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un demy septier ou tout autant de vin blanc qu'il en sera besoin, assisonnez cet appareil d'une pincée de sel meu, & d'une once de sucre en poudre, & il faut que cét appareil ou paste soit époisse environ comme de la boüillie qu est cuite ; vous pouvez lors y adjouter de la pomme coupée par tranches, ou de l'escorce de citron qui soit raspée coupée par petits morceaux.
Lors que cét appareil est prest, il faudra faire chauffer du sain doux, ou du beurre, ou de l'huile, & quand il sera chad suffisamment, vous broüillerez vostre ppareil avec une cueillere, prenez en suffisamment dans la cueillere, & le versez dans le sain doux.
Aussi-tost que les beignets seront cuits, il faudra les tirer hors de la poësle, & les faites égouter, puis les mettre dans une escuelle, les poudrer de sucre si bon vous semble, & les arroser de quelques gouttes d'eau rose, ou d'eau de fleur d'orange.
Remarquez que vous pouvez faire plus ferme l'appareil ou farce de vos beignets & la reduire en forme de paste molle, en y mettant moins devin, & cette
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paste servira à faire des pets d'asme ; c'est à dire qu'au lieu de faire des beignets communs, vous diviserez votre paste en petits morceaux ronds qui soient gros comme de petites noisettes, & vous les mettrez cuire dans le sain doux ou beurres, ou huiles jusqu'à ce qu'il soient rissolez.
II.
Autre façon de beignets que l'on applle des Tourons.
FAites cuire du ris avec du laict, ou avec de l'eau, il faut qu'il soit assez espois, & lors qu'il sera refroidy, vous le pilerez, eny adjoûtant si bon vous semble, des amandes douces pelées : qu'il faut aussi piler.
Mettez cét appareil dans un escuelles, adjoûtez-y la moitié autant ou environ de fleur de farin, quelques œufs cruds, un peu de sel menu, & du vin blanc ou du laict à discretion : meslez bien ensemble toutes ces choses, & les reduisez en façon d'une farce ou boüillie ou paste qui ne soit, trop ferme ny trop molle, vous pouvez y meslez du raisin de Corinthe, & de l'écorce de citron raspée.
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Lors vous ferez chauffer du sain doux, ou du beurre, & lors qu'il sera caud suffisamment, vous prendrez de cét appareil dans une cueillere mediocre, & vous le verserez dans la poësle.
Faites cuire ces beignets de deux costez : & pour cét effet, vous les retournerez dans la poësle l'un apres l'autre, & lors qu'ils seront cuits, il faudra les tirer à sec & les faire égouter, puis les mettre dans un plat, & les poudrer de sucre avant que de les manger.
III.
Autres beignets.
PAistrssez de la farine avec de l'eau & du sel, faites vostre paste modérément ferme, estendez-là avec un rouleau, coupez-là par petits morceaux carrez, ou de telle autre figure qu'il vous plaira, puis vous les frirez dans du beurres ou dans du sain doux ou de l'huile.
Et lors que vous les aurez tirez à sec, vous pourrez les poudrer de sucre, ou bien vous les employerez à garnir un plats d'espinards, ou des poix, ou un costé découvert de poisson, ou sur quelque autre metz.
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CHAPITRE XVI.
La maniere de faire des rissolles.
PRenez de la chair de bœuf, ou de mouton, ou de porc, ou de veau, qui soit rostie ou boüillie, hachez bien menu, & l'assaisonnez d'un peu d'episse salée : puis vous ferez de petites abesses de paste blanche à demy fine, dans lesquelles vous enfermerez un peu de cette chair hachée : & lors que vos rissoles seront façonnées, il faudra les frire dans du sain doux qui soit chaud comme pour faire des beignets : quand la crouste paroist jaune d'un costé dans le sain doux, vous retournerez les rissoles de l'autre costé avec un petit bastons sans le crever, & quand elle seront rissolées des deux costez, il faudra les tirer à sec avec un escumoire ou cueillere percée.
II.
Rissoles fueilletées plus delicates.
PRenez de bonne viande boüillie, ou plûtost qui soit rôtie si elle n'est pas tout-à fait cuite, elle en sera meilleure :
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par exemple du blanc de volaille, ou de la roüelle de veau : s'il y a quelque peau grossiere, il faudra l'oster, puis hacher la viande, & la mettre dans une escuelle, avec un peu d'épisse salée, ou raisin de Corinthe, du pignon, du sucre à discretion, & un petit d'eau rose, meslés ensemble toutes ces choses.
Lors il faudra dresser de petites abesses de paste fueilletée, & leur en donner l'espoisseur d'un quart d'écu : envelopez dans châque abesse environ gros comme un petit œuf ou une noix, plus ou moins comme il vous plaira de vostre appareil, & formés vos rissoles, dorés les, & les mettrez au four sur du papier.
Ces rissoles veulent cuire à feu doux comme pour cuire une tarte, laissez les cuire à loisir, il faut environ demie heure pour les cuire si elles sont petites.
Quand ces rissolesseront presque cuittes, & que la crouste a pris couleur, il faudra les tirer hors du four & les poudrer de sucre par dessus, puis les remettre quelque peu de temps dans le four pour achever de les faie cuire, & pour faire glacer le sucre.
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CHAPITRE XVII.
La maniere de faire des casse-museaux.
IL faut prendre des morceaux de moëlle de bœuf qui soient longs, chacun s'il est possible, environ de la longueur du poulce, eschaudez les dans de l'eau presque boüillante, puis il faudra les tirer hors de l'eau avec une cueillere percée, & les faire égouter un peu, puis les arranger sur une table, & les poudrer tous le plus que vous pourrez les charger de sucre en poudre qui soit assaisonné d'un peu d'épisse salée ou d'un peu de sel & de canelle en poudre.
Lors vous dressez promptement de petites abesses de paste fueilletée bien mince : garnissez un des bouts d'un morceau de moesle qui soit de la longueur du poulce, & s'il est besoin vous y adjoûterez encore du sucre assaisonné comme il a esté dit, puis vous renversez sur cette moesle l'autre bout de l'abesse, moüillez un peu les bords de la paste, afin que vous puissiez les joindre l'un avec l'autre plus facilement.
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Lors que vos casse-museaux seront faits, il faudra les frire dans du beurre, ou dans du sain doux, & les pas éfondrer en retournant, & quand ils seront frits, il faudra les tirer hors de la friture avec une cueillere percée, puis les poudrer de sucre, & les manger incontinent.
II.
