes d'œufs cruds, puis en remplissez des gros concombres, apres les avoir creusez & vuidez ; estans remplis il faut re-

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boucher l'entrée, peler les concombres & les faire cuire entre deux plats, ou dans une tourtiere, les assaisonnant de beurre & de sel ; & lors que la sausse sera presque faite, adoûtez-y un peu de verjus ou de vinaigre s'il est besoin, ou de la sausse de poissons raspez-y de la muscade pardessus & de la crouste de pain, ou mettez-y du sucre, le tout suivant la qualité de la farce ou hachis dont le concombre sera remply ; Au lieu de sausse on peut faire une aumeltte fort mince & baveuse pour y envelopper un concombre farcy, lorsqu'il est cuit & prest à manger.

On peut farcir un concombre avec du roignon de veau cuit, & haché avec sa graisse & jaune d'œufs, des pignons, raisins de Corinthe, sel, &c. Et lors qu'il sera cuit entre deux plats ou en la poësle, on achevera de l'apprester comme il a esté dit.

XVII :

Aumelette à la Turque.

PRenez de la chair d'un rable de lievre, ou d'autre venaison, hache-la menu avec un peu de lard gras, de pista-

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ches ou pignon, ou amandes, ou avelaines ou noisettes, pelées, ou bien des marons ou chataignes rosties & pelées, ou de lacrouste de pain coupée par morceaux à guise de chataignes, assaisonnez ce hachis de sel, d'espisses & de quelque peu de fines herbes. Si la chair est cruë, il faut avec du beurre ou de la moësle, ou de bonne graisse coupez bien menu, & quand elle sera fonduë dans la poësle, versez-y la chair hachée & assaisonnées des ingrediens susdits, & la faite cuire. En suites, faites fondre du beurre dans une poësle, & faites une aumelette, & quand elle sera cuite à demy adjostez-y le hachis, & lors que l'aumelette sera cuite, retirez-la de la poësle avec une escumoire ou une assiette, sans rien rompre, & la recevez dans un plat, en sorte que le hachis paroisse dessus, puis on arrousera l'aumelette avec du jus de mouton, ou d'autre viande rostie, raspez-y de la muscade par dessus : on peut adjoûter des moüillettes de pain frittes, & des tranches de citron decoupées.

Si la chair de lievre ou d'autre venaison est rostie, il n'y a qu'à la hacher & assaisonner, comme il a esté dit, puis fai-

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re l'aumelette : & quand elle sera cuite à demy, adjoûtez-y le hachis, puis on achevera l'aumelette.Au defaut de venaison, vous pouvez employer du hachis de viandes ordinaire.

XVIII.

Aumelette au roignon de veau.

PRenez de roignon d'une longe de veau, apres qu'elle est rostie, hachezle avec sa graisse, & l'assaisonnez de sel, d'épisse, de quelque peu de thim, ou de quelques autres herbes fines ; on peut y adjoûter de petites croustes de pain fricassées, ou des champignons cuits, ou des pistaches pelées, puis on fera une aumelette, &lors qu'elle sera cuite à demy, versez-y le hachis lors que l'aumelette, sera cuite, dressez-la dans un plat, adjoûtez-y de la muscade par dessus, ou du sucre.

XIX.

Aumelette en tourte aux œufs, & hachis de poisson.

PRenez de la chair de carpe, ou d'autre poisson bien desossées, & des laites de carpes blanchies, adjoustez-y du sel & du poivre, ou de l'épisse, & si vous

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voulez ces champignons, faites un hachis : vous pouvez y adjoûter du pignon, du raisin de Corinthe, de l'escorce de citron confite coupée bien menu, faites cuire le tout dans une poële ou tourtiere avec du beurre, & quand le hachis sera cuit, vous ferez une aumelette bien assaisonnée, & quand elle sera cuite à demy, versez-y le hachis tiré à sec hors de sa sausse, & quand l'aumelette sera cuite il faut la rouler, & la mettez sur un plat & fendre par les deux bouts, lesquels vous escarterez en forme d'estoille, raspez du sucre par dessus & l'arrosez si bon vous semble avec de l'eau rose.

XX.

Aumelette à la farce.

FAites de la farce avec des herbes douces, des jaunes d'œufs durs, le tout assaisonnée de sel ; vous pouvez y hacher aussi des champignons cuits à demy, ou du raisin de Corinthe, mettez  cette farce sur une assiette ou dans un plat, & la couvrez d'un aumelette baveuse.

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XXI.

Aumelette aux asperges.

PRenez des asperges qui soient tendres & menuës, rompez-les par petits morceaux, faites-les cuire a demy dans du beurre roussy en la poësle ; en suite, versey des œufs battus, assaisonnez de sel, & faites l'aumelette : D'autres font parboüillir les asperges dans de l'eau salée, & apres les avoir tirez secs du boüillon, & qu'elles sont égouttée, on les met dans la poësle avec des œufs battus : l'aumelettez estant faite & dressée, adjoutezy un filet de vinaigre, ou de verjus, quelquefois on prend des champignons bien avés, & coupés par morceaux, on les fait frire entre deux plats sur le feu, puis on les dresse, & on se sert de l'eau qui en sort pour en arroser l'aumelette, sur laquelle on peut aussi rasper de la muscade.

XXII.

Aumelette au pain ou raton.

BAttez par exempe quatre œufs frais avec cinq ou six cueillerées de laict, adjoûtez-y du sel, & environ la grosseur d'un œuf  ou un peu de mie de pain blanc bien menuë, ou plain une cueillere d'argent de farine qu'il faut delayer exa-

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ctement avec les œufs en les battant ensemble, puis on versera dans le beurre pour faire l'aumelette, laquelle il faut retourner une fois : n'épargnez-pas le beurre. Quand l'aumelette est cuitte vous pouvez la couper par tranches longues comme de biscuits, ou de telle autre figure qu'il vous plaira, adjoutez-y du sucre, & un peu d'eau rose.

Si vous ne retournez pas cette aumelette dans la poësle, & que vous la laissiez baveuse d'un costé, elle n'en vaudra pas moins.

On peut faire cuire ces œufs dans un poëslon mediocre de cuivre jaune, qui soit haut de bords, ou dans une petite tourtiere, pour en faire une façon de gasteau, & pour le rendre plus excellent, vous adjoüterez encores dans les œufs deux ou trois cueillerées de sucre en poudre, battez-les bien & les versez dans la tourtire ou poëslon, dans lequel il y ait la grosseur d'un œuf de poule, ou un peu plus de bon beurre frais à demy roux : faites cuire doucement ces œufs, & à petit feu, & à mesure que le fonds se prendra, vous le pouvez tirer dessus avec une cueillere. On peut faire ces œufs sans y

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mettre du laict : lors qu'ils seront pris par tout, prensetez-les au feu, ou les couvrez d'une pesle bien chaude pour affermir le dssus ; puis vous dresserez le gasteau sur une assiette, vous pouvez y adjoûter du sucre.

XXIII.

Œufs au miroir.

EStendez dans une plat avec le dos d'une cueillere environ la grosseur d'une œuf de bon beurre, cassez-y en suite cinq ou six œufs, & les assaisonnez de sel bien menu, puis vous mettrez environ six cueillerées de bonne crème sur le blanc des œufs, & y adjoûterez un petit de sel ; faites cuire ces œufs & donnez leur de la couleur sur la fin avec unepesle chaude, sans toutefois faire durcir le jaune.

XXIV.

Oeufs au beurre noir.

FAites bien roussir du beurre en la poësle, cassez des œufs dans un plat, & sans les battre versez-les dans le beurre, & les assaisonnez de sel menu ; & quand ils seront cuits dressez les en un plat, & les arroser de vinaigre qui ait passé par la poësle raspez-y un peu de muscade par-

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dessus on peut y adjoûter une sausse à robert à ces œufs, qui sont nommez par quelques-un des œufs à la Milannoise.

XXV.

Œufs au laict.

BAttez par exemple cinq ou sinx œufs, adjoûtez-y du sel bien menu, environ une chopine de bon laict, qu'il faut verser peu à peu à diverses fois, & bien dilayer les œufs avec une partie du laict, en y adjoûtant une cueillerée de sucre en poudre. Versez cét appareil dans un plat qui soit sur un pot plein d'eau boüillante ou sur un rechaud, & que dans ce plat il ait environ la grosseur d'un œuf de poule de bon beurre fondu : quand les œufs ou laict y seront versez ; il faut couvrir le plat avec une autre escuelle, & laisser cuire doucement ces œufs sans les remuer. Lors qu'ils seront suffisamment cuits, il faut leur donner couleur avec une pesle bien chaude, ce qui aide à les achever de cuire par dessus, puis on les ostera hors du feu pour y rasper du sucre par dessus. Vous pouvez aussi y adjouter quelque goutte d'eau rose, ou de canelle. Ces œufs estant cuits, si vous les gardér quelque temps sans les manger, il s'y

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fait de l'eau, principalement quand le laict n'est pas excellent : On peut neantmoins empescher que ces œufs ne fassent de l'eau, en detrempant un peu de farine avec le laict avec lequel on les fait. Si vous les faites cuire sur un vaisseau quasi plain d'eau boüillante, ils sont beaucoup plus delicats, feront moins d'eau, & le plat ne se fondra point : Il n'y a qu'à entretenir le feu pendant que ces œufs cuisent, ils seront encores plus delicats si vous les faites avec la crème, & si vous n'y mettez que peu ou point de blanc des œufs, mais il en faudra davantage. Quelquefois on met dans les œufs au laict de la fueille de persil haché menu, broüillez-la dilayant les œufs, & il s seront bons encore qu'il n'y ait point de sucre, on fait quelquefois les œufs au laict sans y mettre de beurre.

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CHAPITRE XXXI.

Diverses maniere de Marmelades.

Marmelade ou Œufs broüillez au verjus. sans beurre.

CAssez parexemple quatre œufs, battez-les, adjoûtez-y du sel & quatre cueillerée de verjus, mettez le tout sur le feu, & le broüillez doucement avec une cueillere d'argent, jusques à ce que les œufs soient pris suffisamment, & lors ont les tirera hors du feu, & vous les broüillerez encore un petit, afin qu'ils achevent de se prendre. On peut de la mesme façon faire des œufs broüillez avec du jus de citron ou d'orange, & il en faut moins mettre, principalement de jus d'orange ; parce qu'estant en trop grande quantité, on est obligé de le tenir long-temps sur le feu, ce qui le rend un peu amer.

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II.

Œufs broüillez au verjus avec du beurre.

FAites fondre du beurre dansun plat ou dans un poësle, battez par exemple quatre œufs avec du verjus, adjoûtez y du sel, versez les dans le beurre, & les remuez jusques à ce qu'ils soient pris & espoissis, rapez-y un peu de muscade par dessus ; vous pouvez y adjoûter des apprestes de pain frit.

Autrement.

Mettez du beurre frais, & de bon miel dans une escuelle de terre sur le feu, & pendant que le beurre se fond, cassez une demie douzaine, ou tout autant qu'il sera besoin de jaunes d'œufs, & y adjoûtez environ demy verre de verjus, pour une demie douzaine de jaunesd'œufs, sans qu'il y ait de blanc, assaisonnez-les de sel, & battez tout ensemble, comme si c'estoit pour faire une aumelette de jaunes d'œufs, versez-les dans le beurre, & les remuez tousjours avec une cueillere jusques à ce qu'il soient époissis.

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III.

Œufs broüillez au verjus de grain.

FAites cuire du verjus en grain dans du beurre, puis ayez des œufs battus avec du verjus, & assaisonnez de sel, versez-les dans le beurre, & les broüillez jusques à ce qu'ils soient cuits, puis on y raspera un peu de muscade.

Autres œufs broüillez.

Delayez par exemple quatre œufs avec un peu de verjus, & les faites cuire en les broüillant ; & lors qu'il seront cuits à demy, adjoûtez-y environ deux cueillerées de jus, ou sausse de champignons qu'on ait bien apprestez, adjoûtez y peu de sel, & achevez de faire cuire ces œufs.

IV.

Œufs broüillez avec boüillon de viande.

CAssez, par exemple, quatre œufs frais, & les delayés avec environ six cueillerées de consommé, ou d'autre bon boüillon de viande qui soit sans herbes, versez-y ce boüillon une cueillerée l'une après l'autre vous pouvez y adjoûter un peu de verjus, & du sel à discretions : faites-les cuire à feu mediocre, jusques à ce qu'ilssoient liez moderément, & lors on retirera le plat hors du feu, & vous

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pourrez y rasper un peu de muscade, ou de la crouste de pain.

Œufs broüillez à la cresme.

BAttez quatre œufs dans un plat avec deux cueillerées de crême, assaisonnez-les de sel, vous pouvvez y mettre aussi un peu d'écorce de citro confite, qui soit raspée ou coupée bien menu, versez cét appareil dans une autre plat, dans lequel il y ait du beurre fondu : faites les cuire doucement, & les remuez jusques à ce qu'ils soient liez suffisamment.

VI.

Œufs broüillez au fromag.

MEttez fondre dans un plat environ gros comme un œuf de beurre, cassez aussi dans un autre plat trois œufs, & les battez comme pour en faire une aumelette, adjoutez-y environ la grosseur d'ne petite noix de fromage coupé en petits morceaux, & lors quele beurre sera fondu, versez les œufs, & les faites cuire à feu mediocre, & les broüillez tousjours avec une cueillere jusques à ce qu'ils soient liez moderement, puis on les tirera hors du feu : tenez les couverts d'une assiette de peur qu'ils ne se refroidissent, & les servez incontinent. Si le

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fromage n'est pas beaucoup salé, adjoutez-y autant qu'il sera besoin de sel en delayant les œufs.

VII.

Œufs broüillez avec chicorée.

COupez bien menu de la chicorée blanche qui soit tendre, & la mettés entre deux plats, ou dans une tourtiere sur un feu mediocre, afin qu'il jette son eau, puis on l'égoutera bien, puis on la fera uire avec du beurre & du sel, & quand elle sera bien cuite, on battra des œufs comme pour en faire une aumelette, versez-les dans le beurre, dans lequel est la chicorée, par exemple, vous mettrez cinq ou six œufs pour faire un plat mediocre, & ils seront meilleurs, d'autant plus qu'il y aura d'œufs, & si vous n'y mettez que le jaune, il en faudra un plus grand nombre, broüillez le tout ensemble, & y raspez de la muscade, & quand le tout sera pris suffisamment, & que ces œufs seront liez mediocrement, ne les remuez plus, il suffit de les couvrir & de les laisser encore quelque peu de temps sur le feu, afin qu'ils achevent de cuire.

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VIII.

Œufs broüillez aux Concombres.

PElez de concombres, faites les parboüillir dans l'eau, puis on les tirera à sec pour les aire esgouter ; puis vous les couperez en tranches deliées, & vous en mettrez trois ou quatre poignées dans une poësle, dans laquelle il y ait prés d'un quarteron de beurre à demy roux, assaisonnez-les de sel menu, & de poivre, & les fricassez, & quand ils le seront assez, versez-y trois ou quatre jaunes d'œufs delayez avec un peu de verjus, remuez le tout ensemble dans la poësle, & lors que les œufs seront cuits suffisamment, dressez le tout dans un plat : on peut y rasper de la muscade pardessus.

IX.

Œufs broüillez à lasasse verte.

CAssez, par exemple, quatre œufs, & les battez un peu comme si c'estoit pour faire un aumelette, assaisonnez-les de sel & d'un peu de poivre & d'épisse : adjoûtez environ la grosseur d'un œuf de mie de pain bien emiée, ou quasi autant defleur de farine, battez bien ce meslange, & y adjoûtez autant de cueil-

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lerées desausse verte comme il y a d'œufs, puis on versera cét appareil dans un plat, dans lequel il y ait environ la grosseur d'un œuf de beurre frais, qui soit bien chaud, & demy roux, faites cuire doucement ces œufs, & les broüillez avec une cueilliere jusques à ce qu'ils soient cuits suffisamment,

X.

Autre Marmelade, ou œufs broüillez.

DElayez le blanc & jaune de six œufs, avec environ six cueillerées d'eau rose ou d'eau commune, adjoûtez y du sel avec un macaron escrazé, & gros comme une noix de mie de pain blanc, qui soit emiée bien menu, ou deux macarons seulement, & environ la moitié d'une feüille d'escorce de citron confite, qui soit raspée ou coupée par petits morceaux. Versez cét appareil dans un plat, dans lequel il y ait environ la grosseur d'un œuf de bon beurre bien chaud : laissez cuire ces œufs, & les tournez de fois à autre, avec une cuelliere à la façon des autres œufs roüillez. Lors que cette Marmelade sera cuite suffisamment, sans la laisser trop secher, retirez la hors du feu : on peu adjoûter

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dans ces œufs une cueillerée ou deux d'hypocras, ou de malvoisie, ou de vin d'Espagne lors qu'il sont cuits à demy, & puis les broüiller avec la cueillere, & achever de les faire cuire moderément. Ces œufs sont plus agreables froids que chauds, & quand ils sont cuits on les peut mettre dans une abesse de paste fine, & en faire une tourte.

XI.

Œufs broüillez aux amandes.

PRenez un biscuit ou deux qui soent minces, separez le dessus d'avec le dessous, & les faites secher prez le feu : faites aussi durcir, par exemple, quatre œufs, puis on en tirera le jaune, écachezle avec une cueillere dans une escuelle, adjoutez-y trois autres jaunes d'œufs qui soient cruds, deux macarons reduits en poudre, ou la grosseur d'un bon œuf, ou un peu plus d'amandes pelées, qui soient pilée exactement avec un peu d'eau rose, & deux cueillerées de sucre, du sel à discretion, & meslez ces choses ensemble, vous pouvez y adjouter de l'escorce de citron confite, coupée bien menu : gouttez de l'appareil, & si vous jugez qu'il soit bien assaisonné, mettez-

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le sur un peu du feu, & le broüillez avec une cueillere, & lors qu'il sera bien chaud, adjoutez-y des morceaux de biscuits sechez prés le feu, & la grandeur d'un quart d'escu ou environ, enfoncez les un peu dans la marmelade, en sorte qu'ils en soient couverts, & que neantmoins on les en puisse tirer commodement avec un fourcette.

XII.

Autres œufs broüillez.

ASsaisonnez bien des champignons, ou des mousserons, & les faites cuire, on peut y adjouter quelques asperges rompuës par morceaux, & lors que les champignons ou mousserons seront preste à servir, cassez-y trois ou quatre œufs, & les broüillez, & les faites cuire avec le reste jusques à ce qu'il soient liez suffisamment.

XIII.

Œufs à la Polonnoise.

FAites tremper de la mie de pain blanc dans du boüillon du pot, puis on la pilera bien dans un mortier de marbre, & vous la mettrez dans un plat, cassezy douze œufs ou plus, adjoutez-y un peu de sel, & cinq ou six cueillerées de

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boüillon, qu'il faut verser peu à peu en delayant lesoeufs, puis on y mettra de l'escorce de citron confite raspée, ou seulement coupée par tranches bien deliées, versez cét appareil dans un plat, dans lequel il y ait du beurre frais qui soit fondu, à demy roux ; faites cuire doucement ces œufs & les broüillez jusques à ce qu'ils soient pris. Au lieu de boüillon à la viande, on peut se servir de laict pour faire ces œufs.

XIX.

Œufs mingons.

PRenés, par exemple dix jaunes d'œufs frais, mettez-les dans un plat avec autant de cueillerées de consomm, ou de boüillon à la viande sans herbes, & qui soit degraissé, mettez-le cueillerée à cueillerée pour delayer peu à peu les jaunes d'œufs en les remuant tousjours, afin de les dissoudre exactement dans le boüillon, puis vous y adjoûterez environ un demy quarteron ou un quarteron de sucre en poudre, & une once d'escorce de citron confite ; rapée ou coupée par petits morceaux extrémement minces : laissez tremper toute ces choses ensemble environ une demie-heure, après y avoir ad-

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joûté peu de sel, si vous jugez que le boüillon ne soit pas assez salé. En suite il faudra mettre environ quatre cueillerées d'eau roze dans une autre écuelle, avec une demie once de sucre ; faites les boüillir environ une demie douzaine de boüillons seulement, puis y verser les œufs assaisonnez comme il a esté dit, couvrez le plat, faites les cuire doucement comme des œufs au laict, ou bien vous les tournerez avec une cueillere d'argent comme des œufs au verjus ; & lors qu'ils seront pris, retirez le plat hors du feu, puis quand ils seront un peu refroidis, vous mettrez dessus environ une once de sucre en poudre, & quelquefois on y adjouste quelque peu de musc dissoult dans de l'eau roze, ou de l'eau de canelle, mangez ces œufs à demy froids ; il sont bons aussi estant refroidis.

XV.

Œufs à la heguenotte.

CAssez quatre ou cinq œufs, & les mettez avec le jus d'un membre de mouton, ou de quelque autre viande rôtie, broüillez les ensemble sur le feu, & y adjoustez du sel : on peu y mettre du verjus, ou de jus de citron, ou d'orange,

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on y met aussi quelque fois des champignons bien cuits, & assaisonnez : dés que les œufs seront liez suffisamment, il faut les retirer du feu : tenez les encore couverts quelques peu de temps, puis y raspez un peu de muscade : on y met quelquefois un peu d'ambre gris en poudre, & du sucre. En cette mesme faon vous pourrez faires des œufs broüillez avec de la sausse d'asperges, ou de poulets, ou de poissons, apres en avoir osté les arestes.

FIN.

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AVERTISSEMENTAU LECTEUR.

SI vous voulez faire vostre profit de ce Livre, remarquez bien toutes les cuissons du sucre ; & lors que je dis à lisse gros, à lisse menu, à perle grosse, à perle menu, le menu est lem oins cuit, le gros est le plus cuit : quand je dis cuit en gelée, c'est lors que le sucre est meslé avec des decoction, ou du jus de fruict. La gelée est faite lors qu'en prenant du syrop avec une cueillere, le versant en bas, il tombe par gros morceaux & ne coule plus comme fait le syrop. Prenez garde que les bouteilles où vous mettez vos breu-

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vages agreable, soient bein nettes & les bouchez bien aussi.

Tenez vos eaux d'Italie le plus fraichement que vous pourrez, & ne les faites qu'à mesure que vous en aurez affaire.

Ne mettez pas vos syrops en lieu trops sec, de crainte qu'il ne candissent.

Le balet dont je vous parle pour vos cresmes & laictages doit estre fait de bouleau bien épluché, ou de branches d'ormeau pelé ; faites le de la grosseur du poulce, & les liez bien ; coupezles bouts.

Les Salades ausquelles je ne mets point d' assaisonnement, se servent avec le vinaigre & le sucre.

Vous pouvez ambrer & musquer toutes les praslines avec le musc & ambre preparé. Vous pouvez aussi avec le mesme musc

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& ambre musquer & ambrer vos massepains, mesmes les glacez.

Vous pouvez donner les couleurs aux conserves avec les couleurs preparées, lors que vous ne trouvez pas des fruicts : Par exemple, au lieu de pistache, vous empoyerez un jus de poirée, & au lieu de grenade, vous pourrez vous servir d'épine vinette, vous le pouvez aussi ambrer & musquer.

Les fruicts & fleurs que vous blanchirez, tenez les tousjours en lieu sec.

Vous pouvez donner telle couleur que vous voudrez à vos paste de sucre avec les couleurs preparées.

Nettoyez bien la paille sur laquelle vous tirerez vos oranges & citrons ; vous pouvez les tirer aussi sur ds clayes ou fils d'arechal.

Vous pouvez garnir vos com-

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potes avec de l'escorce de citron, des cerises à oreille, de pistaches, grains de grenades, marons, brignolles, &c.

Je n'ay point mis le sucre qu'il faut aux confitures à châque article, crainte de faire un trop gros volume ; mais si vous les voulez bien faire, mettez aussi pesant de sucre que de fruict à toutes, excepté les cerises & les coins.

Mettez aux cerises trois quarterons de sucre pour une livre de cerises, on les peut faire avec moins de sucre, & ne mettre qu'une demie livre pour une livre de sucre.

Mettez aux coins cinq quarterons de sucre pour une livre de fruict.

Pour les oranges, citrons, vous n'en pouvez trop mettre, il faut qu'ils nagent dans le sucre, le reste vous peut servir aux conserves, aux praslines, aux compotes de

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poires, & aux noix vertes.Mettez aussi livre à livre aux confitures seiches, & apres les avoir tirées de l'estuve, mettez-les dans les boëtes de sapin, ou autres : mettant toûjours du papier entre deux, crainte qu'elle ne se gastent, & les tenez en lieu sec, ayez soin de les changer souvent de papier, au moins jusqu'à ce qu'elles ne jettent plus de syrop, & que le papier ne soit plus moüillé : Du reste du syrop vous pouvez vous en servir aux confitures liquides, & aux pastes de fruict, en meslant moitié sucre, moitié syrop.

Mettez aussi les pastes de fruict dans des boëtes, & les changez souvent de papier, mettez aussi pesant de sucre que de marmelade pour faire vos pastes, vous les pouvez faire à trois quarterons de sucre ou à demie livre.

Tenez vôtre candi en lieu sec.

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Aux pastes de Gennes, mettez une demie livre de sucre à une livre de marmelade.

Tenez vostre sel blanc en lieu sec.

Tenez bien nets vos bassins, ou poëslons dans lesquels vous ferez vos confitures, & qu'ils soient de cuivre rouge, l'escumoire & cueillere de mesme cuivre, ou d'argent.

Que le four pour cuire vos massepains soient de fer ou de cuivre rouge, ce n'est pas que l'on ne les puisse faire cuire dans un four de Patissier, ou Boulanger, faute d'autre.

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LECONFITURIERFRANÇOIS OU LA MANIÈRE DE FAIREtoutes sortes de Confitures,Liqueurs, & Breuvagesagreables.

CHAPITRE I.

Preparation du Musc & de l'Ambre.

MEttez le Musc ou Ambre dans un petit mortier de fonte, & le broyez bien ave le pilon aussi de fonte, mettez-y un peu de sucre en poudre & apres l'avoir bien broyé, mettez-le dans du papier pour

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vous en servir à ce que vous voudrez.

Couleurs preparées.

CHAPITRE I.

Poirée preparée pour faire de la couleur verte.

PRenez des feüilles de poirée bien verte, ostez les cottons, & les lavez bien, & les pilez dans un mortier, puis les passez dans un linge pour en tirer le jus, & mettez dans un plat, & le faite boüillir un boüillons, jettez-les sur un tamis ou serviette, prenez ce qui restera sur le tamis pour vous en servir à vos pastes & conserves.

Cochenille preparées.

Prenez une once de cochenille, demie once d'allun, demie once de cristal mineral & broyez bien le tout ensemble dans le mortier de fonte : lors que vous voudrez vous en servir, délayez-le avec un peu de verjus, ou de l'esprit de vin, & le passez dans un linge, & vous servez du jus.

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Gomme adragant.

Vous la trouverez chez les Espiciers & Droguistes.

Fleurs de Lis.

En Esté prenez des fleurs de Lis, prenez les brains jaunes qui sont dedans, faites les seicher, & les mettez en poudre lors que vous aurez affaire.

CHAPITRE II.

Clarification du Sucre & Castonnade.

MEttez vostre sucre ou castonnade dans une bassine ou poëslon, faites les boüillir, mettez des œufs dans une terrine, ou autre vaisseau, sçavoir les coques blanc et le jaune, ou si vous voulez n'y mettez que le blanc, mais tout y est bon : foüettez-les avec de petit balet, & de l'eau, jusques à ce qu'ils soient tous en escume, mettez en une partie dans vostre sucre lors qu'ils commence à boüillir, le remüez avec l'écumoire, & apres escumez-le, & y remettez encore du blanc d'œufs foüettez, & l'écumez, continuez jusqu'à ce qu'il soit bien clair

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& bien net, passez-le dedans une chausse ou linge, il se gardera si long temps que voudrez pour peu qu'il soit cuit à lisse.

A vingt-cinq livres de castonade, il faut environ trois pintes d'eau pour la faire fondre, & trois œufs pour la clarifier, & trois demy septiers d'eau avec les œufs pour la foüetter ensemble, faites en sorte avant que passer vostre sucre, qu'il soit cuit à lisse.

Cuissons de sucre

La premiere est à la lisse, elle se remarque lors que le syrop commence à s'épaissir, qu'en le prenant avec le doigt, & le mettant sur le poulce, il ne coule plus, & demeure rond comme un pois.

Cuit à perle.

Seconde cuisson est lors qu'en prenant avec un doigt, & le mettant sur le poulce, & ouvrant les doigts il en sort un petit filet & lors qu'il en sort un gros de la longueur de la main, cela s'appelle à perle grosse.

Cuit à la plume.

3. Cette cuisson a plusieurs noms differens, les uns disent & soufle, les au-

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tres à l'espatule, d'autre à rosard, d'autres à la plume, à laquelle je m'arreste, & elle se remarque en mettant une espatule dedans, & secoüant le sucre en l'air, il s'envole comme des plumes seiches sans gluë ; ou bien trempez une écumoire dans le sucre, soufflez au travers jusqu'à ce que le sucre s'envole par feüilles : Cette cuisson est celle des conserves & des tablettes.

Cuit à bruslé

4. Cette cuisson se remarque lors que l'on trempe son doigt dans de l'eau fraische, puis dans le sucre, & qu'en le remettant dans l'eau fraische, le sucre se casse net comme un verre sans gluë, on peut faire la mesme remarque avec un petit baston. Cette cuisson est celle du grant biscuit de citron, celle du caramel, & du sucre torts, ou penide, c'est la derniere cuisson.

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Breuvage delicieux.

CHAPITRE IV.

Hypocras.

PRenez de bon vin, le mettez dans quelque vaisseau bien net, & qui ne puisse pas donner de mauvais goust. Mettez dedans du sucre ou castonnade, un peu de canelle, du gingembre la grosseur d'une noisette, du poivre long deux brains, douze cloux de girofle, de la fleur de muscade, ou massis deux feüilles, une pomme de reinette pelée & coupée par roüelle ; laissez le tout tremper environ demie heure, tenez le couvert, puis pilez une douzaine d'amandes douces à demies pilée, & les mettez dans vostre chasse quand vostre sucre sera fondu, & que vous serez prest à passer vostre hypocras, metez dedans un peu d'eau de fleur d'orange, & le passez sur vos amandes, & le passez trois ou quatre fois : si vous le voulez ambrer & musquer, broyez vostre ambre & musc dans

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un petit mortier avec un peu de sucre en poudre, & le mettez dans du cotton, ou filasse, & l'attachez au vas de vostre chausse, & passez l'hypocras par-dessus ; si vous voulez le garder plus de huit jours, n'y mettez point de pomme, ny de citron. Il faut à deux pintes de vin environ une livre & demie de sucre, deux grains d'ambre, & un grain de musc.

Rossoly.

Prenez de bon esprit de vin, le mettez dans une bouteille ou vaisseau bien net, & estoit par en haut, mettez dedans six grains de poivre blanc concassé, du poivre long deux grains, du massis deux feüilles, un peu de canelle, douze cloux de girofle, gros comme une noisette de gingembre, & que le tout soit bien proportionné, de l'any & de la coriande trois pincées qui soient concassées, bouchez le bien, & le laissez infuser vingtquatre heures en lieu frais, puis le passez dans une chausse comme l'hypocras ; mettez un jus de citron en le passant, faites cuire vostre sucre à la plume, puis ostezle de dessus le feu, & mettez vostre esprit de vin dedans, & le passez derechef à la chausse, il faut beaucoup plus d'am-

384bis

bre & de musc qu'à l'hypocras ; Il faut à une pinte d'esprit de vin trois livres de sucre.

Populo.

Faites la mesme composition qu'au Rossoly, faites cuire une livre de sucre à la plume, mettez demy septier d'esprit de vin dedans, apres l'avoir passé & le laissé refroidir, mettez dedans une chopine de bon vin blanc bien clair, une pomme de reinette pelée & coupée par roüelle, un peu d'eau de fleur d'orange, passez-le à la chausse comme le rossoly, n'oubliez pas à le bien ambrer & musquer.

Angelique.

Prenez une pinte, de blanquette ou vin deScipion, mettez dedans une livre de sucre royal, un peu d'anis & de coriande de concassée, une pomme de reinette, & un citron pelé & coupé par roüelle, toris ou quatre zestes de citron, un peu de poudre de cypre, un peu d'eau de fleurs d'orange, laissez le tout infuser sans feu demie heure, & le passez à la chausse avec ambre & musc comme l'hypocras.

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Vin bruslé.

Prenez une aiguiere d'argent, ou pot de terre neuf, mettez dans une pinte de bon vin, une livre de sucre, un peu de massis, du poivre long, cloux de girofle, une branche de laurier, deux branches de romarin ; & ayez un grand feu de charbon, mettez vostre pot au milieu, & que le feu soit tout autour : lors qu'il bout bien fort, mettez y le feu avec du papier ; & lors que le feu de dedans s'éteint, il le faut oster de dessus le feu, il se boit tout chaud.

Vin des Dieux.

Pelez des pommes de reinette, & des citrons, autant de l'un que de l'autre, les coupez par rouëlles, ayez un bassin ou plat, faites un lict de pomme & de citron, & mettez dessus un lict de sucre en poudre, & continuez selon la quantité que vous en desirez faire, & mettez de bon vin par-dessus jusques à ce qu'elles trempent, les couvrir & les laisser environ deux heures infuser, & le passez à la chausse comme l'hypocras.

Sorbec façon d'Alexandrie.

Prenez une rouëlle de veau, la degraissez bien, coupez-la par morceaux, la fai-

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te cuire avec trois pintes d'eau jusqu'à ce qu'elles soient reduittes à chopine, & la passez dans un linge, & prenez la decoction, & la mettez avec deux livres de sucre, & le ferez cuire à la plume, &  l'ostez de dessus le feu, & mettez dedans une chopine de jus de citron, & la mettez dans des phioles de verre ; cette liqueur se conserve pourveu qu'elle soit bien bouchée & tenuë en lieu sec, & lorsque l'on s'en veut servir, il en faut prendre deux cueillerées, & les mettre dans un verre & l'emplir plein d'eau fraische, & le verser dans un autre par plusieurs fois.

