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1516-Les fantasies de mere Sote (Pierre Gringore) (201-217)

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debille et foible. Finablement a ce quil demande du cinquiesme tonneau et quon luy en fait reffus disant se sont lyes Se entend que quant nature deffault a lhomme impossoble luy est vacquer a penitence Et considere que quant il estoit en sa force, beaulte et richesse il y cuidoit tousjours estre, mais maintenant il est impuissant parquoy advient souventeffois que ung tel homme tumbe en desesperance et en ce point fine sa vie Par quoy est fait incontinent quil est mort une grande plaincte devant dieu et la court celestielle ou sentence est donnee disant. Allez malheureux au feu eternel lequel vous est appareille.

¶Des loyaulx serviteurs.

BOn fait servir princes et gransseigneurs

Car paistre nest que en grande seigneurie

Le serviteur qui en servant varie

Quant doit prier commande quon le prie

Il nest pas dit de vertu enseigneur

Necessaire est de garder son honneur

En bien servant ester prompt et loyal

Sil a le nom destre bon gouverneur

Sans ce quil soit larron ne rapineur

Il sera cause eviter ung grant mal

¶Il est requis de son seigneur garder

Songneusement que tort on ne luy face

Tout aussi tost quon le regarde en face

Scavoir soubdain quil demande etquil trasse

Et lacomplir sans nullement tarder

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Ne le souffrir blasonner ne larder

Mais au besoing son corps en danger mettre

Trop familier ne soit au regarder

Ne trop hardy quant vient a brocarder

Danger ya soy jouer a son maistre.

¶Soigneusement est requis de veiller

Comme celluy qui a puce en loreille

Sans que aucun vice a son seigneur conseille

Ce qi luy fault convient quil appareille

Ne plaindre peine a courir traveiller

Sobre en manger mesmes a babiller

Mais regarder trois fois ce quil veult dire

En sa maison tout conduyre et reigler

Par bon moyen non de biens se aveugler

Sil est hastif amoderer son yre.

¶Ce son seigneur le transmet quelque part

Honnestement doit faireson voyage

Garder de faire a son semblable oultrage

Ne pourchasser a ses subgectz dommage

Car il ne scait quant davec luy depart

Aucunesfois faire son cas a part

Mais quil ny ait au maistre prejudice

Ne a ses subgectz peult prendre bonne part

Non pas ainsi que ung lyon ou liepart

Mais doulcement en evitant malice.

¶Bons serviteurs sont honorez prisez

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Et les mauvais regardez a grant honte

Se orgueil les fuyt supedite et surmonte

De leur seigneur ilz tiennent peu de compte

Quant lappercoit leurs gaiges sont brisez

Se a mal parler ont engins aguisez

Chassez seront ainsi que chiens de lastre

Servans il fault que a ce cas advisez

En regardant que cest que devisez

Peut vault celluy qui est acariastre.

¶Exemple.

[illustration]

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IL fut ung empereur qui eut en sa fantasie de trouver ung bont et loyal serviteur & pour en recouvrer ung ordonna et fit edit que ceulx qui vouldroient estre a son service frapassent trois coups a la porte de son palais affin quil fust adverty ce quilz vouloient, appetoient & scavoient faire. Or advint de cas fortuit que il y eut ung povre homme pour lors appelle guido lequel ayant la congnoissance de la loy & edit ordonne par ledit empereur & en rememorant sa fortune dist telz motz Je suis povre et destitue de tous biens mondains ; de parente et lignee vile par quoy le plus expedient et meilleur que je puisse faire est de servir & par mon service et labeur acquerir biens & richesses que journellement vivre en ceste povrete & indigence. A ce que dessus est dit se adventura approcher de la porte du palais et selon ledict & loy imperialle frappa trois coups contre ladicte porte du palais auquel son le portier luy ouvrit la porte. Luy entre dedans se prosterna a deux genoulx devant lempereur le saluant qui le receut amyablement et parla a luy en telle maniere. Mon amy dy moy ce que tu demandes. Sa responce fut Estre en vostre service si cest vostre plaisir. Lempereur luy demanda quel service il luy pourroit faire. Sa responce fut quil estoit experimente en six services. Le premier que il scavoit bien garder la personne dunggrant prince, laver ses piedz parer son lict & preparer viandes. Le second service que il scavoit veiller quant les autres prenoient repos et dormir et reposer quant les autres veilloient. Le tiers service que il scavoit bien gouster vin et discerner mistions de vins au goust. Le quatriesme quil congnoissoit & scavoit invi