Autre casse-museaux.
PRenez du fromage mol non écresmé qui soit frais fait, ou bien du laict caillé, & du fromage sec découpé bien menu, des œufs cruds, un peu de farine fine ou plustost de la cresme de Pastissier, du raisin de Corinthe, & du pignon, du sucre assaisonné d'épisse salée, ou seulement de l'épisse salée : vous pouvez aussi y mettre un peu de viande cuitte qui soit hachée bien menu, meslez ensemble toutes ces choses, & en faites comme une farce, en y adjoûtant un peu de laict, & que cette farce soit un peu coulante.
Enfermez de cette farce dans des petites abesses de fueilletage, & en faites des casse-museaux, lesquels il faudra frire dans dun beurre ou du sain doux, puis vous pourrez les poudrer de sucre si bon vous semble.
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CHAPITRE XVIII.
La maniere de faire deseschaudez, ou craquelins au beurre.
MEttez sur une table un demy litron de fleur de farine, faites-y une petite fosse au milieu, mettez-y environ un demy verre de leveure de biere, adjoûtés y ce qu'il faudra d'eau chaude, & maniez le tout ensemble, le reduisez en paste un peu mollette, pour vous servir de levain, c'est pourquoy il faudra ramasser cette paste & la tourner en façon d'un petit pain, & la mettre dans un lieu chaud, afin qu'il revienne ou se renfle promptement, & si c'est en Esté il pourra se renfler suffissamment en un demy quart d'heure.
En attendant que ce levain se renfle, vous mettrez sur une table, un quart de fleur de farine, faites y une fosse au milieu, & mettez une livre de beurre non salé, lequel beurre vous aurez manié & ramolly auparavant s'il est trop dur, adjoûtez y une once ou un petit plus de sel
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menu, meslez ses choses ensemble, en y adjoûtant ce qu'il faudra d'eau froide pour paistrir cette paste.
Lors que cette paste sera paistrie à demy, vous prendrez vostre levain s'il est prest, c'est à dire s'il est bouffy & renflé, il faut le mesler avec vostre paste en achevant de la paistrir.
Et quand elle sera paistrie suffisamment, vous la couperez par morceaux, que vous mouslerez avec la main en petits poins qu'il faudra estendre en suitte pour les former en eschaudez.
Cela estant fait il faudra avoir dans un chauderon ou dans une poësle à confiture de l'eau sur le feu, & qu'elle soit quasi boüillante jettez-y dedans vos eschaudez, & les y laissez jusqu'à ce qu'ils reviennent dessus : & lors il faudra les remuer un peu dans cette eau, puis vous prendrez une escumoire avec laquelle vous enleverés en l'air un peu de l'eau dans laquelle sont vos escaudez, & vous les arroserez ou bassineés de cette eau, les laissant cependant dans leur eau jusques à ce qu'il se soient revenus & raffermis, pourquoi reconnoistre, il faudra tirer un de vos eschaudez, & vous la ma-
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nierez pour reconnoistre s'il est assez ferme.
Lors que vous jugerez que les échaudez seront revenus suffisamment, vous les tirerez hors de l'eauavec un escumoire, & les mettrez se ressuyer & refroidir sur un clayon ; puis vous les mettrez au four : il ne faut qu'un quart d'heure pour cuire de petits eschaudez communs.
Mais il faut que le four soit rude, c'est à dire qu'il soit aussi chaud par tout comme si c'estoit pour cuire des gros pastez.
Si les eschaudez ne prennent pas suffisamment de couleur en cuisant, il faudra faire un peu de feu clair sur la fin, à une des jouës ou costé du four, afin que la chaleur se rebatte sur les échaudez & leur donne de la couleur.
Remarquez que si vous ne mettez point de beurre dans l'appareil de vos eschaudez, vous ne ferez que des eschaudez au sel & à l'eau, qui sont plus estimez de quelques personnes, que les eschaudez au beurre.
Quant aux eschaudez au œufs, ils se font aussi comme au beurre : mais il faut mettre des œufs dans la paste ; c'est pour-
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quoy sur un quart de farine il faut casser quinze œuf, & mettre seulement une demie livre de beurre.
Il faut aussi que la paste de laquelle on pretend faire des échaudez aux œufs, soit bien maniée, & plus mollette que celle des autres eschaudez.
Il faut encore remarquer qu'on doit donner le four moins rude aux eschaudez aux œufs, qu'à ceux qui sont seulement au sel & à l'eau, ou au beurre.
CHAPITRE XXIV.
La maniere de faire du biscuit commun des Pastissiers.
CAssez par exemple huit œufs dans une escuelle, battez les comme si c'estoit pour faire une omelette ; adjoûtés y environ pour deux liards de coriandre battuë, ou d'anis verd, & une livre de sucre en poudre, delayez un peu ces choses ensemble, puis y adjoutez trois bons quarterons ou pres d'une livre de fleur de farine ; il faut delayer ensemble toutes ces choses exactement, & les battre jus-
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ques à ce que la paste devienne blanche, & le biscuit sera d'autant plus beau & mieux fait que la paste aura esté plus battuë.
Lors que la paste sera blanche à force d'estre battuë, vous la coucherés dans des mousles à biscuit que les Pastissiers nomment des tourtieres à biscuit qui sont de fer blanc, & devant que de les garnir de cette paste, il faut les graisser par dedans avec du beurre frais qui soit fondu.
Remplissez vos mousles au juste, & ne les garnissez point de cette paste ou appareil que quand le four sera prest & non plustost : puis il faudra poudrer avec du sucre bien sec le dessus des biscuits, & les mettre incontinent dans le four loin de la braise.
Vous pouvez faire l'essay avec un ou deux biscuit, afin de vous apprendre à en faire sans beaucoup de perte ; car cette pastisserie est dificile à bien faire.
Il faut que la chaleur du four soit douce pour cuire du biscuit, & qu'elle soit à peu près comme elle se rencontre dans le four lors que le pain est cuit un peu plus qu'à demy.
Il faut laisser le four ouvert, & conside-
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rer souvent le biscuit pendant qu'il cuit, car en premier lieu il se renflera, puis il prendra de la couleur : ce qui se fait environ au bout d'un demy quart-d'heure.
Si le biscuit noircit dans le four, c'est signe que le four est trop chaud, c'est pourquoy il faudra retirer les biscuits pres la bouche du four, afin de laisser un peu amortir la chaleur.