Aigre de Cedre.

Prenez un quarteron de  gros citrons, les coupez de leurs longueurs, ostez les testes & les pepins, levez bien doucement l'endroit où est le jus, & le mettez dans un pot de terre neuf : faites cuire deux livres de sucre à la plume, & lors qu'il sera cuit mettez vostre pot sur un grand feu de charbon, & jettez vostre sucre cuit dedans, & le laissez boüillir jusqu'à ce que le syrop soit à perle, il se conserve & s'employe de mesme que le Sorbec.

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Limonade.

Prenez une pinte d'eau, mettez dedans demie livre de sucre, le jus de six citrons & de deux oranges, l'écorce de la moitié d'un citron & d'une orange que vous aurez pressé : battez bien l'eau dans deux vaisseaux bien nets en la versans l'un dans l'autre plusieurs fois, & la passez dans une serviette blanche.

Orangeade.

Elle se fait de mesme façon que la Limonade, sinon qu'il n'y faut point de citrons.

LES EAUX D'ITALIE.

Eau de Framboise.

Prenez des Framboises bien meures, les pressez & les passez dans un linge, mettez le jus dans une phiole ou bouteille de verre découverte, mettez-la trois ou quatre heure au Soleil, puis tirez le jus bien doucement crainte de remuer la lie qui est au fonds ; mettez demy septier de jus avec une pinte d'eau fraische, demie livre de sucre,  les battez bien dans deux vaisseaux, & lors que

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le sucre est fondu, passez-la dans une serviette : Elle se boit le plus frais que l'on peut.

L'eau de Cerise, de Grenade & de Groseille se font de la mesme façon.

Prenez des Abricots bien murs, ostez les noyaux, faites-les cuire dans de l'eau bien nette, & laissez refroidir l'eau & la passez dans une serviette, mettez à une pinte d'eau un quarteron de sucre : Elle se boit comme celle de Framboise.

Eau de Iasmin.

Prenez une pinte, mettez-y un quarteron de sucre royal, une poignée de fleurs de Iasmin, mettez le tout tremper ensemble l'espace de demie heure, & les battez dans deux vaisseaux, puis la passez dans une serviette.

L'eau de fleurs d'orange, & de roze muscade, se font comme celle de Iasmin.

Eau d'Espine-Vinette.

Prenez les grains de l'Epine-Vinette, faites les boüillir un boüillon avec un peu d'eau, les passez, prenez le jus, & en mettez demy septier, avec une pinte d'eau, un quarteron de sucre, bat-

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tez les bien dans deux vaisseaux & la passez dans une serviette.

Eau de Coriande.

Concassez de la Coriande, & la mettez dans une pinte d'eau fraische avec un quarteron de sucre, & les laissez tremper jusqu'à ce que l'eau ait bien pris le goust, & la passez.L'eau d'Anis, d'Orange & de Citron, se fait de mesme celle de Coriande.

Eau de Canelle.

Faites boüillir une pinte d'eau, avec demie once de canelle rompuë par morceaux, apres l'avoir osté de dessus le feu, mettez un quarteron de sucre, laissez la refroidir, & la passez.

Syrops rafraischissans.

CHAPITRE V,

Syrop de Violette.

Separez les feüilles de Violette d'avec leurs boutons, & les pilez dans un mortier, faites cuire du sucre à la plume, ostezle de dessus le feu, & mettez vos Vio-

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lettes dedans & les remuez avec le sucre passez-les dans une serviette : Il faut une livre de sucre, quatre onces de feüilles de violette mondez.

Syrop de violette pour infusion.

Prenez un coquemar de terre neuf, mettez quatre onces de violettes mondées dans une chopine d'eau, le bouchez bien, faites-les infuser sur de la cendre chaude l'espace de vingt-quatre heures, passez les violettes dans une serviette, & les pressez, prenez la decoction qui en sort, faites la boüillir avec une livre de sucre, jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle, tirez-le, & le serrez dans une phiole ou bouteille de verre, & le bouchez lors qu'il sera froid.

Syrop de bouroche, & de buglose, de roze pasle, se font de mesme que celui de violette.

Syrop de Cerise.

Prenez deux livres de cerises bien mures, ostez la queuë & les noyaux, faites les boüillir avec demy septier d'eau, jusqu'à ce qu'elles ayent jettés toute leur eau, passez-les dans une serviette, prenez demy septier de jus, & le mettez dans une livre de sucre, faites-

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les boüillir jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle : Il se doit faire à grand-feu, puis le tirez, & les serrez.

Syrop d'Abricots.

Prenez des Abricots bien murs, les pelez, & ostez les noyaux, mettez sur un bassin des petits bastons bien nets : faites sur les bastons un lict d'Abricots, & un lict de sucre en poudre, & continuez selon la quantité qu'en desirez faire : couvrez-les & les mettez à la cave toute une nuict, tirez le syrop qui sera tombé dans le bassin si vous le voulez garder, faites le boüillir un boüilon jusqu'à ce qu'il soit cuit à perle.

Les Abricots vous peuvent servir à faire de tourtes ou marmelades.

Syrop de Verjus.

Pilez du Verjus & en tirés le jus, mettés-le dans une bouteille de verre découverte, mettez la au Soleil, & ne la bouchez point, & la tenez toûjours pleines : lors que le Verjus sera clair ; faites cuire une livre de sucre à la plume, & mettez demy septier de Verjus dedans, tirez-le & le serrez.

Syrop de Coins.

Rapez des Coins bien murs, pressez

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la rapure dans une serviette ou presse, prenés le jus qui en sort, & le mettés dans une phiole de verre, mettez le au Soleil ou en lieu chaud ; & lors qu'il sera clair ; faites cuire une livre de sucre à la plume, ostez-le de dessus le feu, & y mettez dedans quatre onces du jus, tirez-le & serrez.

Syrop de Mures.

Prenez un demy cent de mures qui ne soient encore que rouges, faites les boüillir avec demy septier d'eau ; lors qu'elles seront cuites, passez-les dans une serviette, & les pressées, prenez le jus, faites le boüillir avec une livre de sucre, jusqu'à ce qu'il soit cuit à perle tirez-le & le serrez.

Syrop de pommes.

Pelez des pommes par rouëlles, ostez les pepins, accommodez les comme le syrop d'abricots, mais ne les faites point cuire.

Syrop de Grenade.

Epluchez bien les grains & les pressés, & en tirés le jus, mettés-le dans une bouteille de verre en lieu chaud, lors qu'il sera clair, faites cuire une livre de sucre à la plume, ostez-le du feu

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& y mettez demy septier de jus de grenade, tirez-le & le serrez.Syrop de Citron.Faites cuire une livre de sucre à la plume, prenez quatre onces de jus, & le mettez dans le sucre hors du feu, tirésle et le serrez.

CHAPITRE VI.

Praslines.

FAites cuire une livre de sucre presque à la plume, mettés dedans une livre d'amandes douces avec leurs peau & les remuez, & lors que vous verrez que le sucre sera cuit à la plume, ostezles de dessus le feu & les laissez refroidir en les remuant toûjours pour leur faire prendre leur sucre, & estant froide mettés-les sur une table, ostés le sucre qui n'aura pas pris aux praslines, & le mettez à part ; remettez les praslines dans la bassine où elles auront cuit sur le feu, & les remuez toûjours avec l'espatule : lorsqu'elles jetterons leurs j[us] mettés le sucre qui a resté dedans, &

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les remuez pour les faire couvrir de sucre, & lors qu'elles jettent leurs jus mettez-les en bas, & remuez-les jusqu'à ce qu'elles soient froides : remetez les encore une fois ou deux sur le feu pour les faire rougir, remuez toûjours, & les ostez lorsqu'elles commencent à jetter leurs eaux : Vous les pouvez ambrer & musquer.

Praslines de Citron.

Prenez des zestes de citron & les faites cuire à l'eau & confire, comme il est dit dans le traité des zestes de citrons & d'oranges. Lorsque le sucreest cuit à perle mettez les zestes dedans & les ostez du feu remuez les bien afin qu'ils se couvrent de sucre, tirez-les sur de la paille comme des oranges.

Praslines de violette.

Faites cuire demie livre de sucre à la plume, ostez-le du feu, mettez dedans environ trois onces de feüilles de violette mondé, & une livre de prasline remués le tout ensemble avec l'espatule, & les tirez sur de la paille.

De roze, & genests.

Prenés des feüilles de rozes & les coupés bien menuës, & faites les praslines comme celle de violette.

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Conserves.

CHAPITRE VII.

Conserve de fleurs d'Oranges.MOndés la feuïlle de fleurs d'orange de son bouton, coupés-la par petit morceaux, faites cuire du sucre à la plume, ostez-le du feu, mettez vôtre fleur d'orange dedans, remués-la avec une cueillere ou espatule, & la dressés sur du papier lorsqu'elle commence à froidir.

De fleur d'Orange liquide.

Mondés la fleur d'orange de son bouton, & la faites boüillir un boüillon dans de l'eau, tirés-la & la mettés dans de l'eau fraische, faites-la égouter & la pilez dans un mortier, faites cuire du sucre à la plume, oestez-le du feu, mettez vostre fleur d'orange dedans & le meslés ensemble, & la mettez dans un pot de fayance ou grais, & la laissez refroidir avant que de la couvrir : Il faut une livre de sucre & demie livre de fleur d'orange.

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Conserve d'eau de fleurs d'orange.

Faites cuire du sucre à la plume ostez-le de dessus le feu, mettez dedans un peu d'eau de fleur d'orange, & la dressez sur du papier.

De grains de grenade.Mondez les grains de grenade bien rouge, faites une quaisse de papier de grandeur pour contenir le sucre que vous y voudrez mettre, mettez les grains de grenade dedans, faites cuire du sucre à la plume, & le versez dans la quaisse sur la grenade, lors qu'elle commence à froidir, coupez-la par bande avec un couteau.

De pistache.

Mondez les pistaches avec de l'eau chaude, & les mettez dans de l'eau froide, faites les égouter & les pilez dans un mortier, faites cuire du sucre à la plume, ostés le du feu, & mettez les pistaches dedans, & les meslez bien, & les dressez sur du papier.

Autre conserve de pistache.

Mondez des pistaches & les coupez par morceaux, faites cuire du sucre à la plume, & mettés des pistaches dedans & les dressez sur du papier.

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Du jus de Citron.

Faites cuire du sucre à la plume, ostezle du feu, mettez du jus de citron dedans, & le dressez sur du papier.

Rapure de Citron.Rapez un citron dans de l'eau, passez-la dans un linge, faites secher la rapure, faites cuire du sucre à la plume, mettez la rapure dedans & la dressez sur du papier.

Conserve de Rose.

Prenez des roses de Provins en poudre, & les délayez avec un peu de jus de citron, faites cuire du sucre à la plume, ostez-le du feu, & mettez les roses dedans, & les dressez sur du papier.

Conserve de Violette.

Mondez les feüilles de violette de leurs boutons, pilez-les dans un mortier, & les passez dans un linge pour en tirer le jus, faites cuire du sucre à la plume, ostez-le de dessus le feu, & mettez vostre jus de violette dedans, le remuez & le dressez sur du papier.

Conserve de Violette marbrée.

Faites la de mesme façon que l'autre & pares avoir mis le jus de violette, mettez-y un peu de jus

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de citron, & elle se fera de plusieurs couleurs.

Conserve marbrée.

Prenez des abricots secs, des cerises seches, de l'écorce de citron confite bien verte, coupez-les par petits morceaux, faites cuire du sucre à la plume, & les mettez dedans & la dressés. Vous pouvés en faire aussi de toutes sortes de fruicts & de fleurs de diverses couleurs.

De Cerises.

Prenés des cerises bien mures, ostés les noyaux & la queuë, faites-les un peu boüillir avec de l'eau, égoutés-les bien, coupés-les par morceaux, faites cuire le sucre à la plume, ostés-le de dessus le feu & mettés vos cerises dedans & les dressés.

Prenés des cerises un peu vertes & en tirés le jus, & les faites comme les precedentes.

Groseilles rouges & framboises : se font comme les cerises.

Caramelle.

Faites cuire du sucre à brûlé, ostésle du feu, mettés un peu d'ambre dedans, frottés une pierre de marbre ou assiette d'huile d'amandes douces, jettés vostre

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caramelle dessus par petits, morceaux comme de la conserve, & la tirés avec la cueillere.

Sucre tors.

Faites cuire du Sucre à bruslé ostés-le du feu, & le jettez sur une pierre de marbre que vous aurez froté d'huile d'amande douce, frotez aussi vos mains & le maniez bien, ayez des crochets, de fer pour le tirer  & le filer, & le dressez comme le massepain tourtillé.

Peneides.

Elles se font de mesme le sucre tors.

Tranches de jambon.

Faites cuire du sucre à plume, mélez-le dans trois vaisseaux ; dans l'un mettez du jus de citron, dans l'autre des roses de Provins, & l'autre de la cochenille ne poudre, ou du jus de grenade ou d'espine vinette en poudre, faites un lict de la blanche sur du papier, deux lict de rouge, continuez jusqu'à ce que le sucre soit de l'époisseur d'un jambon, coupez-le par tranches en forme de tranche de jambon.

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La manière de blanchir les fruits & les fleurs.

Chapitre VIII.

Blanchir le fenoüil, cerises, groseilles, &c.

PRenez des bouquets de fenoüil lors qu'ils sont defleuris ou sec mettez des blancs d'œufs dans un plat avec un peu d'eau de fleur d'orange, trempez les bouquets dedans, puis les sucrés de sucre en poudre jusqu'à ce qu'ils soient tous blancs, faites-les secher devant le feu, ou au Soleil.

Fenoüil au sec.

Prenez des jettons ou branches de fenouïl vert bien tendre, faites les bouïllir à grande eau, estant cuites mettez-les dans de l'eau fraische, égoutez-les bien, faites cuire du sucre à perle, mettez vôtre fenouïl dedans, & le faites bouïllir à grand feu jusqu'à ce que le sucre soit cuit à la plume, ostez-le du feu, & tirez le fenoüil sur de la paille.

1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (401-451)

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Rozes au sec.

Prenez des boutons de rozes, ostez le vert, laissez la queuë, faites-les boüillir deux ou trois boüillons, mettez-les dans de l'eau fraische, confisez, & les tirés de mesme fenoüil.

CHAPITRE IX.

Oranges & Citrons.

LEvez la peau des oranges le plus delicatement que vous pourrez, mettez la pelure dans de l'eau fraische & les oranges dans d'autre eau, faites boüillir de l'eau, fendez les oranges par le bout, & les mettez cuire, faites-les boüillir demie heure, & les tirez & mettez dans l'eau fraische, vuidez le jus, les zestes & les grains de dedans avec une petite cueillere d'acier, faites cuire du sucre à perle, égoutez les oranges, faites les boüillir à grand feu jusqu'à ce que le sucre soit cuit à la plume, ostez les de dessus le feu, les laissez un peu reposer, tirez les oranges sur de la paille, & les laissez secher avant que de les lever : Pour un quarteron d'oranges il faut

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environ six livres de sucre.

Oranges par anneaux.

Pelez les oranges comme les entieres, & les coupez par roüelles de l'épaisseur d'un demy doigt, mettez-les dans de l'eau fraische, faites boüillir de l'eau, égouttez-les, voude-le dedans des anneaux, faites les cuire à l'eau, estans cuites tirez-les & les mettez dans l'eau fraische, & les confisez comme les oranges entieres, & les separez en les tirant sur la paille.

Oranges de Tailladins.

Pelez les oranges de mesme les autres, mettez-les à mesure dans l'eau fraische, coupez-les en quatre, vuidez bien le dedans, & les nettoyez avec un couteau, coupez les par bandes comme des lardons, mettez lez à mesure dedans l'eau fraische, faites boüillir de l'eau & les égoutez, & les mettez dedans, faites-les cuire, & les remettez dans l'eau fraische, confisez-les comme les autres, & les tirez sur la paille avec des fourchetes en forme de petits rochers.

Zetes d'orange.

Prenez les zestes ou pelures que vous avez levez, faites-les bouïllir à grande

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eau environ demy quart d'heure, tirezles, & les mettez dans l'eau fraische, faites les boüillir dans quatre eaux differentes, & les mettez toûjours dans de l'eau fraische, faites les égouter, & les confisez comme les oranges, & les mettez sur la paille en forme de petits rochers.

Citron par quartiers.

Pelez les citrons comme les oranges, fendez-les en quatre, & nettoyez bien le dedans, mettez-les à mesure dans l'eau fraische, faites boüillir de l'eau & les mettez dedans, tirez-les lorsqu'ils commenceront à amollir, & les mettez dans l'eau fraische, confisez-les comme les oranges, & les tirez sur la paille, separezles les uns des autres.Tailaldins de citrons ce font de mesme ceux d'oranges.

Chair de Citron.

Prenez des gros citrons ou limons, & les pelez comme les oranges, levez la chair avec un coûteau le plus long & le plus large que vous pourrez, de l'épaisseur d'un escu blanc, mettez-les mesure dans l'eau fraische, faites-les cuire à l'eau, & les confisez comme les

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quartiers de citron, & les mettez sur la paille sans qu'ils se touchent l'un & l'autre.

Chair de ponsiere & de ballotin, se confisent de mesme celle de citron.

Confitures qui ne se font point sur les Confiture de boutique.

CHAPITRE X.

Compote de pomme.

PRenez des pommes de reinette, les pelez, & les coupez par quartiers, ostez les cœurs, & les mettez à mesure dans l'eau fraische, faites-les cuire avec de l'eau & du sucre à grand feu, estant cuites tirez-les & les mettez égouter sur une assiette ou sur le bord d'un plat & les dressez sur une assiette, & achevez de faire cuire vostre syrop, faites-les boüillir jusqu'à ce qu'il soit cuit en gelée, & lors qu'il commence à froidir mettez-le sur les pommes avec une cueillere : Il faut pour six pommes trois

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chopines d'eau, & trois quarterons de sucre.

Prenez de pommes de calvi bien rouges coupez-les par quartiers, fendez la peau par taillades, ostez le cœur, & la faites cuire comme la compôte de reinette, n'y mettez pas tant d'eau, & y mettez demy septier de vin.

Autres pommes.

Comptez des pommes de reinette par quartiers, ostez les cœurs & les faites cuire avec chopine d'eau & demie livre de sucre, lors qu'il n'y aura plus de syrop, & qu'ils commenceront à rôtir par-dessous mettez une assiette dessus, & les renversez comme un fromage que l'on retourne, faites que la peau soit dessus.

Pommes entieres.

Prenez des pommes de reinette, tailladez la peau, & les faites cuire comme les pommes par quartiers, laissez y un peu de syrop & les servez entieres.Gelée de pomme de reinettes.Pelez des pomme de reinette, coupez-les par morceaux, ostez les pepins, faites les cuire avec de l'eau, passez-les dans une serviette & les pressez bien, prenez la decoction des pommes & la

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faites boüillir avec du sucre à grand feu jusqu'à ce que le syrop soit cuit : Il faut pour une pinte de decoction une livre de sucre.

Gelée de grenade.

Faites la gelée de pommes de reinette, & lors qu'elle sera presque cuite, mettez des grains de grenade bien rouges que vous aurez mondez, & les faites un peu boüillir, & les passez dans un linge.

Compote de marons.

Faites rôtir des marons à braise, pelezles & les applatissez, & puis les mettez dans un plat d'argent avec du syrop d'abricots ou autre, un peu de vin d'Espagne, faites les boüillir lorsque vous les voudrez servir, mettez une assiette dessus, & les renversez comme un fromage,

Compote de Ctron.

Ostez la peau des citrons, & les coupez par roüelles, ostez les pepins faitesles boüillir un boüillon dans de l'eau, tirez les & les mettez dans l'eau fraische, faites cuire du sucre à perle grosse, égoutez-les & les mettez dedans boüillir jusqu'à ce que le syrop soit cuit en gelée, & les dressez sur une assiette.

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Compote d'orange.

Faites-la comme celle de citron, mais ne la faites point cuire à l'eau.

Compote de chair de citron.

Pelez les citrons, levez la chair par tranches, mettez-la à mesure dans l'eau fraische, faites boüillir de l'eau, & faites boüillir vostre chair de citron dedans, remettez la dans l'eau fraische, faites cuire du scure à perle, mettez la chair de citron dedans jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle grosse, dressez-la sur une assiette, mettez du jus de citron en servant.La compote de chair d'orange se fait de mesme.

Compote de poires.

Pelez des poires, faites-les cuire à grand feu & grand eau, estant cuites mettez-les dans de l'eau fraische, faitesles égouter & les confisez avec l'eau, & des sucrez, mettez du jus de citron en servant.

Pelez des poires de cuisse-madame, ou d'autres poires & les mettez dans un pot de terre avec de l'eau, du sucre, & un peu de vin & de canelle, laissez-les boüillir jusqu'à ce qu'il n'y aye plus guere de syrop.

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Compote de poires au jus d'orange.

Faites cuire de grosses poires à la braise ou à la cloche, pelez les ou les fendez par quartiers, ostez le cœur & les faites boüillir avec du sucre & un peu d'eau, lors que le syrop sera tout consommé, mettez-y du jus d'oranges & les tirez.

Compote d'espine vinette.

Ostez les queuës & les pepins de l'épine-vinette, faites la boüillir avec de l'eau & du sucre, faites cuire le syrop à perle, & la tirez.

Marons au sec.

Faites cuire des marons à la braise & les pelez, faites cuire du sucre à la plume & l'ostez du feu, mettez les marons dedans & les remuez, tirez les lorsque le sucre commencera à froidir, mettez les sur la paille.

Faites une glace avec de l'eau de fleur d'orange & du sucre, comme il est dit au glacé de macepain, faites cuire des marons à la braise & les pelez, & les applatissez, glacez-les d'un costé & les faites cuire avec le dessus du four, puis les retournez de l'autre costé & les glacez, & faites cuire de mesme.

Brugnolles glacées, cerises & péches,

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se font de mesme les marons.

Abricots glassez.

Prenez des abricots confits secs, & les glacez de mesme les marons.Pistaches au sec.Mondez les pistaches dans l'eau chaude, puis les mettez dans l'eu fraische, faites les égouter & secher, & les tirez au sec comme les marons.

Gelée de Coings.

Coupez les coings par morceaux, & les faites bien boüillir dans de l'eau passez les dans un linge & les pressez bien, prenez la decoction qui en sort, & mettez à une pinte une livre de sucre, faitesla cuire à petit feu & la tenez couverte, lors qu'elle sera cuite tirez-la & la dressez.

Cotignac clair.

Faites la de mesme celle de coings, & la mettez dans des boëtes de sapin : vous pouvez y mettre un peu de cochenille pour la rendre plus rouge.

Cotignac espais

Pelez des coings bien meurs, coupezles par morceaux, faites les bien cuire dans de l'eau, & puis apres les passez dans une passoire bien deliée, prenez ce

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qui sera passé faites cuire du sucre à perle avec de l'eau, dans laquelle auront cuit les coings, faites les boüillir à petit feu jusqu'à ce qu'ils soient cuits en gelée, & les serrez dans des boëtes de sapin : Il faut à une livre de marmelade, une livre de sucre.

Marmelade de Coings.

Faites-le de mesme le cotignac espais mais ne le faites pas tant cuire, & la mettez dans des pots de fayance ou de terre & la couvrez de papier lors qu'elle sera froide.

Marmelade de pommes.

Elle se fait de mesme celle de coings.Faites-le comme celuy de coings, faites-le cuire à grand feu, & ne les couvrez point.

Confitures liquides.

CHAPIRE XI.

Abricots verts.

PElez les abricots & les mettez à mesure dans de l'eau fraische, faites tie-

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dir de l'eau, & les mettez dedans, mettez y un peu de vinaigre & les tenez couverts, faites-les oüillir jusqu'à ce qu'ils soient verts, ostez-les du feu & les laissez refroidir dans l'eau, tirez-les & les mettez dans l'eau fraische, faites cuire du sucre à perle, égoutez les abricots & les mettez dedans, faites-les cuire à grand feu jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle grosse, tirez-les, si c'est pour garder ne faites pas tant cuire le sucre avant que de les y mettre.

Amandes.

Faites cuire de la cendre ou de la gravelée avec de l'eau, mettez les amandes dedans, & les y laissez jusqu'à ce qu'elles se pelent sous le poulce, ostés-les de l'eau pelez les avec les doigts, & les mettez dans de l'eau fraische, & les confisez comme les abricots.

Groseilles.

Ostez la fleur, la queuë & les grains de deans, & les faites cuire & confire comme les abricots.

Cerises à noyaux.

Prenez des cerises bien meures, & ostez la queuë, faites cuire du sucre à la plume, mettez les cerises dedans & les fai-

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tes boüillir à grand feu un quart d'heure, ostez les de dessus le feu, & les laissez refroidir, remettez les sur le feu, & les faites cuire jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle grosse, & les tirez.

Framboise.

Prenez des framboises, qu'elles ne soient pas trop mures, ostez-la queuë & les mettez dans une terrine, faites cuire du sucre à la plume, & les mettez sur les framboises, mettez-les dans une étuve ou lieu sec un demy jour, faites-les boüillir à fu mediocre, jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle.

Groseilles rouges.

Ostez les queuës des groseilles, faites cuire du sucre à la plume, & mettez les groseilles dedans apres les avoir écumées laissez-les refroidir & les achevez de cuire, faites que le syrop soit cuit à perle.

Abricots avec le noyau & la peau.

Prenez les abricots lors qu'ils commencent à meurir, ostez la queuë & les percez par endroits avec un coûteau, faites tiédir de l'eau mettez les abricots dedans, ne les faits pas ouïllir, tirezles à mesure qu'ils mousseront sur l'eau,

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& les mettez dans l'eau fraische & les égoutez, & faites  cuire du sucre à perle, mettez les abricots dedans laissez-les boüillir demy quart-d'heure, ostez les du feu les laissez refroidir, & les achevez à grand feu, faites cuire le syrop à perle grosse.

Mures.

Prenez de mures un peu rouges, ostés la queuë, faites cuire du sucre à la plume, mettez les mures dedans apres les avoir escumées, laissez-les refroidir & les faites boüillir jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle.

Abricots sans noyeau.

Ostez les noyaux des abricots & les piquez, puis les confisez comme les autres.

Abricots sans peau.

Pelez les abricots le plus delicatement que vous pourrez, & les mettez à mesure dans l'eau fraische, faites-les blanchir à l'eau, & les confisez comme les autres.

Prunes Imperiales.

Prenez les prunes lors qu'elles commencent à meurir, faites chauffer de l'eau, mettez les prunes dedans apres

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les avoir piquées avec la pointe d'un couteau, mettez y un peu de vinaigre & les tenez couvertes, faites bien chauffer l'eau, mais ne la faites pas boüillir, lors qu'elles commenceront à verdir ostez les du feu, & les laissez refroidir dans leur eau, tenez-les couverts estant froides, tirez-les & les mettez dans de l'eau froide, faites cuire du sucre à la plume, égoutez les prunes & les mettez dedans, faites les cuire à grand feu, & apres les avoir escumées ostez-les du feu, & les laissez froidir, achevez de les faire boüillir à grand feu jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle grosse, tirez-les & les serrez.

Imperiales sans peau.

Pelez les Imperiales le plus delicatement que vous pourrez, mettez les à mesure dans l'eau fraische, & les faites cuire et confire de mesme les autres.

De perdrigon blanc.

Prenez le perdrigon blanc un peu verre, & les faites verdir & confire de mesme les imperiales.

Perdrigon sans peau.

Pelez les prunes, & les mettez à mesure dans l'eau fraische, faites les ver-

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dir & confire de mesme les autres.

Perdrigon rouge.

Faites les cuire à l'eau boüillante, & les tirez à mesure qu'elle cuiront, & les mettez dans de l'eau fraische, faites cuire du sucre à la plume, & mettez les prunes dedans apres les avoir esgoutées, faites-les cuire à feu mediocre, laissez les refroidir apres les avoir escumées, achevez les au mesme feu, & faites cuire le syrop à perle & les tirez.

Prunes de damas rouge.

Elles se confisent de mesme le perdrigon. Toutes sortes de prunes se peuvent confire en l'une de ces deux sortes. Celles qui se doivent verdir de mesme les imperiales : & celles qui se doivent rougir de mesme les perdrigon rouge. Les blanches se peuvent faire aussi de mesme le perdrigon rouge, mais faites-les cuire dans le sucre à grand feu.

Poires de rousselet.

Prenez des poires de rousselet bien meures faites lescuire à grande eau, estant cuites mettéz-les dans de l'eau fraische, pelez-les bien delicatement, & les remettez dans de l'eau fraische, faites cuire du sucre à lisse, & mettez

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les poires dedans, faites-les cuire à feu mediocre : Vous y pouvez mettre du clou de girofle & de l'écorce d'orange seiche, laissez les refroidir & les achevez de mesme, faites cuire le syrip à perle, & lestirez.

Poires muscadelles.

Faites-les cuire de mesme le rousselet, mais faites les cuire à grand feu, & n'y mettez point de cloux ny d'orange. Toutes sortes de poires se peuvent confire de la mesme façon : Les blanches faites-les cuire à grand feu.

Noix blanches.

Prenez des noix vertes bien tendre, & les pelez jusqu'au blanc & qu'il n'y demeure point de vert, mettez-les à mesure dans l'eau fraische, faites-les cuire à grand feu & grande eau apres les avoir percées de travers avec une lardoire, laissez les boüillir jusqu'à ce qu'en les picquant avec une épingle elles n'y tiennent point, tirez-les & les mettez dans l'eau fraische & les picquez de caneles, de cloux de girofle ou d'escorce de citron confite, faites cuire du sucre à lisse & les mettez dedans, faites les cuire à grand feu, laissez-les refroidir & les achevez

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de cuire, faites le syrop à perle, & les tirez.

Noix vertes.

Prenez des noix vertes bien tendres, pelez les & les percez, faites-les cuire & confire comme les autres.

Avant péches.

Faites les boüillir dans de l'eau jusqu'à ce que la peau commence à se lever, tirez-les alors & les mettez dans de l'eau fraische, puis levez la peau & les mettés égouter, faite cuire aussi du sucre à perle, et mettés le fruict dedans, faite les cuire à grand feu, puis les laissés refroidir, & les achevés de faire cuire jusqu'à ce que le syrot soit cuit à perle grosse, puis vous les tirez.

Alberges.

Prenez les alberges & les mettés dans l'eau fraische, faites cuire du sucre à perle, faites les égouter & les mettez dedans lorsque le syrop sera presque cuit à perle ostés les du feu, mettés-les dans une terrine & les laissez reposer vingt quatre heures, remettés-les sur le feu, & faites  cuire le syrop à perle grosse & les tirez.

On peut confire de la mesme façon

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les mirlicotons, les mirobolans, & toutes les pavies ou péches dont le noyau tient à la chair. Si vous en confisez il les faut recuire de deux mois en deux mois, ou lorsque le syrop commence à se décuire.

Péches de Corbeil.

Prenez des péches un peu vertes & les pelez, & ostez les noyaux, metez le fruict dans de l'eau fraische, faites-les verdir à l'eau comme les prunes imperiales, & les confisez de la mesme façon.

Muscat.

Prenez le muscat lorsqu'il commence à meurir, ostez les pepins, faites cuire du sucre à la plume & y mettez le muscat, couvrez-le & le laissez reposer, estant froid remettez-le sur le feu mediocre, faites cuire le sucre à perle, puis tirez les confitures.Le muscat sans peau se fait de mesme l'autre.

Verjus.

Prenez le verjus lorsqu'il commence à meurir, ostez les pepins, mettez-le à mesure dans l'eau fraische, faites chauffer de l'eau & mettez le verjus dedns, tenez

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le couvert & le laissez cuire à petit feu jusqu'à ce que le verjus ait repris sa verdeur, ostez le du feu & le laissez refroidir, & le tirez, & le mettez dans l'eau fraische, faites cuire le sucre à la plume, égoûtez-le verjus & le mettez dedans, faites-le cuire à grand feu, & que le syrop soit cuit à perle & le tirez.

Coins.

Prenez des coins bien meurs & les pelez, fendez-les par quartiers, & ayant osté le cœur, mettez le fruict dans de l'eau fraische, faites boüillir de l'eau & y mettez les coins ; tirez-les lors qu'il seront un peu molets, & les remettez dans l'eau fraische, faites cuire du sucre à lisse, & ayant fait égouter les coins, mettezles dedans le sucre, tenez les couverts & les faites cuire à petit feu, vous pouvés y mettre un peu de canelle, faites cuire le syrop en gelée, puis il faudra tirer la confiture.

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Confitures seiches.

Gorge d'Auge.

PRenez des laituës romaines montées, ostez la feüille & la peau bien delicatement, & les mettez à mesure dans de l'eau fraische, faites boüillir de l'eau & les mettez dedans, faites-les jusqu'à ce qu'en les picquants avec une épingle elle ne les puisse enlever, tirez-les & les mettés dans l'eau fraische, puis les tirés & les égoutez, & les mettez dans une terrine de leur longueur, faites cuire du sucre à perle & le versez par-dessus, mettez les deux jours à l'étuve, apres versez le syrop doucement dans une bassine & les faites recuire à perle & le renversez sur les letuës, & les remettez deux jours à l'étuve, mettez les dans la bassine avec le syrop, faites-les bouillir jusqu'à ce que le syrop soit cuit à perle, mettez-les dans des pots de grais & les serrés, & lors que vous en aurez affaire tirez-les & les faites secher à l'étuve. On confit de la mesme façon les brocolis de choux, & les branches de sureau.

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Abricots vers au sec.