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ter gens a quelque banquet a lhonneur de celluy qui fait le convy. Le cinquiesme service quil scavoit bien faire feu sans fumee et eschauffer ceulx qui ont froit. Le sixiesme service quil scavoit bien adresser le bon chemin et serue voye vers la terre saincte en telle facon quilz en retrouneront en sante. Lempereur oyant ses responces luy dist. Tu es digne de loyer, mais que tu faces ce que tu as dit par quoy je te retiens pour lung de mes principaulxserviteurs. Lempereur le voulut experimenter quant au premier point qui estoit touchant la garde de son corps disant pour la premiere annee quil auroit la garde de luy, ce que guido accorda. La premiere nuyt para le lict, ly lava les pieds et se coucha tout arme a lentree de luy ayant avecques luy ung chien bien abbayant affin que ce quelcun venoit subit quant il dormoit quil sesveillast pour labboy dudit chien dont lempereur fut content et eu agreable ce premier service. Lan revolu lempereur le fist seneschal pour venir a congnoistre son deuxiesme service. Guido se voyant en tel honneur tandis que leste dura ne cessa de assembler biens et veiller nuyt et jour affin de faire provision pour liver et quant liver fut venu et que les autres veilloient pour gaigner leur vie il prenoit son repos, ainsi acomplit son deuxiesme service Ce voyant lempereur layma tresfort et se resjouyt davoir ung tel serviteur, puis appella son eschancon auquel il commanda que on baillast audit guido dedans une coupe dor du vin aigre, de tresbon vin & du moust cest vin nouveau affin de experimenter son tiers service, ce qui fut fait. Incontinent quil en eut gouste dit il fut bon il est bon, il sera bon cestadire le moust ou vin novueau sera bon, le bon vin

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 est bon, et le vin aigre fut bon Ce voyant par lempereur le vray jugement du vun mesle luy commanda aller par toutson royaulme es villes et chasteaulx pour inviter tous ses amys a ung banquet quil vouloit faire au jour de la nativité de nostre seigneur qui se devoit festiver en brief temps et estoit pour son quatriesme service. Guida se transporta par les villes & chasteaulx et ne pria aucun des amys de lempereur, mais tous ses ennemys y furent invitez tant que le jour venu les ennemys de lempereur estoient en si grande quantite que la salle en estoit quasi toute plaine. Quant lempereur les vit il fut tout perturbe et appella ledit guido disant. Je ne te avoye pas baille charge de inviter mes ennemys. A quoy guido fist responce. Tu as tes amys touteffois que tu les veux mander. Je tay amene tes ennemys lesquelz par le moyen de lhonneur que tu leur fais de les convyer a ton banquet devant que de partir ilz seront tous tes amys, ce qui advint dont lempereur fut plus resjouy que devant & dist Benoist soit nostre seigneur qui a permis que tous ceulx qui souloient estre mes ennemis sont au jourdhuy mes amys. En apres lempereur luy commanda faire le cinquiesme service qui est faire du feu sans fumee, ce quil fit, car en este mectoit le boys au soleil & le faisoit seicher en telle maniere que incontinent le feu se y prenoit dont on se povoit chauffer sans fumee. Lempereur luy commanda faire le sixiesme service luy promectant donneur plusieurs richesses se il lacomplissoit Parquoy le voulant acomplir fit faire edict par le commandement de lempereur que ceulx qui vouldroient entreprendre le voyage pour aller a la terre saincte fussent prestz et appareillez Plusieurs le