Si au contraire, le biscuit demeure pasle dans le four, sans prendre de couleur, c'est signe que la chaleur du four est foible, c'est pourquoy il faudra mettre le bouchoy à la bouche du four, & le déboucher souvent, afin que le biscuit ne se brusle pas.
Quand le biscuit aura de la couleur, & qu'il aura demeuré environ un quartd'herre & demy dans le four ou un peu plus à proportion qu'il sera gros, il faudra en tirer un hors du four & le toucher doucement avec la main : & s'il vous repousse, & qu'il paroisse ferme sans s'applatir, asseurez vous qu'il est cuit : & à l'heure mesme il faudra tirer le biscuit hors du four, & le tirer tout chaud hors de son moule ou tourtiere.
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II.
Du biscuit à la Reyne.
FAites de la paste comme au chapitre precedent, sinon que vous y mettrez moins d'œufs, car il faut que la paste du biscuit à la Reyne soit un peu plus ferme : c'est pourquoy au lieu, par exemple de huit œufs, ce sera assez d'y en mettre six.
Lors que la paste sera preste, vous la coucherez avec une gache sur du papier bien blanc, & vous ferez ces biscuits ronds comme des petits pains, & on les poudrera par dessus avec du sucre.
Il faut donner l'atre un peu plus chaud au biscuit à la Reyne, qu'au biscuit commun.
Aussi-tost quele biscuit à la Reyne sera cuit, vous le tirerez hors du four, & le détacherez hors de dessus son papier, en coulant adroitement un couteau mince entre le biscuit & le papier.
III.
Du biscuit de Piedmont.
ON le fait avec de semblable paste que le biscuit à la Reyne.
Il faut seulement coucher la paste en long sur du papier, & lui donner environ l'époisseur d'un travers de doigt, & le
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moins de largeur que vous pourrez, & la longueur d'un bon doigt : poudrez-le de sucre & le mettez au four.l'atre du four bien doux, comme il a
Il faut laisser peu de temps ce biscuit dans le four, parce qu'il est bien-tost cuit : mais il faut que le four soit aussi chaud que pour cuire du biscuit à la Reyne.
Quand ce biscuit sera cuit, vous le détacherez incontinent hors de dessus son papier.
IV.
Du biscuit de canelle.
PRenez de la paste de massepain ; adjoutez-y de la canelle en poudre, mélez bien l'un avec l'autre, & faites en sorte que la paste soit bien forte, roulez-là sur le tour, & luy donnez deux tours, c'est à dire qu'il faut l'estendre & la rouler par deux fois sur le tour.
Quand la paste sera roulée pour la seconde fois, il faudra l'estandre avec le rouleau, comme si vous desiriez en faire une abaisse, & qu'elle ne soit pas plus espoisse qu'une piece de cinquante huit sols : puis on couperea cette paste en façon de petits biscuit ou de petits carrez, & les mettre sur du papier : donnez leur
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coustume d'estre apres qu'on en a tiré le pain : on peut les seicher dans une estuve.
V.
Des biscuits de sucre en neige.
CLarifiés un quarteron de sucre royal & les faites cuire en consistance de syrop bien espois, ou de sucre rosat : puis on y adjoûtera deux blacs d'œufs reduits en mousse, battez ces choses ensemble, & en estendez sur du papier en forme de petit biscuit, & luy donnez le four fort doux.
VI.
Des biscuits de pistaches.
PElez des pistaches, puis vous les pilerez dans un mortier, & vous les meslerez avec l'appareil du biscuit en neige, pour faire du biscuit qui sera verdastre.
VII.
Du biscuit de Gamby.
PRenez de la paste de fueilletage apres qu'elle est ployée, & qu'elle a tous ses tours, il faut reduire l'abesse de l'espoisseur d'un quart d'escu, & la couper de telle figure qu'il vous plaira, & les couchez sur du papier.
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Donnez-leur le four fort doux, & c'est assez deles mettre au four apres qu'on en aura tiré d'autres pastisseries : il faut environ une demie heure pour les cuire, & quand ils seront cuits, on les glacera avec de la glace de sucre.
VIII.
Du biscuit de Caresme.
IL faut avoir par exemple une demie livre d'amandes douces pelées & bien battuës dans le mortier, une livre & demie de sucre en poudre, & gros comme une petite amande de gomme cantragan qui soit detrempée à loisir dans une cueillerée d'eau chaude.
Meslez ces choses ensemble dans un mortier avec un coupe de blanc d'œufs & une demie cueillerée de jus de citron, ou raspez seulement gros comme la moitié d'une avelaine ou muscade d'escorce d'un citron crud & bon à manger ; on battra pareillement toutes ces choses dans un mortier l'espace d'une bonne heure, & vous ferez en sorte que la paste devienne un peu plus ferme que celle de massepain, en sorte qu'on ait de la peine à la manier & la bien lier.
Quand la paste sera en cét estat, on la
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tirera sur le tout, & faudra la manier sur iceluy avec un peu de sucre en poudre, & un peu de farine meslez ensemble : estendez donc cette paste avec le rouleau & luy baillez deux ou trois tours c'est à dire, qu'il faut estendre & plier deux ou trois fois la paste sur la table tout de la mesme façon que du fueilletage : enfin vous l'aplatirez & estendrez uniment, lui donnerez l'espoisseur d'une piece de cinquante huit sols, & vous la taillerez uniment par morceaux en lon en forme de biscuit de carnage : puis on les couchera en mesme-temps sur du papier, & de là au four, qui soit doux comme pour faire cuire du biscuit de canelle.
Chapitre XXV.
La maniere de faire du massepain commun.
PRenez une livre d'amandes douces nouvelles & entieres, mettés-les dans de l'eau quasi boüillante, laissez-les tremper environ un quart-d'heure hors du feu pour amollir la peau : puis on les pe-
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lera, & à mesure qu'elles seront dépoüillées de leur peau, il faut les mettre dans de l'eau fraische.
Les amandes estans toutes pelées, vous les laverez dans une ou deux eaux, puis on les mettra égouter sur un clayon ou égoutoir ; ce qu'estant fait, vous les pilerez dans un mortier de marbre ou de pierre, en adjoûtant à diverses fois environ un petit demy verrre d'eau rose en les pilant, afin qu'elles ne fassent huile.
Il faut piler les amandes jusques à ce qu'elles soient reduite en paste bien douce, & qu'il ne reste rien à piler, en sorte que si vous maniez cette paste entre vos doigts, vous n'y rencontriez rien de dur ou de rude : il faut aussi que cette paste d'amandes soit assez ferme estant pilée ; ce qui oblige d'y mettre un peu d'eau rose en la pilant.