Faites les de mesme les liquides, & apres avoir demeuré huit jours dans le syrop, tirez-les & les égoutez, & les dressez sur des feüilles de fer blanc ou des ardoises, ayez soin de les retourner, & les faites seicher à l'étuve. On confit de la mesme façon les amandes vertes.

Groseilles vertes.

Ostez les grains de dedans, & les faites de mesme les abricots vers.

Noix blanches.

Faites-les de mesme les liquides, & lorsque vous en aurez affaire, faites les esgouter & seicher, & les tirez sur des feüilles de fer blanc ou ardoises.

Cerises à noyaux.

Prenez des cerises bien meures, laissez les queuës, faites-les boüillir vingt boüillons avec un peu d'eau, égouttezles & faites cuire du sucre à la plume, & mettez les cerises dedans, faites-les boüillir demy quart d'heure, mettezles dedans une terrine & les y laissez huict jours, apres remettez-les dans la bassine, & faites cuire le syrop à perle menu remettez-les dans la terrine, & estans friodes, faites les égouter & les

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dressés sur des ardoises, & les faites secher à l'étuvé, & ayez soin de les retourner.

Cerises à oreilles.

Ostez la queuë & les noyaux, de cerises, & les confisez de mesme celles à noyaux, & les faites seicher à l'étuve.

Abricots à oreilles.

Prenez des abricots lors qu'il commencent à meurir, ostez les noyaux, & ayant pelé les abricots bien delicatement, mettés les à mesure dans l'eau fraische, puis faires tiedir de l'eau & les mettez dedans, tirez les à mesure qu'ils monteront sur l'eau, & les remettés dans l'eau fraische, égoutez-les, puis le mettez dans une terrine, & ayant fait cuire du sucre à perle menu, versez-le sur les abricots, & les laissez reposer un jour, puis versez le syrop bien doucement dans une bassine, & le faites recuire à perle, & le renversez ensuite sur les abricots ; continuez à faire recuire le syrop cinq ou six fois, & lors que les abricots auront assez pris de sucre laissez les reposez huit jours, & les faites égouter & secher à l'estuve, ayez soin de les retourner souvent, & les changer de feüilles, jusqu'à ce qu'elles soient seches.

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Abricots à noyaux.

Ostez les noyaux des abricots & les confisez comme les autres.

Péches de Corbeil.

Prenez les péches un peu vertes, pelez-les & ostez les noyaux & les confisez, & tirez-les comme les prunes imperiales.

Prunes Imperiales.

Prenez les prunes un peu vertes, lors qu'elles commencent à meurir, percezles en trois ou quatre endroits avec un couteau, faites chauffer de l'eau & les mettez dedans, faites les cuire sans les faire boüillir, mettez un peu de vinaigre dedans & les couvrez, laissez-les jusqu'à ce qu'elles commencent à verdir, ostez les du feu & les laissez refroidir dans leur eau, & les tirez & les mettez dans l'eau fraische, égoutez-les & les mettez dans une terrine, & les achevez comme les abricots.

Imperiales sans peaux.

Pelez les prunes & les mettez à mesure dans de l'eau fraische, & les achevez de mesme les autres.Prunes de Lilevert & de Perdrigon.Elles se font de mesme les Imperiales

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Poires de Blanquette.

Prenez des poires de blanquette bien meures, faites-les cuire à grand eau & grand feu, tirez-les lors qu'elles commenceront à mollir, & les mettez dans de l'eau fraische, pelez-les & les mettez à mesure dans d'autre eau fraische, egoutez-les, & les mettez dans une terrine, faites cuire du sucre à lisse & le versez sur les poires, laissez les reposer un jour & versez le syrop dans une bassine & le faites cuire à perle, continuez à recuire le syrop huit jours la derniere fois : mettez les poires avec le syrop, & faites cuire le syrop a perle, remettez-les dans la terrine & les y laissez huit jours, faites-les égouter de leur syrop & les dressez, & les faites secher à l'estuve.

On confit de la mesme façon les poires de Muscat de Rousselet.

Poires par quartiers.

Faites-les cuire à l'eau & les mettez dans l'eau fraische, pelez-les & les fendez par quartiers, ostez les cœurs & les confisez de mesme la blanquette.

Muscat.

Prenez le muscat lors qu'il commence à meurir, ostez les pepins & mettez le

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fruict dans une terrine, faites cuire du sucre à perle & le versez sur les muscats, et les achevez comme les abricots.

Muscat sans peaux.

Ostés les peaux & les pepins, & les confisez comme les precedents.

Verjus.

Faites verdir le verjus à l'eau comme les liquides, & les confisez comme le muscat sec.

Coings.

Prenés des coings bien meurs, fendésles par quartiers, pelés-les & ostés les cœurs, faites-les cuire à grand eau & les tirés à mesure, qu'ils seront cuits, & les mettés dans de l'eau fraische, faites-les égouter & les mettés dans une terrine, & les achevés comme les poires de blanquetes.

Pommes par quartier.

Prenés des pommes de reinette & les coupés par quartiers, pelés les & ostés les cœurs, faites les cuire à l'eau, mettés les dans de l'eau fraische, les égoutés & les mettés dans une terrine, & les confisez comme les poires blanquettes.

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Les pastes de fruits de fleurs.

CHAPITRE XIII. 

Paste de pommes.

PRenez des pommes de reinette, les pelés & ostés les cœurs & les faites cuire à l'eau, faites les égouter, passésles dans une passoire ou tamis, prenés la marmelade qui en sort, faites la seicher dans un poëslon sur le feu, remués-la toûjours crainte qu'elle ne brûle, lors qu'elle est bien seiche & ne tient plus au poëslon, mettés du sucre en poidre & la remués encore un peu, & la tirés & la dressées sur des feüilles de fer blanc ou ardoises, & faites secher a l'estuve, & lors qu'elle sera seiche d'un costé retournés-la de l'autre en la lavant avec un couteau, & la remettés sur d'autres feüilles, & la faites seicher, estant seiche, tirés-la & la mettés dans des boüetes de sapin avec du papier.

Paste d'Abricots.

Prenés les abricots ostés les noyaux,

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faites-les cuire à l'eau & les passés à la passoire ou tamis de crain, prenés la marmelade & la faites de mesme celle de pommes.

De Cerises.

Prenés des cerises bien meures, ostés les queuës & les noyaux, faites les boüillir vingt boüillon, tirez-les & les égoutés, passez-les comme les pommes.

De Framboise & de Groseille rouge.Elle se fait comme celles de pommes.

Paste de Péche.

Prenez des péches un peu vertes, ostez la peau & les noyaux, faites-les cuire à l'eau, & les passez & les faites comme celles de pommes.

Paste de Muscat.Prenez le muscat un peu vert, ostez les pepins & les passez à la passoire, prenez la marmelade, & faites la paste de mesme celles de pommes.

Paste de Verjus.

Ostez les pepins du verjus & les faites verdir à l'eeau comme pour les confire liquide, faites-les égouter & les passez, & les faites comme celles de pommes.

Paste de Coings.

Prenez des coings bien meurs, pelez

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les & les fendez par quartiers, ostez les cœurs & les faites cuire dans de l'eau, les égoutez & passés, & les achevés comme celles de pommes.

Paste contrefaite.

Paste de Cerises, Framboises, Groseilles.

Prenés de la marmelade de pommes, & luy donnez la couleur rouge avec la cochenille preparée ou la sinavre, & faites la paste comme celles de pommes.

Paste d'Abricots contrefaits.

Prenés de la marmelade de pommes & luy donnez la couleur jaune avec les fleur de lys preparées.

Paste de Prunes.Prenez de la marmelade de pommes, & luy donnez la couleur verte avec des feüilles de poires preparées, faites la paste de mesme celles des pommese.

Paste de Violette.

Mondez des feüilles de violettes de leurs boutons, pilez les dans un mortier, prenez de la marmelade de pomme, & meslez les violettes parmy, faites la paste de mesme celles de pommes.Vous pouvez faire des pastes de tou-

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tes sortes de fleurs de la mesme façon.

Paste de Gennes.

Prennez des coins bien meurs, faitesles boüillir entiers, estans cuits tirez-les & les mettez dans de l'eau fraische, pelezles, prenez la chair de coins & la passez dans une passoire, prenezla marmelade, faites cuire de sucre à souflé, & l'ayant osté du feu mettez la marmelade dedans & la remuez bien avec l'espatule du cueillere, mettez la dans une terrine & la laissez refroidir & la dressez, mettez le moule de fer blanc de la figure que vous voulez faire sur une ardoise, mettez de la paste dedans, & l'emplissez bien, levez le moule, faites la paste bien unie, cizelez la par-dessus ou y faites des ramages, faites-la seicher à l'estuve ; estant seche d'un costé retournez-la & la changez d'ardoise, & la sechez de l'autre, & lors que vous voudrez vous en servir prenez de l'or en feüille & le coupez par morceaux, dorez vostre paste par endroits, moüillez un peu l'endroit que vous voudrés dorer & mettre l'or dessus.

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Manière de candir les fruicts, et les fleurs

CHAPITRE XIV.

Oranges Candies.

PRenez des oranges confites seches, faites cuire du sucre à perle & presque à la plume, & le mettez dans une terrine, attachez une épingle à chaque orange, attachez un bout de fil à l'épingle, & attachés le fil à des batons que vous mettrez au-dedans de la terrine, mettés les oranges dedans, en sorte qu'elles trempent toutes & qu'elles ne touchent point au fond ny au bord, ny les une aux autres, mettés-les à l'estuvé, & les y laissés quatre ou cinq jours, puis les tirés.

Abricots candis.

Prenez des abricots, confits, secs & les attachés, & les faites candir de mesme les oranges.

Fenoüil Candis.

Prenez des bouquets de fenouïl secs,

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attachés-les par la queuë & les candissés de mesme les oranges. Vous pouvez candir toutes sortes de fruicts de mesme.

Violette candie.

Mettez les violettes avec leurs queuës dans une terrine, faites cuire du sucre à perle, & presque à la plume, mettez-le sur les violettes lors qu'il sera froid, mettez-les en lieu sec, les couvrez & les laissez huit jours, & les tirez & les mettez secher sur de la paille, ne les mettez point à l'estuve.

Fleur d'Orange candie.

Prenez la fleur d'orange en bouton & la candissez de mesme la violette.Fleur de Bouroche candie.Faites la candir de mesme la violette. Vous pouvés candir toutes sortes de fleurs de la mesme façon, excepté la Roze.

Boutons de Rose candie.

Prenez des boutons de roze, faitesles boüillir une douzaine de boüillons dans de l'eau fraische, faites-les bien égouter, & les faites candir de mesme les oranges.

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CHAPITRE XV.

Manière de faire les Dragées.

IL faut remarquer que pour faire des dragées il y a deux cuissons de sucre différentes ; l'une est nommée à perle, l'autre à lisse, comme ilssont expliqués dans les cuissons du sucre au traité des Confitures ; c'est pourquoy on dit dragées perlées, & dragées lissées.

Il faut pour toutes sortes de dragées, avoir une grande bassine de cuivre rouge avec deux ances & plate par le fond, ou d'argent, soustenuPe en l'air avec deux cordes à la hauteur de ceinture ou environ, sous laquelle vous mettrés un rechaud en une terrine avec du feu mediocre pour faire les dragées perlées.

Il faut avoir un outil de cuivre rouge en façon d'entonnoir, & que le goulot soit de la grosseur d'un feret d'éguillette, lequel vous susprendrés en l'air au dessus du milieu de la bassine, dans lequel vous mettrés le syrop lors que vous en aurés affaire.

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Amandes perlées.

Prenés des amandes douces bien entieres, & les netoyés bien de leur poussiere & ordure, mettez-les dans la bassine, dessechés-les un peu sur le feu, mettez du syrop dans l'entonnoir avec soing de bien remuer la bassine & faire tourner les dragées dedans, afin qu'elles prennent toutes du sucre également, vous les pouvés aussi quelquesfois remuer avec la main, & les separer l'une de l'autre, s'il y en a qui se tiennent, arrestés quelquefois le syrop, & les laissés un peu reposer & secher ; Vous les pouvés rendre si grosses & si couvertes de sucre que vous voudrez en continuant toûjours de mesme.

Amandes lissées.

Mettés bien les amandes & ldes dessechés à la bassine, prenés du syrop cuit à lisse avec une cueillere environ demy septier à la fois & le versés dans la bassine, & les remuez souvent avec la main, laissez les reposer quelquesfois ; Vous pouvez les couvrir de sucre tant que vous voudrez, en continuant toûjours de mesme.

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Pistache lissée.

Prenez des pistaches cassées & bien épluchées, mettez les dans la bassine, & y mettez du sucre cuit à lisse en mesme temps, & les faites comme les amandes lissées. Vous pouvez en faire aussi de perlées, en les faisant de mesme les dragées perlées, mais il ne faut pas les dessecher dans la bassine, il faut laisser couler le sucre en mesme temps.

Canelle de Milan.

Prenez de bonnes canelle nouvelle, & la coupez par petits morceaux comme des lardons, mettez-les dans la bassine, & mettez du sucre cuit à perle dans l'entonnoir, & le faites comme les amandes perlées.

Orange perlée.

Prenez des oranges bonnes à confire, ostez l'écorce de dessus bien mince, coupez l'orange en quatre, ostez le dedans, coupez-la par petits morceaux comme des lardons, faites les cuire dans l'eau & les confisez au sec, tirezles sur de la paille, & que tous les morceaux soient separez, & les mettez dans la bassine, & les faites come les amande[s pe]rlées.

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Pois sicrez ou Anis de Verdun.

Prenés de bon Anis bien doux, nettoyez-le bien & ostés toutes les queuës, & lors qu'il sera bien netoyé mettez-le dans la bassine le dessechez un peu, & achevés l'anis dem esme les amandes lissées. Et si en desirés faire de plus gros il n'y a qu'à les grossir.

Coriandes perlées.

Prenez de la coriandre nouvelle & l'épluchés & la nettoyés bien, & la mettés dans la bassine, faites les de mesme les amandes perlées.

Fenoüil endragée.Prenés de la graine de fenoüil verte bien douce, & les faites de mesme l'anis de Verdum.

Abricots en dragées lissées.

Prenés des abricots confits secs, ou de la paste d'abricots, pilez-la dans un mortier avec un peu d'eau de fleur d'orange, faites-la par petites boules comme un poix, & l'aplatissés avec les doigts comme une nantille, laissez-la un peu secher, & en faites des dragées comme les amandes lissées.

Dragée de chair de Citron.

Prenez de la chair de citron tirée au

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sec, & en faites des dragées de mesme celle d'abricots ; vous pouvez ambrer & musquer les pastes en les pilant au mortier.

Graine de Melon.

Lors que les melons sont bas, il faut serrer la graine des meilleurs & les tenir en lieu sec, & lors que vous voudrez faire des dragées, il la faut bien dessecher dans la bassine, & faire les dragées avec le syrop cuit à lisse de mesme les amandes lissées.

Graine de Concombre.

Dans la saison des Concombres il en faut serrer la graine & la tenir en lieu sec, lors que vous voudrez faire les dragées, il faut oster l'écorce de dessus & prendre l'amande de dedans, & faire les dragées de mesme celle de Melon, mais il ne faut pas les faire dessecher dans la bassine.

Graine de Citroüille.

Les dragées de citroüille se font aussi de mesme celle de concombres : On peut faire aussi des dragées de toutes sortes de fruicts ou paste de fruicts de la mesme façon.

Vous pouvés ambrer & musquer tou-

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tes les dragées, en mettant le musc & l'ambre preparé dans la bassine à la derniere couche que vous leur donnerez avec le sucre.

Manière de faire toutes sorte de Machepain.

CHAPITRE XVI.

Machepain commun.

LEs machepain & les biscuits sont décrits dans le pastissier François. Mondez les amandes douces avec de l'eau chaude, & les mettez dans de l'eau fraische, faites-les bien égouter, pilésles dans un mortier avec un pilon de bois, ayés soing de les arrouser bien souvent avec de l'eau commune ou de fleurs d'oranges ou autre, afin que la paste ne sente point l'huile, estant bien pilés en sorte qu'il ne reste rien de rude à la paste, faites cuire du sucre à la plume, & mettés vos amandes dedans, delayez-les bien & les faites secher sur le feu mediocre, ayés soing de les bien remuer avec

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l'épatule crainte qu'elles ne se brûlent au fond, & lors qu'il commenceront à secher, & ne plus tenir au poëslon, tirezles : Vous les pouvez servir chaud, ou le dressez de telle façon que voudrez, il se peut servir aussi froid, si vostre paste est trop seche rebattez-la dans le mortier avec du blanc d'œuf, & la tendez si molle que vous voudrez : vostre machepain estant dressé faites les cuire dans le four avec feu mediocre dessus & dessous, cette paste vous peut servir à plusieurs sorte de machepains. Il faut à une livre d'amande trois quarterons de sucre.

Machepain Royal.

Prenez de cette paste de machepain & la dressez par anneaux, mettez des blancs d'œufs dans un plat & trempez vos anneaux dedans, puis les mettez dans du sucre en poudre & les poudrez bien, & les mettez sur du papier, faites-les cuire à grand feu dessus & mediocre dessous, ne les levez point de dessus le papier qu'ils ne soient froids.

Machepain Royal rond.

Il se fait comme le precedent, mais il faut mettre dans chaque anneaux gros comme une noisette de paste, & qu'elle

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soit faites avec des blancs d'œufs & du sucre en poudre, & la remués bien avec une cueilliere petit à petit jusqu'à ce qu'elle soit un peu maniable, ayez soing de la bien remuer.

Machepain glacé.

Prenez de la paste de machepin commun & la dressez par anneaux, ou de telle façon que voudrés, faites une glace avec de l'eau de fleurs d'orange & du sucre en poudre, prenés de l'eau de fleurs d'oranges, mettés du sucre dedans, delayez-le bien jusqu'à ce que la glace soit un espaisse, trempés vôtre machepain dedans d'un costé, & le mettez sur du papier, & le faites cuire avec le dessus du four, & le feu mediocre estant cuit laissés-le refroidir & le trempés du costé qu'il n'est pas glacé, & le faites cuire auparavant.

Tarte de Machepain.

Prenez de la paste de machepain commun & la dressés en tarte de la grandeur que vous voudrez, faites-la secher dans le four, mettés dedans de la glace que vous aurés faites avec de l'eau de fleurs d'orange, & la faites cuire avec le dessus du four & le feu mediocre.

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Glace pour les Tartes de Machepain.

Prenés un blanc d'œuf, mettés du sucre dedans en poudre & le delayez bien mettés-y un peu de jus de citron, & mettés du sucre jusqu'à ce que la glace soit un peu épaisse. On se peut aussi servir de la glace faite avec l'eau de flers d'orange & sucre.

Tarte de Marmelade de fleurs d'orange.

Prenés de la paste de machepain, dressés vos tartes de la grandeur que vous voudrés, faites-les cuire au four par-dessous & non pas dessus, emplissés-les de marmelade, de fleurs d'orange, & les glacés par-dessus, faites cuire la glace avec le dessus du four.

Tarte de marmelade d'Abricots.Elle se fait comme la precedente, sinon qu'il y faut mettre de la marmelade d'Abricots : vous en pouvés faire de toutes sortes de marmelades.

Machepain d'Abricots.

Prenés des abricots secs sans noyaux & les pilés dans le mortier avec de l'eau de fleurs d'orange, mettés-y du sucre en poudre jusqu'à ce que la paste soit maniable, vous la pouvés dresser en telle façon que vous voudrez, & la faire cuire

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au four avec du feu dessus & dessous, & pouvés aussi en faire des tartes & abesses.

Machepain de Cerises, de Pommes, Prunes & Péches.

Tous les machepains se peuvent glacer & faire cuire la glace avec le dessus du four, vous les pouvez aussi musquer & ambrer.

Machepains d'Oranges & Citrons.

Prenés des oranges confites & les pilés bien dans un mortier, mettés-y deux fois autant de paste de machepain commun, pelés les bien ensemble, & les dressés comme vous voudrés, & le faites cuire au four, vous le pouvez glacer.

Machepain en forme de Biscuit.

Prenés de la mesme paste & l'estendés avec un rouleau, coupés-là de la forme d'un biscuit & la façonnés d'un costé avec un cousteau, & la faites cuire avec le dessus du four, estant froide glacés-la de l'autre costé, & faites cuire la glace avec le dessus du four.

Machepain liquide.

Pilés des mandes douces dans le mortier apres les avoir mondés, arrosés-les avec de l'eau de fleurs d'orange,

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estant bien pilez mettez-y une fois autant de sucre en poudre, & de l'écorse de citron vert rapé, dressés-le en petit pain ou forme de biscuit & le façonnés avec le couteau, & le faite cuire avec le dessus du four à petit feu, estant froid glacésle de l'autre costé & la faites cuire de mesme.

Machepain frizé.

Pilés des amandes mondées estant bien pilées mettés-y une livre d'amandes, trois blancs d'œufs & les pilés bien, mettés-y du sucre en poudre petit à petit jusqu'à ce que la paste soit maniable, passés-la à la seringue & le dressés en anneaux sur du papier, faites le cuire avec le dessus du four à feu mediocre, estans froid reournez-le de l'autre costé : Il le faut lever chaud de dessus le papier.

Machepain souflé.

Pilez un quarteron d'amandes douces bien mondées, & l'arrosés d'eau de fleurs d'orange, estant bien pilés mettés-y six blancs d'œufs & les pilés derechef, mettés y du sucre en poudre petit à petit jusqu'à ce que la paste soit maniable, passez-la à la seringue & la dres

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sés en anneaux sur du papier, faites-le cuire au four : il faut plus de feu dessus que dessous.

Paste de Jasmin.

Prenés des fleurs de Jasmin, par exemple une poignée, pilez-les au mortier avec un peu de gomme adragan, mettés y du sucre en poudre petit à petit jusqu'à ce que la paste soit maniable, il en faudra bien une livre, vous la pouvés seringuer ou filler, & la faire secher devant le feu ou à l'estuve.

Paste de fleurs d'orange.

Elle se fait de mesme.

Paste souflée.

Faites tremper de la gomme adragan avec de l'eau de fleursd'orange, passésla dans un linge & la broyés bien dans un mortier, mettés du sucre en poudre petit à petit jusqu'à ce que vous ayés fait une paste bien maniable, pilés-la bien, & l'estendés sur une table avec le rouleau de l'epaisseur d'un écu blanc, faites une glace avec de l'eau de fleur d'orange & du sucre en poudre & englacés vostre paste, coupés-la de telle façon que vous voudrés sur du papier, & la faites cuire au four à feu mediocre dessus & dessous.

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Coquillage de sucre.

De cette mesme paste vous pouvés faire toutes sortes de coquillage, & abesse de sucre, ne les glacés point & les faites cuire devant le feu.

Pets de Putain.

Mettés des blancs d'œufs dans un mortier & un peu d'eau de fleur d'orange, broyés les bien & mettés du sucre en poudre petit à petit, faites une paste maniable & en faites des petites boules de la grosseur d'une noix & les mettés sur du papier, faites les cuire au four.

Pets de Putains glacez.

Faites des boules de la mesme paster & les trempés dans des blancs d'œufs, puis les mettés dans du sucre ne poudre, tirés-les sur du papier & les faites cuire au four.

Paste de Citron.

Elle se fait de mesme paste que la precedente, en mettant dedans de la rapure de citron.

Muscadins.

Prenez de la paste dont on fait les pets de putain, faites des boules comme des poix, mettés les sur du papier, faitesles cuire au four à feu mediocre, &

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meslés du musc dans vostre paste.

Muscadins rouges.

Rougissés vostre paste avec de la cochenille ou de santel rouge en poudre.

Muscadins verts.

Verdissez vostre paste avec du jus de poirée.

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LA MANIERE DE PLIER toutes sortes de linge de Table, & en faire toutes sortes de figures.

POur bien plier le linge, il faut sçavoir le bien plisser & friser. Plissé & bastonné, c'est étendre une serviette bien blanche, bien unie, bien fermée sur une table bien nette, ou sur une carte bien unie & blanche qui ne serve qu'à cela ; apres avoir estendu la serviette dessus, il la faut prendre de travers le long de l'ourlet & le plisser le plus bas, & faire le plus plus petits que vous pourrez, pressés-les le plus fort que vous pourrés avec les doigts les uns contre les autres ; cette façon s'appelle plié en baston rompu, cette façon vous peut servir à mettre sur des couverts, ou à laver les mains.

Lors que les plis seront bien joints & pressés l'un contre l'autre, vous la pouvés plier en cœur en la pliant par le

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milieu, & joindre les deux bouts ensemble vers le milieu environ de quatre doigts de long, puis roulez la serviette vers la pointe sui fera le cœur : ou bien vous la pouvez plier en deux ou en trois, ou laisser tout de son long.

Pour friser une serviette.

Lorsque vous aurez plissé la serviette bien unie & bien pressée, il la faut friser avec le bout des doigts le plus delié que l'on  peut, en commençant par le milieu ou par l'un des bouts jusqu'à la fin : il faut avoir soin de bien presser les plis les uns contre les autres, & les tenir bien unis. Cette façon vous peut servir à faire plusieurs sortes de couverts en la dressant sur le pain en forme differente.

Pliez par bande.

Prenez une serviette de travers par l'ourlet & la pliez environ de la largeur d'un poulce, faites un autre plus qui deborde l'ourlet encore d'un poulce, faite encore un plis de l'autre costé de la mesme largeur, & continuez tout le long de la serviette tenant les plus les plus unis que vous pourrez, en apres renversez la serviette avec la main, & la pliez en trois en amenant les deux

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bouts vers le milieu, puis la plié par le milieu. Vous pouvés de cette façon faire plusieurs couverts differents.

Plié en Melon.

Prenés une serviette, & estant pliée par bandes, mais laissez aux deux bouts prés de demy pied sans plier, puis reprenés la serviette de travers & la plissés bien menu, & en le mettant sur le pain, pliés les deux bouts qui n'auront point esté pliés par-dessus le pain.

Melon frisé.

Pliés la serviette de mesme que la precedente, & lorsqu'elle sera plissée, reprenés tous les plis dedans, l'un apres l'autre, avec la pointe d'une épingle ou d'une lardoire  en les relevant en haut, & la mettre de mesme que l'autre sur le pain.

Coquille double.

Prenez une serviette & la pliés de travers en deux par le milieu, & pliés l'un des costés par bandes, & laissés pour le moins six doigts au bout sans plier, puis la retournés de l'autre costé & la pliés de mesme, & prenés la serviette de travers & la plissés bien deliée, pressez bien les plus, ouvrés les deux bouts de

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la serviette qui ne sont point pliés par bandes, mettés un pain dedans, renversés la serviette de sa hauteur sur le pain, & que les deux bouts soient dessous.qu'il se fasse deux pointes aux deux cô-

Coquille double & frisée.

Pliés la serviette par bandes & la plissés de mesme la precedente, & tirés les plis de dedans, de mesme que celle du melon frisé, & la dressés sur l'assiette de mesme l'autre.

Coquille simple.

Prenés une serviette en longueur, & pliés environ un pied de la serviette par dessous, & pliés le reste par bande à six doigs prés de l'ourlet, & prenés la serviette de travers & la plissés bien delié, prenés un pain & enfermée les deux bouts de la serviette dessous, & renversés la coquille sur le pain : Vous la pouvés friser de mesme que l'autre.

Pied de bœuf.

Pliés une serviette en trois de sa longueur, prenés les deux pointes & les amenés ensemble, en faisant une pointe dans le milieu de la serviette, retournés la serviette, prenés les deux bouts & les joignés ensemble dans le milieu, en sorte

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tez de la serviette, joignés les deux pointes ensemble bien également, repliez la serviette ar le molieu, ouvrés deux des bouts, mettez le pain dedans, & mettés les bouts sous le pain, & renversés la serviette sur le pain, & retirés une des pointes de la serviette sur le bas de l'assiette.

En Coq.

Pliez une serviette en deux detravers, que les deux ourlets soient joints ensemble, bastonnés la detravers le plus bas que vous pourrés, & la frisés bien delié, ouvrez la serviette jusqu'à un doigt prés du milieu, repassés les plis le plus que vous pourrés, mettés un gros pain sous le milieu de la serviette, en sorte que l'areste de la serviette soit au milieu du pain par un des bouts, ou à l'areste, vous tirerez la teste & le bec du coq laquelle vous éleverés en haut, vous luy ferez la crête & la barbe avec du drap ou serge rouge, & les yeux avec quelques graines rouge, & lesquelles vous ferez tenir avec de la cire blanche, ou de la gomme adragan detrempée, de l'autre bout de l'areste vous en tirerez la queuë que vous éleverés en haut des deux costés de la serviette, vous en formerés les aisles que

1680-Le cuisinier françois (La Varenne) (texte) (451-458)

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vous coucherez au long bien proprement.

Le Faisan.

Vous ferez le faisan de la mesme façon du coq, mais vous ne luy  ferez point de crête, & vous luy marquerez la teste & le col avec des petites fleurs de couleurs avenantes, & les ferez tenir avec de la gomme adragan detrempée, & vous luy alongerez la queuë & les aisles plus qu'au coq, & les tiendrez plus droites.

La Poule.Vous ferez la poule de mesme que le coq, mais ne luy faites pas la crête si rouge ny si grandes, ny la teste si relevée, & la queuë plus en bas & plus large.

Poule qui couve dans un buisson.

Vous plierez la serviette de mesme que celle du coq, vous mettrez dedans un gros pain, & vous ferez le buisson avec les bords de la serviette que vous tournerez en rond au tour du pain de la grosseur du poing, & ferez sortir des espines par endroits, & ferez passer la teste & la queuë par-dessous le buisson.

Poule avec ses poussins.

Vous plierés la serviette de mesme cel-

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le du coq & la dresserés sur un pain, vous tirerés ses petits des bords de la serviette, & les ferés sortir par-dessous ses aisles, son estomac & sa queuë : Vous pouvez aussi en faire quelqu'un sur son dos, ayez soin de bien former le bec et les yeux.

Le Poulet.

Le poulet se fait de mesme que le coq, mais il faut mettre le petit pain, & ne luy guere faire de crête, & la queuë peu levée.

Le Chapon.Le chapon se fait de mesme que le coq, mais il luy faut faire une crête raze.

Deux poulets dans un pasté.

Pliés une serviette de largeur en trois & la plissez de sa longueur, frisés-la le plus delié que vous pourrés, apres ouvré les deux bouts à un doigt prés des plis, vous mettrés sous chaque plis un pain rond, & des bords, de la serviette, vous formerés comme les bords d'un pasté, par-dessus lesquelles vous ferez sortir les testes des poulets des plis qui sont sur le pain.

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Quatre Perdrix.

Pliés une serviete de sa largeur en quatre & la bastonnez de sa longueur, & la frisez bien menu, ouvrés-la à un doigt prés des plis, & mettés un petit pain sous chaque ply & formés le bec, la queuë & les aisles d'une perdrix au droit de l'areste de chaque pain.

Un Pigeon qui couv dans un pannier.

Pliés une serviete de mesme façon que celle du coq, ouvrés-la & mettés un pain sous le plis ; faites la forme d'un pannier des bords de la serviette, tirez la teste & la queuë du pigeon au droit de l'areste par-dessus le pannier, & les aisles à costé.

Poulet d'Inde.

Pliés la serviette du Poulet d'Inde de mesme celle du coq, mettés un gros pain dessous, élevés la teste un peu plus haute, & tenez le col gros, mettés un mourceau de taffetas rouge sur son bec, semés la teste, & le col de petites fleurs de differentes couleurs ; vous pouvez faire la queuë en rond de mesme celle du Paon, mais il ne la faut pas tant élever.

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La Tortuë.

Bastonnez une serviette de travers & la frisez bien delié, mettez un pain rond sous le milieu, tirez la teste du milieu d'un des ourlets, & la queuë de l'autre ourlet, & tirez les quatre pieds des quatre coins de la serviette.

Le Chien avec un collier.A un pied d'un des ourlets de la serviette faites une bande d'un poulce de large, & bastonnez la serviette de sa longueur & la frisez, excepté la bande que vous éleverés en haut par plus de mesme la coquille frisée, de laquelle vous ferez le collier, mettez un gros pain long sous le ventre, & un à la reine dans la teste, que vous éleverez un peu en haut, & tirés les quatre pieds des quatre coins de la serviette.

Cochon de laict.

Pliés la serviette de mesme celle du Chien, mais n'y faites point de bandes, faites la teste un peu longue & l'abbaissez en bas, mettés un pain un peu gros dans la teste, & un long sous le ventre.

Le Lievre.

Bastonnez la serviette de travers & la frisez bien delié, mettez un pain long

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sous la serviette pour former le ventre mettez un petit pain pour former la teste, faites les quatre pieds des quatre coins de la serviette, & le tenez le plus long que vous pourrez.

Deux Lapins.

Pliez la serviete, de mesme que celle du Lievre, mettez deux pains longs dessous, faites une separation de la serviete entre les deux pains, ne tenez pas les corps si longs que celuy du lievre, ny la teste si grosse : vous pouvez tourner une teste d'un costé & l'autre de l'autre.Pliez une serviete par bandes de travers, & que les bandes soient d'un poulce de large, bastonnez-la, & relevez tous les plis de mesme que la coquille frisée, mettez un pain rond dessous, faite vostre serviete bien en rond, tirez les quatre pieds des coins de la serviete, & faite un petite teste.

Le Brochet.

Faites une bande de travers à la serviete qui ait demy pied de large, faites que l'ourlet soit ioignant le bord de la bande, bastonnez la serviete de sa longueur & la frisez, faites au deffaut de la bande environ quatre doigts de frisure, & laissez

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quatre autres doigts sans friser, refrisez encore quatre doigts & laissez prés l'ourlet quatre doigts sans friser pour former la queuë, mettez un pain long sous la serviete & rangez bien les bords, mettez un autre pain dans la bande qui n'est point frisée, de laquelle vous formerez la gueule.

La Carpe.

