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1505-Platine en françoys (71-80)

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res aux reins. Et leaue diceulx cuyte louee en tant de choses selle est sur terre espanchee rent puantise. Dit encores que lesditz choux font mauvaise aleine & nuiysent aux dens et gencyves. Les choux sauvaiges quavons descript par dessus ont semblablement grans vertus selon ledit caton. Et briefvement ainsi que dit le pline sont bons a guerir inflacions & aux melancoliques, & a guerir playes fraiches avec du miel mais que on ne les lieve devant le septiesme jour. Galien & dyascorides mettent aultres differences de choux & dient bien que en ya trois especes mais ne les specifient pas ainsi que caton & les aultres naciens, ains appellent la premiere espece domestique, laultre saulvaige, la tierce maritime. Et leur premiere vertu est ainsi que dit galien desiccative. La seconde mondificative & resolutive. Et la tierce conglutinative pource quilz conglutinent & curent les apostemes & ulceres fraudulentes, & aussi celles qui sont endurcies & devenues a tant que ne se peuvent resoluir. Et pource que leur premiere vertu est desiccative il dit quilz induysent quant ont les menge tenebrosite a la veue. Dyascrodies dit que quant les choux ont ung peu boilly et lon les menge laschent le ventre & provoquent lorine. Et silz boillissent grandement principalement se on les fait boillir par deux foys en deux eaues serrent & retiennent le ventre. Et dit que les choux qui naissent en este sont mauvais a lestomach & sont de plus ague saveur que les aultres, et les summites des choux sont meilleurs a lestomach & provoquent plus a pisser que les aultres parties. Et se on les cuyst en eaue & sel ne sont mye bons audit estomach, combien quilz mollifient le ventre, & se on lave la teste du just des choux purge icelle, et quant lon menge les fueilles crues desditz choux valent aux splenetiques. Et se on les masche & puis lon transglotist le just dicelles restaurent la voix perdue. Et quant lon boyt la premiere decoction desditz choux lasche le ventre & provoque les fleurs aux femmes selon ledit dyascroides. Et macer dit que lesditz coux vers font habondance de laict aux nourrisses selles en mengent souvent et leur

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purgent les fleurs, & aydent a lestomach en cuysant la viande receue. Or lesditz choux sont chaulx & secz selon tous medicins, & tient lon quilz augmentent melancolie, font mauvais songes nourrissent peu, & en user & menger souvent nuysent a la teste, es yeulx, a lestomach, & induysent a dormicion. En yver toutesfoys se on les cuyst avec chair grasse sont plus tolerables que en este pource quilz purgent la flegme, adoulcissent le gorgeron & font bonne voix. Magnini dit que le just des choux principalement quant ne cuysent guieres est laxatif, & leur substance est constipative. Et pource dit que convenablement lon peu prendre ledit just a la premiere table & la substance a la tierce. Et dit que prendre ledit just ensemble ladite substance est fort indecent pource que lung lasche & laultre restraint. Et par ainsi lestomach est agite & commeu grandement a cause de ceste diversite, mais se on oste la premiere eaue desditz choux ne sera pas lors indecent prendre ladite substance desditz choux avec le just seconde ou tiers.

¶ Sensuyt la facon de composer les potaiges des choses dessusdites. Et premierement du grueu ou avenat.

JUsques icy avons parle daulcunes choses simples & avons declaire leur nature & vertu. Doresenavant me revoquent les cuysiniers & me prient & pressent que je leur dye les compostes mystions et confections dicelles pour les mettre en viande & en faire potaiges. Et particulierement de ceulx quon fait des choses cy dessus prochainement declairees, pourquoy obtempreant a leurs prieres je viens a parler desditz potaiges. Et premierement du grueu ou avenat, pour lequel fayre convient avoir de lespeaulte ou aveine monde nette et bien lavee, et icelle faire cuyre longuement a part au just des pouletz ou du mouton qui soyt bien gras. Et quant sera forment cuyt en prendras dedans une escuelle une partie, & y adjousteras

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trois roux doeufz, & dissoluiras tout la dedans ensemble du sffran, et puis le remettras dedans le pot & linspargiras despices & presenteras a table. Et de ce grueu icy les bretons en usent plus que aultres gens, & non tant seulemen ainsi quest dit, mais forment a tous potaiges, soyt au just de la chair ou des choux ou daultres herbes, car ilz en mettent voulentiers en tous potaiges & le trouvent bon agreable & plaisant a menger, non obstant quil nuyse aulcunement ainsi quil est dit dessus au chapitre de lespeaulte ou aveine.

¶ Du rys en quelque just que soyt.

LE rys apresteras & cuyras tout ainsi que avons dit du grueu ou avenat excepte que aulcuns ny veulent point mettre des oeufz, ce soyt a ta voulente & plaisir dy en mettre ou non. Se peut ledit rys aprester en laict ou en amandres comme verrons cy apres.

¶ De la fromentee.

SE tu veulx aulcunesfoys menger & faire de la fromentee, premierement feras cuyre en eaue ton dit froment apres le mettras dedans le just ou broet de chair grasse, ou si aymes mieulx en laict damandres. Et en ceste facon est potaige convenient en temps de jeusne pource quil se resoluist tardement, cestadire est de tarde digestion & nourrist beaucop. Semblablement se peut faire lordiat ou le potaige dorge, & est plus louable selon aulcuns que nest la fromente.

¶ Du millet en potaige.

EN eaue chaulde le millet bien lave cuyras lentement & longuement au just de la chair a beau petit feu, et tourneras souventesfoys ta potee avec quelque cuillier, & avise bien que ton pot soyt loing de la flambe & fumee. Apres y mettras du saffran pour luy donner couleur & le presenteras puis a table. Aultres laprestent & le font cuyre en laict de chievre ou de vacche comme verrons cy apres au chapitre du rys cuyt au just damandres.

¶ Potaige de pain gratuse.

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LE Pain gratuse lauras ung peu boillir au just de chair, apres que sera tire du feu & refroydi & adjousteras du fromaige gratuse & mesleras tout ensemble dedans le pot. Aulcuns y mettent deux ou troys roux doeufz, & si le veulx colorer & y mettre ung peu de saffran en sera plus agreable & joyeulx.

¶ Potaige appelle versuse

AYes quattre roux doeufz bien frais, demye unce de cynamome, quattre unces de succre, du just dorange quattre unces semblablement, deux unces deaue rose mesle tout ensemble avec quelque cuillier, & reduys tout en ung corps & le fais cuyreainsi quest dit dessus au chapitre du just saffranne ou jaune. Et si veulx pareillement y pourras adjouster ung peu de saffran pour donner couleur, est viande merveilleusement saine principalement en este & fort plaisante, nourrist bien et grandement, refraiche le foye et reprimist la colere.

¶ Feve frese en potaige.

MEtz ta feve frese bien nettoyee et lavee empres le feu, & quant commancera a boillir exprimis leaue & la metz hors du pot, et y en metz de rechief par autant de fraiche que surmonte quelque deux doys & y metz du sel a ton advis, & faits boillir ta potee bien couverte loing de la flambe pour cause de la fumee, & ce jusques ta dite potee sera bien cuyte & redigee forment en paste. Apres la mettras au mortier et agiteras et mesleras icelle tresbien & la reduyras en ung corps, puis de rechief la trouneras a son dit pot & le feras chauffer. Et quant vouldras faire tes platz ou escuelles confiras ta viande en ceste composte qui sensuyt. Et cuyras premierement des oignons decoppes bien menu en huyle fervent dedans ung pot, & y mettras de la saulge, des figues ou des pommes decoppees bien menu a petis loppins. Et ceste confection toute boullant et fervente infondiras et metras

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dedans tes platz ou escuelles ou sont tesdites feves & presenteras sur table, aulcuns y veulent par dessus inspargir des espices.

¶ Feves frites.

 LEs feves cuytes er resolues friras dedans la poille bien oincte de graisse ou duyle ensemble des oignons, figues, saulge, et aultres herbes odorantes, puis les mettras dessus quelque plat & inspariras par dessus se tu veulx des espices.

¶ Poys au lart.

FAis boillir une foys seulement les pois avec toute leur coque & silique, puis ostes que soyent de leaue fais frire ung peu de belles lesches et loppins de lart, ne trop gras ne trop maigre. Apres metz tesditz poys ensemble & fais tout frire, finablement metz y peu de verjust avec du moust vin cuyt ou succre, & quelque peu de cynamome. & ainsi semblablement pourras faire des phasolz.

¶ Potaige de chair.

AYes de la chair maigre & fais la boillir, puis decoppe icelle menuement et la fais cuyre de rechief en ung aultre pot au just gras par demye heure avec de la miete du pain gratuse, ung peu de poyvre & de saffran, apres que sera ung peu refroydie auras des oeufz batus, du fromaige gratuse, persil, marjoleine, mente, decoppes menuement, & ung peu de verjust & mesleras tout ensemble, & puis le mettras dedans ton pot le remenant tousjours doulcement avec ton cuillier. Semblablement pourras faire des corees & polmons, des gelines ou aultres oyseaulx.

¶ Potaige de trippes.

BIen lave[e]s tes trippes & nettes mettras cuyre empres le feu dedans ung pot ensemble quelque os de chair salee pour leur donner goust & saveur, et garde toy dy mettre du sel. Quant seront cuytes les mettras dehors & les decopperas a beaux petis loppins, & y adjousteras de la mente saulge & sel autant que sera necessaire. Et de re

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chief les feras ensemble lesdites herbes boillir ung peu, & cytes que soyent & mises sur tes platz & escuelles inspargiras par dessus des espices, & aulcuns y mettent du formaige gratuse.