La paste estant aprestée en cette sorte, on y adjoûtera du sucre en poudre à raison d'une demie livre ou trois quarterons pour livre d'amandes pelées : meslez bien ensemble le sucre avec la paste d'amandes ; adjoûtés y aussi un blanc d'œuf frais, puis on rebattra bien toutes ces choses ensemble dans le mortier avec le pilon :
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& lors que la paste sera liée exactement tirez-là hors du mortier, & la mettez dans une escuelle.
Maniez ensuite cette paste sur une table bien nette qu'il faut poudrer de fois à autre avec un peu de sucre en poudre au lieu de farine, pour empêcher que la paste d'amandes ne tienne sur la table ny à vos mains.
Mettez cette paste en autant de morceaux qu'il vous plaira, & les façonnez en telle figure qu'il vous plaira : & si vous en faites des autres, donnez leur environ l'époisseur de sepot ou huit feüillets de papier, & les posez sur du papier blanc quand elles seront dressées : puis on les mettra secher plus qu'à demy dans un four dont la chaleur soit tres-douce ; car il faut qu'elle soit pour bien secher du massepain, & ne point brûler, neantmoins il faut que l'âtre soit un peu chaud : on peut donc mettre le massepain au four apres qu'on en aura tiré le pain ou biscuit.
Quand le massepain sera cuit ou seché, tirez-le hors du four pour le glacer, c'est à dire le dorer promptement avec de la glace de sucre qu'il faut estendre
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sur les massepains avec le dos d'une cuillere d'argent ou avec un cousteau : puis on remettra aussi-tost le massepain à l'entrée du four pour secher la glace ; ce qui sera fait en demy quart d'heure ou environ, en suitte dequoy le massepain sera tiré hors du four : & si vous desirez piquer par dessus du canela ou de l'escorce de citron, ce sera à la fortie du four avant que la glace se soit refroidie, afin de ne la rompre pas.
Il faut plus de temps pour secher du massepain dans une estuve : mais la glace & le masspaine en sont plus beaux & plus blancs.
Chapitre XXVI.
La maniere de faire du macarron.
PIlez des mandes, ainsi qu'il a esté proposé au Chapitre du massepain, puis vous le pilerez & reduirez en paste tres-douce : par exemple une livre, adjoûtez-y autant pesant de sucre en poudre & quatre blancs d'œufs : meslez ces choses ensemble, en y ajoûtans un peu
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d'eau rose, & les rebattez derechef dans le mortier pour faire cette paste bien liante, il faut pourtant qu'elle soit un peu mollette.
Quand cette paste sera preste, couchez là sur du papier blanc par morceaux éloignez quelque peu l'un de l'autre, & que ces morceaux soient un peu longs en forme de macaron, & les poudrez par dessus avec du scure fin, puis on les mettra au four pour secher jusques à ce qu'ils soient bien fermes par dessus en les couchant.
Il faut que la chaleur du four soit douce comme au Chapitre du massepain, & que l'atre soit pourtant un peu chaud, afin de pousser la paste, & la faire bouffer.
Le macaron doit estre au four un peu plus long-temps que le massepain, d'autant qu'il est plus espois : & on peut y laisser le macaron jusques à ce que le four soit refroidy.
Neantmoins les bons Pastissiers ne laissent pas si long-temps leur macaron dans le four, de peur qu'il ne devienne roux, & le tirent avant qu'il soit parfaitement ressuyé : mais ils le mettent ensuite sur le four chaudement l'espace de
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vingt-quatre heures, afin qu'il se desseche à loisir sans perdre sa blancheur.
CHAPITRE XXVII.
La maniere de faire des pains de citron.
MEttez dans un mortier un quarteron de sucre Royal en poudre ; adjoûtez-y un blanc d'œuf & un peu de jus de citron, & aussi gros que deux noisettes d'écorce de citron crud raspée bien menu ; battez ensemble toutes ces choses, & les incorporez bien, en sorte que la paste soit fort dure, & qu'on ne puisse quasi plus la manier.
Lors vous mettrez cette paste par morceaux de la grosseur d'une noix, il faut les rondir entre les mains en les maniant avec du sucre en poudre, puis vous les applatirez & les arrangrez sur du papier blanc, puis vous les mettrez au four à my-four, c'est à dire qu'il ne faut pas les mettre trop avant dans le four : donnezleur une chaleur douce, & quil soit semblable à celle qui est requise pour cuire
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du macaron, & ne bouchez pas le four.
Il faut environ un quart-d'heure pour le cuire.
Retirez-les quand le sucre sera bien costoyé & ferme.
II.
Autres Pains de Citron.
IL faut composer vostre paste comme au Chapitre precedent, sinon que vous y mettrez le double d'écorce de citron crud : lors que la paste sera apprestée, vous la mettrez par morceaux qui soient gros environ comme la moitié d'une noix, serrez les un peu entre vos doigts, puis vous les mettrez sur du papier, & vous les ferez cuire comme les autres pain de citron.
CHAPITRE XXVIII.
Pasté aux œufs.
FAites de la paste avec un peu de farine & d'eau salée, ou servez-vous de paste plus fine, estendez-là, & la coupez par morceaux ; relevez le bordage
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de chaque piece, pour en former autant de petits pastez, cassez un œuf frais dans chacune de ces abesses, assaisonnez-les de sel, du sucre, & d'un peu de canelle en poudre, puis vous y mettrez le couvercle, faites cuire moderément ces pastez dans du beurre bien chaud, & les retirez avant que l'œuf soit beaucoup durcy.
II.
Pasté en pot aux œufs.
FAites un aumelette assaisonnée de sel, ciboulette, & persil, ou autre menuës herbes coupées menuës : il faut hacher l'aumelette, & la mettre dans un pot avec de la purée de poix clairs & du beurre, ou de l'huile, assaisonnez cela de sel & d'espisse détrempée avec du verjus : & en Esté on peut y adjouster des groseilles : apres que le tout aura boüilly quelques temps, adjoustez-y des jaunes d'œufs durcis, & bardez de cloux de girofle, vous pouvez y mettre de l'oignon frit, servez cela chaudement, on peut y picquer du pain frit par dessus.
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III.
Gasteau ou Tourte aux œufs.