Bastonnez une serviete de travers, frisez environ demy pied & en laissez cinq ou six doigts sans friser, frisez en encore autant, & en laissez autant sans friser, & laissez à un bout deux ou trois doigts sans friser pour faire la queuë : mettez un pain long sous la serviete pour faire le corps, & un à la rene pour faire la teste.

Le Turbot.

Bastonnez une serviete de travers & la frisez jusqu'à quatre doigts de l'un des bouts, mettez un grand pain rond, large & plat sous la serviete du bout qui ne sera point plié, retournez-le en rond autour de la serviete, faites une petite teste & une petite queuë.

La Barbuë.

La Barbuë se fait de même que le Turbot.

La Mire.

Pliez une serviete de travers par le mi-

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lieu, & faites que les deux ourlets soient joignants ensemble, & repliez les quatre coins de la serviete en dedans, en sorte que cela fasse une pointe dans le milieu qui soit large d'un poulce ou environ, bastonnez la serviete de sa longueur, faites la bien deliée, excepté la point que vous laisserez sans friser, ouvrez la serviete par la pointe, mettez un pain rond dans le fond de la serviete & la refermez, dressez la pointe en haut à demy ouverte, vous pouvez mettre un pain long dedans pour la tenir droite.

Croix du S. Esprit

Prenez un serviete quarrée, ou la pliez par un bout, en sorte qu'elle soit bien quarrée, pliez les quatre coins de la serviete dans le milieu, qu'ils se joignent bien, & faites que les quatre pointes soient bien unies & égales, & retrounez la serviete de l'autre costé, la pliant de mesme façon, retournez la encore une fois, & la repliez de mesme, & la croix se trouvera bien formée : vous pouvez mettre un pain rond dessous.

Croix de Lorraine.

Pliez la serviete de mesme que la precedente & la retournez de l'autre costé, renversez la pointe du milieu de la serviete sur

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les quatre pointes de dehors vous pouvez mettre le pain rond dans la croix, ou sous la serviete.

Fin des Matieres.

[Suit la table des matières.]

1705- Le cuisinier roïal et bourgeois (Massialot) (texte) (i-xiv)

Le cuisinier roïal et bourgeois ; qui apprend a ordonner toute sorte de repas en gras & en maigre, & la meilleure maniere des Ragoûts les plus delicats & les plus à la mode.

Ouvrage tres-utile dans les Familles, & singulierement necessaire à tous Maîtres d’Hôtels, & Escuïers de Cuisine.

Nouvelle Edition, revuë, corrigée & beaucoup augmentée, avec des Figures.

A Paris,

Chez Claude Prudhomme, au Palais, au sixiéme Pilier de la Grand’Sale, vis-à-vis la Montée de la Cour des Aides, à la Bonne-Foi couronnée.

M. DCCV.

Avec privilege du roy.

[i]

Preface

Quoy que quelques-uns aïent voulu imputer le peu de durée de la vie de l’Homme, à son éloignement de la maniere de vivre simple & frugale de nos premiers Peres, & à la multitude des Ragoûts & assaisonnemens dont il a cherché le secret ; il est certain qu’on ne sçauroit le blâmer en cela sans injustice, & sans faire injure à la Providence, qui a créé tant de choses pour ses besoins ; lorsqu’il ne donne point dans l’excés, & qu’il n’oublie pas les devoirs de son état.

Ce n’est en effet que par ce principe, qu’on a lieu de condamner

[ii]

le luxe de ces Princes de l’Antiquité, qui non contens de faire venir pour leur Table, avec des frais immenses, tout ce qu’il y avoit de plus rare dans les autres parties du Monde, portoient encore leur magnificence ç faire servir en breuvage des perles d’un prix infini, qu’ils avoient de mollesse pour eux-mêmes, & d’aveuglement sur le fait de la Religion.

Mais quand on est aussi éloigné de ces dereglemens, qu’on le doit aujourd’hui présumer de l’Homme, aprés les lumieres dont il a été éclairé, & les exemples qu’on verra dans ce Livre, n’est ce pas rendre une espece d’hommage à la main liberale dont on a reçû tant de biens, que d’en sçavoir user de la maniere la plus parfaite ? Et quand tous ces Ragoûts pourroient contribuer à la corruption du corps ; n’est-il pas vrai aussi qu’ils servent

[iii]

à le soûtenir, & à empêcher le dégoût que l’affoiblissement de sa nature et les soins qui l’agitent lui communiquent boen-tôt, même dans l’usage des choses les plus déclicates, s’il ne sçait les relever par la variété, ou par la nouveauté des assaisonnemens ?

L’Homme n’est pas par-tout capable de ce discernement, qui est neanmoins un raïon de sa raison & de son esprit. Si l’on en croit les Relations, on void des Peuples entiers, qui bien loin, de s’entendre aucunement à réveiller l’appetit, par les apprêts qu’ils pourroient faire des Metz propres à leur nourriture, ignorent l’excellence & la boné de la plûpart ; leur preferent même souvent ce qu’il y a de plus sale, ou ne les mangent que de la maniere la plus dégoûtante. C’est n’est qu’en Europe où regne la propreté, le bon goût, & l’adresse dans l’assaisonnement des Viandes & des

[iv]

alimens qui s’y trouvent, & om l’on rend en même tems justice aux dons merveilleux que fournit l’heureuse situation des autres Climats, ; & l’on peut se vanter, principalement en France, de l’emporter en cela sur toutes les autres Nations, comme on le fait en politesse, & en mille autres avantages assez connus.

Ce Livre en peut être un assez bon témoignage. C’est un Cuisinier qui ose se qualifier Roïal, & ce n’est pas sans raison ; puisque les Repas qu’il décrit pour les differens tems de l’année, ont tous été servis depuis peu à la Cour, ou chez des Princes, & des Personnes du premier ordre : Et montrant ensuite à pratiquer ce qui composoit tous ces Repas, il donne les veritables manieres des Officiers de chez le Roy, qui y ont travaillé ; ainsi l’on peut dire que c’est tout ce qu’il y a de plus à la mode, & de plus exquis.

[v]

L’on trouvera donc ici, bien des choses inconnuës dans les Livres de Cuisine imprimez ci-devant ; & d’autres dressées avec beaucoup plus d’art & d’un meilleur goût, aussi-bien qu’expliquées d’une façon plus claire & plus intelligible. Dans cette vûë on n’a rien oublié de toute ce que l’art peut apprendre pour rendre les choses plus succulentes & plus riches ; & neanmoins on avouëra qu’on ne va point au-delà de ce qui peut se recouvrer assez facilement. Que si l’on se rencontre en des lieux, ou des conditions qui ne permettent pas d’y atteindre, on ne laissera pas souvent de bien faire à moins, tâchant d’en approcher le plus prés que l’on pourra ; & c’est en quoi ce Livre ne sera pas inutile dans les Maisons Bourgeoises, où l’on est reduit à s’en tenir à peu de chose : outre qu’il s’y peut presenter des occasions où l’on est baien-aise, & quelquefois obligé

[vi]

de donner des Repas qui passent une dépense mediocre ; & alors, comme un Cuisinier peut avoir tout ce qu’il faut, il est necessaire qu’il sçache l’emploïer avec esprit, afin de s’en faire honneur.

Il y a d’ailleurs dans ce Livre, mille manieres de choses assez communes, comme Poulets, Pigeons, & même pour la Viande de Boucherie, qui peuvent donner beaucoup de satisfaction dans des Ordinaires passables, sur tout à la Campagne & dans les Provinces : & l’on peut dire generalement, qu’on n’y a rien omis qui puisse contribuer à faire vivre un Maître agreablement, & à soulager ceux qui ont soin de lui apprêter à manger ; puisque, toûjours sans s’écarter des meilleures manieres qui sont à present en usage, on s’est étendu à tout ce qui se peut servir sur toutes sortes de Tables, si l’on en excepte ce qu’on appelle du dernier Bour

[vii]

geois ; à quoi il auroit été fort inutile de s’arrêter, parce qu’on en vient aisement à bout, quand on sçait faire les autres choses qu’on marque ici.

Aprés avoir ainsi rendu compte du dessein de ce Livre, & de la sûreté des Instructions qu’on y donne, nôtre Cuisinier ne craint pas qu’on le censure ; à moins que ce ne soit en ce qu’il divulgue les secrets de son Art, pour obliger le Public : ce qui est assez pardonnable, l’utilité commune devant l’emporter sur celles des particuliers. Il peut arriver qu’en travaillant differemment, on fera aussi-bien : il est libre là-dessus, de sui[vre]

chacun sa metode, parque tout revient au même, pourvû que les choses soient d’une grande propreté, d’un bon goût, & dressées avec esprit.

On s’étoi proposé d’ajoûter ici ce qui regarde les Officiers, pour le Dessert, les Confitures & les

[viii]

Liqueurs : mais comme ce Volume a paru assez gros sans cela, on s’est contenté d’en toucher quelques articles par occasion ; sçavoir, des pieces d’Entremets, & d’autres qui servent pour garnitures : & on a reservé d’en traiter à fond dans un Voulume, qui n’est pas d’un moindre secours que celui-ci, & qui merite d’être reçû aussi favorablement que l’ont été les precedentes Editions, qui n’ont pas plûtôt paru qu’elles ont été portées dans toutes les Provinces, où elles ont été tres-bien reçûës de ceux qui les ont euës.

A l’égard de cette Edition du Cuisinier Roïal & Bourgeois, on peut dire qu’elle est augmentée d’une quantité de Ragoûts qui n’ont point encore paru ; ce qui fait esperer que l’on aura pas moins d’empressement à les voir & à les pratiquer que les autres.

[ix]

Approbation

J’ay lû par ordre de Monseigneur le Chancelier, un livre intitulé : Le Cusisinier Roïal & Bourgeois, avec sa suite ; & je n’y ai rien trouvé qui doive en empêcher l’Impression. A Paris ce 14. Mars 1703.

Signé, Pouchard.

[x]

Table des repas et inscructions contenuës dans ce Livre.

Repas pour les mois de Janvier & de Fevrier : Table de douze Couverts, sur le modele d’un Repas donné par Monsieur le Duc de Chartres à Mademoiselle, le 15 Fevrier.       page 1

Repas pour le mois de Mars : Soupé donné à Monsieur le Duc d’Orleans chez M. Langlois, le 28. mars.   6

Repas pour le même mois de Mars : Diné de Monsieur le Duc d’Orleans, le jour de Pâques 26, Mars.  10

Soupé du même jour.        12

Liste de ce qu’on peut servir durant la même saison, outre ce qui a été marqué pour le repas ci.devant : Potages.      13

[xi]

Entrées.        14

Rôti.   15

Repas pour le mois d’Avril, donné à Monsieur le Duc de Chartres le 10 avril.            17

Autre Dîné pour le même tems, chez M. le Marquis d’Arci. 17

Dîné servi chez le même, pour Monsieur le Duc de Chartres & Mademoiselle, le 18. Avril.   19

Grand Repas au mois de Mai de la même année, donné à Sceaux par M. le Marquis de Saignelau, à Monseigneur, Monsieur, Madame, Monsieur le Duc de Chartres, Mademoiselle, & toute la suite de la Cour, le 14. Mai.           21

Autre Repas pour le même mois de Mai, servi le 18. Mai.   25

Repas pour le mois de Juin, sur le modele d’un Service du Petit Commun de l’année derniere.    27

Autre Repas dans le même tems, pour M. de Livri premier Maître d’Hôtel du Roy : Table de 12 Couverts.         30

Autre Repas servi le 20. Juin devant

[xii]

M. le Cardinal d’Estrées, à la Table du Grand Chambellan, Petit Commun du Roy.   31

Liste de ce qu’on peut servir durant la même saison, outre le contenu aux Repas ci-dessus : Potages.           33

Entrées.        34

Rôti.   35

Grand Repas, pour les mois de Juillet & Aoust, sur le modele de celui que M. le Marquis de Louvois donna le 25. Aoust, jour de la Sain Loüis, à Monseigneur & autres Princes & Dames de la Cour, en son Château de Meudon.       36

Plusieurs autres Repas pour le même temps, qui sont des Services du Petit Commun, pour differentes Tables.        39. & suivantes.

Liste de ce qui peut être servi outre les Viandes ci-dessus, durant les mois de Juillet, Aoust & Septembre : Potages.          43

Entrées.        44

Rôti.   45

Repas pour les mois d’Octobre, No

[xiii]

vembre & Decembre, sur le modele du Soupé servi chez Monsieur le Duc de Chartres, le premier Decembre. 46

Autre grand Repas ou Festin, chez M. le Duc d’Aumont, le 17. Decembre de la même année : Table de quarante-deux Couverts. 48

Liste de ce qu’on peut servir, outre les plats ci-dessus, durant les mois d’Octobre, Novembre & Decembre : Potages. 51

Entrées.        52

Rôti, Voïez page      15

Table generale d’Entremes pour toute l’année.         53

Repas en Maigre pour toute l’année.    56

Potages maigres pour les mois de Janvier, Fevrier & Mars.            57

Potages maigres pour les mois d’Avril, Mai & Juin.   58

Potages maigres pour les mois de Juillet, Aoust & Septembre.      58

Potages maigres pour les mois d’Octobre, Novembre & Decembre.        59

Entrées de Poissons pour toute l’an

[xiv]

née.    59

Pour le second Service.    63

Listes des Salades de Poissons. 64

Modele de Repas en maigre, pour un fort Ordinaire.           66

Pour le Soupé.         67

Ordinaire d’un jour.          69

Pour le Soupé.         70

Ordinaire d’un jour.          71

Pour le Soupé.         71

Repas en Racines, Dîné de Monsieur le Duc d’Orelans le jour de Vendredi Saint. 74

Liste des Salades pour la Collation du même jour.    79

Instruction suivant l’ordre alphabétique, enseignant la maniere d’apprêter toutes sortes de Viandes grasses et maigres, & comment on doit les servir pour Entrées, pour Entremets, & pour le Rôti, ou de toutes autres façons.            81

Voïez là-dessus, la Table des Matieres qui est à la fin du Livre.

Fin de la Table des Repas.

Le prix de ce Livre est de 36. sols, relié en Veau.

1705- Le cuisinier roïal et bourgeois (Massialot) (texte) (1-50)

[1]

LE CUISINIER ROÏAL ET BOURGEOIS, Qui apprend à ordonner toutes sortes de Repas en gras et en maigre, & la meilleure maniere des Ragoûts les plus délicats & les plus à la mode.

Repas, pour le mois de Janvier.

LORSQU’IL sera question de donner un Repas reglé, vous observerez le nombre des personnes pour placer vos couverts, & vous aurez égard à la qualité des Viandes pour les bien

[2]

ordonner, afin d’éviter le voisinage de deux plats d’une même façon, sans en intermedier un d’une autre sorte : car autrement la chose seroit de mauvaise grace, & pourroit contraindre le goût de quelques-uns de la table, chacun n’aimant pas la même chose.

Vous observerez aussi la forme de la Table, soit ronde, soit ovale ou quarrée, pour la disposition de vos Plats & de vos Couverts ; afin qu’il y ait un tel ordre, que chacun puisse prendre ce qui conviendra à son appetit, & que ceux qui serviront ne soient contraints en iren & n’incommodent personne en ervant ou desservant, qui est une chose fort desagreable, & qui neanmoins n’arrive que trop souvent.

Tres-peu de personnes ignorent ce que c’est que nous appellons, en terme de Cuisine, une Entrée ; neanmoins, pour donner une idée de ce que c’est, nous dirons que c’est une sorte pa Mets qui se sert immédiatement aprés le Potage, & avant tout autre Mets. On sert rarement pour Entrée du Rôti ; mais assez souvent des pieces de four, telles que des Tourtres de beatilles à la moëlle, de pigeonneaux, &c. comme aussi des Pâtez de Gaudiveau, d’Assiette, Pâtez à la Cardinal, à l’Angloise & autres choses semblables ; les Ragoûts, les Hachis, les Gribelettes, le Boudin blanc, les An

[3]

douillettes, les Saucisses, le Bœuf à la mode les Fricassées & autres pareilles Viandes que l’on peut servir chaudes, composent ordinairement les Entrées des bonnes Tables, car rarement on sert des viandes froides pour Entrée.

Supposé qu’on veuille faire une Table de douze Couverts, on peut servir à chaque Service, un bassin au milieu, quatre moïens Plats, & quatre Hors-d’œuvres : par exemple.

Premier Service.

Potages & Entrées.

Deux potages : un moïen plat d’une Bisque de Pigeons, & l’autre d’un Chapon aux racines.

Les deux autres moïens plats pour Entrées ; l’un des Pâté Perdrix, chaud.

Et l’autre de Poulardes aux truffles, garni de fricandeaux.

La grande Entrée,

Sera de deux Ros de Bif, garni de coteletes sz Veau mariné frites, un degout par-dessus, pour le bassin du milieu.

Pour les Hors-d’œuvres.

Un Poupeton de Pigeons.

Un plat de Cailles à la braise.

[4]

Un de Poulets farcis, coulis de champignons.

Un de Perdrix, sausse à l’Espagnol.

Second Service.

Le Rôt.

Sera composé de deux moïens plats.

L’un d’un petit Dindon garni de Perdrix, petites Poulets, Becasses & Mauviettes.

Et l’autre d’un quartier d’Agneau garni de même.

Pour l’Entremets.

Une Tourte de crême pour le bassin du milieu, garni de feuillantines, de fleurons, & de beignets au lait.

Les deux autres moïens plats ; l’un d’un Pain au Jambon, garni de petites rôties de Pain & de Citron.

Et l’autre de Jambon, & autre Salé.

Les Hors-d’œuvres.

Seront ; l’un d’un Blanc mangé,

L’autre de Foies-gras ;

Le troisieme, d’Asperges en salade ;

Et le quatriéme, de Truffes au court-boüillon.

[5]

Troisième Service.

C’est le Fruit & les Confitures, dont on se dispensera de parler, parce que c’est une affaire d’Officier, plutôt que de Cuisinier.

Il s’est donné un semblable Repas le 15 Février chez Monsieur le Duc de Chartres, à Mademoiselle.

Au lieu de ce qui fut servi pour le Rôt, on peut composer les deux plats ; l’un, de deux Poulards grasses, quatre Poulets de grain, six Pigeons de voliere.

L’autre, d’un Oiseau de riviere, quatre Perdrix, quatre Becasses & douze Becassines.

Voïez ci-aprés la liste de ce qu’on peut servir pour diversifier les Entrées & Entremets, de même que pour les Repas suivants.

On se reglera aisément sur ce premier Repas, pour l’ordonnance & la disposition des autres qu’on voudra faire plus grands, augmentant le nombre ou la grandeur des plats, à proportion du nombre des personnes & des Couverts.

[6]

REPAS,

Aux mois de Février & Mars.

Premier Service.

Entrées.

On peut donner pour entrées,

Un Pâté chaud de Lapreaux & Perdrix, dans lequel on mettra en servant quelque bon Coulis de Perdrix, ou autre Ragoût.

Un Poupeton farci de vingt ou trente Pigeonnaux, suivant le nombre des personnes, avec toutes sortes de garnitures.

Un plat de Brusolles à la braise, un Coulis par-dessus.

Un de Ris-de-Veau farcis à la braise, un Ragoût par-dessus.

Une Marinade de Poulets frits.

Une Poularde à l’Angloise rôtie, Ragoût par-dessus en servant.

Un plat de Filets de Poularde au concombre.

Un de Fricandeaux farcis en Ragoût.

[7]

Second Service.

Le Rôt.

A proportion des Entrées que l’on aura servi, & du monde qu’il y aura à Table, sera de trois grands plats, composez de toute sorte de Gibiers de la saison ; & quatre Salades dans les angles.

Pour l’Entremets.

Douze plats ; sçavoir, un plat de Jambon, garni de Langues fourrées, & Saucissons de Boulogne.

Une tourte de crême garnie de Tartelettes.

Un Blanc-manger de divers couleurs de Gelées.

Un plat d’Asperges à la crême.

Un de Ris-de-Veau & crêtes farcies en[1] ragoût.

Un de Ris-de-Veau mariné frit.

Un de Foies-gras à la Crêpine, grillez.

Une de Roignons de Chapons.

Un pain au Jambon.

Un plat de Truffles au court-boüillon.

Un Ragoût de Ris-de-Veau, Champignons et Morilles.

[8]

Monsieur Langlois a donné un Soupé pareil à celui que nous venons de spécifier, le 28 Mars à Monsieur le Duc d’Orleans. Il y avoit pour Monsieur seul, un potage de santé, composé d’une Poularde aux œufs, & d’un Chapon.

Pour ce Repas, on fit rôtir des Poulardes, Poulets et Perdrix, qui ne servirent qu’à faire les Farces ; par exemple, la Farce des Croquets. L’on peit pour cela l’estomac & les cuisses de ces Volailles ; & on laissa quelques filets pour les Entrées. Cette Farce se fit avec du land blanchi, de la tetine de Veau cuite, quelques Ris-de-Veau blanchis, des truffles & champignons hachez ; de la moëlle, une mie de pain trempée dans du lait, toute dorte de fines herbes, un peu de romage à la crême, & de la crême de lait : le tout bien haché & assaisonné, on y mit quatre ou cinq jaunes d’œufs, & un ou deux blancs ; & l’on se servit de cette Farce pour les Fricandeaux, Croquets, & Filets mignons. On forme les Croquets en rond, de la grosseur d’un œuf ; il faut les paner en même-tems, les laisser reposer sur un plat, les frire avec du saindoux, & les servir chaudement.

Les carcasses des Volailles servent à faire differens Coulis, pour diversifier les Ra

[9]

goûts. Pn peut faire un coulis de pain, de perdrix, de poularde, de poulets, essence de Jambon, du jus de bœuf & de veau : on passe les Ragoûts des Entrées & Entremets à part, dans differentes casseroles, & par-tout un bouquet de fines herbes. Ceux où il y entre de la crême, doivent être passez au bon beurre de Vanvre, ou autre semblable, & un peu de farine à chaque Ragoût ; lequel étant passé & cuit, on y met de la crême, & en servant on les lie avec quelques jaunes d’œufs.

On trouvera ci-aprés la maniere d’accommoder le reste que nous avons marqué, tant pour les Entrées, que pour l’Entremets, aprés que nous aurons parcouru les autres mois de l’année, & vû ce que l’on peut servir dans chaque saison, comme nous avons commencé de faire.

[10]

REPAS,

Pour le même mois de Mars.

Premier Service.

Potages.

On peut servir un Potage de Chapon, coulis de foies d’Agneau.

Un peu de tête d’Agneaux à la puréee verte, garni de pieds de même, &

Une poularde en Bisque.

Grandes Entrées.

On donnera une grange piece de Bœuf.

Une Poitrine de Veau farcie en Ragoût.

Et une ricassée de Poulets, garnie d’une Marinade de Poulets.

Les petites Entrées seront,

Une de Cotelettes de Mouton grillées sur le gril.

Et l’autre de petite Boüillons faits de Blanc de Chapon.

Second Service.

Pour le Rôt.

Un plat de Rôt d’un Chapon pané, garni

[11]

de trois Pigeons & de trois Poulets[2].

Un Gigot de Mouton pané, garni de même.

Une Longe de Veau, garnie d’une Marinade de Veau autour.

Un plat de deux Canards rôtis, une sausse dessus.

Un de deux Lapins.

Et pour les petits plats, des Poulardes panées.

L’Entremets.

Sera d’un Ragoût d’Artichaux.

Un plat de Truffles, & de Foies-gras en ragoût.

Une Tourte de crême, & un Blanc-manger.

Un plat de Champignons panez mis dans le four.

Un d’œufs frais à la Huguenotte.

Un Pain de Jambon.

Des Beignets de pomme.

Et deux assiettes de Salé.

Ce fut le Dîné de Monsieur le Duc d’Orleans, le 26 Mars, jour de Pâques.

[12]

POUR LE SOUPÉ.

Potages.

Un Potage de santé, avec un Chapon.

Une Bisque de Chapon, ou de Pigeons.

Et un Potage avec une Poularde aux œufs, rien que bon jus.

L’Entrée.

Des Ris-de-Veau piquez, rôtis, une bonne sausse dessous.

Deux Poulardes rôties, un ragoût dessous.

Et une Compote de Pigeons.

Le Rôt.

Une Longe de Veau garnie de trois Pigeons & trois Poulets, moitié piquez, moitié bardez.

Une Eclanche de Mouton panée, garnie de même.

Un plat de deux Lapins piquez.

Et un de six Pigeons rôtis.

L’ordinaire de chez Monsieur, regulierement est de la même force qu’on vient de dire. Tout ce qu’il y a, c’est que l’on

[13]

déguise les Potages et Entremets, suivant la saison des Legumes.

Chez Madame, on sert ordinairement un grand Potage, un grand plat de Rôti, un plat d’Entremets, & deux petits plats chaque service.

LISTE

De ce qu’on peut servir, outre les Plats ci-dessus, durant les mêmes mois de Janvier, Février & Mars.

Potages.

Potage d’Allouëttes à l’Angloise, Potage de Cailles au Boüillon brun, Potage de Chapon desossé, aux Cardes & Fromage,

Potage de Cochon de lait.

Potage d’Echignée de Porc aux Pois passez,

Potage de Faisans au pot-pourri ;

Potage au Fromage, ou Jacobine,

Potage de Gigot de Veau farci,

Potage de Gelinote aux Choux de Milan,

Potage de Lapreaux à l’Italienne,

Potage de Mauviettes au Boüillon brun,

Potage d’Oie grasse aux Navets,

Potage de Perdrix aux Champignons,

Potage de Perdrix, à la Reine & à la Roïale,

[14]

Potage aux Piegeonneaux gorgez.

Potage de Poule d’Inde à l’Allemande,

Potage de Poulets farcis,

Potage de Ramiers aux choux verds,

Potage de Ris,

Potage de Sarcelle aux Navets passez.

Entrées.

Agneaux en Ragoût,

Alloüettes en Ragoût à l’Angloise.

Aloïau à l’Angloise,

Andoüilles de Porc,

Andoüillettes à l’Espagnole,

Boudins,

Cochon de lait au blanc,

Eclanches de plusieurs manieres,

Epaule de Mouton en Ragoût,

Gigot de Veau étouffé,

Grillade de Poulet d’Inde froid,

Hachi de blanc de Perdrix,

Levraut à la Suisse,

Pigeonneaux à l’Italienne,

Poule d’Inde au Pot-pourri,

Poulets à l’Espagnole,

Pot-pourri d’Oisons,

Queuë de Mouton à la Suisse,

Saucisses,

Vinaigrette de Bœuf.

On sert aussi[3] des Pâtez[4] chauds de plusieurs sortes, que l’on trouvera à la fin,

[15]

aprés ce qui regarde chaque saison, aves les Pâtez froids et les Tourtes, qui se peuvent servir pour entremets ; parce que cela s’étend à presque toute l’année.

Il en est de même de plusieurs autres pieces d’Entremets, dont on pourra donner aussi un supplément general, quoiqu’il y en ait un assez grand nombre dans les Repas qui sont décrits pour les mois suivans.

A l’égard du Rôti, on peut servir les Viandes suivantes.

Alloüettes,

Becasses,

Becassines,

Beutrs,

Bizets,

Cailles,

Canards,

Chapons gras,

Chapons paillers,

Gelinottes de Bois,

Faisans,

Lapins,

Levraux,

Oies-grasses,

Mauviettes,

Perdrix,

Pigeons de voliere,

Pluviers,

Poulets de grain,

[16]

Poulets d’Inde,

Poules châtrées, ou Poulardes

Ramiers,

Sarcelles,

Tiers,

Venneaux.

Ces mêmes Viandes sont aussi dans leur saison pour les mois d’Octobre, de Novembre & de Decembre ; & l’on peut y en ajoûter quelques-unes des mois prochains, que l’on marquera ci-aprés en son rang.

REPAS,

Pour le mois d’Avril.

Premier Service.

Potages.

Deux Potages ; une Bisque de Pigeons ; & un Potage de santé, avec une Poularde.

Entrées.

Un quartier de Mouton farci,

Une Poularde en ragoût,

Une Poitrine de Veau farcie,

Des Pigeons au Basilic, avec une petite Farce.

Et la grand piece d Bœuf au milieu.

[17]

Second Service.

Pour le Rôt.

Un grand plat de Rôt : composé de diverses Volailles suivant la saison, & deux Salades.

L’Entremets.

Un pain au Jambon.

De la Crême brûlée.

Un Ragoût de Ris-de-Veau & Foies gras.

Un plat d’Asperges, sausse au jus lié.

C’est ainsi sept plats à chaque Service.

Monsieur le Marquis d’Arci, ci-devant Ambassadeur du Roi à Turin, & depuis Gouverneur de Monsieur le Duc de Chartres, donna un semblable Repas chez lui, le 10 avril.

AUTRE DINÉ

Pour le même tems.

Premier Service.

Potages.

Deux Potages ; l’un de Poulets farcis aux Asperges ; & l’autre un Potage de santé, avec un Poularde, garni de racines.

[18]

Pour les Entrées.

Un Poupeton farci de six Pigeons en ragoût.

Des Poulets au Jambon.

Des Langues de Veau farcies en ragoût.

Une ou deux Poulardes en ragoût aux truffles.

Une grande Poitrine de Veau, garnie de Cotelettes de Mouton farcies.

Second Service.

Le Rôt.

Un grand plat de Rôt de diverses Volailles, & deux Salades.

L’Entremets.

Des Ris-de-Veau en ragoût de Champignons & truffles, un bon coulis dedans.

Des Asperges, saussu au jus lié.

Une Tourte de moëlle.

Un Blanc-manger.

Hors-d’œuvres.

Un de cus d’Artichaux à la crême.

Un de Salé en tranches.

Ce Diné a encore été servi chez Monsieur le Marquis d’Arci, aussi-bien que le

[19]

suivant qu’il donna à Monsieur le Duc de Chartes & à Mademoiselle, le 18 Avril.

AUTRE DINÉ.

Au mois d’Avril.

Premier Service.

Potages.

Deux Potages de santé, avec deux Poulardes, garnis de pointes d’asperges.

Un des Poulets farcis, garnis de laituës farcies.

Une Bisque de Pigeons.

Un Potage de perdrix, coulis à la Reine.

L’Entrée de la Table.

Pour la grande entrée, un quartier de Veau de riviere, ou autre, garni de pain frit, & cotelettes de veau frit, piqué de hattelettes, un salpicon sur la cuisse.

Les autres seront, un Poupeton farci de six Pigeonneaux.

Un Miroton.

Des Ris-de-Veau piquez, & farcis en ragoût.

Un plat de Filets de Poularde aux huîtres.

[20]

Et une Tourte de Lapin.

Second Service[5].

Pour le Rôt.

Deux grands plats de Rôt, & deux petits composez de diverses Volailles, avec deux Salades.

L’Entremets.

Un plats de Jambon, garni de Saucissons & de Langues fourrées.

Une Tourte de pâte d’amandes, farcie de marmelade d’abricots.

Un Blanc)manger,

Un plat d’Asperges, sausse ordinaire ;

Un de Morilles à la crême,

Un de Mousserons en ragoût au roux,

Un de Foies-gras en ragoût.

[21]

GRAND REPAS

Au mois de May.

Premier Service ;

Potages.

Quatre Bisques de Pigeons.

Quatre Potages de Poulets farcis ; garnis de laituës farcies[6].

Trois Potages d’Oies aux pois verds ; garnis de pointes d’asperges.

Trois petites Dindons à la chicorée blanche.

Deux Oils servis dans les cuvettes.

Entrée de Table.

Quatre grandes Entrées, & douze moïennes.

Deux de deux Croups de Veau de riviere, garnies de cotelettes, & piquées de hattelettes ; le Veau de riviere moitié piqué, & un Salpicon sur la cuisse.

Deux Ros de Bif de Mouton, garnis de pain frit, & marinade de cotelettes de Mouton.

Pour les douze plats moïens,

Deux Tourtes de Lapreaux,

[22]

Deux Tourtes de Pigeons,

Deux Pâtez de Dindons chauds,

Deux piéces de Bœuf salé, un hachide Jambon par-dessus,

Deux Poupetons farcis,

Deux Mirotons.

Hors-d’œuvres.

Trente-deux ; sçavoir,

Deux Pigeons au Basilic,

Deux de Poulets au Jambon,

Deux de Perdrix rôtie, sausse à l’Espagnol,

Deux de Filets mignons, ragoût à part,

Deux de Filets de Bœuf au concombre,

Deux fricassées de Poulets à la crême,

Deux de Lapreaux rôtis, coupez par moitié, avec une sausse au Jambon dessus,

Deux de Filets de Mouton en ragoût aux Morilles,

Deux de Poulets farcis en ragoût,

Deux de Poulets farcis à la braise, ragoût par-dessus,

Deux de Fricandeaux farcis,

Deux de Ris-de-Veau au Jambon farcis,

Deux de Laituës frcies à la Dame Simonne,

Deux de Ris-de-Veau piquez à broche, & aprés rôtis, un bon ragoût par-dessus ;

Deux de Fricandeaux, sans être farcis,

[23]

Deux de Pains au Veau.

Second Service.

Pour le Rôt.

Saize plats de Rôt, autant comme de Potages, composez de toute sorte de Volailles, Gibiers, Marcassins, Cochons de lait, &c.

Dix petites Salades.

L’Entremets.

Deux grands Pâtez de Jambon,

Deux autres de Poulardes & mouton.

Les douze plats moïens :

Deux de Blanc manger,

Deux de Salé,

Deux d’Oreilles de Veau farcies,

Deux de Galantine,

Deux d’Asperges.

Hors-d’œuvres.

Vingt-deux Hors-d’œuvres, qui aves les dix Salades, remplissent le même nombre qu’au premier Service.

Deux de Mine-droit.

Deux de Pieds de Cochon à la Sainte-Menehout,

Deux de Hattelettes grillées, panées,

Deux de cus-d’Artichaux, sausse au Jambon.