¶ Potaige des trippes ou entrailles de la truyte.

AUlx entrailles & trippes de la truyte bien lavees & demyes cuytes, adjousteras ung peu de poyvre, persil, mente & saulge decoppes bien menu. Et quant auras fait tes platz ou escuelles tu mettras par dessus des espices.

¶ Oeufz de truyte a facon de pois.

LEs oeufz de la truyte demy cuitz & ostes du pot deviseras a petites pieces & menus loppins. Et affin que le just appare trouble & espes tu feras passer par le mays ou estamine de la miete du pain blanc ensemble ledit just, ou si par leure povoyes finer du just propre des pois en prendras ce que te semblera estre asses, puis ensemble ce just feras de rechief cuyre tesditz oeufz de truyte avec des espices, safran, persil, mente bien decoppes menu. Et te semblera au goust que tu menges des pois.

¶ Laictues en potaige.

LEs laictues principalement le millieu cuyras avec un oeuf purge & verjust. Aultres les cuysent & sont saines grandement ensemble les pouletz dedans le pot ou aultre chair, et y mettent ung peu de verjust principalement en este.

¶ Potaige de pommes.

LEs pommes feras cuyre avec le just de la chair, & quant seront pres que cuytes en icelluy mesmes pot mettras ung peu de persil & de la mente menuement decoppes. Et si veulx le just plus espes le feras facilement avec la miete de pain ainsi quest dit dessus au chapitre des oeufz de truyte. Et quant auras fait tes escuelles mettras par dessus des espices.

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¶ De la semole. LA semole mettras au just gras & fervant dedans quelque pot le remenant incessamment avec le cuillier, & ainsi feras boillir ta potee par demye heure sur les charbons loing de la flambe a cause de la fumee, apres mise es escuelles inspargiras du formaige gratuse par dessus & des espices. Et en tems de jeusne pourras confire ladite semole avec succre, just damandres & eaue rose, & tout ainsi le millet, aveine, orge & aultres. Ceste viande approfiteras beaucop a Marso qui est fort greve de la toux.

¶ Potaige de raves.

LEs raves bien lavees et decoppees a beaux loppins feras tresbien cuyre en quelque just gras, & cuytes que soyent & pilles les remettras par aultresfoys cuyre en aultre just plus gras & meilleur sil se peut faire que le premier ensemble quelques lesches de chair salee, poyvre & saffran, & quant auront une foys boilly tu feras tes escuelles et presenteras a table. De ce ne mengera point nostre galbre qui ne peut contenir son orine.

¶ Potaige de fenoil.

TU cuyras les fenoilz tout ainsi que les choux, se doyvent toutesfoys mieulx cuyre & decopper, ayment poyvre et requierent avoir condiment de chair sallee ou duyle.

¶ Potaige a la romaine appelle lozans ou crosetz.

AVoir fault de bonne farine et pistrir icelle avec ung peu deaue, apres estandre ladite paste sur quelque tableau avec ung pillon de boys bien delie plus gros au millieu que aux deux boultz. Apres que sera bien estandue & delie convient decopper icelle a belles losanges, puis les feras cuyre & infondiras au just gras chault & fervent. Et si les te convient cuyre en eaue en temps de jeusne y mettras du beurre & du sel. Et quant seront cuytes les mettras sur ung beau plat avec du formaige beurre, sucre, & espices doulces. Et tout ainsi

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doys cuyre les crosetz lesquelz se font pareillement avec petis loppins de paste, mais lon les presse avec les doys tournant & decoppant ladite paste deliement.

¶ Potaige fromentin ou menudetz.

LE potaige fromentin se fait forment ainsi que nous avons dit des lozans, mais lon les decoppe plusmenuement, & se cuysent ainsi quest dit prochainement dessus.

¶ Potaige des racines du persil.

AU just de la chair tu cuyras tresbien les racines du persil bien lavees et estanees, cest adire leve le dur qui est par dedans au milliei desdites racines quant sont dures. Et quant sont cuytes et decoppees les feras cuyre de rechief en aultrejust gras et meilleur se peux que le premier avec poyvre & saffran. Et quant auront ung peu boilly en feras tes platz ou escuelles, & tout ainsi peux faire des racines de lalixandre. Vault a gens graveleux & qui pissent à grant peine ainsi quest dit dessus a son chapitre.

¶ Courge frite.

PRemierement tu racleras bien la peau & escorce premiere qui est dessus la courge, apres decopperas icelle courge en belles lesches deliees et les feras ung peu boilly, puis les osteras du pot et estendras icelles netement sur quelque table. Et quant seront exalees & deseichees ung peu les involuiras en sel & farine bien blanche, & puis les friras en huyle. Et quant seront frittes et myses sur le plat infondiras par dessus ceste saulce, cest assavoir ail, fenoil, myete de pain blanc macere en verjust tout dissolui & mesle ensemble, & plustost soyt cler que especs. Et ceste saulce se tu veulx peux faire passer par my lestamine, aulcuns ya qui ny veulent aultre chose que le verjust ensemble la fleur du fenoil. Et ceulx qui ayment le saffran y en mettent & adjoustent.

¶ Potaige de coingz.

LEs coingz cuytz au just maigre pilleras, & puis les dissoluiras en just

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damandres ensemble du just de veau ou des pouletz. Et feras tout passer par lestamine dedans ton pot & y adjousteras du gingembre, cynamome, succre et saffran. Et derechief le feras boillir lentement sur les charbons loing de la flambe remenant tousjours avec le cuillier tadite potee. Aulcuns y mettent & instillent du beurre ou de la graisse fraiche, & quant est cuyt inspargissent sur les escuelles du succre & des espices.

¶ Feves tailles a la guise nouvelle.

TU lairras les feves dedans leaue jusques soyent bien macerees & remoillees, apres prendras une chascune & tailleras doulcement son escorce au dessus vers la teste ou est le noir, tellement que en puisses getter la feve & noyau quest dedans. Apres ce fait mettras dedans ses escorces vacques & vuydes des amandres pilles en succre & eaue rose. Finablement les feras toster en quelque petit pot ou poille sans eaue, & prendras bien garde que ne se bruslent, & quant te aperront asses tostees mettras icelles dedans tes escuelles & infondiras par dessus quelque bon just ou broet dedans lequel mettras du persil & espices, aulcuns y adjoustent des oignons.

¶ Potaige du cheneve ou de la graine de chanvre.

POur douze convies feras potaige de cheneve cest de la graine du chanvre mondee en ceste facon, une livre de graine de chanvre bien nette & monde cuyrasjusques puisses forment copper icelle a ung couteau, lors la prendras & la pilleras avec une livre damandres ensemble la moelle du pain gratuse, & mesleras tout & dissoluiras avec du just maigre & feras tout passer par lestamine dedans ton pot, lequel mys au feu rameneras & tourneras bien souvent avec ung cuillier. Finablement quant sera pres que cuyt mettras dedans demye livre de succre, demye unce de gingembre, ung peu de safran ensemble deaue rose. Et quant sera cuyt et mys aux escuelles inspargiras dessus

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des espices doulces. Cecy me semble que soyent les baricocolles de fenes, car de plusieurs choses probables & bonnes sen fait une male composte & improbable, pource q(ueà ceste viande est de difficile concoction donne fastic & douleur.

¶ Potaige fait de chair.

A Dix convies boilliras tresbien une livre de la tetine grasse de la truye ou de la graisse des roignons du veau ou du sein & auve de porceau. Et quant sera cuyte & decoppee y adjousteras demye livre de formaige vieulx tant gras que pourras, et avec ce des herbes odorantes bien decopees, poyvre, gingenbre, & girofle pareillement & mesleras tout ensemble. Aulcuns y adjoustent la poytrine du chappon pillee laquelle y est bien ceante. Tout cecy involuiras en bonne farine qui soyt estee bien pestrie & redig&e deliement en forme dung fueillet de papier et ce a la grandeur dune chastaigne, & quant sera tout involui & couvert le cuyras au just gras colore de saffran. Ne veult guieres cuyre mais veult estre inspargi sur le plat de formaige gratuse ensemble despices doulces. Ceste viande se peult faire pareillement de la poytrine dung fesan, perdris, gelines ou daultres oyseaux.

¶ Macarons en potaige.

EN eaue doulce tu pistriras tresbien de la farine blanche deliement passee avec une glere doeuf ou plus selon que vouldras faire & avec eaue rose, apres avec les dois feras tes macarons bien deliement ainsi que petis vermiceaux, puis les feras bien seicher au soleil, & se garderont par deux ans ou plus. Et ces macarons ou petis vers de paste quant les vouldras faire cure les mettras empres le feu par lespace dune heure au just gras & mys sur tes platz ou escuelles les condiras avec du formaige gratuse & espices doulces. Et sil est jour de jeusne les pourras faire cuyre au just damandres & laict de chievre, mais pource que ledit laict ne requiert pas estre tant cuyt tu les

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feras par avant en leaue ung peu boillir et puis y adjousteras & metras ton dit laict, et quant seront cuytz souvieigne toy les inspargir de succre. Et telle façon de cuyre est forment semblable a tout viande & potaige fait de farine, et qui veult les peut colorer avec du saffran, se nest que fussent cuytz en laict.