MEttez dans une tourtiere environ la grosseur d'un œuf de beurre frais, & pendant qu'il fond, vous casserez cinq ou sinc œufs, adjoûtez-y du sel & la grosseur d'un gros œuf, ou un peu plus de mie de pain blanc qui soit menuë, ou deux cueillerées de fleur de farine, bateez exactement le tout ensemble, puis y adjoûtez deux ou trois cueillerées de créme ou de laict, & une petite pincée d'épisse ou de canelle en poudre battez encore un peu vos œufs, & les verserez dans la tourtiere lors que le beurre sera fondu & roux à demy, couvrez la tourtiere avec son couvercle, sur lequel vous mettrez de la cendre chaude, & un peu de braize, pour faire cuire la tourte de tous les costes, servez la chaude ; vous pouvez rasper dessus du fromage, ou du sucre, & y adjoûter quelques goutes d'eau rose.
IV.
Tourte d'œufs aux Pommes.
MEttés dans une escuelle la grosseur de deux œufs ; ou un peu plus de moëlle de pomme cuite, adjoûtez-y deux
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cueillerées de sucre en poudre, deux petites cueillerées de fleur de farine, cinq ou six œufs, & du sel à discretion, broüillez le tout ensemble jusqu'à ce que la farine soit incorporée exactement avec le reste des ingrediens ; versez cét appareil dans une tourtiere, ou dans un poëslon, ou dans une scuelle, dans laquelle vous aurez estendu la grosseur d'un œuf, ou un peu plus de beurre frais : couvrez la tourtiere, mettez-là sur un peu de feu, & couvrez aussi le couvercle avec un peu de braize, & au bout d'un quart-d'heure ou un peu plus, vous découvrirez la tourtiere, afin de voir si le gasteau est cuit, & s'il a assez de coleur dessus & dessous, & sil en a assez il n'y a qu'à le dresser sur une assiette pour le servir sur table : vous pouvez y mettre du sucre & de l'eau rose, & y piquer quelque morceau d'écorce de citron confite.
Au lieu de moëlle de pomme, vous pouvez employer de la chair de citroüille, ou de melon ou de quelqu'autre fruict qui soit cuit pour en faire un gasteau.
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V.
Œufs foüettez en forme de gasteau ou poupelain.
CAssez par exemple quatre ou cinq œufs, mettez le blanc à part dans une escuelle, & les jaunes dans une autre escuelle : battez bien le blanc des œufs jusques à ce qu'il soit reduit en escume, avec une petite poignée de jons ou de petits baston ; broüillez aussi un peu les jaunes : puis on mettra dans un poëslon mediocre, ou dans une tourtiere, quasi la grosseur de deux œufs de bon beurre frais, & quand il sera fondu, & qu'il deviendra roux, il faudra rebatre un peu le blanc des œufs, & y adjoûter deux bonnes cueillerées de sucre en poudre & du sel à discretion : lors que le beurre sera roux à demy, mettez-y une petite rostie, ou une crouste du dessus du pain : qui soit ronde & grande comme la moitié de la main ou environ, & incontinent apres versez-y le jaune des œufs, puis vous y adjoûterez le blanc par dessus. Faites cuire ces œufs sur un peu de cendre chaud, ils seront cuits en peu de temps, & se brusle aisément ; donnez-leu de la couleur de la mesme
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façon qu'aux œufs au laict, puis vous les dresserez sur une assiette, & les poudrerez de sucre.
VI.
Œufs en beignets.
PRenez du coq ou de l'arbe à char, de la melisse, de la tenesie, du persil, de chacun deux trois brins, de la buglose bien tendre autant que de toutes les autres vous pouvez y adjoûter de la ciboulle & de la laictuë : hachez bien menu toutes ces herbes, puis on battra par exemple six ou huit œufs, comme si c'estoit pour faire une aumelette, adjoûtez-y les harbes hachées, & du sel a discretion. Lors on fera fondre de bon beurre dans une poësle, ou dans une escuelle large : & lors que le beurre sera demy roux, prenez de vos œufs battus avec une cueillerée assez grande, & en versez par cueillerés dans le beurre tant que soit assez pour faire trois ou quatre beugners de la grandeur de la main ou environ, & lors qu'ils seront cuit suffisamment, tirez-les à sec, & faites en autant qu'il vous plaira : mais il faut les manger tout chauds ; quelques-uns raspent du sucre, par dessus.
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VII.
Autres œufs en façon de bugnets, ou de macarons.
FAites cuire des œufs jusques à ce qu'ils soient durs, puis vous les hacherez avec du persil, & un peu de ciboulettes & de thin, assaisonnez cet hachis avec d sel, & l'incorporez avec de la glaire d'œuf, ou avec un jaune d'œuf crud, puis vous en ferez de petites pelottes en façon d'andoüilletes de la grosseur d'un œuf, ou en façon de macaron, ou de telle autres figure qu'il vous plaira ; faites-les frire ou cuire un peu dans du beure à demy roux sur le rechaud, ou dans lap oësle puis retirez-les à sec & les poudrez d'un peu de muscade & de sel, s'il est besoin.
VIII.
Autres œufs en façon de beugnets.
CAssez quatre œufs, adjoûtez-y du sel, battez-le, & en faites une aumelettre, & dés qu'elle sera cuite à demy hachez-là avec une poignée de persil amorty sur une pele de feu, adjoûtez-y une demie once de raisin de Corinthe, & presque autan de pignon ; liez cet hachis avec un œuf crud, & un peu de
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farine, puis on fera de petites pelotes, ou des morceaux de telle figure qu'il vous plaira, faites-les cuire dans du beurre à demy roux, comme au Chapitre precedent, puis les tirez à sec hors du buerre & les poudrez de sucre & de sel s'il est besoin ; mangez-les devant qu'ils soient refroidis.
IX.
Bisque aux œufs.
MEttez dans un plat un lict de tranches de bon fromage entre deux licts de soupes, ou roties de pain sechées au feu, arrosez-les de pureee au poix ou d'autre boüillon maigre, qui soit assaisonné de beurre & de sel, faites mitonner le tout quelque temps sur un peu de feu, puis il faudra garnir le potage avec du persil haché grossierement, puis vous y adjoûterez des œufs pochez en l'eau, ou apprestez en quelque autre maniere, entier ou non ; vous pouvez mettre entre les œufs des morceaux de laicts de carpe, ou de petits poissons frits, comme de l'eperlan ou goujon, ou des aprestes de pain frit : adjoûtez des capres & des champignons, ou autres beatilles maigres, telles que vous les aurez, bien cuites & assai-
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sonnées : quelques-uns y mettent des raisins de Corinthe, & des pruneaux boüillis : Assaisonnez le tout de quelques cloux de girofle entier ou rompus grossierement, ou de quelque autre episse, comme de gingembre : lors vous adjoûterez doucement autant qu'il sera besoin de purée, ou d'autre boüillon maigre bien beurré, & remettez le plat sur le feu pour quelque temps, prenant garde que le pain ne s'attache au fonds : on peut adjoûter du verjus en cette bisque, ou de la sausse verte ; quelques-uns y mettent du vin : quand la bisque sera preste & de bon goust, rapez-y de la muscade, ou de la crouste de pain, & la servez.