[24]

Deux de Pain au Jambon,

Deux de Morilles farcies, & Champignons en ragoût,

Deux de Crêtes farcies, & de Foies-gras en ragoût,

Deux de Tourte de blanc de Chapon,

Deux de petits pois à la crême,

Deux de Rissoles, composées de blanc de Chapon,

Deux petites Crêmes brûlées.

Pour un semblable Repas, il faut s’y prendre dés la veille ; mettre le soir trois ou quatre grandes marmites au feu, avec quantité de Viandes, & des bouquets de fines herbes, & des oignons entiers. L’on fait cuire en même-tems une quantité de Poulets & Poulardes, avec quelques Perdrix rôties, qui avec du Lard blanchi & de la Graisse, servent pour les Farces qui se feront le jour du Repas ; & les Boüillons serviront pour faire le jus de Bœuf & de Veau, Petit-jus & Coulis, & Essence de Jambon.

Pour les Potages, il faut faire les Jus & Coulis à part ; & de même pour les Entrées & Entremets. Il faut aussi avoir beaucoup de ciboulle & persil haché, & plusieurs bouquets de fines herbes, pour mettre dans les Ragoûts. On fait beaucoup de Coulis de Perdrix, Pigeons et Poulets, le tout à part.

[25]

Monsieur le Marquis de Seignelai donna un pareil Repas à Seaux, à Monseigneur, Monsieur, Madame, Monsieur le Duc de Chartres, Mademoiselle, & toute la suite de la Cour le 14 Mai.

La baterie de Cuisine qui y fut emploïée, consistoit en soixante petites Casserolles à main, vingt Casseroles rondes, tant grandes que petites ; ving Marmites tant grandes que petites ; trente Broches : & pour faire ce Repas, il y eut trente-six Officiers de Cuisine, tant Chefs, qu’Aides.

AUTRE REPAS.

Pour le même mois de May.

Premier Service.

Potages.

Trois Bisques de Pigeons,

Trois Potages d’Oisons aux pois, ou asperges,

Trois de Poulets farcis à la purée verte,

Trois Juliennes aux Poulardes.

Les Juliennes garnies de concombre : les Oies, de petit lard : la purée, de laituës farcies, & pointes d’asperges ; & les Bisques, de citron.

[26]

Entrées de Table.

Deux Tourtes de Pigeons,

Deux entrées de Bœuf à demi salé,

Deux de Filet de Bœuf au concombre,

Deux de Fricassées de Poulets à la crême,

Deux Mirotons.

Hors-d’œuvres.

Deux de Pâté à l’Espagnol,

Deux de Cotelettes de Veau grillées,

Deux Lapreaux à la Saingaraz,

Deux de Pigeons au basilic,

Deux Grenadins de Poularde.

Second Service.

Pour le Rôt.

Deux plats de Marcassins.

Huit[7] plats moÏens : deux de quatre Dindons à chaque plat.

Deux de Poulets garnis de Pigeonneaux,

Deux de Lapreaux,

Deux Faisans ;

Et huit petites Salades.

L’Entremets.

Deux grands plats de Pâté de Jambon.

Deux de Langues de Bœuf parfumées & Saucissons.

[27]

Douze plats moïens : deux de petits pois à la crême,

Deux d’Artichaux à l’estoufade,

Deux de Champignons & Foies-gras,

Deux de pain au Jambon,

Deux d’Asperges à la crême,

Deux de Ris-de-Veau, & Crêtes.

Hors-d’œuvres.

Huit : deux de Blanc-manger,

Deux de Beignets,

Deux de Pieds à la Sainte-Menehout,

Deux Tourtes de blanc de Chapon.

Ce Repas a été servi le 18 Mai de l’année 1690.

REPAS

Pour le mois de Juin.

Premier Service.

Potages.

Un Potage d’Allebrans, ou Poulets aux pois, garnis de concombres.

Une Bisque de Pigeons,

Un Potage de Navets au Canard,

Un Potage de Choux aux Perdrix,

[28]

Un Potage de santé au Chapon ;

Une Potage d’une Casserole au Parmesan.

Un Potage de Ramereaux,

Et un autre de Cailles aux racines.

L’Entrée de Table.

Une cuisse de Fan, la croupe attachée, moitié piquée & moitié panée, garnie de petits Pâtez, une poivrade dessus.

Une piece de bœuf à demi salé à la braise.

Et pour la grande Entrée, un Ros de bif, garni d’une marinade, & cotelettes de Veau frites.

Aïant levé les Potages, on a mis les plats suivans.

Hors-d’œuvres.

Pieds de Moutons farcis, de même que les Croquets.

Un filet de Poularde aux huîtres.

Des Langues de Mouton grillées, une Ramolade pour la sausse.

Une fricassée de Poulets au Brochet.

Un Dindonneau farci aux fines herbes.

Second Service.

Le Rôt.

Composé d’un grand plat de toute sorte

[29]

de gibier, avec quatre Salades.

L’Entremets.

Une Tourte d’Amandes.

Des Artichaux à la Saingaraz, garnis d’Artichaux frits.

Un Ragoût de Foies-gras, Champignons & Jambon.

Des Pois à la crême garnis de Ramequins au fromage.

Hors-d’œuvres.

Quate : un de Beignets à l’eau,

Une de Rissoles,

Une de Champignons à la crême,

Un d’œufs à l’orange.

C’est ainsi que l’on sert au Petit-Commun chez le Roi. Voici le modèle d’un autre Repas qui y fut encore servi l’année derniere pour Monsieur de Livri premier Maître d’Hôtel du Roi.

[30]

AUTRE REPAS.

Pour le mois de Juin.

Table de douze Couverts.

Premier Service.

Un grand Potage, & six Entrées.

Le Potage est un grand Oil servi dans une cuvette de vermeil, ou autre sur un grand plat.

Pour les Entrées.

Un Pâté chaud de Levraux.

Une Entrée de Pigeons au fenoüil.

Un Filet de Poularde au Concombre.

Une entrée de Ris-de-Veau à la Dauphine.

Une de Queuës de Moutons à la Sainte-Menehout.

Une de Fricandeaux farcis.

Les plats garnis de pain frit, de croquets, de Marinades, & de pain aux Perdrix.

Second Service.

Le Rôt.

Quatre plats de Rôt de toutes sortes de

[31]

Volailles, selon la saison : un Ros de Bif entr’autres, garnis de hattelettes ; & deux Salades.

L’Entremets.

Pour le grand plat, des Artichaux en étuvée, garnis d’Artichaux frits.

Une Tourte d’Amande, garnie de Beignets de pomme.

Des pois à la crême, garnis de Ramequins au fromage.

Un plat de Jambon.

Et un de Rissoles.

AUTRE REPAS.

Pour le même mois de Juin.

Premier Service.

Potages.

Quatre Potages : une Bisque de Pigeons.

Un Potage de santé, avec une Poularde.

Un petit Potage de Poulets farcis à la purée verte.

Et un Potage de Cailles, façons d’Oil.

[32]

Entrées.

Une grande Entrées, d’une Longe de Veau moitié piquée, un salpicon dessus, garnie de cotelettes marinées de[8] Veau.

Deux moïennes Entrées ; l’une d’un Pâté de Lapin ;

Et l’autre, un Chou farci, garni de fricandeaux farcis.

Deux petites Entrées : une Fricassée blanche de Poulets, garnie de marinade :

Et l’autre, de Lapreaux à la Saingaraz.

Les Hors-d’œuvres.

Un de Poularde farcie à la crême.

Un de Poulets à la Polacre, avec une ramolade.

Un pain de Perdrix.

Et une Queuë de Mouton à la Sainte-Menehout.

Aprés avoir levé les quatre Potages, on a mis quatre autres Hors-d’œuvres ;

L’un, d’un pain de Veau,

L’autre, de Piegeons au Basilic.

Une de Hattelettes.

Une Grenade.

Et deux autres Hors-d’œuvres, composez d’Esturgeons au gras, de deux manieres.

L’une, en maniere de Fricandeaux piquez ;

[33]

Et l’autre à la Sainte-Menehout par grosses tranches.

Second Service.

Le Rôt & l’Entremets, est de la sorte des precedens.

On servit un pareil repas le 20 Juin 1690 ; devant Monsieur[9] le Cardinal[10] d’Estrées & les Ambassadeurs, à la Table du Grand Chambellan[11], Petit Commun du Roi.

Parmi les Potages servis dans ce second Quartier, on en a pû voir qui ont déjà été marquez pour les trois premiers mois de l’année : voyons ce qu’on y peut encore ajoûter, aussi-bien qu’aux Entrées, & à l’égard du Rôti.

LISTE

De ce qu’on peut servir, outre les Plats ci-dessus, durant les mois d’Avril, Mai & Juin.

Potages.

Potages d’Agneau aux laituës[12] Romaines.

[34]

Potage de Cailles au blanc-manger naturel.

Potage de Chapon desosse aux champignons.

Potage de Chevreaux au boüillon blanc.

Potage de Choux blancs farcis.

Potage de petites Citroüilles farcies à l’Espagnole.

Potage de cus d’Artichaux, Concombres & Laituës.

Potage de Dindonneaux aux morilles farcies, & aux choux blancs.

Potage de Lapreaux aux petites raves.

Potage d’Oisons[13] aux asperges.

Potage de Pain farci aux laituës farcies.

Potage de Perdrix au boüillon brun.

Potage de Poitrine de Veau farcie.

Potage de Poulets aux concombres farcis.

Potage de Poulets en ragoût.

Potage d’un Poupeton en triangle.

Potage de Pieds & Fraises de Veau.

Potage de tête d’Agneau.

Potage de tête de Veau à deux faces.

Potage à l’Italienne.

Entrées.

Andoüilles de Veau.

Carré de Mouton à la broche.

Foies de Veau.

Fraise de Veau frite.

[35]

Gigot de Veau piqué menu, à la daube.

Griblettes de Veau à la persillade.

Lapreaux à la sausse blanche & brune.

Longe de Veau en ragoût.

Oisons en ragoût.

Oisons à la daube.

Pieds de veau piquez, & à la sausse blanche.

Pigeonneaux marinez & en fricassée.

Poitrine de veau marinée.

Poulets à l’étuvée.

Poulets desossez.

Poulets fricassez à la crême.

Poulets-d’Inde à la Suisse, & frits au concombre.

Petits Poulets encerisez.

Poupeton farci de Pigeonneaux.

Têtine de Vache à la sausse douce.

Pour le Rôt.

C’est la saison des Agneaux,

Du Chevreau,

Des Cochons de lait,

Des Dindons de l’année,

Des Faisans,

Des Lapreaux,

Des Levraux de Janvier,

Des Oisons,

Des Marcassins,

Des Perdrix,

[36]

Des Pigeonneaux & Poulets, &

Des Ramereaux, ou Pigeons de campagne.

GRAND REPAS.

Pour les mois de Juillet & Août.

Premier Service.

Potages.

Deux Bisques de Pigeons.

Deux Potages e Concombres farcis, au Chapon.

Deux Potages d’Oils,

Deux de Casseroles,

Deux de Racines aux Ramereaux,

Deux de Navets aux Poulets farcis,

Deux de Porceaux aux Oies,

Deux de Chicorée aux Dindons.

Entrées.

Deux Tourtes de Pigeons,

Deux Pâtez de Lapreaux,

Deux Eclanches de Mouton à la Roïale

[37]

Deux Entrées de Perdrix à la braise,

Deux de Poulardes à la Saingaraz,

Deux de Poulardes farcies à la crême,

Deux Mirotons,

Deux Pains de Veaux,

Deux Terrines, &

Deux Entrées de Canards aux huïtres.

Deux grandes Entrées, de Ros de bif, garni de cotelettes de Mouton.

Et deux autres, de Veau de riviere, garnies de cotelettes de Veau frit, un hachi sur la cuisse.

Hors-d’œuvres.

Deux de Croquets,

Deux de Saucisses franches,

Deux de Saucisson roïal,

Deux de Veau à l’Italienne,

Deux de Pigeons au fenoüil,

Deux de Poulets farcis à la braise,

Deux de Pigeons au basilic,

Deuxde Poulets à la Tartre,

Deux de Poulets à la Sainte-Menhout ;

Deux de Boüillans,

Deux de Marinades de Poulets,

Deux Entrées de pigeons au blanc, &

Deux de pain de perdrix.

Second Service.

Ving-deux plats de Rôt, composez de

[38]

toute sorte de grosses pieces de Bœuf, Mouton & Veau ; & de toute sorte de Volaille, Gibier, Marcassins, Cochons de lait, Faisans, &c. avec les Salades.

L’Entrements.

Vingt-quatre plats d’Entremets ; dont,

Deux de Pâtez de Jambon,

Deux de Faisans,

Deux de Salé, Langues & Saucissons,

Deux Tourtes de blanc de Chapon, garnies de Tartelettes,

Deux Tourtes[14] de pâtes croquants, le dedans d’une marmelade d’Abricots,

Deux Blancs-mangers, garnis de diverses Gelées,

Deux de Ris-de-Veau à la Dauphine, garnis de Ris-de-Veau frits,

Deux de Beignets de Blanc-manger, garnis d’autres Beignets à l’eau,

Deux de pieds de Cochon à la Sainte-Menehout,

Deux de Mine-droit,

Deux de Hattelettes,

Et deux de Galantine.

Hors-d’œuvres.

Deux de pain au Jambon,

Deux de Champignons à la crême,

Deux de Crêtes farcies, & Morilles,

[39]

Deux de cus d’Artichaux,

Deux Omelettes, & un hachi de Jambon par-dessus.

Deux Omelettes au sucre.

Deux de Beignets de pomme,

Deux de Crême brulée,

Deux de Rissoles.

Deux de Foies-gras,

Et deux de truffes au court boüillon.

Monsieur le Marquis de Louvois donna[15] un semblable Repas, le 25 Aoust en son Château de Meudon, à Monseigneur, Monsieur, Madame, Monsieur le Duc de Chartres, Mademoiselle, & toute la suite de la Cour. Il y avoit trois Tables qui furent servies tout de même, ainsi l’on avoit redoublé presque pour trois plats de chaque chose.

AUTRE REPAS,

Qu’on peut donner dans la méme saison, & dans les mois suivans.

Trois grandes Entrées, de trois pieces de Bœuf, garnies de Marinade en cuvette ou en bassin.

[40]

Douze plats ; sçavoir,

Trois de Poulets gras & Dindons,

Trois de Carbonnades de Mouton,

Trois de Pâté à l’Espagnol,

Deux de Laituës farcies ; &

Un de Pigeons au fenoüil.

Quatre Hors-d’œuvres.

Deux de Ris-de-Veau au blanc,

Deux de Filets au concombre.

Une autre jour.

Pour les douze plats :

Trois de Poulets gras & Poulardes,

Trois de Saucissons & Perdrix,

Trois de Fricassées de Poulets,

Trois de Pâtez de Faisans, Perdrix & Lapreaux.

Hors-d’œuvres.

Trois de Boudin blanc, Saucisses & Andoüilles ; & trois autres de Carbonnades.

A des Tables moins fortes.

Une grand Entrée de piece de Bœuf.

Deux moïennes de pieces de Bœuf aussi, mais diversifiées de quelqu’une des manieres, que l’on peut voir ailleur.

Une Tourte de Pigeons,

Et une Fricassée de Poulets,

Pour Hors-d’œuvres.

Un Filet au concombre,

[41]

Un de Carbonnade,

Un Filet au blanc,

Une de Dindons en Salmi.

Une autre fois.

Pour la grande Entrée une piece de Bœuf.

Deux moïennes Entrées ; l’une des Filets aux concombres, garni de Carbonnade.

Et l’autre de Poulardes entieres, aux truffles.

Pour Hors-d’œuvres.

Quatre, de Saucisses, Boudins & Andoüillettes.

Un Filet de Mouton aux truffles.

Une Fricassée de Poulets & des Pâtez.

Pour des Soupez.

Trois grandes Entrées de Veau, garnies de marinade & de hattelettes.

Douze autres plats,

Trois de Poulets & Dindons,

Deux de Pigeons au feoüil,

Un d’un Gigot à l’ail,

Deux de Dindons au Jambon,

Un de Pigeons au basilic,

Trois Hachis de Perdrix,

Hors-d’œuvres : quatre ; sçavoir,

Deux de Filets au concombre ;

Et deux Marinades de Poulets.

[42]

Autre Table moins forte.

Un quartier de Veau garni de marinade, pour la grande Entrée.

Deux autres moïennes Entrées ;

L’une d’une Poularde au Jambon,

Et l’autre, d’une Eclanche.

Pour Hors-d’œuvres,

Un de Dindons en Salmi,

Un de Ris-de-Veau en rond,

Une de Hachi de Perdrix,

Un Flient au blanc.

Autre Table.

Trois Quartiers de Veau garnis de marinade, pour les grandes Entrées.

Douze plats ; sçavoir, trois de Poulets gras, & Dindon,

Trois de Filets d’Aloïau dans le jus,

Trois de Dindons à la sausse au Jambon.

Et trois de Salpicons.

Pour les Hors-d’œuvres : deux de Ris-de-Veau frits, & deux de Poularde au blanc.

Autre Table.

Deux Entrées :

Une de Langues de Veau,

Et l’autre de Poularde au Jambon,

[43]

Quatre Hors-d’œuvres.

Une de Filet au concombre,

Un d’une Fricassée de Poulets,

Un autre, d’un Filet dans le jus,

Et un de marinade de Poulets.

L’ordre de tous ces premiers Services est tel qu’on les fait ordinairement en pareille saison à la Cour, pour le Roi, pour les Princes, & pour Monsieur l’Intendant.

LISTE

De ce qui peut être servi, outre les Viandes ci-dessus, durant les mois de Juillet, Aoust & Septembre.

Potages.

Potage de Cailles farcies.

De Chapon aux Champignons,

De Chapon aux Prunes de Brignoles,

De Dindonneaux auc Concombres,

D’Epaule de Mouton aux Navets,

Des Faisandeaux aux Truffles,

Des Gelinotes à la Chicorée blanche,

De Gigot de Veau farci & piqué,

De Gribelettes de Vea piquées,

De Grives au boüillon brun,

[44]

De Jaret de Veau à l’Epigramme.

De Melon aux petits Poulets,

D’Oisons aux Navets,

De petite Oie d’Oisons,

De perdrix à la capilotafe,

De Perdreaux au boüillon passé,

De Poulets farcis à la purée verte,

De gros Poulets aux Choux,

De Poulet d’Inde desossé,

De Ramereaux aux Campignons,

De Ris-de-Veau,

Et le Potage de santé, au Jaret de Veau & Chapon.

Entrées.

Bœuf à la mode,

Cochon de lait à l’Allemande,

Civet de lievre,

Eclanche à la Suisse,

Epaule de Veau aux Champignons,

Grives en ragoût,

Haut côté de Mouton boüilli, & passé par la poële.

Langues de Bœuf fraîches lardées,

Langues de Veau à la sausse douce,

Lapreaux en Casserole,

Longe de Veau en hachi,

Oisons par quartiers,

Pigeonneaux en fricassée,

Pigeonneaux à la poivrade,

[45]

Poitrine de Veau en ragoût.

Poulet-d’Inde au Pot-pourri,

Poulet-d’Inde desossé.

Roüelle de Veau en ragoût,

Queuë de Mouton passée à la poële,

Tête de Veau frite,

Tétine de Veau à la sausse douce.

Rôti.

Becfigues,

Cailletaux,

Chaponneaux ou Poulets gras,

Cochon de lait,

Faisans, Faisandeaux,

Grives,

Levraux,

Marcassins,

Mauviettes,

Perdreaux,

Pigeonneaux de voliere,

Poulardes de l’année.

Ces mêmes viandes sont encore bonnes pour les mois suivans, de même que beaucoup de celles qu’on a marquées pour la premiere & la seconde Saison, peuvent être servies dans un autre temps, si l’on en a. On n’a donc qu’à consulter là-dessus sa commodité ; & si elle le permet, s’attacher en tout à ce qui compose les Repas que l’on

[46]

décrit, preferablement au contenu des Listes, qui sont des Ragoûts moins à la mode, & plus communs.

REPAS

Qu’on peut donner les mois d’Octobre, Novembre & Decembre.

Premier Service.

Potages & Entrées.

Un grand plat, quatre moïens, & quatre hors-d’œuvres, sçavoir,

Une Bisque de Pigeons,

Un Potage de Canard, au coulis de Nantilles.

Trois entrées ; l’une, de Poularde à la Singaraz, garnie de marinade.

Un Pâté de Lapin,

Et un Aloïau servi avec le Filet, garni de Fricandaux.

Les quatre petits plats, ou Hors-d’œuvres, sont,

Une de Perdrix, sausse à l’Espagnol,

Un de Filets mignons,

Une Fricassée garnie à la braise,

Et un de Mauviettes farcies à la moutarde.

[47]

Second Service.

Rôt & Entremets.

Deux moïens plats de divers Volailles, & Gibiers de la saison,

Une grane Tourte de pâte croquante, garnie de Tartelettes & Beignets,

Un plat de Blanc-manger,

Un Pâté au Jambon,

Les quatre Hors-d’œuvres, sont,

Un de Cardons au Parmesan,

Un de Truffles au court-boüillon,

Un de Ris-de-Veau, & Crêtes farcis,

Un de Hattelettes, & quatre Salades.

On servit un Soupé de cette maniere chez Monsieur le Duc de Chartres, le premier Decembre.

[48]

AUTRE GRAND REPAS.

Pour le mois de Decembre.

Premier Service.

Potages.

Deux Bisques de Pigeons,

Deux Casseroles au Parmesan,

Deux Potages de Poulets farcis, à la purée verte,

Deux de Canards aux Navets,

Deux de Poulardes à la Chicorée,

Deux de Cailles farcies aux Truffles,

Deux de Cercelottes au Basilic,

Deux de Perdrix, coulis à la Reine.

Entrées.

Trois grandes Entrées ; sçavoir,

Une grande Longe de Veau, garnie de marinade, & piquée de hattelettes.

Une piece de Bœuf, avec le Filet garni de cottelettes.

Et un Ros de bif de Mouton, garni de cotelettes farcies.

Dix moïennes Entrées ; sçavoir,

Deux tranches de Bœuf roulé & farci.

Deux d’Oiseaux de Riviere farcis aux huîtres,

[49]

Deux de faisans hachez en pâtisserie,

Deux de Poulets gras aux truffles,

Deux de petites Poulardes au coulis d’Ecrevices.

Hors-d’œuvres.

Deux de Grenadins aux Poulardes,

Deux de Veau à la Bourgeoise,

Deux de Perdrix à l’Espagnole,

Deux de Faisans, sausse à la Carpe,

Deux de Poulets marinez,

Deux de Becasses rôties au vin,

Deux de Cailles à la braise,

Deux Biberots de Perdrix,

Deux Mirotons de Veau aux asperges,

Deux de Filets de Poularde au blanc,

Deux de Filets de Bœuf aux Concombres,

Deux de Pigeons au basilic,

Deux de Perdrix aux Olives,

Deux de Saucisson Roïal.

Second Service.

Pour le Rôt.

Seiz plats de toute sorte de Gibier, Ortolans, Faisans, Marcassins, & autres especes de Volailles ; avec douze petites Salades.

[50]

Entremets.

Les trois grands plats, de trois Pâtez de Jambon.

Les dix plats moïens :

Deux de Blanc-manger,

Deux Tourtes de blanc de Chapon,

Deux de Gâteaux farcis de marmelade,

Deux Tourtes croquantes garnies d’autre marmelade.

Deux Omelettes au Jambon.

Hors-d’œuvres.

Deux de Beignets de poemmes,

Deux de Beignets de Blanc-manger,

Deux de Rissoles,

Deux de Champignons à la crême,

Deux de Pain au Jambon,

Deux de Crême brûlée,

Quatre de truffles au court-boüillon,

Deux de cus d’Artichaux,

Deux d’Artichaux frits,

Deux d’Artichaux à la glace,

Deux d’Asperges en Salade,

Deux de Mine-droit,

Deux de Galantine.

Il y eut un semblable Festin chez Monsieur le Duc d’Aumont, le 27 Decembre. La Table étoit en[16] fer à cheval ; & comme il y avoit quarante-deux Couverts, on fut

 

[1]             Ce mot répété.

[2]             Le texte porte : pouets.

[3]             Le texte porte : aussit.

[4]             Le texte porte : Pâez.

[5]             Le texte porte : Sevice.

[6]             Le texte porte : facies.

[7]             Le texte porte : Huits.

[8]             Ces deux derniers mots soudés.

[9]             Ces deux derniers mots soudés.

[10]            Ces deux derniers mots soudés.

[11]            Ces deux derniers mots soudés.

[12]            Le texte porte : l’aituës.

[13]            Le texte porte : d Oisons.

[14]            Le texte porte : toutes.

[15]            Le texte porte : don-.

[16]            Ces deux derniers mots soudés.

1705- Le cuisinier roïal et bourgeois (Massialot) (texte) (51-100)

[51]

obligé de redoubler jusqu’à trois plats de plusieurs choses, tant aux Entrées, que pour le Rôt & l’Entremets.

Si ces modeles ne suffisent pas pour diversifier en des jours differens les Repas que l’on aura à ervir, ou que la commodité des personnes & des lieux n’y répondent pas, on peut choisir dans la Table suivante.

LISTE

De ce qu’on peut servir, outre les Plats ci-dessus, durant les mois d’Octobre, Novembre & Decembre.

Potages.

Potages d’Alloüettes à l’Hipocras,

D’Andoüilles aux Pois,

De Tête d’Agneau,

De Canards aux Choux,

De Cailles aux Champignons,

De Champignons farcis,

De Chapons aux Choux-fleurs,

De Chapons aux Cardes, au boüillon blanc,

De Chapon desossé aux Huîtres,

D’Eclanche farcie aux Navets,

De Gigot de Veau farci, au blanc,

De Jarret de Cerf, ou de Sanglier,

[52]

D’Oie-grasse aux Pois passez,

De Perdrix aux Choux de Milan,

De Perdrix farcies,

De gros Poulets farcis, desossez,

De petits Poulets de grain en Bisque, aux Truffles.

De Poupetons,

De Sarcelles aux Champignons,

De Sarcelles à l’Hipocras,

De Santé,

Et de Vermicellis d’Italie.

Entrées.

Boudins de Foie de Veau,

Capilotade de Perdrix & Chapon,

Canard en ragoût,

Canard farci, à la sausse douce,

Chapon gras à la Daube,

Daube de Veau, haché & piqué,

Foie de Veau en Marinande,

Foie de Veau piqué & rôti,

Foie de Porc en ragoût,

Gallimafrée d’Epaule de Mouton,

Haricot de Poitrine de Pouton,

Langue de Bœuf piquée,

Langues de Mouton à la grillade,

Marinade de Perdrix,

Perdrix à la Daube,

Piece de Bœuf lardée de gros lard,

Pieds de Mouton à la sausse blanche,

[53]

Queuë de Mouton à la croûtade,

Roüelle de Veau aux Huîtres,

Tête de Veau en Mine-droit.

Pour le Rôti, voïez page 15. parce que les mêmes Viandes peuvent servir en cette Saison, aisi qu’il a été remarqué. Ce qui regarde l’Entremets est encore plus general, puisqu’il[1] s’étend pour la plupart à toute l’année. Par cette raison, on va recueillir en cet endroit, les differens Mets qu’on a servis dans les Repas qu’on a décrits pour chaque Saison[2] ; & nous y en ajoûterons quelques-autres, que l’on y pourra substituer dans les occurrences, & suivant les moïens.

TABLE GENERALE

d’Entremets.

Artichaux à la sausse blanche,

Artichaux frits,

Artichaux à la glace,

Artichaux à la Saingaraz,

Artichaux au beurre blanc,

Artichaux à l’estoufade,

Cus d’Artichaux empâtez, & frits,

Cus d’Artichaux sausse au jambon,

Asperges au jus de Mouton,

Asperges au beurre blanc,

Asperges à la crême,

Asperges en salade,

[54]

Beatilles en ragoût,

Beignets de Blanc-manger,

Beignets de Pommes,

Blanc-manger de plusieurs façons,

Cardons au Parmesan,

Champignons à la crême,

Champignons frits,

Champignons en ragoût,

Champignons en Casserole,

Choux-fleurs au beurre blanc, & au jus de Mouton,

Concombres,

Crêmes de plusieurs especes,

Crêtes farcies, & Foies gras en ragoût,

Echaudez glacez,

Fèves à la crême, & au lard,

Foies gras à la crêpine,

Foies gras à la broche,

Foie gras & Champignons,

Foies gras d’autre maniere,

Foies de Lapin en Omelette,

Galantine,

Gelées de plusieurs sortes,

Gruot,

Hattelettes,

Hure de Sanglier,

Jambon en tranches, & en hachis

Lait d’Amandes,

Langues de Bœuf parfumées,

[55]

Langues de Porc,

Mines-droits,

Mousserons & Morilles, farcies & frites,

Œufs & Omelettes de plusieurs manieres,

Oreilles de Porc à la Barbe-Robert,

Oreille de Porc frite en pâte,

Oreilles de Veau farcies,

Pain au Jambon,

Pâté froid de Faisans. Poularde, Venaison, & autres,

Pâté de Jambon,

Petits Pois au lard, & à la crême,

Pieds de Cochon à la Sainte-Menehout, & sur le gril,

Poupelins,

Ris-de-Veau farcis à la Dauphine,

Ris-de-Veau, & crêtes farcies,

Rissoles de blanc de Chapon,

Roignons de Coq en ragoût,

Rôties de Roignons de Veau, & autres.

Salée,

Talmouses,

Tourtes de plusieurs sorts,

Truffles au court-boüillon,

Truffles à la braise,

Truffles au jus de Mouton,

Truites, & autres Poissons au gras.

Pour ne pas lasser le Lecteur, par un trop longue suite de pareils Catalogues tou

[56]

chant les Pâtez, tant chauds que froids, & pour les Tourtes, de même que pour les differentes sortes qui sont propres à certaines choses exprimées dans la Table ci-dessus ; on le renvoie à la Table des Matieres, à la fin de ce livre, où il en trouvera le détail : ou bien à chaque Lettre qui s’y rapportera, dans l’Instruction Alphabétique, qui traitera de chaque chose en particulier, aprés que nous aurons vû ce qui regarde les jours maigres.

REPAS EN MAIGRE.

Pour toute l’Année.

On pourroit ne point tirer ici de Service, parce qu’il est aisé de se regler là-dessus, sur les Repas qu’on a décrits pour le gras : Cependant on ne laissera pas d’en donner quelques modeles, aprés que nous aurons marqué ce qu’on peut servir, tant pour les Potages & Entrées, que pour l’Entremets ; les fritures des mêmes Poissons dont il sera la saison, tenant lieu de Rôt. Commençons par les Potages.

[57]

Premier Service.

Potages maigres, pour les mois de Janvier, Fevrier & Mars.

Potages de Brochet aux Navets,

De Borchet farci,

De Cardes d’Artichaux,

De Choux de Milan,

D’Ecrevices,

D’Esturgeon,

D’Eperlans au boüillon brun,

D’Huîtres,

De Juliennes,

De Laites aux[3] Laitances,

De Langoustes aux Pois,

De Macreuse,

D’Oignons au basilic, & autrement,

De Parmesan,

De Profiterolle,

De Saumon frais,

De Soles farcies,

De Soles en filets au blanc, au basilic, aux nantilles, au concombre,

De Soles, aux Oignons, au blanc,

De Turbot,

De Tanches farcies,

De Tortuë.

On peut y ajoûter des Potages aux Racines & aux Legumes, que l’on trouvera

[58]

ci-aprés, sur-tou l’Oil maigre ; & même des Potages aux Poissons qui sont marquez pour les mois suivans.

Potages maigres, pour les mois d’Avril, Mai & Juin.

Potages d’Asperges,

De Champignons,

De Choux Blancs au lait,

De Concombres farcis,

De Framboises,

De Grenoüilles,

De Goujons,

De Lamproies,

De Laitües Farcies ;

De Maquereaux frits,

De Morilles,

De petits Pois verts,

Et le Potage de Santé aux Herbes, qui est commun pour les mois suivants,

Potages maigres, pour les mois de Juillet, Août & Septembre.

Potages d’Anguilles ;

De Barbottes au boüillon brun,

De Barbeaux à la purée de Fèves frites,

De Brochet farci,

De Carpes farcies,

De Choux blancs,

De Citroüille au Lait,

[59]

De Grenoüilles au boüillon brun,

De Lait avec Pistaches,

De Melon,

De Moules,

De grains de Muscat,

De Perches au boüillon blanc,

De Poissons en Bisque,

De Purée de Pois verts,

De Saumon aux Champignons.

Potages maigres, pour les mois d’Octobre, Novembre & Decembre.

Potages d’Andoüillettes de Poisson,

De Barbuës,

De Brochet aux Choux,

De Cardes d’Artichaux,

De Champignons farcis,

D’Eperlans au bouillon blanc,

De Hure e Saumon salé, à la purée,

De Lait marbré,

D’œufs pochez au Parmesan,

De Perches au boüillon brun,

De Pigeonneaux de Poisson.

On a de plus pour tous ces tems, les Potages de Ros, de Vermicellis, de Lait d’Amandes, & autres.

Entrées de Poisson pour toute l’Année.

Alozes,

Anguilles rôties,

[60]

Anguilles grillées, sausse Robert,

Anguilles à la sausse blanche,

Anguilles frites,

Anguilles à la sausse brune,

Aumar en ragoût,

Barbuës & Barbottes en ragoût, en Casseroles, en Filets.

BarbuPes à la crême, ou aux Anchois,

Bouillans de Poissons,

Bremmes en ragoût & rôties,

Brochet farci,

Brochet en Casserole,

Brochet en fricassée,

Brochet farci, à la sausse d’Anchois,

Brochet frit, en pâte,

Brochet en ragoût, par tronçons.

Carlets & Cancres.

Carpes en ragoût, & à la daube.

Carpes en filets à l’étuvée, sausse Robert.