¶ Potaige derbes.

MEtz dedans leaue fervent au pot les fueilles des vitz ou des sermens quant sont tendres et aussi les fueilles des borraches & puis le lieve tout acop, & les decoppe apres sur quelque tableau net avec du persil & de mente a ung couteau. Et quant seront decoppees & puis pillees au mortier finablement les mettras dedans ung pot & les feras cuyre & boillir ung peu au just gras, & quant sera cuyt linspargiras de poyvre.

¶ Rys aux amandres.

POur dix convies auras demye livre de rys et le laveras deux foys ou troys en leaue chaulde, & lave & cuyt estendras icelluy dessus quelque tableau netjusques leaue sen soyt yssue & excoulee. Apres quant sera mys dedans le mortier avec une livre damandres plumees pilleras tout ensemble, & avec de leaue fraiche feras tout passer par lestamine dedans ton pot, & la dedans y adjousteras demye livre de succre, et le feras cuyre a petit feu loing de la flambee sur les charbons en remenant souvent ta dite potee avec ung cuillier tout a lentour du pot, et convient que boille demye heure. Semblablement se pourroyt cuyre au laict de chievre, mais pource que ledit potaige souventesfoys se trouve ryme & prent fumer sil advient par ceste facon y peux remedier. Et osteras ton rys doulcement sans toucher a lentour du pot ne au fons, & le remettras dedans ung aultre pot qui souyt bien net, & auras quelque linge blanc & net sur tout & mettras icelluy en trois ou quattre doubles, & ainsi ploye le moilleras en leaue fraiche, apres reployeras icelluy et

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lespresseras avec les mains pour en faire yssir leaue. Et quant sera este asses serre et exprime le mettras nettement dessus ton pot en estoupant la bouche dicelluy apertement. Et de rechief aultre foys feras tout ainsi jusques ayes attyre & mys dehors toute la fumee dudit rys, & cest le seul remede en tel cas. Tout ains iquest dit dessus du rys tant de laprester que dudit remede datirer la fumee & rymeure tu peux entendre que se peut faire a lordeat, millet, grueu ou avenat, et tous aultres telz semblables.

¶ Potaige damandres.

DEs amandres tu pilleras une livre ensemble la myete du pain blanc remoillee, & tout bien pille et dissolui en eaue fraiche, consequmment le feras passer par lestamine dedans ton pot. Et tout ainsi quest dessus dit feras cuyre, non obliant dimettre demye livre de succre, veulent peu cuyre, & est plus plaisant & agreable liquide et cler que quant est espes, aulcuns y adjoustent deaue rose.

¶ Peau de chappon en potaige.

QUant ton chappon sera boilly copperas icelluy doulcement a lentour & luy osteras sa peau, principalement cele quest a lenviron du col. Et decoppee ladite peau et mise en pieces la feras cuyre de rechief par demye heure au just gras, & y adjousteras du saffran pour y donner couleur, & mys sur le plat ou escuelles inspargiras pardessus espices & formaige gratuse. Deceste viande se delectoit fort nostre archigal quant il en pouvoyt souvent avoir.

¶ Ciches rouges en potaige.

UNe livre de ciches ou plus laveras en eaue chaulde, et laves & mys dedans le pot sans eaue mesleras iceulx avec tes mains par bon espace ensemble demye unce de farine, ung peu duyle & du sel, vingt grains de poyvre grossement pilles et cynamome passee. Apres les mettras empres le

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feu avec troys metretes deaue de la saulge, du rosmarin & des racines du persil decoppees menuement, & tout ainsi les feras boillir jusques soyent rediges a .viii. escuelles. Et quant seront pres que cuytz instilleras ung peu duyle dedans, et se tu veulx ledit just pour malades ny mettras guieres duyle ne despices.

¶ Just ou potaige de courge.

TU cuyras la courge decoppee au just ou en eaue avec ung peu doignons, et puis la feras passer par un cuillier perce dedans ton pot ou y aye de bon just gras, ung peu de verjust & saffran, & quant aura ung peu boilly losteras du feu. Et quant sera aulcunement refrigeree y adjousteras deux roux doeufz batus ensemble ung peu de formaige vieulx gratuse, & remeneras souvent ta potee, finablement mys aux escuelles mettras par dessus des espices.

¶ Laict en courge.

PUis que tu auras bien boilly la courge et apres exprimi son eaue feras icelle passer par lestamine ou par le cuillier perce dedans ton pot, puis la feras boillir avec just demandres & laict de chievre. Et finablement y mettras du verjust ou succre selon la volupte et goust de ceulx que vouldras.

¶ Carabasse a la catelanne.

LA courge que les catelans dient carabasse bien mond&e tu mettras dedans ton pot avec du lart seulement. Et la tu lairrais icelle cuyre sur les charbons par lespace de quattre heures ou environ remenan souventesfoys ta potee avec ung cuillier, apres y adjousteras du just gras saffranne composte et mesle en succre & espices. Aulcuns y mettent encores deux roux doeufn batus ensemble du verjust et formaige gratuse comme est dessus dit au just & potaige de la courge.

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¶ Just au potaige de feves fraiches ou daultre legum.

AInsi que les amandres tu plumeras les feves en eaue chaulde & puis les mettras au pot sur les charbons avec du just gras & chair sallee. Et quant te sembleront pres que cuytes y mettras du persil et mente decoppes menu, et ainsi semblablement peux cuyre tout aultre legum en leur escorce sans oster icelle comme avons fait ausdites feves.

¶ Potaige en jeusne appelle verzuse.

LEs amandres ensemble tu mesleras mondees en eaue chaulde & pilles au mortier, ma lyete du pain remoillee en verjust, puis y adjousteras du just de lorange & ung peu de succre & deaue rose & bien petit de saffran, et tout cecy feras passer dedans ton pot par lestamine. Et feras boillir loing de la flambe sur les charbons remenant tousjours auvec ung cuillier ta dite pote.

¶ Potaige en jeusne appelle leucophage.

EN ung mortier tu pileras une livre et demye demandres levees leurs pellicules. Et quant seront pillees y adjousteras de la myete du pain remoillee au just des pois, et aussi demye livre de la poulpe dung poisson de mer ou deaue doulce, principalement dung lus boilly. Et pour dissoluir lesdites amandres pain et poisson pilleras et mesleras ensemble du just de lorange ou du verjust, eaue rose, demye livre de gyngembre et demye livre de succre. Et quant sera tout redige en ung corps le feras passer & le tramettras dedans ton pot par lestamine & le feras ung peu boillir loing de la flambe sur les charbons, & souviengne toy de le remener continuellement. Cecy nourrist peu & demeure longuement en lestomach, reprimist la colere, tollist lardeur de lorine, et augmente generacion.

¶ Pois en jeusne.

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EN temps de jeusne tu pourras confire les pois avec laict damandres par la raison devant dite. Ceste viande evitera pandagraste pource quest de tarde concotion, augmente melancolie & nuyst aux nerfz.

¶ Potaige derbes appelle iote.

LEs herbes mises en leaue fervent & bien tost leveez decopperas menu, et decoppees pilleras icelles au mortier. Et quant seront pillees les feras bien boillir tant que soient cuytes & adjoustant du succre ce que te semblera estre asses. De cestuy potaige usera Celius lequel va tart & a peine a chambre, & combien que ne nourrissent guieres & soyent de tarde concoction, elles meuvent ce non obstant le ventre, laschent icelluy, augmentent geniture & mitiguent lardeur de lorine.

¶ Aultrement potaige derbes.

LEs herbes ainsi quil est dit dessus cuytes & decoppees cuyras au just gras de la chair, de luyle ou du beurre, nourrissent peu, sont de legiere concotion, lschent le ventre, repriment la colere.

¶ Potaige de cheneve ou de la graine de chanvre.

LA semence du chanvre laisseras en leaue par ung jour & une nuyt, celuy qui noyera par dessus comme vain & inutile osteras, & ceulx du fons ensemble des amandres mondees pilleras. Et quant seront pillees dissoluiras en just de pois & adjousteras ung peu de succre & deaue rose & cuyras tout ensemble, & longuement le remenant maintesfoys du cuillier. Cestuy potaige cassius reprouve grandement, et dit quil nya nul aultre tant insalubre dommageable.

¶ Choux a la romaine.

AVec les mains tronceras et rompras tes choux & getteras iceulx dedans leaue chaulde et fervante. Et quant seront demy cuytz leveras celluy just & les

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transmueras en aultre pot & involuiras ensemble du lart bien pille. Et oultre ce y adjousteras autant de just gras que sera necessaire & ainsi les laisseras ung peu boillir pource que ne veulent guieres cuyre. Cestuy potaige nuyst a lestomach & a la teste ainsi que avons dit dessus au chapitre des choux. Et a ceste cause nostre corneli encores que soyt romain haist lesditz choux comme pernicieux & domageables.

¶ Potaige jaune & saffranne.

 POur douze convies pilleras une livre damandres ensemble leurs pellicules et membranes, & y adjousteras la poytrine du chappon boilly ou daultre bon oyseau, quattre roux doeufz, demye livre de succre, ung petit de cynamome et gingembre, et ung peu plus de saffran, & le dissoluiras tout avec du just gras & verjust. Et quant sera dissolui le infondiras & mettras dedans ton pot par lestamine, & le feras cuy par lespace dune heure loing de la flambe sur les charbons en remenant souvent ta pot&ee. Aucuns ya ce pendant que boillist qui pettent & infondent par my deux unces deaue ou de beurre frais, et mys sur les escuelles inspargissent despices, nourrist bien & si est de tarde concoction, tousfoys engraisse, commeut luxure, et profite a ceulx qui sont dangereux du foye & du cueur.