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suyvirent jusques au port de mer Et la venu leur monstra ung roch sur lequel avoit ung nid doyseau leur disant que audit nid y avoit sept oeufz et ledit oyseau prenoit grande delectacion & estoit sa nature telle que qyant la mer estoit doulce et transquille jamais ne partoit de son nid, mais elle seenfloit par ventz impetueux incontinent qui en sortoit dehors en telle facon que ceulx qui pour lors espoient sur mer estoient peris et noyez en la mer. Les assistans luy demanderent comment il pourroit congnoistre si loyseau estoit enson nid ou non, ausquelz guido fit responce que jamais ledit oyseau ne laissoit son nid si se nestoit par ung autre oyseau cruel qui ne taschoit que a luy casser ses oeufz & gaster son nid. Les voyagiers luy demanderent comme il estoit possible garder que ledit mauvais oyseau ne grevast celluy qui estoit en son nid. Sa responce fut que le mauvais oyseau ne hayoit chose au monde plus que le sang dung aigneau et quil estoit requis en asperger ou enrouser ledit nid affin de garder ledit mauvais oyseau den approcher, ce quilz firent Et par ce moyen allerent et retournerent sains & sauves en la terre saincte. Ces choses voyant lempereur et la prudence dudit guido luy fit biens innumerables.

¶Fantasie et application a lhistoire precedente.

PAr cest empereur on peult entendre et figurer dieu noste pere createur qui a ordonne que qui heurteroit trois coups a la porte de leglise militante, cest a dire par oraison, jeusne & aulmosne quil seroit agreable a dieu et par consequent auroit le souverain bien qui est la vie eternelle. Par guido povre homme

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on peult signifier tout homme yssant du ventre de sa mere, car on napporte nulz bien en ce monde et si tost que lhomme est ne en recevant le sacrement de baptesme il promect a dieu faire six services agreables. Par le premier qui est garder le corps de son seigneur tout arme se peult entendre que qui veult estre serviteur de dieu doit estre arme des armes de vertu affin que nulle temptacion nentre en la chambre de son cueur pour faire quelque offence a son seigneur et est requis avoir ung chien qui se peult entendre bonne conscience qui murmure contre les vices & aussi quil prepare bien le lict de son cueur par œuvres de misericorde et change les draps, cest assavoir les vices en vertus par contriction de cueur, laver aussi deux fois les piedz a son maistre se peult entendre plorer ses pechez & avoir de son meffait confession contriction & satiffaction. Le second service est que nous avons promis veiller en bonnes œuvres quant les autres sendorment a leursp echez. Par le jugement du vin aigre mesle avec bon vin & moust se peult entendre que mort endurer et souffrir martire & penitence a este bonne chose aux sainctz et sainctes qui ont vescu en ce monde. Par le bon vin est entendu que les martirs boivent doulx breuvage au ciel et par le moust que on aura joye inestimable quant le corps et lame seront joinctz & unis ensemble au jour du jugement. Le quatriesme qui est inviter les hommes au banquet de so nmaistre Et a ce que guido y a invite ses ennemys les ignorans & ceulx qui sont pecheurs a lenconte de dieu a bonnes œuvres et a delissaire leur peche. Le cinquiesme service qui est de faire du feu sans fumee peult estre entendu

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que qui veult parvenir au royaulme celestiel il est requis navoir aucune fumee de hayne ne rancune en son cueur a lencontre de so nprochain. Le sixiesme service cest quil fault enseigner la voye de la terre saincte qui se peult entendre vers le ciel Et qui y veult pretendre il fault passer par la mer qui se peult entendre le corps humain, et par le nid le cueur de lhomme, par loyseau le sainct esprit qui y reside par vertu de baptesme, par les sept oeufz les sept dons du sainct esprit, lequel pourveu quil reside continuellement dedans le nid, cest assavoir dedans lecueur on pourra facillement passer a la terre saincte que prenons pour la vie eternelle Et qui veult avoir tousjours le sainct esprit en son cueur le doit asperger du sang de laigneau, cest assavoir davoir continuelle memoire et recordation en nostre cueur de la passion de jesus, & se ainsi le faisons loyseau contraire, cest assavoir le dyable denfer ne nous pourra garder de parvenir a la terre saincte qui est la gloire de paradis.