Carpes farcies en ragoût,

Carpes au demi court-bouillon,

Casseroles de Poissons,

Cervelats de Poisson,

Chevrettes frites,

Congres frits par tronçons, à l’Anchois,

Congres à la Marinade,

Daubes de chair d’Anguille,

Dorades en fricassée, en tourte, &c.

Ecrevices en ragoût, & à la sausse blanche,

[61]

Eperlans aux Anchois, & en Casserole,

Filets de Carpes, de Soles, de Perches, &c.

Fricassées de Brochets, de Vives, de Soles.

Flais en Casserole, & frits,

Grenouilles de même,

Goujons empâtez, & à l’étuvée,

Hachis de Carpes, d’Ecrevices, de Perches, de Brochet,

Harans frais, & autres,

Haricots de Poisson,

Huîtres sur le gril, en ragoût, frites, ou farcies,

Lamproies,

Langoustes en ragoût, en hachis,

Limandes,

Loup ‘Etang de mer,

Macreuse au pot-pourri,

Maquereaux,

Merlans en Casserole,

Merluche,

Mirotons de Poissons,

Moruë fraîche, & autre,

Moules à la sausse blanche & brune,

Mulets frits, sausse à l’Anchois, & sur le gril,

Pains de Poissons,

Pâtez chauds de Poissons,

Petits Pâtez au blanc,

Perches, sausse aux Anchois,

[62]

Perches farcies,

Perches à la sausse blanche ou verte, ou aux concombres,

Pigeons de blanc de brochet,

Plies de Loire en ragoût,

Poissons de Saint Pierre aux truffles, au blanc, aux artichaux, au concombre, ou à la sausse verte.

Poupetons de Poissons,

Raie frite, & à la sausse Robert,

Rougets en Casserole,

Rougets grillez, panez,

Rougets farcis, ou en pâté,

Sardines,

Saucisses de Poissons,

Saumon en ragoût, avec Champignons,

Soles grillées aux Anchois,

Soles marinées, farcies, en ragoût, au blanc, aux fines herbes,

Saoles en filets, aux nantilles, au basilic, au concombre, à la sausse Robert, aux truffles, à l’Espagnole, aux Ecrevices, & au coulis de Capres, ou d’Anchois.

Soles à la Sainte-Menehout,

Soles en fricassée de Poulets, ou au roux ;

Soles en Pigeons,

Soles au Laurier,

Tanches farcies en ragoût, en fricassées, ou en casserole,

Thon mariné, sur le grill, ou en pâté enpot,

[63]

Thon en tranches, à la sausse au pauvre-homme.

Tortuës en ragoût, en marinade,

Truites en ragoût.

Turbot à l’huile ou à la sausse aux Anchois.

Turbot en ragoût.

Vives en filets, aux concombres, aux capres ou aux mousserons,

ives au Coulis d’Anchois,

Vives desossées, à l’étuvée,

Vives en fricassée de Poulets, au blanc,

Vives frites en ragoût.

Vous pouvez ajoûter à ces Poissons, des plats d’Epinards, de Choux farcis, de Pois, & autres Herbages ou Legumes, suivant les saisons.

POUR LE SECOND SERVICE.

On sert les mêmes Poissons que dessus, au court-boüillon & frits, ou sur le gril & à la broche ; entre-autres les suivans.

L’Aloze rôtie, & au court-boüillon.

Les Barbuës au court-boüillon,

Le Brochet de même ; ou bien, piqué d’Anguille, & à la broche,

Les Carpes au court-boüillon, sur le gril & frites,

L’Esturgeon de même,

Les Eperlans frits,

[64]

Les Maquereaux sur le gril,

Les Plies frites,

Le Saumon au court-bouillon,

Les Soles frites & grillées,

Les Tanches de même,

Le Turbot au court-bouillon

Les Vivves sur le gril, sausse aux Anchois.

On sert aussi des Pâtez de Poissons & des Tourtes, que l’on verra marquées ailleurs ; & l’on y peut ajoûter plusieurs pieces ‘Entremets des jours gras, comme Champignons, Artichaux, Asperges, Morilles, Concombres, &c. Hors du Carême, on a le secours des œufs, avec lesquels on peut déguiser un tres-grand nombre de plats : & dans ce même tems, on peut en choisir parmi ceux qui sont designez dans le Repas en Racines, que nous décrirons ci-aprés.

Voici seulement les Salades de Poissons, qui font encore partie de ce Service.

LISTE DES SALADES

de Poissons.

Salades de filets de Soles,

De Turbot frais,

De Barbuës fraîches,

D’Huîtres fraîches,

De filets d’Eperlan,

De Truite saumonée,

[65]

De Raie,

De filets de Merlan,

De filets de Vives,

De Thon frais,

D’Anchois & de Sardines,

De Saumon frais,

D’Ecrevices,

De Langoustes, & autres.

On trouvera ci-aprés les Salades de Racines. Pour celles d’Herbages durant l’Eté, rien n’est plus facile que de sçavoir dequoi les composer : on en a pour lors une si grande abondance, qu’on en peut changer aisément chaque jour, & en servir de plusieurs sortes differentes à la fois.

A plusieurs Filets de Poisson, on fait une sausse qu’on appelle Ramolade, composée de Persil haché, de la Ciboule hachée, des Anchois hachez, des Capres hachées, du basilic, de la sariette, & un peu de poudre de thin, le tout mis dans un plat, avec un peu de sel, de poivre, de muscade, d’huile & de vinaigre bien delaïez ensemble : & aprés avoir dressé les Filets dans son plat, on les arrose de cette Ramolade, & à quelques plats on y ajoûte du jus de Citron, pour les servir froids.

Si l’on veut maintenant des modèles de Repas en maigre, en voici un d’Ordinaire fort considerable, qui est de chez Monsieur

[66]

Duc de C…. Quand on aura de plus grandes Tables à servir, on pourra se regler pour l’ordonnance, sur les Repas qu’on a marquez pour le gras ; & si l’on se trouve dans des Ordinaires moins forts, on sera moins en peinde de retracher le nombre des plats, que d’avoir de quoi les bien assortir.

MODELES DE REPAS

en Maigre.

Pour un fort Ordinaire.

Potages.

Deux moîens Potages, & quatre petits.

Les deux moïens : l’un d’Ecrevices ; & l’autre de Soles farcies.

Les quatre petits : l’un, de Santé ; l’autre, aux Choux, le troisiéme, aux Pois : & le quatriéme, aux Oignons.

La grande Entrée.

Une Tourte d’Anguilles.

Deux autres petites Entrées ;

Une, de Perches entieres, à la sausse blanche ;

Et l’autre, de quatre Brochets.

[67]

Huis hors-d’œuvres.

Un d’Huîtres fricassées,

Un d’Epinars,

Un de peites pains de Soles,

Un de Soles en filets au concombre,

Un de filets de Perches au blanc,

Un de filets de Vives aux capres,

Une petite fricassée de Brochets,

Et le dernier, d’Anguille grillée, sausse Robert.

Le Rôt.

Deux moïens plats, composez de deux Brochets, & de huit Soles chacun.

Le grand, d’une Carpe, & six Brochetons autour.

Et le reste de ce Service, de pieces d’Entremets, & filets en Salades.

POUR LE SOUPÉ.

Potages.

Deux moïens Potages : l’un de Tortuës ;

L’autre, de Brochet farci.

Deux petits : l’un de filets de Soles au basilic ;

L’autre, de Soles aux Nantilles.

[68]

Entrée de Table.

Pour la grande Entrée, des Meuges farcis.

Quatre autres Entrées ; sçavoir,

Une tourte de Brochet,

Une Entrée de Dorades,

Une Etuvée de Carpes,

Une de Loup d’étand de mer.

Huis Hors-d’œuvres.

Sçavoir, un Hachis de Carpes,

Une dePerches,

Un Brochet farci,

Des Tortuës,

Des Soles farcies,

Des filets de Soles à la sausse Robert,

D’autres aux Truffles, & d’autres aux Ecrevices.

Pour le Rôt.

Deux moïens plats ; d’Esturgeon, & des Rougets autour.

Deux petits : de cinq Soles à chacun.

Le reste de ce Service, de pieces d’Entremets.

Seconde Table.

Grande Entrée ; de dix Soles aux Anchois.

Quatre autres ; sçavoir,

Une Tourte,

[69]

Une fricassée de Brochet,

Deux de Dorades,

Et deux plats de Rôt.

ORDINAIRE

d’un autre jour.

Potages.

Deux moîens, & quatre petits.

Les deux moïens ; l’un de Perches au blanc ; l’autre, de Langoustes.

Les quatre petits : l’un de Santé : l’autre, d’Oignons au basilic : le troisiéme, de Profiterolles ; & l’autre, de Laites.

Entrées.

Grande Entré ; de Rougets.

Deux moïennes : l’une, de Perches farcies : l’autre, de Carpes entieres.

Huis Hors-doeuvres.

Un Poupeton de Thon,

Des filets de Perche à la sausse verte,

Des Huîtres farcies,

Un Haricot,

Filets de Soles au truffles,

Des Bouillans,

Des soles grillées, aux Anchois,

[70]

Et un Pâté au blanc.

Pour le Rôt.

Deux moïens plats ; de six Brochets, & quatre Soles à chacun.

Deux autres plus petits ; de deux Barbuës, & quatre Soles autour.

Le reste de ce Service, de pieces d’Entremets, & Filets en Salade.

POUR LE SOUPÉ.

Potages.

Deux moïens Potages :

L’un, d’un Oil ; & l’autre, de Moules.

Deux petits : l’un, de Macruses aux Nantille ;

Et l’autre, de Soles au concombre.

Entrées.

Pour la grande, de la Raie.

Les autre autres : l’un de Rougets ; l’autre, de Vives en fricassée de Poulets ; l’autre, d’une Tourte ; & la quatriéme, de Grenots.

Hors-d’œuvres.

Soles à la SainteMenehout,

[71]

Filets de Perches au blanc,

Filets deBarbües aux Anchois,

Un Hachis,

Des Tanches,

Un Chou farci,

Vives aux Mousserons,

Une Casserole.

Pour le Rôt.

Deux moïens plats, de sept Soles chacun.

Deux petits : l’un, d’une Carpe ; & l’autre de Brochet.

ORDINAIRE

d’un autre jour.

Potages.

Les deux moïens : l’un de Grenots farcis ;

L’autre, de Brochet aux Huîtres.

Les quatre petits : l’un d’Epinars ; l’autre, de Nantilles ; le troisiéme, de Seoles farcies sur l’arête ; & le quatriéme, d’Oignons, un Pain au milieu.

Entrées.

Un Pâté de Brochet pour la grandeEntrée.

Les deux autres :

L’une, de Thon grillé ;

Et la seconde, de Barbuës.

[72]

Hors-d’œuvres.

Un Miroton,

Des Pains de Soles,

Des Filets de Carpes aux concombres,

Des Filets de Soles au coulis de capres,

Vives grillées,

Rougets farcis.

Pour le Rôt.

Deux moïens plats, de douze Soles pour les deux.

Et deux petits, de deux Barbuës à chacun.

POUR LE SOUPÉ.

Potages.

Deux moïens : une Julienne ; & l’autre, de Filets de Soles.

Et deux petits : l’un au Parmesan ; l’autre, de Cancres farcis.

Entrées.

La grande Entrée ; de Merlans en Casserole,

Les quatre moïennes :

L’une, de Maquereaux ;

L’autre, de Moruë fraîche ;

La troisiéme, d’un Poupeton de Tortuës ;

Et l’autre, de Rougets panez sur le gril.

[73]

Huis Hors-d’œuvres.

Un Pain farci,

Un Gâteau de Soles,

Des Vives au concombre, & aux mousserons.

Soles à l’Espagnol,

Langoustes en hachis,

Un Pâté d’assiette,

Poissons de Saint Pierre, au blanc.

Le Rôt.

Un grand plat, d’un Turbot & d’une Barbuë, garnis de Rougets.

Deux plats moïens : l’un d’Aloze, l’autre[4], de Saumon frais.

En voilà plus que suffisamment, pour sçavoir regler & disposer un Ordinaire aussi fort. A d’autres qui le seroient mois, on peut se contenter d’atant d’Hors-d’œuvres qu’il y aura de Potages ; afin de servir ceux-là en levant ceux-ci : & l’on proportionnera ainsi le reste pour le second Service, chacun suivant la portée de la dépense. Voïons maintenant pour ce qui regarde les Racines.

[74]

REPAS EN RACINES.

Premier Service.

Potages.

Six Potages ; deux petits, & quatre moïens.

Un Potage de petits Oignons, un Pain au milieu.

Un Potage de Nantilles à l’huile, garni de pain frit.

Un d’Asperges à la purée verte,

Un Potage sans beurre.

Les deux petits Potages : l’un de lait d’Amandes, garni d’Amandes à la Prâline ; & un potage de Morilles.

On peut servir aussi un Oil de Rocines, & herbages à l’huile.

Entrées.

Un plat de Nantilles en ragoût, aux fines herbes,

Un de Purée aux Pois, aux fines herbes,

Un de Haricots,

Un de Racines en ragoût,

Un de Topinambours,

Un d’autres Racines differentes,

Quatre plats d’Huitres.

[75]

Second Service.

Pour les Entrées.

Il faut prendre des Racines, comme Panais, Racines de Persil, Topinambours, Salsifix, Navets, &c. le tout bien ratissé & bien blanchi ; & étant comme cuites, prendre une Casserole, avec quantité de bon beurre, & des Oignons hachez : quand le beurre est un peu roux, on y met une poignée de farine, aprés on y jette ses Racines, on les frit & assaisonne comme il faut ; & on hache ensuite le tout sur la table, pour en faire une Farce, mêlée d’un peu de persil & de ciboule, de toute sorte de fines herbes, quelques morceaux de truffles & de champignons, un bon morceau de beurre, un peu de mie de pain & de la crême de lait ; en sorte que cette Farce soit délicate & pas trop grasse, & assaisonnée comme il faut.

Avec cette Farce, on forme sur des assiettes telle maniere de Poissons que l’on veut ; à l’une, des Soles ; à l’autre, un Turbot ; sur l’autre, des Carlets ; sur une autre, des Rougets, des Vives, des Maquereaux, & ainsi du reste. A chque assiette, il faut un peu de beurre dessous vôtre Farce formée en maniere de Poissons. Vous

[76]

les panez ensuite proprement par-dessus, & les faites cuire au four. Pour des Soles, on les peut encore former sur une feüille de Patience qui en a assez la figure, & les frire de la sorte avec beaucoup de facilité.

On peut prendre aussi des Carotes, & sur-tout des Betteraves, lesquelles étant bien ratissées & cuites à proportion, chaque racine à part, on les coupera par belles tranches larges ; les unes en maniere de Soles, les autres en maniere de Vives, & ainsi des autres manieres : & vous mettrez le tout un peu mariner, tandis qu’avec de la farine, du sel & du vin blanc, vous ferez une pâté comme celle de beignets de pomme, pour empâter vos racines, avant que de les frire avec du bon beurre & huile, chaque chose à part ; & les frirez comme d’autre marinade, de même que des salsifix & autres Racines, dont on peut faire un ou deux plats pour le Rôt.

Pour les déguiser, il faut avoir des ragoûts à part de plusieurs sortes ; les uns, de champignons hachez ; les autres, de truffles ; d’autres, de pointes d’Asperges ; d’autres, de morilles : une bonne sausse Robert aussi à part ; une sausse blanche, qu’il n’y entre pas d’Anchois ; ce qui servira principalement pour les plats façon de Poisson, composez avec la Farce. On les garnira de

[77]

quelque peu de Pain frit, Persil frit, Racines marinées frites en pâte, cus d’Artichaux frits en pâte, & quelques morceaux de concombres.

Pour l’Entremets.

Un plat d’Asperges à la crême,

Un de Tourte de lait d’Amandes, & fleur de lait,

Un de Crême brûlée,

Une de Morilles à la crême,

Un d’Asperges en Salade,

Un de Gelée de corne de Cerf,

Un Blanc-manger,

Des Champignons panez & mis au four,

Des choux en Salade,

Des Concombres en Salade,

Des Epinars à la crême,

Des Haricots en cosse qu’on avoit conservez secs, servis en Salade ; & d’autres à la crême,

Des Artichaux salez, à la sausse blanche,

Des Truffles seches à l’huile,

Des Beignets de pomme.

Le Repas que l’on vient de décrire, fut le Dîné de Monsieur le Duc d’Orléans, le jour de Vendredi-Saint. On fit porter les Racines dés la veille ; il y en avoit trois ou quatre Tables chargées : on les éplucha,

[78]

ratissa & blanchit à l’ordinaire, tant pour les Ragoûts & Entrées, que pour le Rôt ; en sorte que tout étoit prêt dés le matin pour les Farces. On fit aussi cuire dés le soir une grande quantité de Pois ; ce qui servit pour faire beaucoup de jus à l’Oignon, & pour empoter les Herbages & Racines de l’Oil.

Quoiqu’à pareil jour on n’ait guere besoin d’une grande diversité de Mets, on ne laissera pas d’ajoûter ici dequoi diversifier, ou augmenter ceux que l’on a marquez ; parce qu’ils peuvent servir pour d’autres occasions, durant tout le Carême. Par exemple,

Pour les Potages.

On ne peut faire aux Brocolis,

A la Ciboulette, au Lait ;

Aux Chmapignons & Mousserons,

Aux Petits Pois,

Aux Truffles,

Aux Raves ;

Et de cus d’Artichaux.

Pour les Entrées & pour l’Entremets.

Outre les Crêmes, les Beignets & les Blanc-mangers ordinaires, & les Racines empâtées & frites dont nous avons parlé, on peut faire des Tourtes de quelques-unes ;

[79]

comme d’Epinars, de Champignons, de Truffles, de Morilles & Mousserons, de Prunes, de Betteraves, &c. On sert aussi des Œufs & des Omelettes falsifiées de plusieurs sortes : & pour ceux qui mangent au beurre, on accomode plusieurs Racines à la sausse blanche ou rousse ; & l’on remplit ainsi aisément une tres-grand Service quand onen a affaire ; ou l’on se passe avec ce qu’on a, d’une maniere qui ne laisse pas de pouvoir donner de la satisfaction, autant que l’abstinence du tems le peut permettre. Il ne nous reste qu’à marquer les Salades que l’on peut servir, parce que c’est en ce jour qu’il en faut davantage.

Liste des Salades.

Artichaux,

Asperges,

Betteraves,

Brocolis,

Celeri,

Cardes,

Champignons en Compote,

Chicorée sauvage,

Choux-fleurs,

Citrons,

Concombres frits,

Grenades,

[80]

Haricots,

Laituës,

Oranges,

Olives,

Oublon,

Persil de Macedoine,

Pourpier,

Salsifix,

Scorsonnere,

Topinambours,

Truffles.

Venons maintenant au travail & à la pratique : car ces idées generales que nous avons données peuvent bien suffire pour les Maîtres d’Hôtels & les Pourvoïeurs ; voïant assez par-là ce qu’ils ont à acheter, & l’ordonnance des Repas dont il peuvent avoir le soin. Mais il faut quelque chose de plus à ceux qui se mêleront de la Cuisine : il est necessaire de leur expliquer la maniere de chaque apprêt, afin qu’ils y puissent réüssir sans peine ; & c’est ce que nous allons faire dans la suite, sans leur rien cacher de ce qui est de plus à la mode, & de plus en usage à la Cour & dans les autres meilleurs Tables, telles qu’on a vû que sont celles que nous avons donné pour modeles.

[Planche 1]

Modele pour une Table de six Coucerts, servie à un Plat & quatre petits.

[Illustration]

[Planche 2]

Modele pour une Table de huit Coucerts, servie à un grand Plat, deux moïens & quatre Assiettes.

[Illustration]

[Planche 3]

Modele pour une Table de dix Coucerts, servie à trois grand Plats & quatre petits.

[Illustration]

[Planche 4]

Modele pour une Table de douze Couverts, servie à deux grands Plats, un moïen, quatre petits, & deux Assiettes dans les flancs.

[Illustration]

[Planche 5]

Modele pour une Table de quatorze à quinze Couverts, servie à un grand Plat, deux moïens, six petits, & quatre Assiettes.

[Illustration]

[Planche 6]

Modele pour une Table de dix-huit Couverts, servie à trois grands Plats, six moïens & huit petits.

[Illustration]

[Planche 7]

Modele pour une Table de vingt Couverts, servie à trois grands Plats, huit moïens & quatre Assiettes.

[Illustration]

[Planche 8]

Modele pour une Table de vingt-cinq Couverts, servie à cinq grands Plats, dix moïens & quatre petits.

[Illustration]

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INSTRUCTION SUIVANT L’ORDRE ALPHABETIQUE

Enseignant la maniere d’apprèter toutes sortes de Viandes grasses & maigres, & comment on doit les servir pour Entrées, pour Entremets & pour le Rôti, ou de toutes autres façons.

A.

Abbatis.

Nous entendons sous ce nom d’Abbatis, les têtes, pieds, foies & autres choses semblables des Animaux, soit volatils ou terrestres. On en fait des Potages & des Entrées.

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Potage d’Abbatis d’Oisons.

Vos Abbatis étant bien échaudez & nettoïez, faies-les cuire dans de bon boüillon, assaisonné d’un bouquet de fines herbes, & sel. Etant cuits, coupez-les par morceaux & les passez à la poële, avec lard fondu, persil, cerfeüil, un peu de poivre blanc ; & ayant blanchi le tout avec jaunes d’œufs, un filet de verjus & un jus de citron, dressez vôtre Potage sur croûtes mitonnées. On en peut faire autant des beatilles d’autres Volailles.

Il s’en fait aussi des Tourtes de cette maniere. Mettez les Abbatis par morceaux, échaudez-les & les nettoyez : formez-en ensuite vôtre Tourte, entre deux abaisses de pâte fine : assaisonnez de poivre, sel, clous, fines herbes, ciboule, muscade, lard pilé, cus d’artichaux, champignons, morilles ; & l’aïant fait cuire environ deux heures, mettez-y une petite sausse blanche en servant.

Agneau.

L’on ne s’arrêtera pas à remarque que l’on sert des Quartiers d’Agneau, ou des moitiez d’Agneaux entiers pour la grande piece de Rôti, quant c’en est la saison, principalement pour les Tables ordinaires.

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Comme il n’y a rien en cela de difficile ni d’inconnu, on viendra d’abord à la maniere de faire un Potage de têtes d’Agneaux ; & l’on marquera ensuite, comment accommoder l’Agneau & les pieds pour Entrées.

Têtes d’Agneaux en Potage, ou pour Entrée.

Ayant bien échaudé les têtes d’Agneaux & les pieds, faites-les cuire avec les foies & du petit lard, dans une grande marmite avec du boüillon, assaisonnez de sel, poivre, clous, & un bouquet de fines herbes ; étant cuit, faites mitonner votre Potage avec de bon boüillon et bon jus ; rangez vos têtes d’Agneaux au milieu ; faites frire les cervelles, les aïans bien panées, en sorte qu’elles soient comme des croquets, et les remettez en leur place ; & garnissez votre Potage des foies, des pieds, & du petit lard ; ajoûtez-y un coulis blanc, fait avec un morceau de mie de pain trempée dans de bon boüillon, une douzaine & demie d’amandes douces, & trois jaunes d’œufs durs, le tout pilé dans un mortier, & passé par l’étamine bien mitonné & bien assaisonné, & un jus de citron en servant.

On peut aussi faire un coulis verd, avec du verd de ciboule, des épinars, & des croûtes de pain que vous faites mitonner

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de même dans une casserole avec de bon boüillon, bien assaisonné de clous, thim, & jus : vous pilez votre verd de ciboule & vos épinars dans le mortier ; & l’aïant passé avec le reste par l’étamine, vous le jettez sur votre Potage, avec des asperges en petits pois semées par-dessus, & un jus de citron.

A la place de ce coulis, on peut mettre sur le Potage de têtes d’Agneaux, une bonne purée verte : & pour le déguiser, une autre fois, on fera un coulis des foies ; & l’on garnira des pieds & du petit lard. Une autre fois on les peut couvrir de petits pois, & un coulis de même, selon la saison. Et une autre fois, on peut échauder les têtes d’Agneaux bien proprement, prenant garde que l’eau ne soit pas trop chaude ; aprés on ôtera tous les os & la langue, aïant soin que la peau reste toute entiere ; on farcira ces têtes de quelque bonne farce ; & les aïant ficelées, on les fera cuire. Aprés qu’elles seront cuites, on les dressera sur lePotage, & on le garnira de même que ci-devant, ou bien du moû d’Agneau mariné, & frit en pâte.

On fait aussi une petite Entrée de têtes d’Agneaux, avec un bon ragoût par-dessus ; & un Potage d’Agneau aux Laituës Romaines farcies ; garnissant encore ledit Potage,

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des tiges de Laitues passées à la poële avec lard fondu & farine frite, & mitonnées ensuite dans un pot avec bon boüillon, que l’on blanchira avant que dresser, avec des jaunes d’œufs passez par l’étamine.

Entrées de pieds d’Agneaux.

echaudez-les bien & les faites cuire ; étant cuites, levez l’os du milieu & les farcissez d’une bonneFarce ; étant farcis, trempez-les dans des œufs battus, ensuite panez-les bien, c’est-à-dire, jettez dessus de la chapelure de pain bien menu, aprés faites-les frire comme des croquets, & garnissez votre plat avec du persil frit.

Ils vous peuvent aussi servir pour Hors-d’œuvres, ou pour garnir une Entrée de tête d’Agneau au blanc, comme si c’etoit des Pigeons au blanc. On en peut encore garnir le Potage de têtes d’Agneaux ci-devant ; & il faut servir le tout chaudement.

On fait un autre Ragoût d’Agneau, le coupant en quatre ; & aprés l’avoir lardé de moïen lard, & lui avoir donné un peu de couleur, on le fait cuire dans une terrine ou casserole, avec boüillon, sel, poivre, clous, champignons, & un bouquet de fines herbes. Etant cuit, passez huîtres par la poële, un peu de farine, deux anchois,

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jus de citron en servant, & garnissez de champignons frits.

Aloïau,

Est le nom de certaines pieces de Bœuf qui se prennent au-dessus des côtes, & qui se mangent ordinairement rôti, & d’autres manieres.

Aloïau à la Godard.

Faites cuire un Aloîau de la premiere piece à la broche, à moitié piqué de gros lard, c’est-à-dire le Filet. Etant à demi cuit, vous le retirerez, & le mettrez dans une marmite, avec un bon assaisonnement & jus bien nourri, un peu de truffles, champignons, morilles, artichaux, seulement pour donner goût ; parce que vous faites un autre Ragoût de truffles, champignons, morilles, cus d’Artichaux, ris-de-veau, crêtes, le tout bien lié, lequel vous mettez par-dessus votre Aloïau, & le garnissez de marinade de Poulets, ou cotelettes marinées.

Aloïau à l’Angloise.

Prenez un Aloïau de la premiere piece, & le mettez deux jours au sel : ensuite mettez le à la broche ; & étant bien cuit, panez-le, & jettez un bon ragoût par-dessus

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& par-dessous : garnissez-le de hattelettes, de marinade, ou de poupietes cuites à la broche.

Aloïau au Concombre.

On fait une autre moïenne Entrée d’un Aloïau, avec un bon ragoût de concombre que vous ferez ainsi. Prenez des Concombres bien meurs, pelez-les, & les coupez par la moitié ; ôtez-en les pepins, coupez-les ensuite par tranches, faites-leur jetter leur eau entre deux plats, & aprés les avoir fait égouter, empotez-les avec de bon boüillon gras, puis les assaisonnez de sel, poivre, clous de girofle, muscade, fines herbes bien menuës, & quelques rocamboles : étant cuits, égoutez-les, & les faites mitonner sur un réchaud dans une casserole ; & lorsque vous serez prêt de servir, jettez-y un bon verre de vin rouge, puis servez votre Aloïau sur vos Concombres. Vous pouvez garnir votre plat de cotelettes de Veau marinées, ou de pain frit, ou de ce que vous aurez de convenable.

Aloïau farci.

Vous pouvez le farcir d’un salpicon, dont vous trouverez la maniere sous la lettre S. Ou bien, votre Aloïau étant presque cuit à la broche, vous prenez la chair

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du milieu de vous hachez bien menu, avec du lard, graisse de Bœuf, fines herbes, épices & bonnes garnitures ; vous en farcissez votre Aloïau entre la peau & l’os, & le recousez proprement, de peur que l chair ne tombe dans la lechefrite en achevant de cuire. Vous garnissez votre plat de Fricandeaux en façon de cotelettes piquées, avec pain frit ; & étant sur Table on ôte les peaux, pour avoir la liberté de le manger avec une cuillère.

Aloze,

Est un Poisson de mer qui passz ordinairement en eau douce, où aïant séjourné quelque temps, elle en devient plus délicate & d’un meilleur suc.

Aloze rôtie.

Ecaillez-la & l’incisez ; & aprés l’avoir frottée de beurre & de sel, ou bien lui avoir fait prendre sel dans une Tourtiere avec de l’huile, faites-la griller à petit feu sur le gril, qu’elle soit de belle couleur. Vous la pouvez servir à l’ozeille, & à la crême. A l’ozeille, on y ajoûte du persil, cerfeüil, ciboule, sel, poivre, muscade, & bon beurre. On peut aussi la servir avec un ragoût de champignons, ou une sausse brune avec capres.

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Aloze au Court-boüillon.

L’aïant écaillée & incisée, faites-la cuite avec vin blanc, vinaigre, sel, poivre, clous, laurier, oignons, & citron verd ; & la servez sur une serviette.

Alloüettes,

Sont de petits Oiseaux d’une assez bonne nourriture : elles sont meilleures en Hyver qu’en tout autre tems. Vous pouvez mettre les Alloüettes en Ragoût pour Entrées : on en peut faire aussi un Pâté chaud, & une Tourte. Pour la Tourte & le Pâté, on n’a qu’à voir ce qui sera dit pou d’autres Volailles semblables, entr’autres pour les Pigeonneaux, hors qu’on ne farcit point les Aloüettes comme on fait les Volailles plus grosses. On ôte seulement les jusiers qu’on range au fond du Pâté ; & l’on garnit de champignons, foies gras, truffles, lard pilé, & autre assaisonnement : en servant, on y met de bon jus de Veau ou de Mouton, & un jus de citron ; & pour la Tourte, quelques capres, avec un peu de vin blanc en l’ouvrant.

A l’égard du Ragoût ; aïant vuidé vos Alloüettes, passez-les à la poële, avec lard & un peu de farine : ensuite, mettez-les dans une terrine, avec boüillon, vin

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blanc, dattes par morceaux, écorce de citron confit, pistaches, canelle, sel, poivre, prunes de Brignole, & jus de citron en servant. Vous garnirez avec ces mêmes choses, & servirez à courte sausse.

On ne s’arrête pas à remarquer qu’on mange les Alloüettes grasses rôties, cela étant assez connu.

Pour les Potages d’Alloüettes, voïez la lettre P.

Amandes,

Est un fruit assez connu de toute le monde : il y en a d’ameres & de douces qui servent à plusieurs usages : on en fait de la pâte, des Potages, du Lait d’Amandes & des Tourtes. Voici la maniere de faire toutes ces choses.

Pâte d’Amandes.

Il faut échauder des Amandes, & les laver dans l’eau fraîche : aprés il les faut piler, & les arroser d’un peu de blanc d’œuf foueté, avec un peu d’eau de fleur d’orange ; & à mesure que l’on pile les Amandes, on continuë de les arroser peu à peu, afin qu’elles ne dviennent point en huile. On ne sçauroit lestrop piler. Quand elles le sont comme il faut, on tire la pâte du mortier, & on la met dans une poële sur le feu, pour la

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dessecher avec du sucre en poudre. Il faut par livre de pâte, demi livre ou trois quarterons de sucre, bien mêmer le tout ensemble avec une gâche, & remuer toûjours jusqu’à ce qu’on voie qu’elle ne tienne plus à la poële, ou que posant le dos de la main dessus, elle ne s’attache pas ; pour lors vous l’ôtez de la poële, & la maniez sur une table bien nette avec un peu de sucre en poudre : vous pouvez aussi la dessecher avec du sucre cuit à la plume, pour livre de pâte demi livre de sucre ; observant auparavant ce que nous avons dit ci-dessus. Il faut un peu laisser reposer votre pâte avant que de l’emploïer, elle vous servira à faire des Abaisses pour des Tourtes. Vous la pouvez aussi travailler de plusieurs manieres ; la glacer, passer à la seringue, & la façonner en divers autres ouvrages. Les rognures qui vous resteront étant séches, il n’y a qu’à les remettre dans le mortier, & les piler avec un peu de blanc d’œuf, pour les ramollir ; & cela vous servira à en former de petits Choux, ou autre galanterie pour garnir vos plats.

Lait[5] d’Amandes.

On sert le Lait d’Amandes pour Entremets ; voici comment il se fait. Prenez des Amandes, échaudez-les, & les pilez dans

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le mortier, comme ci-devant. Vous prendrez ensuite un peu de lait, & passerez le tout bien proprement par l’étamine. Etant passé, il faut bien battre quatre œufs frais, & y verser du lait peu à peu ; aprés quoi on y met un peu de sel & de muscade. Pour le cuire, vous aurez une marmite sur le fourneau avez de l’eau ; & quand elle bouillira, vous mettrez un plat sur cette marmite avec un morceau de beurre de Vanvre, ou autre de pareille bonté : vous verserez dans ce plat votre lait d’Amandes, & vous remuerez toûjours, jusqu'à ce qu’il se forme une crême. Il le faut servir chaudement, sans sucre.

Potage de Lait d’Amandes.