¶ Potaige de la fleur du seuz.

A Douze convies en temps de jeusne laisseras demourer dedans leaue fraiche par lespace dune heure troys unces de fleurs seiches de seuz. Et exprimee leaue de celles fleurs la moytie pilleras ensemble une livre & demye damandres mondess & y adjousteras de la myete du pain blanc remoillee, demye livre de sucre, petit de gingembre, et si le veulx jaune ung petit de saffran, tout cecy passeras par lestamine dedans ton pot. Et quant commancera a boillyr y mettras dedans laultre moistie de tes fleurs entieres. Et quant sera cuyt le presenteras a table & inspargiras des

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espices par dessus. Cestuy potaige encores que nostre Labeo non seulement au goust mais encores au sentir le reboute & desprise, si est il ce non obstant util et profitable a la poytrine, au foye, melancolie, & a ceulx qui sont vexes des emorroydes ainsi que avons dit dessus au chapitre du seuz.

¶ Potaige de fleurs de seuz appelle zanzarelle blanche.

POur dix convies pilleras bien une livre damandres mondees ensemble ung peu des fleurs du seuz, tout pille & dissolui en eaue fraiche le manderas dedans ton pot par lestamine. En reserveras toutesfoys ung peu pour dissoluir deux pains gratuses, dix gleres doeufz bien batues & demye livre de succre, lequel surplus & reservacion mettras dedans ton dit pot quant commancera a boillir. Ne requiert point estre tourne du cuillier mais quant se commancera a espessir le mettras dessus tes plats ou escuelles & presenteras aux convies, & souviengne toy de inspargir des espices doulces par dessus. De cecy usera Aristophene pource quest bon a doulcir la poytrine & meut le ventre.

¶ Potaige de cataloigne appele leucophage.

POur dix convies tu pilleras des amandres mondees & les dissoluiras au just gras de veau ou des pouletz, puis les feras passer ensemble deux unces de farine de rys par lestamine dedans le pot, comme il est dit dessus frequentement, & y feras du feu lentement par lespace dune heure le remenant souventesfoys que ne tiengne entour du pot, finablement y adjousteras demye livre de succre et la poytrine dung chappon boillie & pillee. Et quant sera cuyt y mettras deaue rose, et mys sur les escuelles incontinent inspargiras des espices doulces et presenteras a table. Nourrist bien & encores que soyt de tarde concoction, engraisse le corps, ayde au foye, serre le ventre, & pource nuyst a ceulx qui ont la colique passion.

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¶ Sensuyt le huitiesme livre des condimens appeles vulgairement saulces.

AVoir descript jusques icy tant des variacions des viandes nestoyt pas asses satisfait si je neusse explique et mys en ce livre les condimens saulces et esperons pour exciter lappetit perdu & le goust endormy, lesquelz condimens ou saulces je approuve & tiens estre bons utilz & necessaires, si par cause de maladies, grandes chaleurs & honnestes labeurs & travailx lon eust perdu le desir & goust de menger. Mais si par une superflue epulence, si par luxure imonde, par intemperance desordonnee lon use & prent iceulx ainsi quon fait communement au jour duy, lors je ne les judique pas seulement destre a reprouver mais destre expellis & condoannes totallement, comme inutilz & iniques, & vehemens instrumens de luxure et desordonnance. Et jay veu non pas a romme seulement ou les gens vivent en grans triumphes coustz & despens, mais encores en aultres cites riches et delicieuses, tant dytalie de France que dailleurs plusieurs gens estra tant adonnes au ventre & a la gueule quilz perdoyent lappetot de menger par crassitude & grant epulence de viandes, & par frequente & indigeste replexion de menger. Et se conqueroyent de ce quilz ne pouvoient bien engorger toutes viandes a leur voulente desordonnee, sou offrans de donner grans dons & premiacions a tous ceulx qui leur pourroyent exciter aulcunement leur estomach clos & charge, & leur gueule questoit endormye & mortifiee en voracite & crapule. O dieu immortel quant grant tresor se consumist en tel desordre, et quant grant ticheesses perissent, mais il mest plus seur retourner a mon propos & premiere institucion que de irriter ainsi & commovoir lire & colere diceulx qui vivent intempereement & veulent estre veux modestes, parcz et atrempes. Or donques pour les bons qui travaillent & de cores et dentendement, et maintesfoys par maladies, laschetes, ennuytz, froidures ou chaleurs, & aultres maintz contrai

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res accidens, ilz perdent le goust & appetit des viandes & desir de menger. Et aussi pour reprimer corriger & emander la malice de plusieurs viandes & la indisposicion du temps je proposeray condimens ou saulces, par lesquelles pourront recouvrer lappetit & trouver goust de menger, et lindisposicion des viandes & du temps se emandera grandement, & par ainsi consequemment ils pourront vivre en en honneste volupte & sante & continuer leur labeur & travail. Et premierement est de savoir que toutes saulces ne sont mye bonnes en tous temps ains aulcunes sont bonnes en este & en temps de chaleur qui ne vauldroyent riens en yver ne en temps de froit. Et par le contraire en ya qui sont propres lyver qui seroyent males & indecentes pour temps deste. Et pource generalement convient veoir et dire dicelles premierement, apres particulierement pour les cuysiniers verrons la facon de les faire.

¶ Des condimens & saulces quon dit menger en ung chascun temps & en une chascune chair, & ce generalement.

PRemierement doncques devons savoir quelles saulces & condimens sont appropries a ung chascun temps affin que nous nabusons de bailler la saulce diver en este, & celle deste en yver. Aussi pareillement celle saulce qui appartient à la chair boillie nest pas bien ceante a la rostie & ainsi semblablement de plusieurs aultres differences comme verrons. Les saulces doncques affin que tu saiches & les condimens qui sont appropries en este, son verjust, aigrest, vin aigre, just de lymons just doranges ou de migrannes, & ce simplement ou mixtioneement se tu veulx ensemble du succre, deaue rose, damandres & du pain toste infondi & macere a lung des justz dessusditz, sans y mettre ailx ne espices chauldes. Aulcunesfoys aussi lon adjouste es saulces deste ung peu de serpolet et du persil pour attremper la frigidite des choses susdites. Et les condimens & saulces appropri&s en yver sont moustarde, eruqye, gingembre, poyvre, cynamome, gyrofle, ailx, saulge, mente, serpolet et persil, vin, just de chair, vin aigre qui ne soyt guieres fort, ainsi soyt prochain a la nature du

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vin. Et en temps moyen & attrempe entre chault & froit lon doit eslire saulces attrempees. Encores se diversifient & changent les saveurs & saulces selon la raison des viandes par lesquelles sont faites, car aulcunes viandes veulent aulcunes saulces, & les aultres en veulent avoir dautres. Et pource generalement jen parleray apres plus a plein cy dessoubz en particuliers chapitres. Generalement doncques a toute chair de mouton boillie & semblablement a celle du veau & chevreau leur saulce propre est saulce verd, faite en este de vin aigre & aigrest ensemble ung peu despices sans y mettre ailx, mais bien du persil, gingembre blanc, aigrest & vin aigre, & pain toste remoille & infondi audit vin aigre ou aigrest. En yver celle mesme saulce se fait en plusieurs espices et ung peu dail avec de tresbon vin & ung peu daigrest, ou peut souffire la moustarde ou leruque. Et la propre saulce de la chair du beuf boilly se fait de poyvre et de pain toste sur les charbons ensemble le just de la chair et ung peu deaue en yver, & en este avec ung peu de poyvre & beaucop daigrest, et ceste mesme sauce est asses convenante a la chair de porceau, specialement en yver. Et peu aussi souffire la moustarde ou la eruque, mais quant on menge la eruque se doit piller avec des amandres & se doyt destramper avec du vin aigre en este, & en yver avec du bon vin. Se pourroyt aussi menger ladite chair de porceau froide en este avec vin aigre & persil au commancement de nostre refection, & si les susdites chairs sont mises en paste, specialement le porceau & le beuf, en yver y mettrons de loignon blanc avec du verjust & formaige gras sur le beurre, ou si peut mettre des petis oignons en petite quantite. Et son fait le paste de chaire subtile & tendre ny convient point mettre des oignons mais du laict des amandres en este ensemble laigrest & ung peu despices doulces, & alendernier si peut mettre ung œuf batu ensemble laigrest, mais en yver en lieu daigrest convient mettre du vin & plus largement des espices. A la chair rostie des connylz et pouletz jeunes sa propre saulce est canelline,

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en laquelle doit sur tout dominer la canelle ou cynamome & estre fondement de toute ladite saulce, & pource est ainsi appelle, & ensemble ladite canelle doit avoir de la myete du pain blanc & de laigrest en este, & en yver du vin. Et a la chair rostie du porceau la propre saulce est la liqueur qui tombe dicelluy quant est en la broche meslee ensemble du vin & des oignons en yver, & en este la saulce verd dessusdite, & peut souffire la moustarde en yver ou la roquete. La chair rostie des perdris, fesans, colombz & tortorelles ne requiert aultre saulce que le sel avec ung peu deaue. Et des chappons & gelines boillis la propre saulce est le just de leur chair ensemble des espices doulces, principalement si en leur decoction lon a mys de la saulge, ysope & persil, & cecy en yver. Et en este souffit ledit just ensemble ung peu de saffran et le just des summites des brotons des vitz, mais des chappons & gelines grasses en paste ny convient mettre aultre saulce ne saveur que des espices & a la fin de laigrest dessusdit en este, et de tresbon vin en yver. Et silz sont rostis leur propre saulce en yver est laillee balnche, ou du vin ensemble la liqueur qui tombe diceulx quant cuisent mesle avec bonnes espices, & specialement vin doulx ou vin cuyt, mais en este fault que soyt vin debile ou aigrest & ny convient pas tant despices. A la chair rosties des oyes cannes & aultres semblables oyseaulx qui nagent par leau leur saulce propre est poyvrade noire boillie en yver, certes sans vin aigre ne aigrest mais avec du vin, & en este avec du vin & aigrest & moins de poyvre. Et cecy soyt dit superficielement, & generalement des saulces & condimens quon fait communement aux susdites chaires. Maintenant particulierement & asses plus soigneusement & amplement dirons des saulces que sensuyvent. Et premierement de la saulce blanche & la facon & forme comment se fait & appreste.