¶De parfection de vie.

CElluy requier avoir pugnicion

Qui rompt la loy par le prince establie

Car il la fait a bonne intencion

Au subgect nest bailler correction

A son seigneur, puissance a ennoblie

Ung estourdy qui cest loy oublie

Cuide que nul ne congnoisse son cas

Se contre droit quelque chose publie

Force luy est en la fin quil supplie

Aucunesfois nest requeste acomplie

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Tousjours nest creu le conseil dadvocas.

¶Celluy saige est qui veult temporiser

Comme le temps peult venir le fault prendre

De soy cuider haulser, auctoriser

Par trop parler autruy scandaliser

Qui na pal fait, on en est a reprendre

Aucuneffois on veult trop entreprendre

Mais on se brusle en prenant chault trepie

On dit tel prent a qui fault le sien vendre

Mais quant il veult a bonne fin pretendre

Ung tel en parle et ne le scait entendre

On en scait pas ce que lasne a au pre.

¶Labourer fault qui veult vivre et manger

Ou autrement on nest digne de vivre

Par trop de biens souhaiter de legier

Plusieurs se sont mis en tresgrant danger

Si est requis conseil des bons ensuyvre

Dieu a baille a moyse certain livre

Ou sont escriptz tous ses commandemens

Observons les puis que en noz mains les livre

Car qui les rompt vault pire que ung homme yvre

Et a le cueur plus venimeux que cuyvre

Ou leaue croupit, ou que agus serremes.

¶Mais qui nous meult des choses enquerir

Que aucunement ne pevent aider ne nuyre

Nous ny povons nul honneur acquerir

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Se leaue cuidons amont faire courir

Cest tout abus, ne soleil de nuyt luyre

Le fol aussi vouloir le saige instruire

Ny a propos cest par trop entrepris

Laissons seigneurs en leur triumphe bruyre

Dames aussi resjouyr et deduyre

Pensons de nous bien reigler et conduyre

Ainsi de nul nous en serons repris.

¶Exemple.

[illustration]

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IL fut ung empreur qui eut en fantasie par le conseil dung nigromancien ordonner telle loy que uqi ne celebreroit tous les ans le jour de la nativite de son filz, cestassavoir cesser de toutes œuvres mecaniques le propre jour quil fut ne il seroit mis a mort. Or est il ainsi que lempereur doubtoit que aucun secretement ne fist une statue par art magique qui disoit et reveloit a lempereur tous les maulx et secretz pechez que on commettoit le jour quon devoit festiver ladicte solennite. Et ainsi par laccusacion de ceste statue plusieurs estoient condamnez a mourir. En ce temps estoit en la cite ung forgeron nomme focus qui besongna ce jour ainsi quil avoit fait les autres jours Et quant il fut couche en son lict luy print une fantasie considerant que plusieurs estoient accusez par ladicte statue et puis mis a mort, par quoy se leva le plus matin quil luy fut possible, alla devers ladicte statue et luy dist telles parolles. O statue statue plusieurs meurent par toy a cause de ton accusacion, je fais veu a mon dieu que si tu me accuses je te romperay la teste, et incontinent ledit focus sen alla en sa maison faire sa besongne. Advint que lempereur ainsi quil avoit de coustume envoya devers ladicte statue pour scavoir se quelcun avoit rompu son ordonnance. Les messagiers arriverent devers elle luy demandant sil y avoit homme qui eust contempne la loy establie par lepereur ausquelz ladicte statue fist responce. Regardez lescript qui est en mon front et puis en allez faire le recit a vostre maistre. Les messagiers regarderent sur