Prenez une livre ou deux d’Amandes, selon la grandeur de votre plat ; & les aïant[6] bien échaudées, pilez-les tout d’un tems, en les arrosant d’un peu d’eau. Etant bien pilées, il faut avoir une casserole sur le feu, avec de l’eau qui soit tiede, & fort peu de sel : vous verserez cette eau dans votre mortier & passerez le tout par l’étamine, deux ou trois fois. Ensuite, mettez ce lait dans une marmite qui soit bien nette, avec un bon morceau de sucre & de canelle en bâton, & faites cuire le tout petit à petit. Pour dresser votre Potage, coupez

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de la mie de pain en tranches, & les rangez proprement dans le plat ; & quand elles seront séchées à l’air du feu, faites mitonner votre Potage du même lait ; & étant prêt à servir, arrosez-les autant qu’il est necessaire.

Quelques-uns font bouillir environ deux pintes d’eau dans une marmite, & y mettent la mie de deux petits pains, qu’ils mêlent ensemble dans un mortier avec les Amandes, & le font ensuite mitonner dans la marmite l’espace de trois ou quatre heures, avec sucre & canelle, comme ci-dessus ; aprés quoi ils le passent, & dressent de même.

Vous garnirez avec du massepain, ou des Amandes à la Prâline, que vous pouvez faire de cette maniere, si vous voulez vous en donner la peine. Prenez des Amandes bien échaudées, & faites bien égouter leur eau : aprés quoi vous les mettrez dans le sucre en poudre, & les jetterez tout d’un temps dans une poële à frire, que vous aurez toute prête avec de bonne huile chaude. Vous les remuërez & tournerez toûjours, jusqu’à ce qu’elles deviennent de couleur d’or : & alors vous les tirerez vîtement, & en ferez quatre ou cinq tas, parce qu’elles s’attacheroient ensemble ; & vous en garnirez votre Potage.

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Tourte d’Amandes.

Il faut piler environ deux bonnes poignées ‘Amandes douces ; & en les pilant les arroser d’eau de fleur d’orange. On y ajoûte de l’écorce de citron confit, d’autre écorce de citron verd, & du sucre : & on pile bien le tout ensemble, avec fort peu de farine que l’on y met : ensuite on foüette deux blancs d’œufs en neige, que l’on jette dedans, & trois jaunes d’œufs ; & toute cette farce étant bien demêlée, on la tire dans un petit plat. On fait une pâte avec de la farine, du beurre, un jaune d’œuf, & un peu de sel ; il faut sur tout que cette Pâte soit bien faite : aprés quoi on en étend une abaisse, que l’on met dans la tourtiere, avec un petit bord autour, que l’on y fait avec la pointe du coûteau. Quand il est tems de la faire cuire, on met dedans la farce que l’on a preparée, en sorte qu’elle tienne & remplisse toute l’abaisse : on la glace avec un peu de sucre fin, & on la met dans le four, prenant garde du feu dessus & y en mettant toûjours dessous : mais prenez garde de la faire trop cuite.

Anchois,

Sont des petits Poissons de mer qu’on

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nous apporte tout confis au sel ; dans des petits barils : on en fait ordinairement des Salades, & c’est la façon la plus commune de les manger. On fait aussi un coulis d’Anchois, & il en entre dans plusieurs Ragoûts, tant gras que maigres, qu’il seroit inutile de rappeller ici, puisque cela est suffisamment expliqué aux endroits où il en faut emploïer. On remarquera seulement, que l’on peut frire les arêtes des Anchois qui vous auront servi, les aïant passées dans une Pâte faite avec vin blanc, farine, un peu de sel & poivre ; &, ou vous en garnirez autre chose, ou vous les servirez pour Hors-d’œuvres, avec orange & persil frit.

Andoüilles.

Les Andoüilles se servent pour Entrées, plus que pour Entremets : on frit celles de Cochon, de la maniere qui suit.

Andoüilles de Cocho.

Prenez de gros boïaux de Cochon, & ôtez-en le gros bout, pour le faire tremper un jour ou deux. Etant bien trempé & lavé, faites-le blanchir dans de l’eau, avec un peu de sel, & quelques tranches d’oignons & de citron. Vous fendrez ce boïau, & vous y mettrez aussi un peu de vin blanc, pour en ôter le mauvais goût. Aprés qu’il

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 sera blanchi, vous le tirerez dans de l’eau fraîche ; & l’aïant ensuite porté sur la Table, vous le couperez de la longueur dont vous voulez les Andoüilles. Vous prendrez du ventre de Cochon, & en ôterez le gras ; & vous couperez cette viande en gros lardons, de la même grandeur de vos Andoüilles ; & vous les formerez ainsi avec moitié d’un & d’autre, les assaisonnant comme il faut : aprés quoi vous prendrez les chemises dont on doit ôter le petit boïau de dedans, les bien nettoïer, & les faire aussi tremper quelque tems pour en ôter le mauvais goût. Vous les couperez de la longueur de vos Andoüilles ; & aïant ficelé les bouts de chaque Andoüille, vous les passerez proprement dans la chemise, pour les en revêtir, & les lier. Quand vous aurez fait vos Andoüilles, il les faut emporter dans une marmite avec de l’eau, des tranches d’oignon, un oignon piqué de clous de girofle, deux feuilles de laurier, un pau de panne de Cochon ; & vous les ferez cuire doucement, en les écumant bie, y jettant aprés que vous les aurés écumées, un ou deux verres de vin blanc. Vous les laisserez refroidir dans le même boüillon, & vous les tirerez ensuite, & prendrez garde de les rompre : on les fait griller sur du papier, & on les sert tout d’un temps.

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On peut servir un Potage d’Andoüilles aux Pois passez avec bon boüillon ; & pour cela on fait cuire l’un & l’autre à part : les Andoüilles avec un bouquet, de fines herbes & un morceau de citron verd. On met dans la purée de fines herbes menuës, passées à la poële avec lard fondu. L’andoüille se coupe par rouëlles, pour dresser sur vos croûtes mitonnées, avec poivre blanc, jus de Mouton & de citron en servant : garnissez de pain frit, & de citron par tranches.

Andoüilles de Veau.

Aïez des boïaux de Veau qui soient un peu gros, bien lavez & bien propres, & coupez-les de la longueur dont vous voulez faire vos Andoüilles : ficelez un des bouts, & prenez du lard blanchi, de la têtine de Veau blanchie, de la fraize de Veau de même, & coupez le tout par petits dez ou roüelles. Vous les emttrez dans une casserole, & les assaisonnerez avec des épices fines battuës, avec une feüille de laurier. Il y faut du sel, du poivre, un peu d’achalottes hachés ; & vous y ajoûterez environ demi-setier de bonne crême de lait. Vous passerez le tout ensemble sur le fourneau, & tirerez aprés la casserole en arriere.

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Il y faut jetter quatre ou cinq jaunes d’œufs, un peu de mie de pain ; & tout étant bien lié, vous en formerez chaudement vos Andoüilles avec un entonnoir, & vous ficelerez le tout : aprés quoi vous les ferez blanchir dans de l’eau, & les empoterez de la même manière que celles de Cochon. On les fait cuire de même, il les faut aussi laisser refroidir dans leur bouillon : pour les servir, on les fait griller sur du papier, & on les sert chaudement. Ces sortes d’Andouilles se peuvent faire en Eté, quand on est hors du temps des Cochons ; comme dans les Païs où l’on n’en tuë pas toute l’année, ainsi qu’on fait à Paris.

Andoüilles & Cervelats de Carême.

Prenez chair d’Anguille, de Tanches, de Carpe, de Moruë fraîche, ou à son défaut, celle de Brochet ; hachez bien toutes ces chairs ensemble avec persil & ciboulette ; assaisonnez les de poivre, sel, clou, muscade & gingembre en poudre ; joignez-y du thim, du basilic, du laurier, & un peu de canelle en poudre, graisse d’Anguille & beurre frais, ce qu’il en faut.

Pilez ensuite les ossemens de Carpe de Brochet, d’Anguille & de Tanches dans un mortier, obsevant de les arroser avec

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de bon vin vermail ce qu’il en faut. Cela étant fait, arrosez-en votre hachis, duquel vous emplirez les menus intestins du Veau aprés les avoir bien lavez & dégraissez ; car en cet état, il n’y a aucun scrupule à s’en servir, ne leur restant aucune qualité grasse. Etant emplis, faites-les marine vingt-quatre heures dans du sel & de la lie de bon vin : les aïant retirez, mettez-les autant à la grosse fumée de votre cheminé, ou tel tems que vous voudrez, pourvû que le sel & les épices ne soient point épargnez : & lorsque vous en aurez besoin, vous les ferez cuire dans du vin blanc avec fines herbes, ou dans deux tiers d’eau, & un tiers de lie, aussi avec fines herbes. On sert l’un & l’autre froid pour Entrée.

Andouillettes.

On fait des Andouillettes de Veau, avec de la chair de Veau hachée, du lard, fines herbes, jaunes d’œufs, sel poivre, muscade, canelle pilée, leur faisant prendre une belle couleur ; & en servant on y delaie des jaunes d’œufs, avec du verjus & un jus de citron. Ces même Andoüillettes se mettent à la broche dans des platines de lard ; & on les arrose de ce qui tombe, avec jaunes d’œufs & mie de pain, tantôt de l’un,

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tantôt de l’autre, pour leur faire prendre une belle croûte : & pour servir, on y met du jus de Mouton ou autre, un jus de citron & persil frit pour garniture.

Il se fait aussi des Andouillettes de Poisson, avec de la chair d’Anguille & de Carpe, hachée ou pilée dans le mortier, assaisonnée à l’ordinaire. D’une partie de cette chair, on forme un Cervelat, dans un longe, & on le fait cuire avec vin blanc, beurre, un bouquet de fines herbes ; & du reste, on en forme des Andouillettes, que l’on met cuire dans du beurre, avec du bouillon & un bouquet de fines herbes. Passez des Champignons par la poële, avec laites de Carpes, & un peu de farine ; & aprés les avoir fait un peu bouillir avec du bouilon de poisson & citron verd, mettez-les avec vos Andouillettes. Vous les pouvez servir ainsi pour Entrées ; ou bien en Potage, les dressant sur vos crôutes mitonnées, garni de Cervelat en tranches, & tranches & jus de citron.

Anguille,

Est un Poisson de riviere que chacun connoît : il s’apprête de differentes manieres.

Anguilles farcies.

Vous les pouvez farcir sur l’arête, en

 

[1]             Le texte porte : quisqu’il.

[2]             Ces deux derniers mots soudés.

[3]             Le texte porte : au.

[4]             Le texte porte : l’auter.

[5]             Le texte porte : l’ait.

[6]             Le texte porte : aïan.

1705- Le cuisinier roïal et bourgeois (Massialot) (texte) (101-150)

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façon de Boudin blanc. Vous faites un Godiveau de la chair de vos Anguilles, que vous battez bien dans un mortier ; vous y mettez de la crême, de la mie de pain, deux ou trois rocamboles, la moitié d’une gousse d’ail : & votre Godiveau étant de bon goût, & bien assaisonné, vous en farcissez vos arêtes bien proprement ; vous les panez bien de mie de pain, & vous les faites cuire au four dans une tourtiere, qu’elles soient de belle couleur.

Anguille au blanc.

Quand l’Anguille sera écorchée, coupez-la par morceaux, que vous ferez blanchir à l’eau bouillante. Etant égoutez sur une serviette, vous les passez au beurre blanc, & vous les faites cuire avec sel, poivre, clous, muscade, feuille de laurier, & un morceau de citron ; quelques-uns y mettent un verre de vin blanc. Passez aussi des cus d’Artichaux, champignons & pointes d’asperges, avec bon beurre & fines herbes, que vous ajoûterez ; & faites une sausse blanche avec des jaunes d’œufs & verjus, quand le temps le permet, & qu’on est prêt à servir. Garnissez de pain frit & citrons par tranches, & servez avec le jus même.

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Anguilles à la sausse brune.

Vous les passez à la poële, avec beurre roux, fines herbes bien menuës, ciboules, sel, poivre, clous, muscade & capres ; un peu de verjus & de vin blanc, si vous voulez, & farine frite : Ensuite vous faites cuire le tout ensemble dans un plat ou une terrine, & garnissez de citron en servant.

Anguille frite.

On ne la doit point écorcher, mais seulement ôter l’arête, la occuper par tranche, la faire mariner avec vinaigre, sel, poivre, laurier, ciboules & citron ; puis les fariner, & les frire en beurre affiné. Pour servir, faites-y une persillade, avec vinaigre rosat & poivre blanc.

Anguille sur le gril.

Aprés l’avoir écorchée & mise par tronçons, faites-les mariner comme ci-dessus : & les aïant fait rôtir sur le gril, faites une sausse avec beurre roux, farine, capres, sel, poivre, muscade, clous, vinaigre, & un peu de boüillon ; faites-y un peu boüillir vos Anguilles, quand elles seront cui

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tes. On les sert aussi à la sausse Robert, & à la sausse douce.

Anguille à l’Angloise.

Aïant bien lavé votre Anguille, écorchez-la proprement : ce qu’étant fait, gardez la peau, mettez l’Anguille dans un plat, versez dessus de bon vin blanc, & l’y aïant laisse quelque tems, retirez-la ; faites-lui des incisions de distance en distance sur le dos & au côté ; emplissez ces incisions d’une maniere de farce que vous composerez ainsi. Prenez mie de pain blanc bien éfraisée, parsil haché, poivre, clou, muscade & sel, ajoûtez-y quelques jaunes d’œufs durs, Anchois pilez en maniere de pâte, & de bon beurre frais ce qu’il en faut, & mêlez le tout ensemble : emplissez de cette farce les incisions de vôtre Anguille, ensuite remettez-la proprement dans sa peau, & liez-la par les deux bouts, piquez-la avec une fourchette en plusieurs endroits, puis faites-la rôtir sur le gril ou à la broche : étant cuite, servez-la à sec, avec un jus de citron, ou faites-y une sausse avec bon beurre, vinaigre, sel, & poivre blanc ; observez qu’il n’y a que les grosses Anguilles qui s’accommodent de cette sorte.

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Anguilles à la Daube.

Hachez de la chair d’Anguille & de Tanches, assaisonnez de sel, poivre, clou, muscade ; & faites des lardons d’autre chair d’Anguille, dont vous mettez un lit sur lespeaux, & un lit de la chair hachée, en continuant ainsi comme un pain long. Enveloppez-les dans un linge, & faites-les cuire de même que le Jambon de Poisson, c’est-à-dire, moitié eau, & moitié vin vermeil, assaisonné de clous, laurier & poivre. Etant refroidi dans son boüillon, servez par tranches pour Entremets, plutôt que pour Entrées.

Potage d’Anguilles.

Ecorchez-la, & la mettez par tronçons : passez-les à la poële avec beurre roux, fines herbes, farine & assaisonnement, & l’empotez avec boüillon de Poisson, dont vous trouverez la maniere, lettre B. Vos croûtes étant mitonnées, dressez votre Potage, & servez avec capres & jus de citron.

Pâte & Tourte d’Anguille.

On fait un Pâté chaud d’Anguille pour Entrée, l’ayant coupée par tronçons,

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aprés l’avoir écorchée. Vous l’assaisonnez à l’ordinaire, avec sel, poivre, clous, muscade, fines herbes, ciboules, beurre, capres, laurier, chapelûre de pain ; à demi cuit, un verre de vin blanc, & jus de citron en servant. Vous dresserez-le Pâté en ovale, ou rond, avec pâte fine.

Pour la Tourte, vous pouvez ou hacher l’Anguille aprés l’avoir écorchée & ôté l’arrête, ou la couper par roüelles, l’assaisonnant comme dessus, avec des champignons par morceaux ; & des jaunes d’œufs & jus de citron en servant, pour faire une sausse blanche.

Artichaux,

Est un légume dont on se sert pour garir les Ragoûts & les Pâtez de beatilles. Voici diverses manieres d’accommode des Artichaux, pour servir d’Entremets.

Artichaux à la sausse blanche.

Faites cuire des petits Artichaux dans l’eau, & un peu de sel. Quand ils seront cuits, passez les cus par la poêle, avec persil, assaisonnez de sel &poivre blanc ; & faites une sausse avec jaunes d’œufs, un filet de vinaigre, & un peu de boüillon.

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Artichaux au beurre blanc.

Vos Artichaux étant cuits comme dessus, ôtez le foin ; & faites sausse avec beurre blanc, vinaigre, sel & muscade.

Artichaux frits.

Coupez-les par tranches, ôtez le foin & les faites boüillir trois ou quatre tours : mettez-les trmper avec vinaigre, poivre, sel & ciboule ; puis les farinez, & les faites frire dans du sain-doux ou beurre affiné : Servez avec persil frit.

Cus d’Artichaux en Pâte & frits.

Les Artichaux étant cuits & nettoïez de leur foin, faites pâte avec farine, sel, poivre & eau ; & empâtez-les pour les frire en grande friture. Servez aussi avec persil frit & un filet de vinaigre rosat.

Autres manieres.

On sert encore des Artichaux à la crême qui est comme les Asperges : d’autres à la Saingaraz & à la sausse au Jambon, pour les jours gras ; sur quoi voïez l’essence de

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Jambon, lettre I. & les Lapreaux à la Saingaaraz, lettre L. Et enfin, d’aures à l’estoufade, & glacez. Ils sont encore d’un grand secours toute l’année, pour presque tous les Ragoûts, Potages & Entrées ; ainsi il est necessaire d’en faire bonne provision, en observant ce qui suit.

Cus d’Artichaux en Purée.

Ayant bien nettoyé & lavé vos cus d’Artichaux, faites-les cuire dans l’eau qu’à ce qu’ils soient reduits comme de la bouillie, passez-les aprés cela dans une passoire à petits trous, de la même façon que l’on fait les pois ; faites-les mitonner ensuite dans une casserole, à petit feu, avec de bon beurre frais, sel poivre, muscade & clous battus : Joignez-y un bouquet de persil, ciboule, & thim avec une feuille de laurier ; émtant prêt de servir, pilez en un mortier amandes douces pelées, écorce citron confit, biscuits d’amandes ameres, jaunes d’œufs durs, sucre en poudre ce qu’il en faut ; mêlez-bien le tout ensemble, avec eau rose, de Jassemin ou de fleurs d’orange ; puis incorporez cette composition avec votre purée d’Artichaux, & l’aïant remise un moment sur le feu, servez promtement.

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Maniere de conserver les Artichaux.

Prenez de l’eau selon la quantité de vos Artichaux, en sorte qu’ils puissent tremper, & faites-la boüillir, avec du sel à proportion. Tirez-la ensuite hors du feu, & laissez-la reposer, afin que la crasse du sel aille au fond. Aprés il la faut couler dans le pot où vous voulez mettre vos Artichaux, qui doivent être bien tournez ; & les blanchir seulement pour en ôter le foin & la crasse. On les lave dans deux ou trois eaux, & on les met ensuite dans la saumure que l’on a faite, versant au-dessus de l’huile, ou bon beurre, afin que l’air n’y puisse penetrer. Si on veut, on y peut mettre un peu de vinaigre. Il les faut couvrir soigneusement avec du papier, & une planche par-dessus, pour que cela ne respire le moindre air. Pour les amploïer, on le dessale auparavant dans de l’eau fraîche. Ils se peuvent garder une année entiere & plus.

Autre maniere.

Ayez des bons Artichaux, nettoyez-les bien de leurs feüilles & du foin qui est dedans, avec un coûteau que vous coupez proprement tout autour, jusqu’à la chair,

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vous les jettez à mesure dans l’eau fraîche, pour qu’ils ne noircissent point, ensuite vous les tirez de l’eau & les jettez dans la farine en sorte qu’ils en soient tout couverts ; vous les rangez sur une claie & vous les faites secher au four, & pour vous en servir, vous les faites tremper vingt-quatre heures & les faites cuire comme les autres : de cette maniere ils ne perdent point leur goût.

On en peut aussi conserver de secs : & pour cela, aprés que vos Artichaux sont blanchis, & ue le foin en est ôté comme ci-dessus, vous les tirez sur des grilles ou claies d’osier, pour les faire égouter ; & on les fait ensuite secher au Soleil ou dans le four moderement chaud, si bien qu’ils soient secs comme du bois. Avant que de les emploïer, il faut les faire tremper dans de l’eau tiede, pendant une couple de jours : ils reviendront par ce moïen, comme quand ils étoient frais ; & l’on trouvera qu’ils en seront beaucoup meilleurs que de l’autre maniere. En les faisant blanchir, il y faut avec de l’eau, un peu de verjus & de sel, de bon beurre pour les jours maigres ; & pour les jours gras, on peut y mettre de la bonne graisse de bœuf.

Asperges,

Est une legume fort en usage parmi les

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aliments du printems ; les plus grosses sont estimées les meilleures : elles se mangent de plusieurs manieres. Il s’en fait des Potages, avec differentes Volailles, ou à la Purée verte, comme on en a pû voir assez d’exemples : & on les sert dans l’Entremets pour Hors-d’œuvres, ou autres plats ; tantôt en Salade, tantôt au blanc & au jus lié, & tantôt à la crême. Voici comme on les accommode de cette derniere sorte.

Asperges à la crême.

Il faut rompre vos Asperges par petits morceaux, & les faire un peu blanchir dans de l’eau boüillante, aprés on les passe au bon beurre dans la casserole, ou avec du lard, si l’on n’a pas de fort bon beurre ; prenant garde que le tout ne soit pas trop gras. On y met ensuite du lait & de la crême, & on l’assaisonne doucement, y mettant aussi un bouquet de fines herbes. Avant que de servir, il faut délaïer un ou dux jaunes d’œufs avec de la crême de lait, pour lier vos Asperges ; & vous servez en même tems.

On en peut faire autant pour ces cus d’Artichaux, & pour les petits Pois ; mais à ceux-ci il faut du sucre, & un peu de persil haché : du reste on les passe de la mpême maniere.

Vous pouvez aussi servir des Asperges en

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petits Pois, avec un coulis verd de cosses de Pois, ou autre chose ; une croûte au milieu, & garni d’un cordon de pain de jambon.

Asperges au jus.

Passez voz Asperges rompuës par morceaux, avec lard fondu, persil, cerfeuil coupé menu, & une ciboulette que vous retirerez ; assaisonnez de sel & muscade, & les faites mitonner dans un pot à petit feu : aprés vous les dégraisserez, & y mettrez un jus de mouton & de citron ; servez à courte sausse.

Asperges au beurre blanc.

Faites cuire les Asperges dans l’eau avec un peu de sel : faites sausse avec beurre, sel, vinaigre & muscade, ou poivre blanc, la remuant toûjours ; & versez-la sur vos Asperges, quand elles seront dressées. Il n’y a rien en cela que d’assez connu ; aussbien que pour les Asperges en Salade. A l’égard des Potages, voïez par le moïen de la Table, ceux où il en sera parlé ; & au rang des Tourtes, la maniere d’en faire une d’Asperges.

Pour conserver des Asperges.

Otez-en le dur, & les faites boüillir

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un boüillon avec sel & beurre : remettez-les dans l’eau fraîche, & les faites égouter. Etant froides, mettez-les dans un vase où elles puissent être de leur longueur[1] avec sel, clous entiers, citron verd, & autant d’eau que vinaigre : couvrez-les de beurre fondu comme les Artichaux, mettant un linge entre-deux : & les tenez dans un lieu temperé. Pour vous en servir, faites-les tremper & cuire comme les autres.

B.

Barbottes.

La Barbotte est un Poisson de Lac & de Riviere. Les œufs qu’elle a dans le corps, ne valent rien ? Vous les pouvez servir en Ragoût & en Casserole : les mettre en pâte, & en faire un Potage au boüillon brun.

Ragoût de Barbottes[2].

Nettoïez les Barbottes de leur limon avec eau chaude ; & les aïant farinées, faites les frire en bonne friture, & les mettez dans un bassin avec beurre roux, farine, anchois fondus, le tout passé ensemble ; assaisonnez de sel & muscade, une ciboule, capres & jus d’orange, ou verjus de grain.

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Garnissez de persil frit & citron par tranches, & servez pour Entrées, comme tous les autres Ragoûts de Poisson.

Barbottes en Casserole.

Limonez les Barbottes, gardez le foie, & passez-les à la poële avec beurre roux ; puis les mettez dans une terrine avec le même beurre, un peu de farine frite & vin blanc ; assaisonnez de sel, poivre, muscade, un bouquet de fines herbes, & un morceau de citron verd. Faites un Ragoût à part de la même sausse des Barbottes, avec les foies & des champignons ; & garnissez-en votre plat, y ajoûtant un jus de citron en servant.

Potage & Pâté de Barbottes.

Pour le Potage ; aprés les avoir lavées, passez-les entieres à la poële, avec beurre roux & un peu de farine ; puis faites-les cuire dans une terrine, avec sel, poivre, un bouquet de fines herbes, boüillon de poisson, ou purée, & un peu de vin blanc. Etant cuites, dressez-les sur vos croûtes mitonnées, & garnissez de champignons & capres.

Pour le Pâté ; dépoüillez la Barbotte, & dressez une pâte fine, où vous la mettrez

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avec ses foies, champignons, laites, queuës d’écrevices, huîtres, cus d’artichaux, assaisonnez de sel, poivre, muscade, fines herbes, ciboules, & jus de citron en servant.

Barbues,

Est un Poisson de mer : sa chair est assez délicate & d’un fort bon suc.

Entrée de Barbuë marinée.

Découpez-la par-dessus le dos, afin que la marinade penetre ; & quand elle sera marinée, vous la panerez bien de mie de pain & chapelûre assaisonnée, & vous la ferez cuire au four : Garnissez de petits Pâtés.

Barbuë en Salade.

Vous la faites cuire au court-boüillon ; & étant froide vous la coupez en filets dont vous garnissez une assiette, & de la petite Salade ; & vous l’assaisonnez de sel, poivre, vinaigre & huile : ou bien, vous y faites la ramolade que nous avons dit, page 65. & servez pour Entremets.

Autres manieres.

Si vous n’avez point d’autre plat au blanc,

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laissez votre Barbuë entiere ; servez-la chaudement avec une sausse blanche & crême pour Entrée.

On la sert aussi en files à la sausse aux Anchois ; & au court-boüillon sur une serviette, étant froide, pour Entremets.

Vous pouvez encore la mettre en pâté comme le Turbot, hors qu’elle ne doit cuire si long-temps.

Becasse,

Est un Oiseau de passage que chacun connoît par son long bec.

Entrée de Becasses au vin.

Il faut prendre les Becasses, & les couper en quatre, comme on fait les Poulets pour une fricassée blanche. Aïez des trufles que vous couperez par tranches, des ris-de-veux, des champignons, des mousserons ; & passez-le tout ensemble, en le moüillant de bon jus. On y met ensuite deux verres de vin blanc ou rouge, n’importe. Quand cela est bien cuit & assaisonné, il y faut du bon coulis de Becasse, pour lier la sausse, ou de quelqu’autre bon coulis dont on aura la commodité. On peut aussi y mettre une cuillerée d’essence de Jambon, le tout bien

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dégraissé. Rangez vos Bacasse dans le plat, le ragoût par-dessus ; & pressez un jus de citron avant que de servir chaudement.

Pour faire un Salmi de Becasses au vin.

Faites rôtir des Becasses ; & quand elles seront à demi cuites, coupez les en pieces, & mettez-les dans une casserole avec du vin, selon la quantité des Becasses que vous aurez. Mettez-y des truffles & des champignons hachez, un peu d’anchois & de capres, & faites cuire le tout. On lie la sausse avec quelque bon oculis : on dresse ensuite ses Becasses ; & on les tient chaudes, sans qu’elles boüillent. Auparavant que de servir, vous les dégraisserez bien, & vous y presserz un jus d’orange, & servirez chaudement.

On peut aussi faire une Entrée de Becasse en surtout ; surquoi voïez l’article des Pigeons qu’on accommode ainsi, lettre P. & le Pâté chaud de Becasse & Perdrix, au premier article des Pâtez.

Becassine,

Est une espece de Becasse ; mais bien plus petite & differente en couler : c’est aussi un Oiseau de passage. Les Becassines se

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peuvent servir en ragoût aussi-bien que rôties. Pour cela fendez-les en deux, & n’ôtez rien du dedans : passez-les à la poële avec lard fondu ; assaisonnez de sel, poivre blanc, une ciboule que vous retirerez, & un peu de jus de champignons & de citrons ; servez garni de tranches de citron.

Beignets.

Il se fait des Beignets de plusieurs manieres. Il y a des Beignets de pomme, des Beignets au lait, des Beignets de blanc-manger, & des Beignets à l’eau ; & on fait les uns & les autres en Entremets. Voici pour les Beignets à l’eau.

Entremets de Beignets à l’eau.

Prenez une casserole, & y mettez de l’eau, & un peu de sel, ave de l’écorce de citron verd & confit, haché bien menu. Faites boüillir cela sur un fourneau ; & y ayant mis deux bonnes poignées de farine & un peu de beurre, tournez-le à force de bras jusqu’à ce que cela se détache de la casserole. Alors vous le tirerez en arriere ; & y mettant deux jaunes d’œufs, vous les mêlerez bien ensemble, continuant d’y mettre deux œufs à deux œufs jusqu’à

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dix ou douze, que votre pâte soit delicate. Il faut ensuite fariner sur son tour, tremper la main dans la farine, & tirer votre pâte par morceaux sur le tour. Quand elle aura reposé, il faut la rouler & couper par petits morceaux, empêchant qu’ils ne s’attachent l’un à l’autre : & quand on sera prêt à servir, vous les frirez das du bon sai-doux ; & les aïant tirez, vous jetterez du sucre dessus & de l’eau de fleur d’orange, & vous servirez promtement pour Hors-d’œuvres. On en peut aussi garnir des Tourtes de crême.

Entremets de Beignets au blanc-manger.

Il faut avoir du Ris, & le laver en cinq ou six eaux ; & le faire sécher à l’air du feu, mais bien. Vous le pilerez aprés cela dans un mortier, & passerez cette farine par le tambour, afin qu’elle soit bien fine : il en faut une bonne demie-once, selon la grandeur de vos plats. Vous prendrez une casserole, vous y mettrez cette farine, & la délaïerez bien avec du lait ; vous y ajoûterez aprés une chopine de lait ; & mettant le tout sur le fourneau, vous aurez soin de remuer toûjours. On y met aussi quelque estomac de Poularde Rôtie, haché ; & vous formerez votre pâte comme si c’étoit pour

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faire une Crême[3] pâtissiere. Il faut fariner sur son tour, vuider cette pâte dessus, & la détendre avec vôtre rouleau. On peu encore y mettre un peu de sucre, d’écorce de citron confit, & de citron confit, & de citron vert râpé en cuisant. Vôtre pâte étant refroidie & bien étenduë sur le tour, il faut la couper par petits morceaux comme les Beignets à l’eau : farinez votre main, & les roulez proprement avec, & faites-les frire dans du bon sain-doux comme les autre. Quand on sera prêt à servir, sucrez & poudrez les de-même, avec de l’eau de fleur d’orange ; & s’ils vous servent de plat, garnissez-les de Beignets à l’eau, ou autres.

Beignets au lait.

On les fait de même que les Beignets à l’eau, mais il n’y faut pas tant mettre de farine, afin que la pâte soit un peu plus delicate. Si elle ne l’est pas assez, vous y mettrez quelques jaunes d’œufs davantage dans la caserole. Il faut ensuite prendre une assiette, & renverser la pâte sur le cu de ladite assiette, bien étenduë : & aïant du saindoux bien chaud & une cuillere en main, vous formerez vos Beignets avec le bout que vous tremperez de tems en tems dans le sain-doux, afin qu’ils ne s’attachent pas à la

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cueillere. Vous remuerez toûjours la poële doucement : & quand vos Beignets seront bien colorez, vous les tirerez & sucrerez tour chaudes, & les poudrerez d’eau de fleur d’orange ; aprés quoi vous les sucrerez encore un peu. On en peut glacer si l’on veut avec la pêle du feu, & les servir chaudement.

Autres beignets.

Echaudez des Amandes douces, & les pilez dans le mortier ; arrosez les de tems en tems, d’un peu d’eau claire, afin qu’elles ne deviennent pas en huile ; étant pilées comme il faut, vous les ôterez du mortier, & pilerez ensuite écorce de citron confite, fromage de Gruiere, jaunes d’œufs durs, biscuits d’amandes ameres, un peu de canelle en poudre, & un peu d’eau de fleur d’oranges pour les humecter, le tout à proportion. Aïant donc bien pilé le tout, vous y remettrez votre pâte d’amandes, & vous y ajoûterez marmelade de pommes & d’abricots, sucre en poudre & fleur de farine ; le tout à discretion. Vous mêlerez bien le tout ensemble, & en formerez une pâte suffisante pour la manier sur le tour : ensuite vous le roulerez & le couperez par morceaux, empêchant qu’ils ne s’attachent l’un à l’autre ; & quand on sera prêt à ser

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vir, vous les frirez dans du bon sain-doux, & les aïant tirez, vous poudrezrez du sucre dessus & du vin d’Espagne, & servirez promtement pour Hors-d’œuvres.

Autres manieres de Beignets.

On fait encore des Beignets de pommes, d’abricots en confiture sècle, de prunes, de cerises à oreille, de pistaches lissées, de groseilles rouges confites, de grains de grenade, & de parmesan ; & aux uns il faut une pâte claire, aux autres plus forte. Comme c’est plus une affaire d’Officier que de Cuisinier, nous n’en dirons pas davantage.

Biche,

Est la femelle du Cerf qui est un animal sauvage. Pour sçavoir la maniere d’accommoder la Biche, on peut consulter l’article du Cerf, étant de même nature ; sinon qu’elle est plus molle & plus fade. Il faut donc la faire tremper dans une marinade de même, aprés l’avoir piquée de menu lard. On l’arrose en la faisant rôtir ; & étant cuite, on met capres & farine frite dans son degout, avec un peu de citron verd, & on la fait mitonner dans sa sausse.

On peut aussi, étant piquée, marinée,

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& rôtie enveloppée dans du papier, y faire une sausse douce, avec vinaigre, poicre, sucre, canelle, & une échalotte entier.

Betteraves.