¶ Condiment au saulce blanche.

SElon le nombre des convies tu pilleras damandres mondes & adjousteras en icelles la myete du pain blanc remoillee par avant au verjust & du gigembre blanc ce que taperra estre asses, & ce condiment dissolui en ver

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just ou au just dorange transmettras par lestamine dedans quelque plat ou catin. Et si veulx doulce ladite saulce y mettras du succre, & en beaux sauciers ou escuelles avec despices ou sans icelles selon le temps & goust des gens presenteras aux convies quant mengeront boilly ou poysson. Ceste saulce combien que guieres ne nourrisse & soyt de tarde concoction, elle ayde au foye & refraiche icelluy grandement.

¶ Sauce canelline.

TU pilleras bien trois tostees ou rosties de pain remoillees par avant en gros vin noir ensemble des raysins passis. Et quant seront bien pillees les dissoluiras en vin noir, moust, verjust ou en vin aigre selon le temps & selon que taperra mieulx, apres y adjousteras de la canelle ou cynamome pille et du gingembre ce que conviendra. Et quant sera tout passe par lestamine dedans ton plat ou catin le presenteras a table quant tu vouldras. Ets de bonne concoction, nourrist & se digerist bien, engraisse le corps, commeut luxure, & ayde a lestomach & au foye. De ceste saulce me souvient avoir doulcement menge au convy de philelphe.

¶ Saulce jaune sur le noir.

TU pilleras des roux doeufz qui soyent durs & les genyers ou periers des pouletz boillis ensemble damandres tostees selon le nombre de tes convies. Et quant sera tout bien pille le dissoluiras en vin aigre & verjust, & puis feras tout passer par lestamine dedans ton grant plat ou catin y adjoustant autant de cynamome, gigembre & succre que sera besoing. Et se doit cuyre ceste saulce ung peu & colorer de saffran, nourrist merveilleusement, ayde au foye, est ce non obstant de dure concoction.

¶ Tucet ou saulce prunes seiches.

LEs prunes remoillees en vin noir & exossees, cest adire leve le noiau quest dedans pilleras ensemble ung peu damandres non plumees, & aulcunes tostees de pain remoillees audit vin noir, & tout pille dissoluiras en verjust, vin noir, moust ou succre, et puis couleras tout y adjoustant ung peu despices, principalement cynamome, nourrist peu

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oste lappetit, griefve lestomach, ce non ostant reprimist la colere & refraiche le foye eschauffe.

¶ Saulce verde.

PIlle ensemble du persil, serpolet, bletes, et aultres herbes odorantes, ung peu de gingembre, cynamome, & du sel, apres dissoluis tout en fort vin aigre & fais passer par lestamine en ton catin, et si aymes les ailx plus ou moinsselon ton goust y en metras. Nourrist peu, eschauffe lestomach & le foye, est e tarde concoction, ouvre toutesfoys les opilacions & donne appetit de menger.

¶ Saulce percicine.

TU pilleras bien des amandres mondees ensemble la myete du pain blanc remoillee. Et quant seront pillees y adjousteras ung peu de gingembre & cynamome, & dissoluiras tout en verjust vin noir & just de pommes grannees, et feras passer par lestamine en ton plat ou catin. Ceste saulce nourrist peu, demeure loing temps en lestomach, reprimist la colere & profite au foye quest eschauffe.

¶ Saulce genestine.

DIssoluis en verjust ung peu de saffran, deux roux doeufz ensemble damandres pilles, & y adjouste du gingembre pille & crible, & tout passe par lestamine presteras a table en beaulx sauciers ou escuelles, est de tarde concoction, nourrist bien, ayfe au cueur & au foye.

¶ Saulce de raysins.

DEs raysins noirs tu pilleras au mortier ensemble la myete du pain blanc, puis y adjousteras ung peu de verjust ou de vin aigre affin que ne soyt plus doulx que nest necessaire, ce fait tu le feras boillir au feu par demye heure & y adjousteras du cynamome & gingembre pilles. Et quant sera refroydi le couleras & mettras en tes sauciers et presenteras sur table. Ceste saulce convient a lestomach & au foye, engraisse le corps nourrist bien, et est de facile concoction.

¶ Saulce de moures.

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TU passeras par lestamine en ton catin amandres bien pilles avec de la myete du pain & le just des moures pressees, cynamome, gingembre & ung peu de noix muscade, & tout ainsi presenteras sur table. Nourrist peu, demeure beaucop en lestomach donne fastic & ennuy, & ayde seulement aux dens & aux poarties de la gorge.

¶ Saulce de cerises ou griotes.

DEs cerises peux faire saulce en telle faon que avons dit des raysins, sont differentes ce non obstant en leur couleur et saveur y adjoustant plus ou moins des compostes dessusdites. Ce est profitable ou non quant avons parle dessus des cerises en avons assez dit & habondamment, semblablement se peut faire saulce des cornes.

¶ De la nature et vertu de la moustarde.

MAintenant se adonne le lieu de expliquer & dire la vertu & nature de la moustarde & en quel temps se doit semer & comment en devons user. Et selon paladius ladite moustarde se peut semer en fevrier en mars, octobre, en decembre, ayme terre labouree encores que viengne en tous lieux, veult souvent estre cerclee, sesjouyst dumer. Et se tu la veulx garder pour semence ne la convient point oster dilecques ne replanter aultre part, & se tu la veulx pour en user & menger elle sera plus belle & robuste replantee que aultrement. La semence vieille est inutile tant pour semence que pour en user, et la pourras congnoistre se tu la romps avec les dens, car celle qui sera verde par dedans sera nouvelle, & selle est blanche sera vieille. Dyascorides dit ce non obstant quon doyt eslire celle qui nest guieres seiche ne estenuee et a gros grain, et quant lon rompt icelluy est blanc par dedans et moiste, et tel signifie estre bon et nouveau. Pline dit que quant est semee une foys et advenue a grant peine peut lon garder quelle ne renouvelle tous

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les ans audit lieu ou elle estoit, & ce a cause de la semence qui tombe & incontinent prent et verdoye. Et peut lon cuyre les fueilles comme les aultres herbes quon menge. En ya toutesfoys selon quil dit troys especes, lune qui est gresle, laultre a les fueilles semblables au rayfort, et la tierce a la semence de la heruque ou roquete. Dit encores ledit Pline que la meilleur semence qui soyt est celle de egypte. Or la vertu de ladite moutarde selon Galien est calefactive & dessicative au quart degre, et en user souvent engendre malles humeurs. Dyascorides dit oultre ce quelle eschauffe et est subtiliative & attractive quant lon masche icelle. Et se on la pille & mesle avec eaue ensemble ydromel est attrempee, & son en gargarise la gorge vault es apostemes qui sont au fons a racine de la langue & a lantique asprete de la cane & polmon, & mise pille pres du nes fait esternuer, & pille grossement & donnee en breuvaige vault aux fievres periodisses & a la durte de ouyr & cornement des aureilles. Pareillement y est bon le just mys dedans icelles. Et selon le dessusdit pline lieve la oduleur des dens, & avec la graisse des hoyes vault a la grate et ulceres de la teste. Et en tout cecy la saulvaige est de plus grant effet que la domestique. Pyctagoras a donne le principat des herbes & des saulces a la moustarde pour cause de sa grant vehemence & de son goust picquant & fort, et nya chose qui plus penetre es narines & cerveau quelle fait. Et afferme lon quelle discutist et met dehors le venin des serpens & des bouletz pour sa grant vertu chaulde & seiche, & est utile a lestomach, ayde es vices du polmon, lieve la toux antique & fait facillement cracher, lon la donne voulentiers a ceulx qui souspirent & leur est fort bonne. Elle purge oultre ce les sentemens & nettoye toute la teste par sternutacions, mollifie le ventre, commeut a pisser, & les fleurs aux femmes rompt & tollist les flegmes et catarres, & mise sur quelque vice du corps monstre avoir force & vertu de brusler, elle est toutesfoys nuysante es yeulx selon que dit de villa nova a cause de son acuyte. Avicenne dit quelle extenue et

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diminuist la rate, donne soif & desir dabiter avec femme, mondifie les humeurs de la teste, & son eaue distillee est bonne atoutes douleurs des aureilles & son huyle pareillement. Et aulcuns ont dit que se on la boit a jeunse fait bon entendement.