X.
Civé aux œufs.
FAites chauffer de bon huyle, cassez y des œufs, & le retirez à sec avant que le jaune soit beaucoup durcy ; puis les mettez dans une plat, & y adjoûtez une sausse faite avec de l'oignon coupé par roüelle, & frites avec de l'huyle, le tout assaisonné de sel & de verjus : rapez-y un peu de muscade.
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XI.
Herbolade.
MEttez, par exemple huict jaunes d'œufs dans un plat d'argent, ou autre, qui ne soit pas bien large : & si c'est un jour gras, delayez-les avec environ un demy-septier de bon boüillon de viande qui soit fait sans herbes : au lieu de boüillon, vous pouvez employer de crème,ou de laict, adjoûtez-y une petite pincée de sel menu, & deux macarons écrasez bien menu : on peut y mettre autant de biscuit rapé ; adjoûtezy aussi trois ou quatre cueillerées de jus de poirée pilez dans un mortier avec de l'eau rose ; mettez-y aussi un demy quarteron de sucre en poudre : versez cét appareil dans un plat, dans lequel il y ait environ la grosseur d'une noix de bon beurre fondu, laissez prendre au fonds l'herbolade sur le feu, & quand elle sera prise à demy, adjoutez-y une once d'escorce de citron confite, rapée, ou coupée en forts petits morceau ; adjoutez-y aussi une once de pistaches pelées & pilées, & laissez prendre entierement l'herbolade sur un feu mediocre, & lors vous luy donnerez un peu de couleur avec une
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pesle rouge, puis on retirera le plat hors du feu, & l'on piquera dans l'herbolade de petites tranches d'escorce de citron confite, sucrez-la pardessus.
CHAPITRE XXIX.
Diverses manieres d'apprester les œufs perdus ou pochez, cuits en l'eau.
Premiere maniere.
FAites boüillir de l'eau, puis cassez des œufs les un apres les autres, & les versez separément dans l'eau boüillante : & lors qu'ils seront cuits mediocrement, tirez-les a sec sans les laisser durcir. Ils peuvent servir pour garnir un potage d'herbes, ou tel autre qu'il vous plaira. On peut aussi servir ces œufs avec diverses sausses, & quelques fois on les poche dans du laict, ou dans du vin doux.
Seconde maniere.
Mettez en un plt quatre œufs perdus, ou pochez, & les assaisonnez de sel : vous pouvez y raper du fromage par dessus.
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Troisiesme maniere.
On peut mettre de ces œufs dans un plat, adjoûtez-y un peu de sel, & les poudrez de sucre, & de quelque goute d'eau rose, ou de verjus, ou de jus de citron, ou d'orange ; vous pouvez y adjoûter un peu de cnelle en poudre, ou de l'eau de canelle.Quatriesme maniere.
Ou bien, vous mettrez de ces œufs dans un plat, dans lequel il y ait un peu de sel, vous pouvez y adjoûter du sucre ; & sivous n'y mettez point de sucre, la muscade n'y sera point mauvaise : on peut donner couleur à ces œufs avant que les mettre dans le plat, en tenant dessus l'espace de quelque temps une pesle ou poësle bien chauffée.
Cinquiesme maniere.
Quelquefois on met de la sausse verte & on les tient quelque temps sur le feu, assaisonnez-les de sel & de muscade.
Sixiéme maniere.
Ou bien vous ferez roussir du beurre dans une pësle, puis faites-y cuire de l'oignon haché ; assaisonnez-les de sel bien menu, & de poivre, & quand l'oi-
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gnon sera cuit, adjoustez-y un fil de vinaigre, & incontinent apres on versera cette saulce sur les œufs pochez : quelques-uns y adjoûtent un peu de muscade. Remarquez que si les œufs sont arrangez dans le plat en façon d'un poisson, on les appelle un Saumon d'œufs.
Septiéme maniere.
Faites cuire dans le beurre roux de l'oignon haché, & lors qu'il sera cuit, adjoûtez-y une sausse faite avec du vinaigre, & de la moutarde meslée ensemble, assaisonnée de sel & versez cette sausse sur les œufs.
Huictiéme maniere.
Ou bien faites roussir du beurre, puis adjoûtez-y une sausse composée de moustarde douce, ou de raisiné delayé avec du vin, ou de l hypocras ; retirez incontinent la poësle hors du feu, sans faire boüillir cette sausse, & la versez sur vos œufs. Au lieu de faire roussir le beurre dans la poësle, il suffit de le faire fondre dans un plat, puis on y adjoûtera l'hypocras ou moustarde douce delayée, comme a esté dit, en suitte on y mettra les œufs pochez, & vous rasperez du sucre par dessus.
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Neufiéme maniere.
On peut faire une farce d'herbes, & la mettre dans un plat, & arranger par dessus les œufs, & adjoûter quelques apprestes de pain frittes dans le beurre, ou des tranches d'aumelettes, & rasper dessus de la muscade.
Dixiéme maniere.On peut aussi faire fondre de bon beure dans un plat sur un feu mediocre ; puis vous casserez desoeufs, & apres en avoir osté la glaire, vous mettrez le moyeux entiers dans une escuelle, & les verserez l'un apres l'autre dans le beurre fondu, & quand le beurre commencera à boüillir, retirez le plat hors du feu. On peut adjoûter par dessus un petit de canelle en poudre.
CHAPITRE XXIV.
Diverses manieres d'apprester les œufs durs.
Premiere maniere.
MEttez dans un plat un morceau de beurre, du vinaigre, ou du verjus
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& un peu de sel : & lors que le beurre sera fondu, adjoutez-y trois jaunes d'œufs durs qui soient écachez ; delayez-les dans la sausse, puis il faudra garnir le plat avec des œufs durs coupez par moitié, ou par quartiers, raspez y un peu de muscade pardessus, ou de la crouste de pain.
Seconde maniere.