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le front de ladicte statue et apperceurent manifestement trois escripteaulx Au premier estoit escript. Tempora mutantur Homines deteriorantur Qui voluerit veritatem dicere capit fractum habebit. Le premier escript est. Tempora mutantur, cest a dire le temps se change. Le second. Homines deteriorantur, les hommes empirent Le tiers. Qui voluerit veritatem dicere caput fractum habebit, cest a dire Celluy qui vouldra dire verite aura la teste rompue. Incontient les messagiers firent le raport a lempereur des escriptz preditz. Lempereur envoya querir ses chevaliers a qui il commanda estre armez et aller devers ladicte statue senquerir qui estoit celluy qui avoit contredit son edit, mesmes qui avoit menasse ladicte statue et que se il estoit trouve quil fust amene piedz et poings liez par devers luy. Les chevaliers firent lecommandement de leur prince et seigneur Et quant ilz furent devant la statue, ladvertirent comme lepereur vouloit quelle leur monstrast ou advertist celluy qui par oultrecuidance avoit contempne la loy & aussi qui la menassoit et que lempereur estoit delibere en faire cruelle pugnition La statue leur dist. Prenez le forgeron focus, car cest celluy qui nuyt et jour offence la loy et me menasse. Incontient ledit focus fut prins & mene devant lempereur qui assez benignement le radargua en disant. Mon amy pour quoy est ce que tu viole la loy par moy ordonnee. La responce de focus fut telle. Moseigneur je ne puis garder la loy pource quil me convient avoir tous les jours huit deniers qe que je ne puis sans grande peine, lempereur luy demanda pour quoy, focus sexcusa disant que par chascun jour lui falloit rendre .ii. deniers qui avoit empruntez en

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sa jeunesse, aussi quil en prestoit deux autres, en perdoit deux et en despendoit deux. Lempereur voulut estre informe plus clerement touchant ce cas par quoy focus luy dist. Monseigneur je suis tenu donner pour chascun jour deux deniers a mon pere pour ce que durant ma jeunsse mon pere les despendoit pour moy. Or est mon pere devenu povre et vieil si ne le vueil laisser en necessite Mais luy subvenir en son affaire congnoissant le bien quil ma fait de me eslever jusques a ce que jaye eu puissance de gaigneur ma vie. Les deux autres deniers je les preste a mon filz que jentretiens a lestude affin que se daventure je deviens vieil & povre comme mon pere mon filz face envers moy ainsi que je fais a mon pere. Les deux autres deniers je les pers Car pour entretenir & nourrir ma femme force mest les bailler et toutesfois elle est tousjour dopinion contraire a la mienne, elle est plaine de sa propre voulente, caulte & subtille envers moy par quoy je pers ce que je luy baille. Les deux autres deniers jen metz une partie en vestemens et lautre partie je les employe a boire & manger, si ne scauroie faire plus chichement que je fais Ainsi suis contraint besongner par chascun jour ou estre en necessite. Lempereur fut content de ses excusations et luy pardonna son meffait permettant quil besongnast quant bon luy sembleroit loyallement ainsi qui avoit acoustume, mai peu de temps apres ledit imperateur se acquita du tribut naturel. Adint que pour la prudence dudit focus il fut esleu par les saiges a gouverner lempire ou il se monstra vertueux et apres sa mort on mit sa statue avec les autres statues des imperateurs et sur

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le chief dicelle huit deniers pour perpetuelle memoire.

¶Exposition.