¶ La facon de faire la moustarde.

LA moustarde tu pilleras remoillee en eaue premierement & souvent icelle remuee a cause que soyt plus blanche & attrempee, & adjousteras en icelle des amandres pilles a part semblablement, et de rechief pilleras tout ensemble la myete du pain remoillee, finablement tout dissolui en verjust ou en fort vin aigre feras passer par lestamine. Et si la veulx doulce metz y choses doulces, si aigre choses aigres plus ou moins selon ton goust & adjousteras. Eschauffe lestomach et le foye, diminuist la rate, fait avoir soif & instimule & commeut a luxure.

¶ Moustarde rouge.

TU pilleras ou mouldras moustarde, raysins passis, tostees de pain, ung peu de cynamome, ou a part ou tout ensemble & puis les dissoluiras en verjust ou en vin aigre ensemble ung peu de moust, & finablement feras tout passer par lestamine en ton catin, eschauffe ung peu moins que la premiere, fait avoir soif, et ne nourrist pas incommodeement.

¶ Moustarde a petis pains pour porter.

MOustarde et raysins passis bien pilles mesleras ensemble ung peu de cynamome et de gyrofle, & de ceste mixtion feras tes petis pains, lesquelz seiches sur ung tableau porteras avec toy la ou vouldras. Et quand en vouldras user dissoluiras iceulx en verjust, vin aigre ou moust, ne se dissert guieres a la vertu, nature et complexion des aultres dessusdites.

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¶ Saulce celestine en temps deste.

LEs mores des buyssons pillees mesleras avec des amandres & y adjousteras ung peu de gingembre & les dissoluiras en vin aigre ou verjust & passeras par lestamine, nourrist peu, est de tarde concoction & donne ennuy ou fastic, ayde toutesfoys au foye.

¶ Poyvrade jaune a poysson.

FAis bouillir des tostees de pain en ung peu de vin aigre de vin noir et vin cuyt. Et quant seront cuytes feras passer icelles par lestamine, et y adjousteras des espices aigres & doulces, et si le veulx jaune y mettras du saffran. Nourrist tresbien, est de bonne concoction, eschauffe lestomach & le foye, rompt & destruit les flegmes et catarres.

¶ Aillee de noix ou damandres.

AUx amandres ou noix demyes pilles tu adjousteras ce que vouldras des ailx bien mondes & les pilleras tresbien ce que sera de besoing, inspargissant continuellement ung peu de leaue que ne facent huyle. Et quant sera tout bien pille y adjoustreas la myete du pain trempee au just de la chair ou des poissons, et de rechief pilleras tout ensemble, & silest trop dur les pourras dissoluir commodeement dudit just. Se peut conserver par long temps ainsi que avons dit de la moustarde. De ceste saulce nostre pompee est desireux grandement encores que ne nourrisse guieres & demeure longuement en lestomach, & nuyst & griefve aux yeulx et eschauffe le foye.

¶ Aille plus colore.

FAis laillee tout ainsi qui l est dit dessus excepte que ne la dissoluiras point en eaue ou en just, mais en most de raisons noirs exprimis et presses entre les mains, & cuyte au feu par demye heure. Semblablement se peut faire du just des cerises, nourrist plus que laultre dessusdite.

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¶ Du verjust verd ou aigrest.

PIlle bien le naritort ou cresson avec ung peu de sel & puis le dissoluis en verjust vieulx & fais passer par lestamine en ton catin.

¶ Saulce verd des brotons de la vitz.

TU prendras les brotons tendres de la vitz & les pilleras tresbien, & y mettras se tu veulx le grelet tendre des ailx ung peu de la myete du pain, & du sel je nen dis riens pource que ne se fait guieres viande sans sel, finablement tout cecy dissoluiras en vin aigre ou verjust & feras passer par lestamine en ton catin, nourrist peu, refraiche le foye & lestomach & reprimist la colere.

¶ Laigrest, ailx, fenoilz

UNg ail avec des fenoilz doulx pilleras tresbien & puis le dissoluiras de laigrest nouveau & couleras apres par lestamine, est bon a lenfleure du ventre, nourrist peu & refraiche le foye.

¶ Saulce roselline.

LEs petites roses qui ne sont encores meures pilleras ensemble une gousse dail, se tu veulx pilles & dissoluis de verjust, couleras par lestamine en catin.

¶ Saulce de cornes.

LEs cornes bien meures macerees et desrompues avec les mains mettras dedans ton pot, & y adjousteras beaucop daigrest nouveau et ung peu de poyvre & du sel. Et quant tout cecy aura boilly par deux heures le feras passer par le tamys ou estamine asses clere en quelque pot pour server & garder. Et avec ce pourras colorer les aultres viandes en y mettant ung peu & non pas grandement, pource que serre le ventre & exaspere la poytrine & nourrist peu, refraiche toutesfoys le foye & estaint la melancolie.

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¶ Sensuyvent lestourtes ou les tartres.

LEs tourtes sont ainsi dites a cause des herbes qu lon tort & rompt avec les mains, couteaux ou aultrement, lesquelles lon appelle tartres maintenant, & ont inverti & obscurcy ce nom ancien de tourtes en tartres, tant sont adonnes a la gueule & ventre que ce questoit cler ont obtenebre. Et leurs gueules delicieuses demandent a present & veulent avoir tartres de toutes sortes & facons doyseaulx, non mye derbes que faisoyent anciennement, bletes, courges, raves, naveaux, borraches & aultres viandes acoustumees leur sont fastidieuses et les laissent menger a moy et a mon corneli, & non sans cause puis quilz ont richesses or & argent pour en avoir & acheter, lequel ont acquis par maquerelaiges, flateries, adulacions, decepcions, & aultres malefices, non mye par vertus ne travaulx genereux et louables. Tartres doncques ou soyent pictagorees ou francoyses doresnavant les appellerons.

¶ Tartre blanche.

UNe livre et demye de bon formaige frais tu pilleras decoppe a beaulx loppins, & y adjousteras douze ou quinze gleres doeufz, demye livre de succre, demye unce de gingembre blanc, demye livre de sein ou dauve de pourceau et autant de beuure frais & du laict ce que te semblera estre asses & mesleras tout ensemble. Apres le mettras sur une croust de paste bien subtile & deliee dedans quelque test ou trappe et le feras cuyre lentement au feu, & pour luy faire mettre couleur mettras des charbons vifz desus le couvercle dudit test ou trappe. Et quant sera cuyte & mise hors du test inspargiras par dessus du succre pille avec deaue rose. Nourrist grandement, est de tarde concoction, eschauffe le foye fait opilacions, engendre la pierre et gravelle, et nuyst es yeulx & aux nerfz.

¶ Tartre bourbonnoise.

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DEcoppe menu & pille autant de gras formaige que avons dit dessus a la tartre blanche, et y adjouste apres des bletes, persil, marjoleine bien laves & decoppes, quatre oeufz bien batus, du poyvre pille, ung peu de saffran, baucop de sein dauve ou de beurre, frais, & mesle tout ensemble avec la main que soyt tout bien reduyt en ung corps, puis comme est dessus dit la metz en ton test ou en crouste de paste sur le feu. Et quant sera demy cuyte pour lui donner couleur y metz par dessus ung œuf batu avec du saffran, et sera cuyte quant la crouste de dessus comancera a soy lever. Ceste cy est encores pire que nest la dessusdite.

¶ Tartre derbes au moys de may.

AUtant de formaige tu decopperas & pilleras que jau dit cy dessus au premier & second chapitre des tartres, & quant sera pille y adjousteras le just de bletes, ung peu de marjolaien et ung petit plus de saulge, bien petit de mente, beaucop de persil tout pille au mortier, & quinze ou seize gleres doeufz bien batus, demye livre de sein, dauve ou de beurre frais et mesleras tout ensemble. Aulcuns ya qui veulent aulcunes fueilles de persil decoppees seulement & non pilles, demye livre de gingembre blanc & y adjoustent ensemble huit unces de succre. Et tout cecy mesle ensemble dedans ung pot ou une poille bien oincte font boillir sur les charbons loing de la flambe a cause de la fumee, & le remenent continuellement jusques devient espes. Et quant est pres que cuit le mettent en une aultre poille de dedans laquelle sera ta crouste & avec ton test la couvriras jusques soyt tout cuyt lentement a petit feu. Et quant est cuyt & mys sur le plat le convient surfondre de bon succre & eaue rose. Et cest facon de tartres de tant que sont plus verdes de tant sont meilleurs et agreables. Ceulx qui sont dangereux de menger choses crues nen mengeront point pource quest de tarde concoction, obfusque les yeulx, fait opilacions, engendre la pierre.

¶ Tartre de courges.

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LEs courges bien mondees pilleras ainsi quil est dit dessus du formaige & les feras ung peu boillir, ou aun just gras ou au laict, demye cuites & passes par lestamine en ton catin y adjousteras du formaige autant quil est dit dessus, demye livre de graisse des roignons ou de la tetine de truye bien grasse boillie & decoppee a beaux couteaux, ou en lieu de ce si aymes mieulx autant de beurre, du sein ou de lauve, demye livre de succcre, peu de gingembre, aulcunment de cynamome, six oeufz, deux bons cuilliers de laict, ung peu de saffran, tout cecy mesleras ensemble & feras cuyre en quelque test oingt ou succrouste, cest adire auquel soyt ta croust delyee de paste tant seulement a beau petit feu dessoubz & dessus. Aulcuns ya qui y mettent des fueilles en lieu de la crouste superieur, & cuyte & myse sur le plat linspargiras du succre & deaue rose. De ceste cy Cassius ne mengera point qui est graveleurx & est vexe de passion colique, aussi est elle daultre part de difficile concoction & ne nourrist guieres bien.