Faites roussir du eurre dans la poësle : vous pouvez y adjoûter du persil, ou de la ciboule qui soit hachée : & quand cela sera cuit, versez le dans un plat apres l'avoir assaisonné de sel & de poivre, puis mettez-y des œufs durs coupez par moitié : On peut y mesler de la moustarde, ou faireu ne sausse à robert : faites boüillir un peu cette sausse avant que de servir ces œufs.
Troisiesme maniere.
Quelquefois on frit simplement les œufs durs coupez par moitié, quelquefois aussi on les trempe dans de la farine dilayée dans du vin ou du laict, puis on les frit en façon de bugnets : & apres les avoir tirez à sec hors du beurre, mettez les dans un plat, & les poudrez de sel : adjoûtez-y du vinaigre, ou du jus de citron, ou une sausse dou-
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ce. On peut aussi y mettre de la canelle en poudre.
Quatriesme maniere.
On peut servir ces œufs avec les sausses proposées pour les œufs pochez.
Cinquiesme maniere.
Vous pouvez encore mettre dans un plat des œufs coupez par moitié, & les assaisonner d'une sausse blanche : faites dans la poësle avec des jaunes d'œufs crud, & du verjus, ou du vin blanc delayé ensemble, le tout assaisonné de sel, & d'un peu d'espice, ou de poudre de fines herbes, puis verser le tout sur vos œufs.
CHAPITRE XXVI.
Œufs à la Portugaise.
VOus pouvez fricasser, ou frire en la poësle des œufs durs, ainsi que suit. Il faut premierement fricasser dans du beurre du persil haché menu, ou de l'oignon : ou des ciboules, & quand le persil ou l'oignon sera cuit à demy, versezy des œufs durs coupez par roüelles : on peut y adjouter une poignée de cham-
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pignons pelez lavez & coupez par morceaux ; assaisonnez le tout de sel, & le fricassez bien dans la poësle : & sur la fin vous y mettrez du vinaigre : quand ces œufs seront hachez dans le plat, vous pouvez y rasper de la muscade pardessus, & ls garnir aussi de pain frit en apprestes, que vous larderez comme dans un hachis de carpe : on peut aussi enjoliver cette fricassé avec destranches de citrons cruds.
Quelquefois, on fricasse à demy de l'oignon, ou persil avec de bon beurre, puis on y adjoûtera des œufs durs coupez par roüelles, & un peu devant qu'on les tire de la poësle, on y adjoûte une sausse composé de moutarde, dilayée avec du verjus ou du vinaigre, & assaisonnée de sel : & apres leur avoir donné un tour ou deux de poësle sur le feu, il n'y a qu'à le dresser ; vous pouvez y rasper un peu de muscade pardessus.
II.
Œufs durs farcis.
PRenez des herbes douces comme laictuës, pourpié, poirée, bourrache, oseille, persil, ou verfeüil, & un peu de thim : ostez la tige des herbes, & si vous
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desirez que la farce soit de haut goust, mettez-y beaucoup de persil ou de cerfueil, & quelques ciboulettes, les herbes estant bien nettes & lavées, il faudra les hacher : assaisonnez-les de sel, & d'un peu de cloux de girofle, ou de poivre : on peut hacher avec les herbes des champiognons bien nets, & qui soient déjà cuit & bien assaisonnez : il y a mesme des personnes qui adjoûtent du fromage coupé bien menu. Versez cette farce dans une poësle, & la faites cuire avec du beurre à demy roux, ou avec d'autre graisse ou huile : & quand elle est cuite à demy, quelques-uns y adjoûtent du raisin de Corinthe, ou du pignon ; ce qui n'est point necessaire, il suffit de l'assaisonner de sel : & quand elle sera cuite, vous y mettrez des jaunes d'œufs durs qui soient coupez par petits morceaux, & donnerez encore deux ou trois tours de poësle, puis vous la dresserez dans un plat, & la garnirez par dessus avec des œufs durs coupez par moitié : quelquesfois on oste le jaune des œufs durs pour le mesler avec la farce : & lors qu'elle est cuite on en remplit le blanc avant que de le poser sur le reste de la far-
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ce : quelquefois au lieu de mettre les blancs d'œufs sur la farce, on se contente d'y piquer des apprestes de pain : ou de petits gasteaux de paste frits dans le beurre : & on peut rasper pardessus un petit de muscade, ou de croute de pain.
III.
Œufs à l'oseille.
BEaucoup se contentent de faire cuire dans un plat, ou dans une poësle de l'oseille ou vinette, apres en avoir osté les tiges : mettez y de bon beurre, & du sel à discretion : vous pouvez adjoûter du poivre, ou de l'espisse : & la farce estant cuite, mettez-y les œufs durs coupez par moitié, ou par quartiers : quelquefois on fait une sausse blanche avec des jaunes d'œufs cruds detrempez avec un peu de verjus ou d'eau, & on la mesle avec l'oseille quand elle est cuite, puis on y adjoûte les œufs : vous pouvez y rasper de la muscade par dessus.
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CHAPITRE XXVII
Diverses manieres de faire les Aumelettes.
Aumelette simple.
Premiere maniere.
PRenez par exemple une demie douzaine d'œufs, cassez-les separément sur une assiette, puis les battez tous ensemble dans un plat, adjoûtez-y du sel menu, & quelque goutte d'eau ou de laict : faites fondre du beurre dans une poësle, & loes qu'il sera roux, versez y les œufs battus, & les laissez cuire plus ou moins, suivant que vous desirez avoir une aumelette baveuse ou seiche. Au defaut du beurre, on se peut servir d'huile, ou d'autre graisse pour cuire ces œufs, & toute autre sorte d'aumelettes.
Si vous desirez qu'une aumelette soit verte, il n'y a qu'à mettre de la sausse verte dans les œufs lors qu'on les bat, ou bien vous en pouvez servir avec l'aumelette : mais ordinairement on aime mieux
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un filet de vinaigre : On peut servir de la moustarde, soit commune, soit douce : & lors il est à propos de servir l'aumelette roulée comme une andoüille, & fenduë par les deux bouts, qu'il faut escarter un peu loin de l'autre.
II.
Aumelette à la Celestine.