PAr cest empereur povons fantasier le roy celeste qui a fait une loy qui violleroit le sabbat, cest pour le jourduy le jour du dimanche et autres festes comme leglise la ordonne il moirroit de mort, mais pour le temps de maintenant plusieurs y a qui commettent plus de pechez aux jours solennelz que a ceulx ou il est permis labourer et ouvrer. Telles gens sont comparez au poisson de mer, car quant il fait quelque frimas ou petite pluye et il seslieve ou saulte sur leaue et est frape dielle pluye il est quasi hors mort & hors dalaine jusques a ce quil se soit rassasie et ait reprins sa vertu et plaisance dedans leaue de la mer. Semblablement les mondains qui sont en la mer de ce monde quant ilz sortent ou saillent dehors de leurs besongnes pour aller a leglise ouyr quelque messe ou seron il leur semble que ilz ne sont pas bien a leur aise, mais en grande misere jusques a ce quilz soient rassasiez des choses mondaines. Par le magicien qui a fait la statue povons entendre le sainct esperit qui parle par la bouche des prescheurs pour nous annoncer les vertus et reprendre noz pechez. A ce quil y a escript sur la statue Le temps se change nous le povons figurer par la primitive eglise, car ilz estoient plus promps de vacquer a prieres et oraisons quilz ne sont au jourduy La terre produisoit son fruict plus habondamment & les elemens changent souvent de proprietez pour les pechez des hommes. Le second est Les hommes empirent com

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me nous voyons clerement. Au temps ancien les gens estoient plus devotz, aulmosniers & charitables quilz ne sont pour le jourduy. Au tiers escript qui est Qui vouldra dire verite il aura la teste rompue. Pour le jourduy si ung prescheur veult desclairer les pechez des riches et puissans il y aura plusieurs murmurateurs a lencontre de luy et sera menace selon le dit de ysaye qui dit en so ntrente ungiesme chapitre. Loquimini verba placendita Cest a dire dictes motz plaisans et agreables ; & pour ceste cause dit lapostre. Il sera ung temps que verite ne sera point soustenur pour la maison disrael. Par focus le forgeron povons entendre ung hcascun bon chrestien qui continuellement labeure en bonnes œuvres et operations charitables et doit donner par chascun jour deux deniers a son pere celeste Cest a dire amour et honneur. Amour pour ce quil nous a tant aymez quil a permis son seul filz descendre du Ciel et pour noz pechez souffrir villaine mort. Honneur pour ce que toutes choses procedent de luy et sans luy nous en povons faire aucun bein. Les deux deniers qu prestons a nostre filz est celluy dont parle ysaye disant. Le petit enfant est ne pour nous par quoy luy devons bailler deux deniers pour chascun jour tandis que sommes en ceste mortelle vie cest bonne voulente et bonne operation. Quant nous serons povres au jour du jugement & que nous apparoistrons comme nuds il nous rendra les deux deniers en la vie eternelle, comme il est escript. Vous prendrez cent fois au double et aurez la vie eternelle. A ce que nous perdons deux deniers que nous baillons a nostre

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femme on peult entendre nostre malheureuse chair laquelle est chascun jour contraire a nostre esprit & se pevent entendre les deux deniers que luy daillons mauvaise & folle voulente et mauvaise opperacion. Nous perdons ces deux deniers cest a dire que nous serons pugnis de noz meffaitz en ce monde cy ou en lautre. A ce que nous despendons deux deniers sur nous mesmes chascun jour il sentend que nous aymons dieu et nostre prochain comme nous mesmes Si est requis exposer saignement les biens quon acquiert qui veult parvenir a la joye eternelle.

¶Lacteur

¶Prenez en gre princes, seigneurs, prelatz

Joyeusement les fantasies predictes

En les faisant lacteur aprins soulas

Redaguez doulcement les redictes

Raison par tout dire ce mot nest las

En esperant a ses choses conduictes.

Gloire et honneur sont a gens congnoissans

Rememorans les œuvres quon a faictes

Il est requis avoir port des puissans

Nestre rebelle aux povres languissans

Grant ouvrier est qui fait choses parfaictes

Or je supplie a rethoriques testes

Remettre au neant faultes il est facille

En composant chascun nest pas virgille.

¶Raison par tou.

Finis.

¶   

Mais non, vous ne vous êtes pas perdu !

 

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