¶ Raves, poires, ou coingz en tartre.

TU adjousteras es raves es poires ou aux coingz bien cuytz soubz les cendres & charons, & bien pilles tout ce forment que avons dit de la tartre des courges et cuyras tout ainsi. Ceste facon de tartre devorera Gracus qui est fort affame & se complaint de sa luxure morte & endormie.

¶ Tartre de pain gratuse ou de farine.

UNe livre de formaige bien frais pilleras jusques soyt quasi converti & redige en forme de laict et y adjousteras huit ou dix oeufz bien batus, demye livre de succre, trois ou quattre unces de farine, ou en lieu de ce la myete du pain blanc remoillee & mesleras tout, puis le mettras dedans la poille bien oincte dauve ou de sein sans croste & les feras cuyre gentement aux charbons tant dessoubz que par dessus, & quant sera cuyte y mettras du succre & eaue rose. Hyrcus ne leschera point de cecy lequel par sa grant douleur de couste souventesfoys

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nous garde de dormir par son cryer.

¶ Tartre des fleurs du seuz.

AUx fleurs du seuz mesleras tout ce que avons dit dessus a la tartre blanche. Cest composicion toutesfoys doit estre plus espesse que laultre a cause que les fleurs puissent estre inspargient par tout. Ceste tartre encores que ne soyt guieres nourrissant & soyt de tarde dif-gestion resjouyst ceulx qui en mengent souvent. Et de ce mengera Celio qui surmonte saturne en melancolie.

¶ Tartre des brotons des vitz ou des roses rouges.

LEs summites tu prendras & brotons tendres & nouveaulx des vitz et demy cuytz les decopperas menuement & semblablement pourras faire des roses rouges, mais ausditz brotons des vitz decoppes tu adjousteras du formaige frais bien pille ou gratuse, & par avant la tetine boillie et pillee, ou en lieu de ce se mieulx aymes de lauve ou du beure, ung peu de gingembre & aulcunement plus de cynamome, de succre ce que sera asses & mesleras tout, & le mettras empres le feu en une poille succroustee, cest adire ou soyt la croust de paste, & que avec ce soyt bien oincte. Et quant sera pres que cuyt tu perceras ou decopperas lacrouste superieur en plusieurs lieux et quant sera cuyte inspargiras du succre largement par dessus avec eaue rose. Ceste tartre encores que soyt agreable a vespasien pource que ayde au foye & reprimist la colere, elle nourrist toutesfoys peu & est de tarde concoction, & si exaspere & greifve la poytrine.

¶ Tartre de rys.

EStens le rys qui sera este bien cuyt ou au laict ou au just gras sur quelque tableau jusques toute la humidite soyt exprimee & exalee, puis adjoustes y dedans quelque catin ung peu de formaige frais bien gratuse, dix gleres doeufz bien batus, du succre ensemble de leaue rose. Et si veulx y adjousteras une cuilliere de laict, & tout dissolui en la poille feras gentement cuyre observant ce quest dessus

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dit en la tartre blanche. Ceste cy toutesfoys requiert avoir moins de formaige que la susdite, nourrist beaucop, ayde au foye, augmente generacion, demeure longuement en lestomach, obfusque les yeulx, engendre gravelle & fait opilacions.

¶ Tartre despeaulte ou daveine.

LEspeaulte ou laveine mondee bien cuyte au just gras estendras sur ton tableau pour essuyer et seicher, apres lumeur expressee mettras ladite aveine ou espeaulte en ton catin & y adjousteras une livre de formaige frais & demye livre de vieulx bien pille ou gratuse, les roignons & graisse de porceau ou du veau bien cuyte & decoppee menueement avec un couteau ou deux, despices & succre ce que sera asses, quinze oeufz batus avec un peu de saffran, et mesleras tout jusques soyt redige en ung corps, puis mys en quelque poille bien oincte, & tant seulement couvert de crouste au dessus, cuyras ainsi que les susdites. Et quant sera cuyte inspargiras succre & eaue rose par dessus. Nourrist beaucop, ayde au foye, est de greifve concoction, fait opilacions, & engendre la pierre & gravelle.

¶ Tartre de chair.

TU boilliras la chair du veau, chevreau ou du chappon, boillie & enervee decopperas icelle menuement & pilleras au mortier, & puis y adjousteras ung peu de formaige frais & autant de vieulx pille ou gratuse, ung peu de persil et marjoleine decoppee xv oeufz bien batus, les roignons ou graisse de porceau, ou la tetine de veau decoppes menuement, de cynamome & bien petit de gingembre & de saffran seulement pour donner couleur, & le feras cuyre ainsi quest dit de la tartre blanche. De ceste mengeront scauro & cellio lesquelz changeroyent voulentiers leur macillance en graisse, certes nourrist grandement, engraisse le corps, ayde au foye, fait toutesfoys opilacions & engendre la pierre & gravelle.

¶ Tartre de chastaignes.

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CHastaignes boillies et pillees au mortier & transmises par lestamine, avec ung peu de laict dedans ung catin ou plat mesleras ensemble tout ce que avons dit cy dessus au chapitre de la tartre despeaulte ou aveine, & si la veulx jaune et saffrannee y adjousteras du saffran. De ceste cy me convye souvent montagnier, nourrist beaucop, excite lappetit, engraisse le corps, est toutesfoys de tarde concoction, enfle lestomach et entrailles, fait la colique & nuyst a la veue.

¶ Tartre commune.

BOn formaige, huit oeufz, bonne graisse ou de porceau ou de veau ou ung peu de beurre selon le temps du pain gratuse ou pille ensemble le just de saffran & gras, mesleras bien jusques soyt redie en ung corps, & le cuyrans en telle facon quil est dit a la tartre blanche. Ceste cy a plus de mal que de bien en soy.

¶ Tartre de millet.

LE millet bien pille lave et monde cuyras estroictement en laict de chievre ou de vacche, cuyt que soyt le mesleras avec de la farine et deux gleres doeufz, ou si aymes mieulx la dissoluir avec du laict le involuissant & remenant tresbien avec le cuillier & inspargissant du succre, apres estendras tout gette hors du pot sur ton tableau. Et quant sera ung peu refroydi avec de lauve en friras de beaulx loppins longz en la poille, fritz & colores que soyent les mettras sur le plat & infondiras de succre et deaue rose. Semblablement se peut faire en temps de jeusne commutant & permuant le just damandres au lieu du laict, et luyle en lieu de lauve. Semblablement du rys peux faire et sera plus doulx & plus salutaire, nourrist peu, est de concoction tarde, restraint le ventre & nuyst es yeulx.

¶ Tartre de cerises ou griotes.

LEs cerises aigres qui sont dites griotes exoss&es pilleras au mortier, pilles que soyent y adjousteras

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des roses rouges bien pilles, ung peu de formaige frais et du vieulx pilles ou gratuses, ung peu de poyvre, aussi peu de gingembre, aulcunement plus de succre, quattre oeufz bien batus. Et tout mesle ensemble feras cuyre en la poille bien oincte et subcrostee a petit feu, et yssue du feu la surfondras du succre & eaue rose. Ceste cy ne dissert pas grandement a la nature & vertu de la dessus prochainement dite, toutesfoys est plus appetissant & tollissant mieulx la colere.

¶ Tartre danguilles.

UNe anguille escorchee et mise a beaulx loppins feras boillir ung peu, et ce pendant le just des amandres avec du verjust & eaue rose feras passer par lestamine en ton catin, & sera bon se tu veulx dy mettre et piller des raysins passis ensemble troys ou quattre figues seiches pour le faire plus espes. Et aultre ce auras dezspinaches et persil et les desrompras avec la main & feras ung peu frire a luyle, plus une unce des raysins passis & une aultre unce de pignons, gingembre, poyvre, cynamome & ung peu de saffran mesleras tout avec les mains jusques soyt redige en ung corps. Et tout bien mesle mettras en ta poille bien oincte & subcrostee comme dessus est dit, colloquant les troncz & loppins de la dessusdite anguille bien appoint par dessus. Et quant sera demy cuyt y mettras dedans ung peu de verjust, deaue rose et de succre par les trouz qui doivent estre dessus la crouste superieur en plusieurs pars. Et finablement cuyte la presenteras a tes ennemys pource quelle est plus friande a menger quelle nest saine.

¶ Tartre de dates.

AMandres bien pillees dissoluiras en just de poisson & eaue rose, & dissoluies les transmettras par lestamine en ton catin. Et oultre ce tu pilleras au mortier ou as pille lesdites amandres demy livre de dates exossees, cestadire sans noyau, ung peu de raysins passis, quaatre ou cinq figues, trois unces de rys bien cuyt, & decoppe

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ras avec ung couteau ung peu de persil, des espinaches & marjoleine que soyent par avant estes desrompues avec la main & fris en huyle. Et seroyt bon avec ce decopper les entrailles & graisse du poisson, & y adjouster oultre ce une unce de raysins passis de corinthe, demye livre de succre, ung peu de cynamome, aulcunement plus de gingembre, bien petit de saffra ensemble ou a part pilles et mesles avec les choses dessusdites. Et affin que soyt plus espes y peux mettre demye unce de amydon, & puis estendras tout dedans ton test bien oingt & subcroste, & par dessus planteras & mettras par tout des pignons bien netz & mondes. Et ceste facon de tartre veult cuyre a petit feu & estre bien subtile & delyee, & quant est cuyte la surfondras de succre et eaue rose, nourrist bien & grandement, est de tarde concoction, ayde au foye, corrompt les dens, & augmente la flegme.