CAssez une douzaine ou vingtaine d'œufs plus ou mois, assaisonnezles de sel, & les battez : vous pouvez y adjoûter de la mie de plain blanc bien emiée, & du persil haché, ou du sucre en poudre : mettez-y aussi de bon beurre frais coupée par petites tranches, autant qu'il en faudroit dans une poësle pour y fricasser grassement une pareille, quantité d'œuf ; & cependant que l'on bat le tout ensemble, il faut mettre dans une poësle à frire bien nette une livre de bonne huile d'olive ou de beurre, & le faire chauffer jusques à ce qu'il boüille, & aussi-tost le verser hors de la poësle, & sans l'essuyer, vous y verserez en mesme temps les œufs battus, assaisonnez de sel & de beurre comme il est dit laissez-les cuire, & les remuez seulement dans le milieu doucement avec un baston
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un peu large & plat par le bout, ou avec la pointe d'un costeau, afin que les œufs se prennent mieux, lors que l'aumelette sera cuite à demy : retournez-la avec une assiette ou un friquet pour achever de la faire cuire, & pour empescher qu'elle ne s'attache à la poësle & ne brusle : mouvez souvent la poësle.Quand cette aumelette sera dressée, vous pouvez la poudrer de sucre, & l'arroser d'un peu d'eau rose & canelle : on peut faire aisément cette aumelette dans une tourtiere couverte qui soit haute de bord.
III.
Aumelette crtonneuse.
BAttez par exemple six œufs, assaisonnez-les de sel : & de beurre estant fondu dans la poësle, versez-y en mesme temps les œufs battus, & incontinent apres vous y adjoûterez du pain en appreste, ou de la mie de pain bien menuë qui soit frite ; il faut répandre l'un l'autre dans la poësle sur le feu, & quand l'aumelette sera cuite & que vous la verserez dans le plat, faites en sorte que le pain frit soit dessus : quelques-uns font frire du persil, & le mettent encore par
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dessus, & quelquefois on y jette aussi un peu de vinaigre à peu pres comme les Pastissiers mettent de l'eau rose sur les tartes.
IV.
Aumelette aux Pommes.
PElez trois ou quatre pommes, & les coupez en roüelles, fricassez-les dans la poësle avec un quarteron & demy ou environ de beurre frais, & de sucre autant qu'il vous plaira : & quand elles seront cuites, vous pouvez verser par dessus sept ou huict œufs battus & assaisonnez de sel : remuez souvent la poësle pour empescher que l'aumelette ne tienne & ne brûle : & lors que vous la verserez dans le plat, vous ferez en sorte que les pommes soient enfermées au dedans, puis on poudrera l'aumelette pardessus avec du sucre.
Il est plus aisé quand les pommes sont cuite de les tirer à sec hors de la poësle : & les metttre sur une assiette, puis on fera une uamelette un peu baveuse : & lors qu'elle sera assez cuite, on peut y enfermer promptement les pommes, puis y rasper du sucre par dessus.
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Il y en a qui se contentent de mettre sur une assiette les pommes fricassées, & les couvrent d'une aumelette baveuse, laquelle on poudre de sucre.
V.
Aumelette à la mode.
BAttez les œufs & les salez : adjoûtez y du pignon, du raisin de Corinthe, de l'escorce de citron confite, hachez menu, le beurre estant fondu & à demi roux dans la poësle : versez-y les œufs en les broüillant bien : dressés cette aumelette dés qu'elle sera cuite moderément, on peut la roulet comme un andoüille, raspés-y du sucre par dessous vous pouvez aussi y adjoûter par dessus quelques gouttes d'eau rose ou de canelle.
VI.
Aumelette à l'escorce de citron.
BAttés des œufs avec un peu de laict, vous pouvez y adjoûter un peu de l'escorce de citron confite rapée bien menu, & du sel à discretion, & faites l'aumelette.
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VII.
Aumelette au lard.
PRenez le gras d'un quarteron de lard ou environ, ostés les leveures, & coupés le lard en petits morceau, qui soient gros à peu prés comme une noisette ; faites-les fondre en la poësle : & lors qu'il commencera à se seicher, adjoûtez-y six ou sept œufs battus & salés si besoin est.
VIII.Autre maniere.
CAssez six ou sept œufs : adjoûtez-y environ demy quarteron de lard coupé menu, & du sel s'il est besoin, battés le tout ensemble, & le versez dans la poësle en laquelle il y ait autant qu'il est besoin de beurre à demy roux ou de moüelle fonduë, & faites cuire l'aumelette.
IX.
Aumelette à la créme.
CAssez six œufs, adjoûtez-y trois ou quatre cueillerées de créme & du sel à discretion : battés bien le tout ensemble, & le versés dans le beurre à demy roux, & faites cuire moderement cette aumelette.
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X.
Autre aumelette à la créme.
FAites fondre environ un quarteron de beurre dans une poësle, puis vous y verserez une demie douzaine d'œufs battus, & sallez suffisamment : & lors qu'ils seront pris, adjoûtez-y environ un posson de bonne créme : & quand elle sera cuite & dresée, raspez-y du sucre par dessus, vous pouvez aussi y adjoûter de l'eau rose. Il ne faut point que la créme bouïlle ; c'est pourquoy si l'aumelette n'estoit assez cuite lors qu'on y met la créme, on fera rougir une pesle pour luy donner couleur.
XI.
Aumelette aux herbes.
HAchez des herbes douces comme laittuës, oseille bourache, buglose, mauves, ostez latige des herbes, & quand elles seront bien hachées, il faut les battre avec les œufs, & y adjoûter du sel : & si vous desirez que vostre aumelette soit douce ,adjoûtez-y du raisin de Corinthe, faites fondre du beurre, & quand il sera assez chaud, versez les œufs : quand l'aumelette sera dressés, raspez-y du sucre par dessus. Si vous desirez que cette
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aumelette soit de haut goust, mettez-y plus de sel & d'espisses.
XII.
Aumelette au persil.
CAssez des œufs, adjoûtez-y de la fueilles de persil haché menu, & du sel : battez vos œufs, & faites vostre aumelette. On peut hacher grossierement une ou deux poignées de persil, & frire dans du beurre, puis y adjoûtez six ou sept œufs battus & assaisonnez de sel.
XIII.
Aumelette à la coiboulette.
HAchez de la ciboulette, & la battez avec des œufs, lesquels estant assaisonnez de sel, vous les versez dans du beurre à demy roux, ou dans de l'huile, pour en faire une aumelete.
XIV.
Aumelette farcie avec chicorée.
PRenez de la chicorée blanche, & la trempez dans de l'eau boüillante : on peut se servir de chicorée sauvage : retirez la hors de l'eau, un peu de temps apres, égouttez-la, puis il faut la hacher menu, assaisonnez-la de sel, vous pouvez y adjoûter des champignons à demy cuits & coupez par petits morceaux : faites