La Betterave est une espece de legume qui pour être comune ne doit pas être méprisée ; c’est la Racine d’une plante que nous appellons Bette ou Poirée rouge. Voici la meilleure maniere de la manger.

Betteraves frites.

AÏant fait cuire vos Betteraves au four, pelez-les, & les aïant coupées de la tête à la queuë en maniere de Soles de l’épaisseur de trois à quatre écus, mettez les tremper dans une pâte claire, faite de vin blanc, fleur de farine, crême douce, jaune & blanc d’œuf crud (plus de jaune que de blanc), poivre, sel & clous de girofle en poudre, ensuite tirez-les de cette pâte, & les poudrez de farine, mie de pain & persil haché ; faites-les frire ensuite, & étant séches, servez dans un plat particulier pour Entremets avec jus de citron. Ils peuvent servir pour border vos ragoûts de poissons.

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Beignets de Betteraves.

Aïant coupé vos Betteraves par roüelles, faites la pâte qui suit ; ayez du lait ce qu’il faut, des jaunes d’œufs à proportion, du fromage frais, des biscuits communs, de la citroüille cuite & passé à la passoire si c’est la saison ; des macarons & de l’écorce de citron confite battuë dans un mortier, & sucre en poudre ce[4] qu’il en faut, & un peu de sel ; délaïez bien le tout ensemble : & votre pâte étant faire un peu épaisse, faites fondre de bon beurre frais, & étant assez chaud, jettez vos Betteraves dans cette composition : prenez-en une cueillerée dans laquelle sera une de vos dites roüelles de Betteraves ; jettez-la dans la poële ; continué comme l’on fait les Beignets à la pomme, servez avec jus de citron.

On mange les Betteraves en Salade, on les fricasses avec beurre, persil, oignons, poivre & sel.

Bisque,

Est un Potage en ragoût. On sert des Bisques de Cailles, Chapons & Poulardes, & plus communément de Pigeons. Nous allons premierement marquer la maniere de celles-ci.

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Pour faire un Bisque de Pigeons.

Il faut prendre les Pigeons les plus frais tuez, les échauder, blanchir & éplucher ; les faire cuire dans de bon boüillon clair, avec plusieurs bardes de lard, un oignon piqué de clous de girofle, deux tranches de citron, le tout bien écumé. On ne les mettra au feu qu’une heure auparavant que de servir, selon la grosseur de vos Pigeons ; & étant cuits, vous les tirerez en arriere. Pour faire le ragoûtn il faut des ris-de-veau bien blanchis, coupez en deux, des champignons coupez par petits morceaux, des truffles par tranches, des cus d’artichaux coupez en quatre, & un entier pour mettre au milieu de votre Potage. Vous passerez proprement ce ragoût avec un peu de lard & de farine, & un oignon piqué ; & n’attendez pas qu’il rousisse. Quand il est ainsi passé, on y met un peu de boüillon, & vous le laissez cuire avec une tranche de citron. Vous ferez cuire à part dans une petite marmite, des crêtes bien échaudées & bien épluchées, avec des bardes de lard, de la graisse de Veau & du boüillon clair, une tranche de citron, un oignon piqué de quelques clous de girofle ; sur tout, que le tout soit bien blanchi : passez pour cela un peu

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de mie de pain dans l’étamine, avec de bon boüillon ; il n’en fait que deux cueillerées. Vos Pigeons, vos crêtes & votre ragoût étant prêts, vous faites vos soupes de la croûte de pain de Potage séchée au feu. On fait mitonner son Potage avec de bon boüillon : on dresse les Pigeons dessus, & le cu d’artichau au milieu : le ragoût dans l’entre-deux des Pigeons, les crêtes sur l’estomac : le tout bien dégraissé, achevez de mettre tout le ragoût desus. Il faut avoir en même temps, un morceau de Bœuf ou Veau rôti à la broche, à demi-cuit : on le coupe dans une casserole, ou un plat ; & à force de main on le presse, pour en tirer tout le jus. On ne le mettra pas au feu, afin qu’il devienne blanc : & quand votre Potage sera dressé, vous l’arroserez de ce jus, afin qu’il soit bien marbré ; vous le garnirez avec du citron, & vous en exprimerez une moitié par-dessus, & servirez chaudement.

Autre Bisque de Pigeonneaux.

Aïez des Pigeonneaux à proportion de la grandeur dont vous voulez votre Bisque, plumez-les & les blanchissez à l’eau chaude ; vuidez-les bien, & les troussez ; bardez-les de petit lard & les faires cuire dans de bon boüillon avec du clou battu, du poi

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vre, quelques feuilles de laurier & un oignon blanc pilé que vous enfermerez dans un noüet de linge blanc, & que vous ne laisserez qu’une demi-heure seulement, pour leur donner goût ; ensuite vous y mettrez du sel, écorce d’orange seche, & un bouquet de fines herbes, & vous les acheverez de cuire : &tant cuits tirez-les de leur boüillon pour les remettre mitonner dans de bon jus de Bœuf & de Mouton, avec un peu de jus de citron ; faites mitonner vos croûtes avec de bon boüillon, dressez vos Pigeons dessus & servez.

Bisques de Cailles, & autres.

Vous troussez vos Cailles bien proprement comme des Poulets, & vous les passez au roux ou à la poële avec beurre roux, qu’elle soient d’une belle couleur. Vous les empotez dans un petit pot, avec de bon boüillon, bardes de lard, unbouquet de fines herbes, clous de girofle, & autre assaisonnement, avec un morceau de tranche de Bœuf battu, un autre de maigre de lard & du citron verd ; & vous les faites cuire à petit feu. Vous garnirez votre Bisque comme l’autre, de ris-de-Veau, cus d’artichaux, champignons, truffles, fricandeaux, crêtes, dont vous ferez un cordon autour

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avec les plus belles ; & marbrerez voter Potage, d’un coulis de Veau & jus de citron en servant.

Les Bisques de Chapons & Poulardes, se font de la même maniere que les precedents, aussi-bien que celles de petits Poulets de grain ; mais au lieu de citron, on y met du verjus.

Pour la Bisque de Poissons, hachez des Champignons bien menus, & les mettez sur les croûtes, que vous ferez mitonner avec bon boüillon de Poisson. Vous ferez le ragoût de laites de Carpes, foies de Broochet, queuës & pattes d’Ecrevices, & jus de citron, garni de même.

Blanc-manger.

On sert du Blanc-manger dans l’Entremets, ou pour plat, ou hors-d’œuvres. Pour le faire, prenez des pieds de Veau, & unePoule qui ne soit pas tout-à-fait grasse. Il faut faire cuire tout cela sans sel, & le passer quand il est bien cuit, prenant garde qu’il ne soit ni trop fort, ni trop délicat. Si vous avez trop de gelée, ôtez-en : ensuite mettez-y du sucre, de la canelle, & de l’écorce de citron ; & faites boüillir le tout un peu de tems, dans une caserole sur le feu, aprés l’avoir bien dégraissé. Il faut

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avoir des amandes douces ; & si l’on veut, on peut y en mettre sept ou huit d’ameres, suivant la quantité de votre Blanc-manger : on les pile bien, en les arrosant de lait, afin qu’elles ne viennent pas en huile. Vous passez votre Blanc-manger, qui ne soit pas trop chaud, avec vos amandes, deux ou trois fois : aprés vous relavez bien les étamines, & les repassez encore une fois, afin qu’il soit bien blanc. Aprés l’avoir mis dans un plat, vous le glacez proprement, & passez par-dessus deux feüiles de papier blanc, pour en ôter la raisse. On y met une goute d’eau de fleur d’orange ; quand il sera bien gelé, vous le servirez froid, le garnissant de citron.

Pour faire le Blanc-manger de diverses couleurs, voïez ce qui sera dit pour la Gelée.

Blanc-manger de Corne de Cerf.

Prenez environ une livre de Corne de Cerf râpée, selon la quantité que vous en voulez faire, & faites-la cuire raisonnablement, en sorte qu’en tâtant avec les doigts, vous trouviez que l’eau en soit devenuë comme gluante, cela étant un signe qu’elle est assez cuite. Passez cette gelée par un étamine bien fine, & pilez des amandes, les humectant avec u lait, & un peu de

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crême. Vous passerez votre gelée avec ces mandes trois ou quatre fois, afin qu’il soit bien blanc ; & vous y mettrez une goutte d’eau de fleur d’orange.

Si c’est pour des jours de jeûne en Carême, pour le soir, il faut passer le Blanc-manger à force d’amandes pilées, y pressant un peu de jus de citron ; & n’y mettre point de lait : Vous ervez quand il est bien pris en glace.

Bœuf.

Comme le Bœuf est une chose aussi commune que necessaire dans le Repas, il a fallu imaginer diverses manieres de l’acommoder, qui pussent lui donner de la délicatesse, & faire honneur sur les meilleures Tables. On a déjà vû ce qui regarde l’Aloïau. Voici pour d’autres pieces.

Grosse entrée d’une culote de Bœuf.

Culote de Bœuf, est un morceau proche de la queuë que l’on peut appeler derriere de cimier. Vous prenez une culote de Bœuf, aussi grande ou petite que vous voulez ; vous la lardez de jmabon & de lard, bien assaisonné de poivre, sel, coriandre, canelle, girofle & muscade battus, persil, oignon, rocambole, le tout bien mêlé en

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semble : vous en ferez entrer autant que vous pourrez dans votre lard, & la larderez dessus & dessous. Vous l’assaisonnerez encore de tous vos ingrediens, & la mettrez dans une casserole, pour la faire un peu mariner, avec oignons, persil, rocambole, basilic, thim, verjus, tranches de citron, & un peu de boüillon. Il faut l’y laisser deux heures, & la faire cuire dès le soir pour le lendemain. Vous la mettez dans une serviette, avec des bardes de lard, & vous serrez bien la serviette, afin qu’il n’y entre point de graisse. Vous choisissez une marmite proportionnée. Vous mettez une assiette d’argent a fond, de peur que la serviette ne brûle, ou la viande : & pour assaisonnement, vous y mettez de la panne de Porc, ou graisse de Bœuf bien fraîche, environ trois livres, suivant que votre piece de Bœuf est grosse. Vous y ajoûtez du verjus, du vin blanc, gingembre, canelle, poivre long, tranches de citron, muscade, oignon, persil, laurer, du sel ce qu’il en faut, du basilic entier, de la coriandre entiere, du fenoüil & de l’anis. Tout cela étant dans votre marmite, vous la couvrez, & laissez bien consommer votre piece de Bœuf en cuisant tout doucement. Quand elle est cuit, vous la laissez refroidir dans sa graisse : vous faites un grand godiveau, que vous mettez dans le

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plat où vous voulez servir votre piece de Bœuf, vous la couvrez du même godiveau, & la mettez au four une heure de tems. Pour la servir, il faut avoir un oculis de Beouf, bien fait & de bon goût ; faire un rond au-dessus du godiveau, faire entre dedans votre coulis, qu’il penetre bien partout, & un jus de citron par-dessus. Ce même Bœuf se peut servir en tranches bien minces, étant froid, en qualité de Bœuf à la Roïale.

Entrée d’une piece de Bœuf.

Vous prenez un derriere de Culote, que vous piquez de gros lard ; & l’aïant mis dans une marmite, avec deux livres de saindoux, de bonnes bardes de lard, & l’assaisonnement necessaire, vous le faites cuire à la braise tout doucement, pendant environ douze heures : Faites en sorte qu’elle n’ai point d’air en cuisant, & qu’elle soit de bon sel. Sur la fin vous y pouvez mettre un peu d’eau-de-vie, & garnir de marinade.

Autre Entrée de piece de Bœuf.

On peut servir une Culote de Bœuf à demi salé, qu’il faut empoter proprement dans une marmite, avec toute sorte de fines

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épiceries & oignons. Vous remplirez la marmite d’eau ; vous la ferez cuire, & l’écumerez bien. On y met de bon jus de viandes que l’on a tirez, pour la bien nourrir. Etant cuite, en la dressant dans son plat, vous dégraissez un peu par-dessus, & vous y mettez un hachis de Jambon, garni de marinade de Beau frit piqué, & de concombres farcis, comme on en trouvera ci-aprés la maniere ; ou bien de cus d’Artichaux coupez en deux, avec des Ris-de-Veau, le tout frit, & trempé comme les concombres.

Entrées de tranche de Bœuf roulée.

Il faut couper de bonnes tranches de Bœuf, & les bien applatir sur la table avec le couperet. On prend, par exemple, trois ou quatre tranches, selon la grandeur de votre plat. Vous faites une farce de chair de Chapon, d’un morceau de cuisse de Veau, du lrd, & de la graisse blanchie, du jambon cuit, du persil & de la ciboule, quelques ris-de-Veau, des truffles & des champignons, le tout haché, bien asaisonné de fines épices & de fines herbes. On y met encore trois ou quatre jaunes d’œufs, & un peu de crême de lait ; & aprés que votre farce est bien hachée vous la mettez sur

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les tranches de Bœuf, que vous roulez proprement, en sorte qu’elles soient bien fermes, & d’une belle grosseur. Vous les faites cuire dans la braise, & assez long-tems ; & quand elles sont cuites, vous les tirez, vous égoutez la graisse, vous les coupez en deux, & les dressez dans un plat du côté qu’elles ont été coupées, qui est le dessus. Etant rangées, vous y pouvez mettre quelque ragoût, ou du coulis ; & rien autre, si l’on veut.

Cette farce ici peut servir pour plusieurs sortes de Volailles, lorsque dans les grands Repas on en a beaucoup à farcir. Elle servira aussi pour le Veau à l’Escalope, Fricandeaux farcis, & autres choses. Il se fait de semblables Entrées, ou Hors-d’œuvres, avec des tranches de Veau, accommodées de la même maniere.

Entrée de Filet de Bœuf au Concombre.

Prenez un Filet de Bœuf bien tendre ; faites-le rôtir, bardé de lard, & envelopé dans du papier ; qu’il ne soit pas trop cuit. Aprés coupez-le par petites tranches, selon la quantité de vos Filets ; il faut qu’ils soient marinez : ensuite presez-les, & aïez

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du lard dans une casserole, pour les y bien passer sur le fourneau. Egoutez ensuite tout le lard, & mettez y un brin de farine, & le passez encore un peu : aprés, moüillez avec de bon jus, selon l quantité de vos Filets. Etant cuits, il y faut mettre de bonne liaison : une cuillerée d’essence de jambon y feroit merveilles. Vous y mettez un filet de verjus, ou de vinaigre ; & vous ne laissez pas boüillir vos Filets davantage, parce qu’ils durciroient. On le sert chaudement, garnis de pain frit, marinades, ou rissoles.

Il se peut faire de toute autre sorte de Filets au Concombre de cette maniere.

Autre Entrée de Filets de Bœuf.

On fait un autre Entrée de Filets de Bœuf piquez, & marinez avec du vinaigre, sel, poivre, clou, thim, oignons, que vous mettez cuire doucement à la broche ; & étant cuits, vous les mettez dans de bon jus, avec truffles, & garnissez de Poulets ou Pigeons marinez, ou de Fricandeaux.

Piece de Lard à la mode.

AÏez du Lard le plus gras que vous pourrez trouver, ôtez-en la coëne, faites le ma

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riner dans le sel, le poivre, le clou de girofle, & la muscade battuë, avec un verre de vin blanc : aïez ensuite un morceau de tranche de Bœuf bien tendre ; coupez-la par lardons, poudrez-les de sel, poivre, muscade & clou battu ; lardez-en votre piece de lard, aussi prés-à-prés que l’on fait le Bœuf à la Roïale, & même plus s’il se peut : empotez-le ensuite dans votre marinade, y ajoûtant encore deux verres de vin blanc, feüille de laurier, thim, écorce d’orange & un bouquet de persil ; bouchez bien votre casserole, & cuisez à petit feu sans la déboucher. Etant cuite, laissez-la refroidir & servez, coupée par tranches, avec persil coupé dessus, & jus de citron : on la sert pour Entremets, & pour déjeûner.

Langues de Bœuf à la braise.

Il faut avoir des Langues de Bœuf, en ôter la gorge, & les mettre sur la braise, pour en pouvoir ôter la peau le plus proprement qu’il se pourra. Vous les lardez à gros lardons, & avec du jambon crud ; le tout bien assaisonné. Prenez ensuite une marmite, une quantité de bardes de lard au fon, & des tranches de Bœuf battu ; & empotez vos Langues dans la même marmite, avec des tranches d’oignons, & toute sorte de fines

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herbes & épices, les assaisonnant aussi de poivre & de sel. Vous les couvrirez ensuite de tranches de Bœuf & bardes de lard, comme vous en avez mis dessous, en sorte qu’elles soient bien enveloppées de tous côtez ; & vous les mettez à la braise, feu dessus & dessous. Il faut qu’elles y cuisent des huit à dis heures, afin d’être bien cuites : aprés quoi vous aurez un bon ragoût, avec toutes sortes de garnitures de champignons, truffles, mousserons, morilles & ris-de-Veau. AÏant tiré vos Langues, vous les égoutez & dégraissez bien, & vous les dressez dans un plat, & votre ragoût par-dessus. On peut presser un jus de citron dans le oculis ; & si l’on veut garnir le plat, il faut couper une des Langues par tranches, ou bien le garnir avec des Fricandeaux, le tout servi chaudement. Vous en pouvez faire de-même pour les Langues de Veau ; & aussi, si on veut les farcir sans les larder, on y fait le même ragoût ; & on sert toûjours chaudement.

Langues de Bœuf parfumées.

On les sale de la même maniere que les Langues de cochon fourréees, que l’on trouvera ci-aprés, hormis qu’il ne les faut pas

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échauder. On les laisse seulement bien tremper dans de l’eau, on coupe le gros bout, & aprés les avoir bein assuïées on les sale. Il les faut laissez trois ou quatre jours de plus dans la saumûre : les aïant tirées, si vous avez quelque petit Salé à faire, cette saumûre vous servira pour cela, soit que ce soit sanglier, Fan ou Cochon ; & dans cinq ou six jours, vous pourrez faire cuire de ce petit Salé, & le servir pour hors-d’œuvres en Entrée, avec une bonne purée dessus. A l’égard de vos Langues de Bœuf, il les faut attacher par le petit bout, & les bien ranger dans la cheminée, afin que la fumée les domine, jusqu’à ce qu’elles soient seches. Elles se conserveront autant que l’on voudra ; & on les fera cuire de même que les Langues fourrées.

Autre Entrée de Langues de Bœuf.

Prenez des Langues, & faites-les cuire dans de bonne eau, avec un peu de sel & un bouquet de fines herbes. Etant cuites, coupez-en le bout du côté de la gorge ; ôtez-en la peau, & les piquez avec du lard un peu long. Il faut que les Langues ne soient pas trop cuites. On les fait ensuite rôtir ; & étant finies de cuire, en servant vous y faites un bon ragoût selon la saison, ou du

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coulis, ou une bonne sausse ramolade. Il s’en fait de même pour les Langues de Veau, aussi bien que de cette autre sorte.

Pour une autre Entrée de Langues de Bœuf.

Faites-les cuire de même que ci-dessus pour en ôter la peau ; & les aïant lardées de gros lardons au travers de la Langue, mettez-les à la braise pour les faire cuire. En les dressant dans le plat, fendez-les tout du long, afin que le lard paroisse proprement ; & faites-y un ragoût de truffles par-dessus, ou du coulis, le tout bien dégraissé & servi chaudement.

Autres services de Bœuf.

Vous pouvez servir du petit Bœuf pour Hors-d’œuvres, qui ait une petite pointe de sel, & garni de persil ; & si c’est une moïenne Entrée, vous la garnissez de ce que vous voulez.

On en sert aussi au jus, coupé fort mince, avec une échalote ou rocambole, & persil haché fort menu, & bon jus.

On peut encore faire cuire une piece de Bœuf de poitrine dans la marmite ; & quand elle sera à demi cuite, la larder de gros lard

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assaisonné de sel, poivre, clous pilez & muscade, & achever de la faire cuire dans une terrine, avec bardes de lard au fond, sel, poivre, un bouquet de fines herbes, un peu de vin blanc, citron verd, laurier & boüillon. Quand elles sera cuite, mettez-y un ragoût de champignons, huîtres, capres & olives desossées, le tout bien lié ; & jus de citron en servant, garni de tranches.

Pour la Vinaigrette ; prenez une tranche de Bœuf, battez-la bien, lardez-la de gros lard, & la faites cuire avec eau & un verrre de vin blanc, assaisonnée de sel, poivre, clou, laurier, & un bouquet de fines herbes ; il faut qu’elle soit de haut goût. Laissez bien conseommer le boüillon ; & étant refroidi avec la tranche dans l même pot, vous la servirez avec tranches de citron, & un filet de vinaigre.

La tranche de Bœuf se met aussi en pâte. Voïez pour cela celui de roüelle de Veau, lettre P. & pratiquez la même chose, hors que le Pâté de Bœuf doit cuire lus long-tems : il ne faut pas sur tout, oublier de le percer en cuisant, & de le boucher étant cuit.

Le Bœuf à la mode veut être bien battu, lardé de gros lard ; & si l’on veut, passé à la poële avant que de le mettre cuire, avec sel, poivre, laurier, citron verd, demi-

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douzaine de champignons, un verre de vin blanc, & eux verres d’eau. On peut aussi le faire dans son jus seul, à petit feu, bien bouché ; & étant cuit, passer farine à la poële avec lard fondu que vous mettrez dedans, & jus de citron.

Autre façon de Bœuf à la mode.

Aïez tranche de Bœuf à jus, poudrez-la dessus & dessous, de sel, poivre, & clou en poudre ; pilez ensuite dans un mortier, une couple d’échalottes, ou une demi-douzaine de rocamboles, basilic, thim & persil ; étant bien pilez, jettez dessus un bon verre de vin blanc ; passez le tout, & y laisez mariner votre Bœuf une couple d’heures, lardez-le ensuite de gros lard & d’écorce de citron verd, mettez-le ensuite avec votre coulis dans une casserole, avec quelques feüilles de laurier ; ajoûtez-y un autre verre de vin blanc, & le faires cuire à petit feu.

Il se sert ordinairement froid aux Antrées ou à déjeûner, par tranches un peu épaisses, avec persil coupé dessus.

Ragoût à la diable.

Aïez tranches de Bœuf, roüelle de Veau ;

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chair de Porc frais, d’éclanche de Mouton, cuisse de Poulet d’Inde cruë, & palais de Bœuf ; hachez bien le tout avec champignon, cus d’artichaux & pointes d’asperges ; faites fondre du beurre dans une casserole ; étant chaud, jettez-y votre hachis ; & l’ayant laissé revenir, retirez-le, faites le égouter, empotez-le ensuite avec de bon jus de Mouton, deux ou trois échalottes, du persil, du sel, du poivre, du clou & de la muscade : étant cuit, démêlez dans un verre de vin blanc, un jaune d’œuf que vous jetterez dedans, & servez chaud pour Entrée.

On sert encore du palais de Bœuf en mine-droit, ou menus droits ; sur quoi voïez lettre M.

Boucons.

Pour faire des Boucons, prenez de la roüelle de Veau en petites tranches qui soient un peu longues & minces. Applatissez-les sur la table ; aïez de gros lardons de lard, & autant de jambon crud, & rangez-les en travers sur vos tranches, y mettant un lardon de lard & un de jambon : poudrez-les d’un peu de pseil & de ciboule, & assaisonnez-les de fines épiceries & de fines herbes. Vos tranches étant pleines de ces

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lardons, vous les roulerez proprement comme si c’étoient des Filets mignons, & les mettez à la braise. Etant cuites, il faut égouter la graisse, avoir un bon coulis & ragoût de champignons, truffles, & autres garnitures, & servir chaudement.

Boudins.

Il y a du Boudin blanc & du Boudin noir, & tous deux se servent pour Entrées. Le premier est le plus délicat ; on le fait de la maniere qui suit.

Pour faire du Boudin Blanc.

Il faut prendre un Dindon rôti ; & si l’on en veut faire beaucoup, aïez aussi un Chapon : prenez les deux estomacs, & hachez-les proprement. Coupez ensuite de la panne de Cochon fort mince, & mettez le tout dans une casserole, avec un peu d’oignon haché que vous y aurez auparavant fait frire, & un peu de fines herbes, hors du persil : asaissonnez-le des épiceries ordinaires, & mettez-y du lait suivant que vous le jugerez à propos. Faites boüillir tout cela ensemble, & aprés tirez votre casserole en arriere, & ajoûtez-y deux ou trois blancs d’œufs foüettez. Il faut prendre garde que votre farce ne soit pas trop liquide :

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ensuite, avec les boïaux que vous aurez preparez, vous formerez votre Boudin, & à mesure que vous les remplirez, vous piquerez tant soit peu pour en faire sortir le vent. Vous les ferez blanchir dans un peu d’eau, un peu de lait, & quelques tranches d’oignon ; & les aïant tirez sur une serviette propre, vous les laissezrez refroidir. Pour les servir il les faut griller sur du papier avec un feu mediocre, de peur qu’ils ne crevent : y mettre un peu de sain-doux ou autre graisse, & servir chaudement.

Pour faire du Boudin noir.

Aïez du sang de Cochon dans une casserole, que le sang ne soit pas pris ; mettez-y un peu de lait, une cueillerée de bon boüillon gras pour le rendre plus délicat, & coupez de la panne de Cochon par petits lardons pour mêler avec du persil & de la ciboule hachez, & toute sorte de fines herbes, que vous ferez frire avec de la panne. Etant frit, vous verserez le tout dans la même casserole, & l’assaisonnerez de fines épices. Il faut ensuite avoir une marmite ou chauderon sur le feu avec de l’eau qui boüille, & y poser la casserole où est votre sang, afin qu’il se tienne haudement. Vous remuërez cependant continuellement,

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afin qu’il ne s’attache pas au fond ; & quand vous croirez que tout aura pris goût, vous formerez vos Boudins de la grosseur & longueur que vous voulez : vous le ferez blanchir à l’eau ; & à mesure qu’ils blanchiront, vous les iquerez avec une épingle. Quand il n’en sortira que de la graisse, c’est signe qu’il sont blanchis : alors il les faut tirer proprement ; & quand ils seront froids, vous les ferez griller, & servirez chaudement, comme ci-dessus.

Autres sortes de Boudins.

Il se fait encore du Boudin de foies gras, & de foie de Veau. Pour le premier, coupez menu un quarteron de panne de Porc ; hachez une livre de foies gras, & autant de chair de Chapon, & assaisonnez le tout de fines herbes, ciboules, sel, poivre, muscade, clous pilez, canelle, six jaunes d’œufs cruds, & deux pintes de crême. Remplissez-en des boÏaux de Porc, de Mouton ou d’Agneaux, & faites cuire votre Boudin dans du lait avec sel, citron verd & laurier. On le fait griller de même que les precedens, pour le servir avec jus d’oranges. Pour l’autre Boudin, hachez un foie de Veau, & le pilez dans le mortier, avec le tiers autant de pannde de

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Porc, dont vous en couperez aussi en dez. Assaisonnez ce composé comme ci-devant : & entonnez-le dans des boïaux de Porc ou de Veau. Vous ferez cuire vos Boudins dans du vin blanc, avec sel & laurier, à petit feu ; & les laisserez ensuite refroidir dans leur bouillon pour les griller & servir comme les autres.

Boüillans.

Pour faire des Boüillans, aïez des Poulets ou Chapons rôtis ; prenez-en l’estomac avec un peu de moëlle, gros comme un œuf de tetine de Veau blanchie, autant de lard, & un peu de fines herbes ; & le tout étant bien haché & assaisonné, mettez-le sur une assiette. Faites un morceau de pâte fine & tirez-en deux abaisses minces comme du papier : moüillez-en une avec un peu d’eau legerement ; mettez de votre farce dessus par petits morceaux, les éloignant d’une distance raisonnable les uns des autres. Vous les couvrirez ensuite avec l’autre abaisse, & avec la pointe de vos doigts vous enfermerez chaque morceau entre les deux pâtes ; & avec un fer propre à cela, vous les couperez un à un, & mettez le dessus dessous, les dressant proprement comme si c’estoient des petits pâtez ; & vous

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les ferez cuire de même. Ils vous peuvent server pour Hors-d’œuvres, ou pour garnir des Entrées de Table ; mais il les faut servir chaudement, avec jus de citron ou un peu de vin blanc.

Boüillon gras.

Quoique cet article pût être renvoyé à celui des Potages à quoi il se rapporte, on a crû devoir en parler plûtôt, afin d’éviter au Lecteur le doute qu’il pourroit avoir sur la difference des Boüillons qu’il a vûs & qu’il verra encore en quelques endroits, ou la peine qu’il auroit à chercher ailleurs pour s’en élcaircir. Voici donc ce qu’il doit observer pour les Boüillons dont on a besoin, tant pour les Potages, que pour les Entrées.

Faites cuire des tranches d cimier, trumeaux de Bœuf, & autres viandes, & tirez-en le jus & le oüillon, le passant par un linge : remettez vos tranches dans la marmite ; & les aïant bien fait cuire, tirez-en encore le boüillon, & les tenez chaudement l’un & l’autre. Le premier vous servira pour empoter les Chapons, Dindons, Poulets, Cailles, Veau, & autres pieces farcies que vous voudrez servir au boüillon blanc. Vous prendrez du boüil

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lon des Chapons, ou du Veau, pour empoter vos Pigenonneaux pour les Bisques & avec le boüillon des Bisques, vous pouvez passer le coulis pour les Potages à la Reine & à la RoÏale. Le boüillon des viandes farcies vous servira poir paser le coulis pour les mêmes viandes : sçavoir, Dindons, & Poulet farcis, Jarrets de Veau, Poitrines farcies, & autres pieces qui se doivent blanchir.

Le second Boüillon que vous aurez tiré de votre grande marmite, sera pour mepoter vos Potages bruns : par exemple, Canards, Sarcelles, Lapreaux, Ramiers, Alloüettes, Faisans, Grives, Choux, Navets, & autres Potages bruns : & l’on passera les liaisons brunes avec le même boüillon, sans confondre celui d’une de ces especes avec d’autres. Ce boüillon est bon aussi pour les Entrées ; & vous en pouvez encore prendre pour mettre cuire vos épluchures de champignons, dont vous tirerez la substance, pour vous servir de ce coulis à tous vos Potages, Entrées & Entremets.

On peu servir les autres coulis qui se font, ci-aprés, lettre C. & les jus, lettre I.

Boüillon du matin, pour le déjeûner.

On le fait d’un morceau de Bœuf de ci

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mier, d’un bout-saigneux de Mouton, d’un colet de Veau & deux Poulets. Vous prenez le blanc des Poulets quand ils sont cuits ; vous les pilez dans le mortier avec un morceau de mie de pain trempée dans du boüillon ; & le tout étant de bon goût, vous le passez dans l’étamine, pour le mettre sur vos croûtes mitonnées du même boüillon que vous avez fait.

On trouvera les Boüillons particuliers des Potages de Santé & autres, en leur lieu, lettre P. Voici seulement en faveur des malades, ce qui peut être de leur usage à cet égard.

Bouillon pour Consommez.

Mettez un membre de Mouton dans un pot de terre, avec un Chapont, une roüelle de Veau, & trois pintes d’eau ; & faites-le boüillir à petit feu, jusqu’à ce qu’il soit reduit à la moitié, & le pressez bien en le passant dans un linge.

Le Restaurant se trouvera parmi les Potages, sous le titre de Potage sans eau.

Eau de Veau.

Il faut couper une roüelle de Veau par tranches bien minces, les faire cuire dans

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un pot de terre plein d’eau, à petit feu ; & aïant boüilli une heure entiere, passer cette eau dans un linge, sans presser les viandes. Vous pouvez ajoûter eau d’orge, ou lait d’amandes douces avec sucre pour le rendre encore meilleur.

Eau dePoulet.

Mettez cuire deux ou trois Poulets dans un pot avec eau, & les faire boüillir deux heures ) petit feu ; & quand ils seront cuits, passez-les par un linge. On peu y ajoûter de la buglose, bourache, chicorée & autres herbes rafraîchissantes, suivant le besoin des personnes & l’ordonnance des Médecins. Cette Eau purge doucement & rafraîchit.

Eau de Chapon.

Faites cuire à petit feu un Chapon dans un pot de terre avec trois pintes d’eau ; & votre Chapon étant cuit, & l’eau diminuée d’une chopine, vous le retirerez sans le presser.

Cette eau engraisse, particulièrement, si on met boüillir de bon orge mondé avec le chapon.

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Boüillon de Poisson.

Ce Boüillon est le corps de tous les Potages de Poisson que l’on peut servir, avec les distinctions qui sont marquées pour chacun. Pour cela, faites limoner des Tanches, Anguilles, Brochets & Carpes, dont vous tirerez les ouïes : mettez le tout dans une grande marmite, avec eau, beurre, sel, un bouquet de fines herbes, & un oignon piqué de clous de girofle. Aïant cuit une heure & demie, passez le boüillon dans un linge, & le separez en trois marmites. Dans l’une mettez les épluchûres des champignons, & les passez ensuite par l’étamine, avec coulis, farine frite, & un morceau de citron verd : cette liaison vous servira pour les Potages bruns, & pour les Entrées & Entremets. Dans l’autre, vous pouvez passer amandes pilées, & jaunes d’œufs durs, si le tems le permet : & ce sera pour vosPotages blancs ; comme Profiteroles, Eperlans, Perches, Soles, & autres Poissons au boüillon blanc, & à quelques ragoûts semblables. Et dans la troisiéme marmite, vous pouvez faire cuire le Poisson de tous vos Potages, tant blancs que bruns, Entrées & Entremets, & même en faire quelque[5] gelée.

 

[1]             Le texte porte : logueur.

[2]             Le texte porte : Babottes.

[3]             Ces deux derniers mots soudés.

[4]             Ces deux derniers mots soudés.

[5]             Le texte porte : qu’elque.

Mais non, vous ne vous êtes pas perdu !

 

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