¶ Tartre blanche.

TU dissoluiras une livre damandres bien pillees en eaue rose et en just de rys forment cuyt, & feras passer par lestamine dedans le mortier. Apres tu pilleras dudit rys bien cuyt huit unces avec lesdites amandres y adjoustant de lamydon demye livre de succre, une unce de pignons ung peu pilles au mortier, tout cecy mesle tu estendras en ta poille bien oincte & subcrostee et mettras sur le feu. Et quant sera demy cuyt y mettras des fueilles par dessus, & puis quant sera bien cuyt inspargiras deaue rose avec du succre. De ce convieroye voulentiers Cassio si nestoit sa colique, nourrist bien ayde au foye & commeut luxure.

¶ Tartre de ciches rouges.

TU pilleras les ciches rouges cuytz avec leur just et ung peu deaue rose. Et quant seront pillez les feras passer par lestamine en ton catin, & y adjousteras une livre damandres tellement pilles que ne les conviegne point passer par lestamine, deux unces de raysins passis, trois ou quattre figues ensemble pilles. Oultre ce une unce de pignons demy pilles, tant de sucre & deaue rose que soyt souffisant, cynamome & gingembre pareillement

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mesleras ensemble & puis le mettras en ta poille bien oincte& subcrostee & estendras gentement. Aulcuns y adjoustent damydon a cause que soyt plus espesse & tenante, & quant est pres que cuyte y mettent du feu par dessus pour la colorer, doit estre subtile & deliee, & veult estre inspargie de succre & eaue rose, ayde seulement au foye & ventre.

¶ Tartre pandadope.

PIlle ensemble une livre de pois boillis, les entrailles des poissons cuyts et les oeufz de la truyte ou tanche, ung peu de persil, aulcunement de mente bien decoppes, & y adjouste du succe, cynamome gigembre ce qui conviendra, et tout ce bien pille dissoluis en eaue rose, et le fais cuyre en une poille bien oincte tout ainsi que les aultres. Et toutes les tartres pourras faire plus colorees avec du saffran ou plus aigres selon ton arbitre, sont toutesfoys de mauvais aliment.

¶ Tartre au just.

FAis ta crouste semblablement comme fais aux pastes, & quant sera bien pistrie faite & redigee en forme de tartre ou de paste la rempliras de farine affin que se puisse soustenir par tous quartiers, & mise en ton test feras cuyre icelle & deseicher tout ainsi bellement au feu. Apres levee la farine & crouste superieur y mettras des pouletz boillis ou des pyjons mys en belles petites pieces ou petis loppins ensemble just damandres, deux roux doeufz, ung peu de saffra, gingembre, cynamome, verjust & just gras, et quant sera cuyt le getteras hors du four & surfondras par desus deaue rose & succre. Ceste facon de tartre Esculapio romain loue grandement pource que nourrist fort, ayde a lestomach, aux reins & au foye, engraisse le corps & conferme icelluy, augmente generacion, et excite la luxure endormie, & a ceste cause archigal en use voulentiers & souvent.

¶ Tartre de marsapan.

LA tartre de parsapan tu feras en ceste façon, & auras des amandres les

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quelles feras demourer par ung jour & une nuyt en eaue fraiche. Et quant seront mondees les pilleras le mieulx que sera possible inspargissant continuellement ung peu deaue fraiche a cause que ne facent huyle, & si la veulx bonne ty convient mettre autant de succre fin que damandres. Et quant tout sera bien pille & dissolui en eaue rose lestendras en ta poille subcrostee deliement, de laquelle crouste aulcuns font dobles, et la remoilleras & humetteras souventesfoys deaue rose tandis que se cuyra au four, & continuellement inspargiras de succre pille ensemble ladite eaue rose a cause que ne fust trop seiche. Se peu semblablement cuyre a ton feu, mais que te preignes garde que ne fust plustost rostie que cuyte, veult estre plustost basse & deliee que haulte ne espesse et en est meilleur. De ceste me souvient avoir menge a senes ou se font peculierement, est de bon aliment de bonne concoction, ayde a la poytrine, aux reins & au foye, augmente generacion & commeut luxure, & tollist lardeur de lorine.

¶ Pastes appelles canisions.

MEtz par dedans ta croust de paste fate de farine pistrie en succre & eaue rose & estendue en forme forment de paste tout ce quest dit cy dessus a la tartre de marsapan, & se doit cuyre au four ainsi quest dit par dessus a petit feu & lentement, ne se differe riens en aliment & propriete a la dessusdite. Aulcuns y adjoustent ensemble des roux doeufz avec les amandres & pillent ensemble & meslent & font comme est dit, sont agreables a Phosphoto qui est adonne des sa jeunesse a menger succre.

¶ Offellees, tartres, ou petis pastes.

TU pilleras ou gratuseras ung peu de formaige parmisan ou daultre bon qui ne soyt guieres dur, & autant de formaige frais, deux gleres doeufz bien batues, des raysins passis tous entiers, cynamome, gingembre, ung peu de saffran mesleras ensemble et involuiras tout en ta farine bien pistrie & deliement extenuee a celle grandeur que

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vouldras, puis les feras cuyre au four non pas grandement pource que en seront plus agreables. Nourrissent peu, sont de tarde concoction, induysent opilacions, & engendrent la pierre & gravelle.

¶ Tartre danguilles.

AUx anguilles bien boillies & mises a pieces & beaux loppins tu adjousteras ou de laict de quelque aultre poisson ou de graisse menuement decoppee, ung peu de mente, persil decoppes, une unce de pignons & autant de raisons passis, ung peu de cynamome, de gingembre, poyvre & gyrofle et mesleras tout ensembe, puis estendras tout en ta crouste y adjoustant ung peu de bon huyle. Et quant seras pres que cuyt dissoluiras deux unces damandres pilles en verjust & saffran, et les feras passer par lestamine et estendras tout ce par dessus la susdite tout doulcement. De ceste cy paaldio se delite merveilleusement encores que naye en soy riens de bien.

¶ Poisson en paste.

TU fendras et ouvriras de toutes pars empres de lespine ung poisson bien monde & lave. Et quant sera ouvvert & fendu linspargiras du sel & espices & le involuirs de paste asses grosse et le feras cuyre au four. Cestuy cy metroye je voulentiers & bailleroie aux ennemys tant est pernicieux & dommageable.

¶ Les coings en paste.

AUx coings mondez & bien excaves,cest adire leve le dur qui est par dedans mettras la moelle de veau ou du beuf avec u cynamome & succre, & tout ainsi les mettras dedans ton paste avec ung peu de sel & les feras cuyre au four lentement a petit feu. Menges au comancement tout ainsi quilz serrent le ventre, par le contraire laschent icelluy quant ilz sont menges a la fin, & ostent les vapeurs qui montent au cerveau.

¶ Gellee damandres en temps de jeusne.

TU adjousteras aux amandres bien pilles deux unces de succre & autant deaue rose, & infondiras ung peu du just

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de poisson de la tanche principalement, et adviseras bien que ne soyt trop sale. Tout cecy passeras par lestamine en quelque plat, et la dedans lairras tout demourer par une nuyt, & lendemain le trouveras congele & bien prins tout ainsi que si fust du laict. Et le pourras involuir se tu veulx avec des joncz ou aultre rame verde, apres le mettras ainsi dedans quelque plat, & par dessus inspargiras du succre fin & danys & le presenteras sur table. Nourrist peu, adoulcist la poytrine & lestomach, ayde au foye, augmente generacion & mitigue lardeur de lorine.

¶ Recuytte ou brosse ficte & dissimulee.

MEsle ensemble une livre damandres bien pilles, quattre unces de succre une unce deaue rose, du just des poissons dessusditz, principalement de la tanche une cuillieree, & tout mesle fais passer par lestamine dedans tes faicelles, formes ou petis paniers. Et fais le mettre par une nuyt en quelque lieu froit & lendemain presente sur table dedans beaulx paltz, & donneras entendre que cest recuytte ou brosse de laict.

¶ Beurre fict & dissimulee.

TU dissoluiras des amandres pilles une livre avec ung demy cuillier deaue rose & les feras passer par lestamine espesse. Et affin que se lie mieulx & especisse y adjousteras ung peu de la farine damydon, & du succre pareillement y mettras quattre unces, & pour lui donner ung peu de couleur du saffran bien petit, tout cecy mettras dedans ung vaiceau de terre a ce expressement fait par une nuyt, lendemain sil a demoure en lieu moiste le trouveras coagule et prins comme beurre. Est proprement semblable de nature au superieur. Nostre germain denye que cestuy soyt suave ne plaisant a menger a cause que nya point doincture.

¶ Darioles.

FAis une petite crouste ainsi que avons dit aux pastes, & par dedans mettras deux roux doeufz bien batus, du laict cynamome et succre, et le mesleras au feu jusques comancera a espessir. Est viande

Mais non, vous ne vous êtes pas perdu !

 

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